Passant dans la ruelle qui donne sur leur demeure, j’aperçois les deux vieux qui me tournent le dos. Assis et rabougris, ils sont face à un feu qui réchauffe la pièce unique de ce... [+]
Un fracas, une lame et l’explosion d’un monde ! L’enfant regardait tout et n’a pas dit un mot lorsque les trois soldats ont transpercé le cœur de ses deux parents morts, gisant l’un près de l’autre. Des larmes ont envahi le champ de sa vision et le monde chavire sous ses pieds trop fragiles. Il titube, s’avance lorsque la nuit survient, errant et hésitant sur les marques du sang. Les soldats sont partis mais ses parents aussi, pour un trop long voyage. Il met tout bout à bout : ses rêves et ses jouets, ses peurs et ses trésors, mais rien n’y suffira pour rebâtir un pont entre lui et le ciel. S’élève alors un cri déchirant le silence et criblant les ténèbres d’une haine farouche. Puisque les cieux sont morts, recouvrant de leur ombre les yeux de ses parents, il fermera son cœur, il éteindra la vie. Et si le jour se lève, il fermera son âme.
Un baiser sur le front de ceux qui l’ont aimé, l’enfant penché sur eux se relève en adulte, fauché par la douleur, transpercé par la peur.
Les mains au fond des poches ne cachant que du manque, il n’a qu’un seul moteur : la violence, l’oubli !
Il marchera des heures et des éternités au milieu des fusils qu’il ne regarde plus. Il n’a plus rien à perdre et personne ne le trouve. Il n’a rien à gagner, il a perdu la vie dans les sillons d’un drame.
Petit bonhomme en berne va sans but et sans voix, affamé de tendresse, assoiffé de douceur. Il n’aura que l’errance. Et je le vois qui court à travers des jardins, au milieu d’une pluie qui ruisselle de sang autant que de prières, au milieu des débris des vies que l’on détruits. Il court à perdre haleine, à s’en crever le cœur ; il hurle sans pudeur à la force du vent qui s’abat sur son être, le terrassant, brisé !...
C’est à ce moment là, je crois bien, qu’il m’a vu. J’étais contre cet arbre qui balançait la vie à chaque bout de branche ; il venait de tomber, trébuchant sur son ombre. Lorsqu’il s’est relevé, son regard dans le mien a dessiné le jour. Il était écorché. Il était terrifié. Il était orphelin de parents et d’amour.
J’ai mis ma main sur lui, contre sa joue en feu. Il a mis son visage au creux de mon épaule, et nous avons pleuré sans honte et sans un bruit jusqu’à voir apparaître l’aurore à sa naissance.
Et nous avons grandi l’un à côté de l’autre. J’ai vu naître ses rires que l’on avait cru morts, et lui a vu mes rides sur le coin de mes lèvres, sur mes deux mains flétries.
Je l’ai bercé encore de mes mots, mes baisers ; j’ai cru en lui toujours, en la vie qui l’anime. Il a semé sur moi une raison, un sens ; et nous avons écrit un avenir nouveau. Nous avons ré ouvert les cieux qui s’étaient tus et nous avons écrit les tables de la loi.
Et pour son premier jour à l’école du village, il a tracé au mur, sur le grand tableau noir, quelques mots à la craie, sans avoir prévenu sous les grands yeux curieux du maître et des élèves :
« l’amour ne meurt jamais... »
Un baiser sur le front de ceux qui l’ont aimé, l’enfant penché sur eux se relève en adulte, fauché par la douleur, transpercé par la peur.
Les mains au fond des poches ne cachant que du manque, il n’a qu’un seul moteur : la violence, l’oubli !
Il marchera des heures et des éternités au milieu des fusils qu’il ne regarde plus. Il n’a plus rien à perdre et personne ne le trouve. Il n’a rien à gagner, il a perdu la vie dans les sillons d’un drame.
Petit bonhomme en berne va sans but et sans voix, affamé de tendresse, assoiffé de douceur. Il n’aura que l’errance. Et je le vois qui court à travers des jardins, au milieu d’une pluie qui ruisselle de sang autant que de prières, au milieu des débris des vies que l’on détruits. Il court à perdre haleine, à s’en crever le cœur ; il hurle sans pudeur à la force du vent qui s’abat sur son être, le terrassant, brisé !...
C’est à ce moment là, je crois bien, qu’il m’a vu. J’étais contre cet arbre qui balançait la vie à chaque bout de branche ; il venait de tomber, trébuchant sur son ombre. Lorsqu’il s’est relevé, son regard dans le mien a dessiné le jour. Il était écorché. Il était terrifié. Il était orphelin de parents et d’amour.
J’ai mis ma main sur lui, contre sa joue en feu. Il a mis son visage au creux de mon épaule, et nous avons pleuré sans honte et sans un bruit jusqu’à voir apparaître l’aurore à sa naissance.
Et nous avons grandi l’un à côté de l’autre. J’ai vu naître ses rires que l’on avait cru morts, et lui a vu mes rides sur le coin de mes lèvres, sur mes deux mains flétries.
Je l’ai bercé encore de mes mots, mes baisers ; j’ai cru en lui toujours, en la vie qui l’anime. Il a semé sur moi une raison, un sens ; et nous avons écrit un avenir nouveau. Nous avons ré ouvert les cieux qui s’étaient tus et nous avons écrit les tables de la loi.
Et pour son premier jour à l’école du village, il a tracé au mur, sur le grand tableau noir, quelques mots à la craie, sans avoir prévenu sous les grands yeux curieux du maître et des élèves :
« l’amour ne meurt jamais... »
Me voilà bien obligée de voter maintenant, bravo :)