Un matin, il était là.
Énorme, noir des pattes jusqu’au bec, le corps luisant et les plumes lissées… Il se tenait sur la plus haute branche de l’arbre, juste en face de ma chambre... [+]

Voilà des jours que je marchais. La lumière chaude de la journée avait déjà cédé sa place à la nuit la plus noire plus d’une dizaine de fois. La durée de chaque jour était de plus en plus courte et les soirées de plus en plus longues. Et le froid gelait les os sous la peau. Je portais la main à mes lèvres que je gardais closes. La peau parcheminée qui les recouvraient avait cessé de me faire souffrir depuis quelques heures maintenant, mes lèvres étaient si glacées que je ne les sentais même plus. Mais le contact de mes doigts engourdis les réveilla en un instant et aussitôt, la douleur sourde recommença à me tourmenter.
Les yeux à demi clos, j’avançais sous les flots de neige qui avaient commencé à tomber peu avant la disparition de la lumière du jour. Les flocons virevoltaient dans le ciel avant de se poser sur les branches des sapins ou de recouvrir d’une couche supplémentaire le bonhomme de neige dont je m’approchais. Son chapeau haut de forme et son nez de carotte seuls dépassaient de la masse de flocons, rappelant qu’il avait été façonné à l’image d’un homme avant d’être enseveli par la masse blanche qui tombait des nuages pour s’agglutiner en tas informes.
Avec un temps pareil, chaque pas était plus difficile que le précédent. À peine formées, mes traces de pas étaient aussitôt recouvertes d’une couche de neige glaciale et extirper son pied du sol pour faire le moindre pas était éreintant.
Mais je tiendrai bon.
Il y avait au bout du chemin une étoile qui me servait de guide. Un astre qui brillait si fort qu’en plein jour je le voyais encore. Ainsi quand les ténèbres nocturnes s’effaçaient, sa lumière providentielle me dirigeait toujours. Je savais au fond de moi qu’elle me menait vers un endroit meilleur, sans neige sans froid, peut-être même sans nuit.
Alors qu’il s’arrêtait de neiger, j’accélérais mon pas qui se libérait plus facilement de la croûte de glace qui formait le sol. Il fallait profiter de cette éclaircie qui ne pouvait durer. Comme redouté, le nuage arriva bien vite. Il était si grand qu’il obscurcissait la terre autour de moi. Je l’avais souvent vu. Comme toujours, il annonça le déchaînement des éléments. Courant vers l’arbre le plus proche, je me réfugiais sous ses branches tout en m’accrochant au tronc de toute la force que je pouvais encore trouver, me barbouillant au passage les bras de résine poisseuse et odorante. Puis arriva le tremblement de terre. Comme toujours.
Le sol vibrait avec vigueur, la neige chutait du haut-de-forme du bonhomme qui retrouvait ses formes de naguère à mesure que le séisme le secouait. Rentrant ma tête dans mes épaules, je priais pour qu’aucune branche de sapin, alourdie de ses amas de flocons blancs, ne me tombe sur le crâne.
Enfin, comme elle l’avait toujours fait, la terre cessa de trembler et la neige se remit à tomber de plus belle. Réajustant mon écharpe autour du cou, le temps était venu pour moi de me remettre en marche. Un pénible pas après l’autre, je tentais une fois encore de rejoindre l’étoile qui clignotait et restait étincelante.
Il n’y avait pas de vent alors que la neige tentait de recouvrir mon bonnet. Il n’y en avait jamais. Je n’osais même pas imaginer le froid qui me saisirait alors si jamais il y en avait eu. Mais dans cette solitude, je me plaisais à penser que le hurlement du vent sifflant dans mes oreilles aurait produit une douce mélodie m’accompagnant dans mon périple.
De temps en temps, je jurais percevoir au loin des rires d’enfants et des chœurs entonnant quelques cantiques de noël. Imaginés ou non, ils avaient le mérite de me réchauffer l’âme quand ma peau craquelait sous le froid. Dans le silence, je croyais également distinguer de temps à autre le crissement d’un papier que l’on déchire. C’est vers ces bruits que je me dirigeais, je voulais moi aussi participer à la joyeuse agitation que je devinais dans le lointain.
Soudain, je me retrouvais étalé à terre. Me frottant énergiquement le front pour atténuer la douleur d’une bosse naissante, je me relevais pour tenter de trouver ce qui avait bien pu provoquer ma chute. C’est alors que mes doigts rencontrèrent une surface lisse et transparente. Au-delà de cette vitre de verre, il ne neigeait plus. Un enfant gigantesque s’approchait en riant, son ombre recouvrait toute la surface de mon sol.
Le garçon saisi l’objet de verre qui me retenait prisonnier et, tout en chantonnant, secoua sa boule à neige.
Les yeux à demi clos, j’avançais sous les flots de neige qui avaient commencé à tomber peu avant la disparition de la lumière du jour. Les flocons virevoltaient dans le ciel avant de se poser sur les branches des sapins ou de recouvrir d’une couche supplémentaire le bonhomme de neige dont je m’approchais. Son chapeau haut de forme et son nez de carotte seuls dépassaient de la masse de flocons, rappelant qu’il avait été façonné à l’image d’un homme avant d’être enseveli par la masse blanche qui tombait des nuages pour s’agglutiner en tas informes.
Avec un temps pareil, chaque pas était plus difficile que le précédent. À peine formées, mes traces de pas étaient aussitôt recouvertes d’une couche de neige glaciale et extirper son pied du sol pour faire le moindre pas était éreintant.
Mais je tiendrai bon.
Il y avait au bout du chemin une étoile qui me servait de guide. Un astre qui brillait si fort qu’en plein jour je le voyais encore. Ainsi quand les ténèbres nocturnes s’effaçaient, sa lumière providentielle me dirigeait toujours. Je savais au fond de moi qu’elle me menait vers un endroit meilleur, sans neige sans froid, peut-être même sans nuit.
Alors qu’il s’arrêtait de neiger, j’accélérais mon pas qui se libérait plus facilement de la croûte de glace qui formait le sol. Il fallait profiter de cette éclaircie qui ne pouvait durer. Comme redouté, le nuage arriva bien vite. Il était si grand qu’il obscurcissait la terre autour de moi. Je l’avais souvent vu. Comme toujours, il annonça le déchaînement des éléments. Courant vers l’arbre le plus proche, je me réfugiais sous ses branches tout en m’accrochant au tronc de toute la force que je pouvais encore trouver, me barbouillant au passage les bras de résine poisseuse et odorante. Puis arriva le tremblement de terre. Comme toujours.
Le sol vibrait avec vigueur, la neige chutait du haut-de-forme du bonhomme qui retrouvait ses formes de naguère à mesure que le séisme le secouait. Rentrant ma tête dans mes épaules, je priais pour qu’aucune branche de sapin, alourdie de ses amas de flocons blancs, ne me tombe sur le crâne.
Enfin, comme elle l’avait toujours fait, la terre cessa de trembler et la neige se remit à tomber de plus belle. Réajustant mon écharpe autour du cou, le temps était venu pour moi de me remettre en marche. Un pénible pas après l’autre, je tentais une fois encore de rejoindre l’étoile qui clignotait et restait étincelante.
Il n’y avait pas de vent alors que la neige tentait de recouvrir mon bonnet. Il n’y en avait jamais. Je n’osais même pas imaginer le froid qui me saisirait alors si jamais il y en avait eu. Mais dans cette solitude, je me plaisais à penser que le hurlement du vent sifflant dans mes oreilles aurait produit une douce mélodie m’accompagnant dans mon périple.
De temps en temps, je jurais percevoir au loin des rires d’enfants et des chœurs entonnant quelques cantiques de noël. Imaginés ou non, ils avaient le mérite de me réchauffer l’âme quand ma peau craquelait sous le froid. Dans le silence, je croyais également distinguer de temps à autre le crissement d’un papier que l’on déchire. C’est vers ces bruits que je me dirigeais, je voulais moi aussi participer à la joyeuse agitation que je devinais dans le lointain.
Soudain, je me retrouvais étalé à terre. Me frottant énergiquement le front pour atténuer la douleur d’une bosse naissante, je me relevais pour tenter de trouver ce qui avait bien pu provoquer ma chute. C’est alors que mes doigts rencontrèrent une surface lisse et transparente. Au-delà de cette vitre de verre, il ne neigeait plus. Un enfant gigantesque s’approchait en riant, son ombre recouvrait toute la surface de mon sol.
Le garçon saisi l’objet de verre qui me retenait prisonnier et, tout en chantonnant, secoua sa boule à neige.
Finale et je viens vous inviter à renouveler votre appréciation pour lui. Merci d’avance et bonne journée!
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