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Un passager inattendu
L’impact des gouttes sur le métal la réveilla. Marie ouvrit les yeux, aucune lumière, l’obscurité totale. Elle essaya de se redresser, sa tête heurta quelque chose de dur. Sous ses doigts, le contact froid du métal. Son corps recroquevillé dans un espace fermé, étroit.
Son cœur bâtit vite, trop vite. « Chut ! Calme-toi, ce n’est pas réel, tu vas te réveiller ! » Mais si c’était un rêve, pourquoi ressentait-elle cette douleur lancinante à la tête et le froid qui engourdissait son corps ?
Marie tenta de se souvenir. Elle était dans le salon, assise sur le canapé devant la cheminée. Julio lui tendait une tasse. Il souriait. Après, des images floues, des bruits indistincts, la voix de Julio déformée. Que c’était-il passé ? Quelqu’un était-il entré dans la maison ? Les avait-il agressés ? Julio ! Que lui était-il arrivé ? Elle l’imagina blessé, ou pire... Elle paniqua, frappa contre les parois, appela à l’aide, mais elle n’entendit que le bruit régulier au-dessus de sa tête semblable au goutte-à-goutte d’un robinet mal fermé.
Des bruits de pas. Elle tendit l’oreille. Ils se rapprochaient. Marie hurla : « A l’aide ! Sortez-moi de là ! » Ses mains martelèrent le métal. Il y eut une secousse puis un bruit de frottement continu. Son corps malmené cogna contre les parois. À l’extérieur, elle perçut une respiration bruyante, essoufflée. « S’il vous plaît, je vous en prie, ouvrez-moi ! » cria-t-elle. Sa voix devint plaintive. Soudain, elle se sentit tomber. Elle bascula vers l’avant, tout le poids de son corps compressa sa tête et elle eut du mal à respirer. Choc brutal, son corps se tassa. Au-dessus d’elle, elle entendit un sifflement. Elle reconnut l’air du film Kill Bill, celui que sifflait souvent Julio. « Julio ? Julio, c’est toi ? » demanda-t-elle. Il l’avait retrouvée, il allait la sortir de là !
Le sifflement s’arrêta puis quelque chose tomba sur le métal, à intervalle régulier, encore et encore. Lorsqu’elle comprit, elle hurla, terrorisée. Ses ongles griffèrent les parois tandis qu’avec ses pieds elle frappait avec rage contre le caisson. Peu à peu ses forces l’abandonnèrent, sa voix ne fut plus qu’un murmure, elle suffoqua et émit un long gémissement.
Julio tassa la terre et la recouvrit de feuilles et de branchages. Il se dirigea vers le Land Rover et jeta la pelle dans le coffre. La pluie s’était transformée en neige. De gros flocons s’écrasaient sur le sol. Dans quelques heures, ils auraient effacé toute trace de son passage. Il sourit. Tout avait fonctionné à merveille. Deux ans d’attente. Deux ans qu’il tenait à la perfection son rôle de mari aimant et attentionné. Le temps que Marie touche son héritage. Cette conne, elle avait placé tout l’argent sur des comptes joints. « L’amour rend aveugle », dit-il en riant.
Julio démarra le Land Rover et mit le chauffage sur la position maximale. Il sentit une présence derrière lui, se retourna, mais les sièges arrière étaient vides. La fatigue sans doute, pensa-t-il. La température avait chuté de plusieurs degrés ces deux derniers jours et il avait eu toutes les peines du monde à creuser le trou dans la terre gelée. Après, il avait dû tirer la malle sur plusieurs mètres avant de la faire basculer dans le trou et de le reboucher. Un travail épuisant. Il était temps de rentrer à la maison. Un bain chaud, une bonne entrecôte avec un verre de vin, c’était bien mérité. Demain matin, il irait à la banque, retirerait l’argent et se rendrait à Genève pour ouvrir un compte. Ensuite, l’avion pour Maracaibo et à lui la liberté, le soleil et la belle vie !
Julio baissa le chauffage d’un cran et enleva ses gants. « Foutu chat », dit-il en regardant sa main droite. Un trait rouge partait du pouce jusqu’au poignet. Le chat l’avait attaqué alors qu’il traînait Marie sur le sol. De douleur, il l’avait lâchée et la tête de Marie avait heurté le carrelage. Une vraie plaie ce chat, toujours à le fixer avec un drôle de regard. Un regard qui lui donnait froid dans le dos, comme si l’animal savait depuis le début qui il était vraiment. Devant Marie, il avait dû jouer le jeu. Des « Minou, Minou » en voici, en voilà. Mais dès qu’elle avait le dos tourné, il ne manquait pas une occasion de le chasser à coup de pied ou de l’enfermer dans le garage. Quand il s’était jeté sur lui, Julio avait voulu l’attraper, il lui aurait volontiers tordu le cou, mais le chat s’était enfui.
Julio fit demi-tour et reprit le chemin de terre qu’il avait emprunté à l’aller. Au bout du chemin, il tourna à gauche et s’engagea sur la route principale. La radio diffusait « Babe I'm Gonna Leave You » de Led Zeppelin. Il monta le son pour couvrir le bruit des essuie-glaces et se mit à chanter d’une voix nasillarde. À peine une demi-heure et il serait chez lui.
Au fur et à mesure qu’il avançait les flocons devenaient de plus en plus denses et il dût ralentir. Il ne reconnaissait pas la route. Il avait dû se tromper au croisement lorsqu’il avait tourné à gauche. Il s’arrêta sur le bas-côté et rentra son adresse sur le GPS. Il suivit les indications et prit la route de droite. Un panneau annonçait des virages sur plusieurs kilomètres.
Au troisième virage il sentit de nouveau la présence derrière lui. Il regarda dans le rétroviseur et sursauta. Deux yeux brillants l’observaient. Le chat émit un long sifflement et se jeta sur lui. Les griffes acérées déchirèrent la peau de son visage. Julio poussa un cri de douleur et lâcha le volant. La voiture fit une embardée et glissa sur le côté. Il essaya de redresser la trajectoire, mais le chat attaqua de nouveau. La voiture pivota sur elle-même avant de basculer dans le vide.
La dernière pensée de Julio avant de fermer les yeux à jamais fut qu’il aurait dû tuer le chat.
Son cœur bâtit vite, trop vite. « Chut ! Calme-toi, ce n’est pas réel, tu vas te réveiller ! » Mais si c’était un rêve, pourquoi ressentait-elle cette douleur lancinante à la tête et le froid qui engourdissait son corps ?
Marie tenta de se souvenir. Elle était dans le salon, assise sur le canapé devant la cheminée. Julio lui tendait une tasse. Il souriait. Après, des images floues, des bruits indistincts, la voix de Julio déformée. Que c’était-il passé ? Quelqu’un était-il entré dans la maison ? Les avait-il agressés ? Julio ! Que lui était-il arrivé ? Elle l’imagina blessé, ou pire... Elle paniqua, frappa contre les parois, appela à l’aide, mais elle n’entendit que le bruit régulier au-dessus de sa tête semblable au goutte-à-goutte d’un robinet mal fermé.
Des bruits de pas. Elle tendit l’oreille. Ils se rapprochaient. Marie hurla : « A l’aide ! Sortez-moi de là ! » Ses mains martelèrent le métal. Il y eut une secousse puis un bruit de frottement continu. Son corps malmené cogna contre les parois. À l’extérieur, elle perçut une respiration bruyante, essoufflée. « S’il vous plaît, je vous en prie, ouvrez-moi ! » cria-t-elle. Sa voix devint plaintive. Soudain, elle se sentit tomber. Elle bascula vers l’avant, tout le poids de son corps compressa sa tête et elle eut du mal à respirer. Choc brutal, son corps se tassa. Au-dessus d’elle, elle entendit un sifflement. Elle reconnut l’air du film Kill Bill, celui que sifflait souvent Julio. « Julio ? Julio, c’est toi ? » demanda-t-elle. Il l’avait retrouvée, il allait la sortir de là !
Le sifflement s’arrêta puis quelque chose tomba sur le métal, à intervalle régulier, encore et encore. Lorsqu’elle comprit, elle hurla, terrorisée. Ses ongles griffèrent les parois tandis qu’avec ses pieds elle frappait avec rage contre le caisson. Peu à peu ses forces l’abandonnèrent, sa voix ne fut plus qu’un murmure, elle suffoqua et émit un long gémissement.
Julio tassa la terre et la recouvrit de feuilles et de branchages. Il se dirigea vers le Land Rover et jeta la pelle dans le coffre. La pluie s’était transformée en neige. De gros flocons s’écrasaient sur le sol. Dans quelques heures, ils auraient effacé toute trace de son passage. Il sourit. Tout avait fonctionné à merveille. Deux ans d’attente. Deux ans qu’il tenait à la perfection son rôle de mari aimant et attentionné. Le temps que Marie touche son héritage. Cette conne, elle avait placé tout l’argent sur des comptes joints. « L’amour rend aveugle », dit-il en riant.
Julio démarra le Land Rover et mit le chauffage sur la position maximale. Il sentit une présence derrière lui, se retourna, mais les sièges arrière étaient vides. La fatigue sans doute, pensa-t-il. La température avait chuté de plusieurs degrés ces deux derniers jours et il avait eu toutes les peines du monde à creuser le trou dans la terre gelée. Après, il avait dû tirer la malle sur plusieurs mètres avant de la faire basculer dans le trou et de le reboucher. Un travail épuisant. Il était temps de rentrer à la maison. Un bain chaud, une bonne entrecôte avec un verre de vin, c’était bien mérité. Demain matin, il irait à la banque, retirerait l’argent et se rendrait à Genève pour ouvrir un compte. Ensuite, l’avion pour Maracaibo et à lui la liberté, le soleil et la belle vie !
Julio baissa le chauffage d’un cran et enleva ses gants. « Foutu chat », dit-il en regardant sa main droite. Un trait rouge partait du pouce jusqu’au poignet. Le chat l’avait attaqué alors qu’il traînait Marie sur le sol. De douleur, il l’avait lâchée et la tête de Marie avait heurté le carrelage. Une vraie plaie ce chat, toujours à le fixer avec un drôle de regard. Un regard qui lui donnait froid dans le dos, comme si l’animal savait depuis le début qui il était vraiment. Devant Marie, il avait dû jouer le jeu. Des « Minou, Minou » en voici, en voilà. Mais dès qu’elle avait le dos tourné, il ne manquait pas une occasion de le chasser à coup de pied ou de l’enfermer dans le garage. Quand il s’était jeté sur lui, Julio avait voulu l’attraper, il lui aurait volontiers tordu le cou, mais le chat s’était enfui.
Julio fit demi-tour et reprit le chemin de terre qu’il avait emprunté à l’aller. Au bout du chemin, il tourna à gauche et s’engagea sur la route principale. La radio diffusait « Babe I'm Gonna Leave You » de Led Zeppelin. Il monta le son pour couvrir le bruit des essuie-glaces et se mit à chanter d’une voix nasillarde. À peine une demi-heure et il serait chez lui.
Au fur et à mesure qu’il avançait les flocons devenaient de plus en plus denses et il dût ralentir. Il ne reconnaissait pas la route. Il avait dû se tromper au croisement lorsqu’il avait tourné à gauche. Il s’arrêta sur le bas-côté et rentra son adresse sur le GPS. Il suivit les indications et prit la route de droite. Un panneau annonçait des virages sur plusieurs kilomètres.
Au troisième virage il sentit de nouveau la présence derrière lui. Il regarda dans le rétroviseur et sursauta. Deux yeux brillants l’observaient. Le chat émit un long sifflement et se jeta sur lui. Les griffes acérées déchirèrent la peau de son visage. Julio poussa un cri de douleur et lâcha le volant. La voiture fit une embardée et glissa sur le côté. Il essaya de redresser la trajectoire, mais le chat attaqua de nouveau. La voiture pivota sur elle-même avant de basculer dans le vide.
La dernière pensée de Julio avant de fermer les yeux à jamais fut qu’il aurait dû tuer le chat.
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La vengeance du chat, quelle trouvaille ! Un grand bravo, hors des clous...
J'ai tenté la compétition avec " Maudit roman". A voir si vous avez quelques minutes.