¶ elle se repose au soleil sur un transat de l’ancien sanatorium | un labrador noir allongé sur ses jambes pétrifiées | a été fauchée par une rafale de kalachnikov | relevée d’entre les morts de la terrasse où elle dînait avec son amie | aurait préféré mourir avec elle ce soir-là | elle contemple la montagne immuablement changeante dans la lumière du soir | ses yeux cillent | son corps devient léger | une plume en ascendance | suspendue dans les airs | les bruits se feutrent | dans sa prime enfance | sombrait ainsi dans les bras de son père | son corps s’élève | elle voit de l’autre côté de la montagne de l’âme | se tend comme une corde de violon | un aigle noir | ailes déployées | fond sur elle | se réveille en sursaut | nostalgie fichée en plein cœur | pose la main sur le pelage chaud | vivant | vivante | elle apprendra le fauteuil roulant | reprendra le chemin | elle a déjà tout vécu | quand les balles ont déchiré sa chair | elle est libre | nul ne peut lui voler l’instant présent ¶