6h14 du matin. Stéphane est tiré de son sommeil par la sonnerie de son téléphone portable. Sur l’écran clignote le nom d’Alex, son coéquipier. Alors que sa femme, allongée à côté de ... [+]
Alors que Julia sort de l'hôpital, elle sent son cœur vaciller d'émotion. D'un pas rapide, elle traverse le parking, serrant son bébé contre son cœur. Les gens dont elle croise le chemin lui renvoient son sourire et la regardent d’un air attendri.
Une fraîche brise de printemps joue avec les branches des arbres. La jeune femme réajuste la couverture dans laquelle le bébé est emmitouflé. Enfin, sa voiture apparaît au bout d'une allée. Commandant à distance l’ouverture des portes, Julia installe le nouveau-né dans son siège- auto et s’assied derrière le volant.
- On rentre à la maison, mon ange, dit-elle d’une voix émue.
Sans tarder, elle prend la route. Un long trajet l’attend. Elle espère juste atteindre sa destination avant l’heure du prochain biberon.
Dans son siège, le petit garçon grogne. Julia l'observe à travers son rétroviseur. Elle laisse échapper un petit rire quand elle le voit sourire dans son sommeil. Pendant une seconde, son regard se perd sur ses traits fins, son petit nez en trompette et sa chevelure étonnamment fournie. Il est parfait, son bébé, son petit miracle.
Cela faisait tellement longtemps qu’elle attendait ce moment. Tellement d’années s’étaient écoulées avant qu’elle ne parvienne enfin à avoir cet enfant. Elle avait rencontré tant de difficultés : d’abord des problèmes de fertilité et plusieurs fécondations in vitro infructueuses.
Finalement, elle était tombée enceinte. La roue tournait enfin pour elle. Fous de joie, le futur papa et elle avaient commencé à préparer la chambre pour le bébé, constitué une liste de naissance. Ils voulaient que tout soit parfait. Petit à petit, elle avait vu son ventre s’arrondir et senti son enfant bouger en elle. C’était une sensation unique, un merveilleux moment de partage. Elle avait aimé son bébé de tout son cœur avant même d’avoir pu le voir.
Mais un jour, à six mois de grossesse, elle avait été prise de contractions inexplicables. Le petit était né, bien avant le terme. Fragile, affaibli par cette naissance trop brutale, et malgré les efforts déployés par l'équipe médicale, il n'avait pas survécu.
Julia avait pleuré des jours durant. Et quand elle n’avait plus eu de larme, seuls étaient restés le vide, la douleur et un insupportable sentiment de perte. Comment une chose aussi horrible avait-elle pu se produire? Pourquoi la Mort s'était-elle attaquée à un être si pur et plein de promesses? Julia avait cru devenir folle.
- Vous êtes tombée enceinte une fois, même si cela n'a pas été simple. Vous y arriverez de nouveau, l’avait encouragée le docteur pour la consoler.
Mais elle n’y était pas parvenue. Son petit Jonathan était encore trop présent dans son esprit.
Après cela, les mois suivants, la vie lui avait semblé couverte de cendres. C'était comme si le destin avait enfermé Julia dans une prison de pierre. Elle percevait, qu'autour d'elle, les choses reprenaient leurs cours. Elle sentait le parfum fragile des fleurs, entendaient les bruits ténus de la foule. Mais elle ne se sentait plus concernée. Elle avait même omis le fait que son compagnon puisse ressentir une douleur identique à la sienne. Désemparé par un tel mutisme, ce dernier avait décidé de rompre, préférant panser ses plaies dans la solitude, plutôt que face à un partenaire indifférent.
A l’arrière de l’automobile, le bébé sursaute dans son sommeil, tirant Julia de ses pensées. Essuyant ses yeux d’un geste pudique, la jeune femme se remet à sourire. Les jours sombres sont désormais loin derrière elle.
Ayant atteint sa destination, elle trouve en centre-ville une place de stationnement. Elle a quelques petites courses à faire. Après avoir récupéré le bébé dans le siège-auto, elle entre dans une pharmacie. Une file d’attente de cinq personnes serpente devant le comptoir. Julia soupire et hésite. Puis elle décide de patienter.
Dans ses bras, le bébé dort. Tendrement, la jeune femme pose un baiser sur le front de l’enfant et passe une main caressante dans sa chevelure, quand elle voit le pharmacien lui jeter un regard appuyé. L’homme la salue d’un hochement de tête avant de disparaitre dans sa réserve et de revenir plusieurs minutes plus tard avec deux boites d'aspirine.
Au bout de quelques temps, vient enfin le tour de Julia :
- Bonjour, il me faudrait une boite de sérum physiologique, de l’huile pour le bain et de la crème hydratante...
- C’est pour le bébé ?
- Oui.
Le pharmacien prépare consciencieusement sa commande, avant de demander :
- Vous avez tout ce qu’il vous faut pour le change ?
- Oui, des couches, des lingettes...
- Ah non, surtout pas de lingettes ! Ça irrite la peau des bébés !
Dans les bras de Julia, le nouveau-né s’éveille et se met à pleurer.
- Ecoutez, je n’ai pas le temps, s’impatiente la jeune femme. Ça doit être l’heure du biberon.
- Juste une minute. Je vous montre ce que vous devriez utiliser. Venez.
Impatiente, un peu nerveuse, elle suit néanmoins le commerçant qui lui montre alors un flacon :
- C’est une lotion à base d’huile d’olive. Vous mettez ça sur du coton et....
De son côté, le bébé se fâche et pousse des cris de plus en plus perçants.
- Ecoutez, je n’ai pas le temps...
Cette fois, le pharmacien ne cherche même pas à la retenir. Une main ferme se pose sur l’épaule de Julia. Ce sont des gendarmes. L’un d’entre eux lui prend le bébé des bras avant qu’elle n’ait pu protester, tandis qu’un autre lui passe les menottes. Un troisième détache un talkie-walkie de sa ceinture et fait son rapport :
- Suspecte appréhendée.
Une voix crachotante questionne alors:
- Et le petit gars ?
- Le petit gars ? On l’a récupéré. Il a l’air d’aller bien. A mon avis, il veut juste qu'on lui donne le biberon et qu'on le ramène à sa mère.
Une fraîche brise de printemps joue avec les branches des arbres. La jeune femme réajuste la couverture dans laquelle le bébé est emmitouflé. Enfin, sa voiture apparaît au bout d'une allée. Commandant à distance l’ouverture des portes, Julia installe le nouveau-né dans son siège- auto et s’assied derrière le volant.
- On rentre à la maison, mon ange, dit-elle d’une voix émue.
Sans tarder, elle prend la route. Un long trajet l’attend. Elle espère juste atteindre sa destination avant l’heure du prochain biberon.
Dans son siège, le petit garçon grogne. Julia l'observe à travers son rétroviseur. Elle laisse échapper un petit rire quand elle le voit sourire dans son sommeil. Pendant une seconde, son regard se perd sur ses traits fins, son petit nez en trompette et sa chevelure étonnamment fournie. Il est parfait, son bébé, son petit miracle.
Cela faisait tellement longtemps qu’elle attendait ce moment. Tellement d’années s’étaient écoulées avant qu’elle ne parvienne enfin à avoir cet enfant. Elle avait rencontré tant de difficultés : d’abord des problèmes de fertilité et plusieurs fécondations in vitro infructueuses.
Finalement, elle était tombée enceinte. La roue tournait enfin pour elle. Fous de joie, le futur papa et elle avaient commencé à préparer la chambre pour le bébé, constitué une liste de naissance. Ils voulaient que tout soit parfait. Petit à petit, elle avait vu son ventre s’arrondir et senti son enfant bouger en elle. C’était une sensation unique, un merveilleux moment de partage. Elle avait aimé son bébé de tout son cœur avant même d’avoir pu le voir.
Mais un jour, à six mois de grossesse, elle avait été prise de contractions inexplicables. Le petit était né, bien avant le terme. Fragile, affaibli par cette naissance trop brutale, et malgré les efforts déployés par l'équipe médicale, il n'avait pas survécu.
Julia avait pleuré des jours durant. Et quand elle n’avait plus eu de larme, seuls étaient restés le vide, la douleur et un insupportable sentiment de perte. Comment une chose aussi horrible avait-elle pu se produire? Pourquoi la Mort s'était-elle attaquée à un être si pur et plein de promesses? Julia avait cru devenir folle.
- Vous êtes tombée enceinte une fois, même si cela n'a pas été simple. Vous y arriverez de nouveau, l’avait encouragée le docteur pour la consoler.
Mais elle n’y était pas parvenue. Son petit Jonathan était encore trop présent dans son esprit.
Après cela, les mois suivants, la vie lui avait semblé couverte de cendres. C'était comme si le destin avait enfermé Julia dans une prison de pierre. Elle percevait, qu'autour d'elle, les choses reprenaient leurs cours. Elle sentait le parfum fragile des fleurs, entendaient les bruits ténus de la foule. Mais elle ne se sentait plus concernée. Elle avait même omis le fait que son compagnon puisse ressentir une douleur identique à la sienne. Désemparé par un tel mutisme, ce dernier avait décidé de rompre, préférant panser ses plaies dans la solitude, plutôt que face à un partenaire indifférent.
A l’arrière de l’automobile, le bébé sursaute dans son sommeil, tirant Julia de ses pensées. Essuyant ses yeux d’un geste pudique, la jeune femme se remet à sourire. Les jours sombres sont désormais loin derrière elle.
Ayant atteint sa destination, elle trouve en centre-ville une place de stationnement. Elle a quelques petites courses à faire. Après avoir récupéré le bébé dans le siège-auto, elle entre dans une pharmacie. Une file d’attente de cinq personnes serpente devant le comptoir. Julia soupire et hésite. Puis elle décide de patienter.
Dans ses bras, le bébé dort. Tendrement, la jeune femme pose un baiser sur le front de l’enfant et passe une main caressante dans sa chevelure, quand elle voit le pharmacien lui jeter un regard appuyé. L’homme la salue d’un hochement de tête avant de disparaitre dans sa réserve et de revenir plusieurs minutes plus tard avec deux boites d'aspirine.
Au bout de quelques temps, vient enfin le tour de Julia :
- Bonjour, il me faudrait une boite de sérum physiologique, de l’huile pour le bain et de la crème hydratante...
- C’est pour le bébé ?
- Oui.
Le pharmacien prépare consciencieusement sa commande, avant de demander :
- Vous avez tout ce qu’il vous faut pour le change ?
- Oui, des couches, des lingettes...
- Ah non, surtout pas de lingettes ! Ça irrite la peau des bébés !
Dans les bras de Julia, le nouveau-né s’éveille et se met à pleurer.
- Ecoutez, je n’ai pas le temps, s’impatiente la jeune femme. Ça doit être l’heure du biberon.
- Juste une minute. Je vous montre ce que vous devriez utiliser. Venez.
Impatiente, un peu nerveuse, elle suit néanmoins le commerçant qui lui montre alors un flacon :
- C’est une lotion à base d’huile d’olive. Vous mettez ça sur du coton et....
De son côté, le bébé se fâche et pousse des cris de plus en plus perçants.
- Ecoutez, je n’ai pas le temps...
Cette fois, le pharmacien ne cherche même pas à la retenir. Une main ferme se pose sur l’épaule de Julia. Ce sont des gendarmes. L’un d’entre eux lui prend le bébé des bras avant qu’elle n’ait pu protester, tandis qu’un autre lui passe les menottes. Un troisième détache un talkie-walkie de sa ceinture et fait son rapport :
- Suspecte appréhendée.
Une voix crachotante questionne alors:
- Et le petit gars ?
- Le petit gars ? On l’a récupéré. Il a l’air d’aller bien. A mon avis, il veut juste qu'on lui donne le biberon et qu'on le ramène à sa mère.