- Encore ces boutons sur les jambes? Pourquoi tu fais ça dans le Jourdain aussi? Il est pas propre, le Jourdain. Tu devrais faire ça dans la piscine de l’hôtel, tiens. Ça ferait plus glamour aussi.
- La piscine de l’hôtel? Tu n’y comprends rien, Sarah! Le Jourdain... ben... ça fait partie du mythe, c’est même dans l’Ancien Testament!
- C’est quoi ça l’« Ancien » Testament? Il y en a un nouveau?
- Laisse tomber, j’me comprends.
- Et pourquoi tu les plonges complètement comme ça? Ils avalent de l’eau, ça fait pas sérieux. En plus c’est dangereux; un de ces jours tu vas en noyer un. Pourquoi tu fais pas juste leur verser un peu d’eau sur la tête, comme pour ce type le mois dernier, le beau gosse avec les cheveux longs. Ça fait plus chic, plus style.
- M’en parle pas de celui-là! Le p’tit délicat, y voulait pas mouiller son auréole qu’y m’a dit. Tu parles! Si ça n’avait pas été mon cousin...
- C’est ton cousin?
- Ben oui... On choisit pas sa parenté. En fait, c’est plutôt quelque chose comme un petit cousin : maman m’a dit que sa mère était un peu parente avec elle, quelque part. Quand elle a eu cette lubie, sa mère, de marier un charpentier, ça a fait un froid; elles ne sont plus revus.
- N’empêche qu’il est en train de se faire toute une réputation ton p’tit cousin, avec ses miracles et tout.
- Ouais, ça a toujours été un beau parleur. Et malfaisant avec ça : tu vois il me fait passer pour un prophète, celui qui a annoncé sa venue à lui (tu te rends compte, il se prend pour le Messie!), et comme ça il se met en valeur, et en même temps il m’attire des ennuis avec Hérode. Je me suis tiré dans le pied en le baptisant. Si j’avais su je l’aurais noyé!
- C’que tu peux être rancunier tout de meme! Pourquoi t’en fais pas aussi, toi, des miracles?
- Bof! C’est bas-de-gamme les miracles, tout le monde fait ça. On les a tous vus, leurs trucs en rase-mottes.
- En quoi?
- Laisse tomber, j’me comprends.
- En tout cas ça prend encore, les miracles. T’as vu la foule quand il a ressuscité Lazard? Et quand il a marché sur l’eau?
- C’est de la concurrence déloyale. Il profite de la crédulité du petit peuple. Je vais pas m’abaisser à ça.
- En attendant il te prend toute ta clientèle.
- Je comprends pas ce qu’il a contre moi, on dirait qu’il veut ma tête.
- Tu te fais des idées. Il fait son boulot, comme toi. Vous devriez vous associer, tiens.
- Jamais de la vie! Over my dead body!
- Quoi?
- Laisse tomber, j’me comprends. En tout cas il m’aura pas, le cousin. S’il continue, je vais le faire crucifier, moi, celui-là. Tiens, ça ma donne une idée. Appelles-moi ton frère, Judas...
- La piscine de l’hôtel? Tu n’y comprends rien, Sarah! Le Jourdain... ben... ça fait partie du mythe, c’est même dans l’Ancien Testament!
- C’est quoi ça l’« Ancien » Testament? Il y en a un nouveau?
- Laisse tomber, j’me comprends.
- Et pourquoi tu les plonges complètement comme ça? Ils avalent de l’eau, ça fait pas sérieux. En plus c’est dangereux; un de ces jours tu vas en noyer un. Pourquoi tu fais pas juste leur verser un peu d’eau sur la tête, comme pour ce type le mois dernier, le beau gosse avec les cheveux longs. Ça fait plus chic, plus style.
- M’en parle pas de celui-là! Le p’tit délicat, y voulait pas mouiller son auréole qu’y m’a dit. Tu parles! Si ça n’avait pas été mon cousin...
- C’est ton cousin?
- Ben oui... On choisit pas sa parenté. En fait, c’est plutôt quelque chose comme un petit cousin : maman m’a dit que sa mère était un peu parente avec elle, quelque part. Quand elle a eu cette lubie, sa mère, de marier un charpentier, ça a fait un froid; elles ne sont plus revus.
- N’empêche qu’il est en train de se faire toute une réputation ton p’tit cousin, avec ses miracles et tout.
- Ouais, ça a toujours été un beau parleur. Et malfaisant avec ça : tu vois il me fait passer pour un prophète, celui qui a annoncé sa venue à lui (tu te rends compte, il se prend pour le Messie!), et comme ça il se met en valeur, et en même temps il m’attire des ennuis avec Hérode. Je me suis tiré dans le pied en le baptisant. Si j’avais su je l’aurais noyé!
- C’que tu peux être rancunier tout de meme! Pourquoi t’en fais pas aussi, toi, des miracles?
- Bof! C’est bas-de-gamme les miracles, tout le monde fait ça. On les a tous vus, leurs trucs en rase-mottes.
- En quoi?
- Laisse tomber, j’me comprends.
- En tout cas ça prend encore, les miracles. T’as vu la foule quand il a ressuscité Lazard? Et quand il a marché sur l’eau?
- C’est de la concurrence déloyale. Il profite de la crédulité du petit peuple. Je vais pas m’abaisser à ça.
- En attendant il te prend toute ta clientèle.
- Je comprends pas ce qu’il a contre moi, on dirait qu’il veut ma tête.
- Tu te fais des idées. Il fait son boulot, comme toi. Vous devriez vous associer, tiens.
- Jamais de la vie! Over my dead body!
- Quoi?
- Laisse tomber, j’me comprends. En tout cas il m’aura pas, le cousin. S’il continue, je vais le faire crucifier, moi, celui-là. Tiens, ça ma donne une idée. Appelles-moi ton frère, Judas...
Humour et religion, j'ai pratiqué un peu aussi avec "Le mendiant de la Cathédrale" (http://short-edition.com/oeuvre/nouvelles/le-mendiant-de-la-cathedrale).
Ca vous dit ?
Je vous recommande aussi "Un oubli fâcheux" (http://short-edition.com/oeuvre/nouvelles/un-oubli-facheux), de Céline Saint-Charle, où un voyageur dans le temps entre en contact avec Jésus pour tenter de modifier l'histoire de l'humanité. C'est un texte que personne ne lit et qui n'en est pas moins excellent.