Diable de vent froid
déchiquette l'univers
et gèle mes doigts
Mon jour de chasse c’est le quatorze février, mon terrain de prédilection les endroits peuplés où les âmes en peine se croisent sans se voir, s’évitent sans raison et se repoussent sans se connaître.
Dès l’aube je me mets à l’affût et j’observe. Cette année j’ai choisi de sévir d’abord dans une station-service d’autoroute à l’heure où, en plus des besoins des véhicules et des corps, la fatigue du trajet ou l’éveil matinal après un somme sur le parking réunissent de parfaits inconnus autour des distributeurs. Se fondre dans le décor, invisible et aux aguets, c’est le secret.
« Ma sœur est folle ! Quelle idée de vouloir participer en cachette à un casting de jeu télévisé enceinte de huit mois ! À Paris ! Faire deux cents kilomètres en voiture, toute seule ! Bien sûr, elle a réservé un hôtel pour la nuit, mais avec la fatigue et le stress, la voilà à l’hôpital et moi sur la route en pleine nuit pour lui apporter ses affaires et la soutenir ! » Je maudis une fois de plus son compagnon qui l’a plantée là quand elle lui a annoncé sa grossesse et qu’elle garderait ce bébé, c’était non-négociable.
Il fait encore noir, je suis fatiguée et je peste. Les doigts de rose et toute la poésie autour du lever du jour, je m’en moque ! En plus, ce voyage me coûte cher car de nuit, pas question de prendre mes habituelles nationales. J’emprunte l’autoroute, drôle de terme, je loue serait plus approprié. Je ne m’arrête que dans les stations fréquentées et bien éclairées, c’est plus prudent pour une femme seule. En voilà une justement, je suis presque arrivée mais tant pis, elle sera parfaite pour faire le plein de caféine entre autres.
Je choisis ma première cible du jour : cette jolie jeune femme qui déguste son deuxième café, les yeux dans le vague, prostrée sur son siège. L’ambulancier assis à la table voisine ne peut détacher son regard de cette demoiselle apparemment en détresse. Son collègue, qui a fini de faire le plein, lui fait de grands signes à travers la fenêtre mais le « petit », subjugué, semble cloué sur place. À moi de jouer ! J’encoche une flèche, bande mon arc discret mais puissant, quitte fugitivement mon coin d’ombre, vise et tire en m’apprêtant à m’éclipser discrètement par la sortie toute proche. Catastrophe ! Juste au moment où le projectile quitte la corde, la belle, effleurée par un des premiers rayons du soleil levant, sort de sa léthargie et se lève comme un ressort. J’ai visé le cœur mais c’est l’artère fémorale qui est perforée. Le résultat aurait été identique sans les foudroyants réflexes de son voisin. Avant même que les témoins ne comprennent ce qui se passe, il a allongé la victime et comprimé l’artère en criant d’appeler son collègue et les pompiers. Quant à moi, après avoir encoché une deuxième flèche pour éliminer le trouble-fête, c’est le trou noir.
Dans les journaux le lendemain : « Arrestation du Cupidon maléfique ». « Cet archer déséquilibré, qui sévissait depuis plusieurs années en tuant trois personnes chaque Saint-Valentin dans des lieux publics tellement dispersés qu’aucune anticipation n’était possible, a été mis hors d’état de nuire par un courageux ambulancier qui venait de pénétrer dans la cafétéria du drame. Le criminel s’apprêtait à supprimer son jeune collègue portant secours à la première victime quand le héros l’a assommé avec un extincteur. » Suivait une jolie photo des deux sauveurs et une autre des deux demoiselles hospitalisées dans la même chambre, l’une avec la jambe dans une gouttière, l’autre un ravissant poupon dans les bras.
Une fois guérie, la belle survivante se fera un doux devoir d’inviter son preux chevalier secouriste pour le remercier. Le temps d’un dîner, d’une soirée, d’un week-end, ils apprendront à se connaître. Elle lui doit la vie, peut-être décideront-ils de la partager au moins quelques temps. Après tout, leur rencontre le jour des amoureux est due à la flèche d’un Cupidon !
Dès l’aube je me mets à l’affût et j’observe. Cette année j’ai choisi de sévir d’abord dans une station-service d’autoroute à l’heure où, en plus des besoins des véhicules et des corps, la fatigue du trajet ou l’éveil matinal après un somme sur le parking réunissent de parfaits inconnus autour des distributeurs. Se fondre dans le décor, invisible et aux aguets, c’est le secret.
« Ma sœur est folle ! Quelle idée de vouloir participer en cachette à un casting de jeu télévisé enceinte de huit mois ! À Paris ! Faire deux cents kilomètres en voiture, toute seule ! Bien sûr, elle a réservé un hôtel pour la nuit, mais avec la fatigue et le stress, la voilà à l’hôpital et moi sur la route en pleine nuit pour lui apporter ses affaires et la soutenir ! » Je maudis une fois de plus son compagnon qui l’a plantée là quand elle lui a annoncé sa grossesse et qu’elle garderait ce bébé, c’était non-négociable.
Il fait encore noir, je suis fatiguée et je peste. Les doigts de rose et toute la poésie autour du lever du jour, je m’en moque ! En plus, ce voyage me coûte cher car de nuit, pas question de prendre mes habituelles nationales. J’emprunte l’autoroute, drôle de terme, je loue serait plus approprié. Je ne m’arrête que dans les stations fréquentées et bien éclairées, c’est plus prudent pour une femme seule. En voilà une justement, je suis presque arrivée mais tant pis, elle sera parfaite pour faire le plein de caféine entre autres.
Je choisis ma première cible du jour : cette jolie jeune femme qui déguste son deuxième café, les yeux dans le vague, prostrée sur son siège. L’ambulancier assis à la table voisine ne peut détacher son regard de cette demoiselle apparemment en détresse. Son collègue, qui a fini de faire le plein, lui fait de grands signes à travers la fenêtre mais le « petit », subjugué, semble cloué sur place. À moi de jouer ! J’encoche une flèche, bande mon arc discret mais puissant, quitte fugitivement mon coin d’ombre, vise et tire en m’apprêtant à m’éclipser discrètement par la sortie toute proche. Catastrophe ! Juste au moment où le projectile quitte la corde, la belle, effleurée par un des premiers rayons du soleil levant, sort de sa léthargie et se lève comme un ressort. J’ai visé le cœur mais c’est l’artère fémorale qui est perforée. Le résultat aurait été identique sans les foudroyants réflexes de son voisin. Avant même que les témoins ne comprennent ce qui se passe, il a allongé la victime et comprimé l’artère en criant d’appeler son collègue et les pompiers. Quant à moi, après avoir encoché une deuxième flèche pour éliminer le trouble-fête, c’est le trou noir.
Dans les journaux le lendemain : « Arrestation du Cupidon maléfique ». « Cet archer déséquilibré, qui sévissait depuis plusieurs années en tuant trois personnes chaque Saint-Valentin dans des lieux publics tellement dispersés qu’aucune anticipation n’était possible, a été mis hors d’état de nuire par un courageux ambulancier qui venait de pénétrer dans la cafétéria du drame. Le criminel s’apprêtait à supprimer son jeune collègue portant secours à la première victime quand le héros l’a assommé avec un extincteur. » Suivait une jolie photo des deux sauveurs et une autre des deux demoiselles hospitalisées dans la même chambre, l’une avec la jambe dans une gouttière, l’autre un ravissant poupon dans les bras.
Une fois guérie, la belle survivante se fera un doux devoir d’inviter son preux chevalier secouriste pour le remercier. Le temps d’un dîner, d’une soirée, d’un week-end, ils apprendront à se connaître. Elle lui doit la vie, peut-être décideront-ils de la partager au moins quelques temps. Après tout, leur rencontre le jour des amoureux est due à la flèche d’un Cupidon !
Bonne chance pour le podium !!
Bien à vous et très bonne journée,
Tranquillou974
Bien à vous et très bonne journée,
Tranquilou974
Tranquillette974