Moi je suis différente. Je l'ai toujours été. Pour ma mère, c'est comme si j'étais une extra-terrestre. Pour mon père, une planète inconnue étrange. Pour les gens, un objet exotique. J'intrigue. On me dévisage longuement, on me scrute attentivement, on me teste malicieusement. Chacun se disant tout bas : moi, j'y arriverai ! Je parviendrai à la déchiffrer. En vain : pour tous, je demeure un mystère. Insondable forteresse.
Parfois, pourtant, des mots s'échappent. Des maux s'envolent, se font la malle dans les étoiles. Certains les saisissent à temps ; ils tentent de les assembler pour en faire une guirlande chamarrée, incarnation fébrile de ma personnalité. Au fil des années, les guirlandes se multiplient et le papier de soie se froisse. Les oiseaux ploient. Le fond de la salle de classe est encombré par ces invitées festives ; nul ne peut plus y travailler. Il est temps de mener une opération d'envergure, un grand événement. Place au vernissage ! Les guirlandes sont réunies, réparées, accrochées. Le sol balayé, les chaises rangées. La promotion, menée tambour battant.
Le Jour J, petits et grands se pressent dans l'entrée. Une fois repus de canapés et de blinis, ils naviguent à vue dans la salle et commentent les œuvres. Gyrophares médiatiques. Pas de pitié : cette guirlande est « perchée », « spéciale », « particulière »... Les remarques fusent comme autant de coups de poing saccadés, blessant artistes et modèle. Je me retranche dans ma caverne, muse déchue de sa superbe. Fustigeant sa vulnérabilité, maudissant sa sensibilité. Ultime soubresaut de ma conscience : vite, rassembler les pans épars de ma robe, me draper dans un semblant de dignité. Fierté des condamnées.
Mes amis, entre deux verres, ont cherché à s'échapper. Ils me trouvent recroquevillée. Des ondes se propagent dans mon corps. Mes dents ne cessent de claquer. Je tousse, manquant de m'étouffer. Repoussant mes cheveux toujours plus nombreux, éternels démons capricieux. La pénombre masque habilement cernes, pâleur, vestiges de maquillage. Je distingue des sons. Des paroles bruissent dans l'air, feux-follets réconfortants. On se parle, on s'approche, on hésite. Puis, soudain, une main tendue, comme un pont entre le désert de mon imaginaire et le réel de mes pairs. Je me relève lentement, dépliant mes membres engourdis, vieille marionnette sortie de son sommeil. La machine se remet en marche ; les rouages de mon cœur et de mon esprit s'activent crescendo. Une grimace, un froncement, et... un rire ? Sauvée ! L'espoir est un invité impromptu et tenace.
Durant nos étreintes, le temps se dilate. Bien sûr, tout n'est pas fini – pas encore, mais déjà, ça va mieux. J'avance, pas à pas. Si possible, sur la bonne voie. Face au soleil. Je n'oublie pas de m'arrêter pour contempler la beauté des paysages et méditer. Il m'arrive aussi de tomber sur des êtres fascinants ; je les salue, échange et repars enchantée.
Vous me connaissez de nom ; je ne faillis jamais à ma réputation. Je vous ai sûrement croisé, mais vous êtes si souvent ailleurs, flottant dans le vague de l'incertitude, la tête penchée sur vos tracas, cloué par le désarroi. N'ayez crainte : ce n'est que partie remise. Soyez patients. Un jour, lorsque la brume de vos pensées se sera dissipée aux quatre coins du ciel, vous rouvrirez les yeux et vous me verrez. Rencontre ou retrouvailles ? A vous de décider de la teneur de ce moment. Sentez-vous libre de tout jugement. Hé ! Mais justement... Attendez !
Parfois, pourtant, des mots s'échappent. Des maux s'envolent, se font la malle dans les étoiles. Certains les saisissent à temps ; ils tentent de les assembler pour en faire une guirlande chamarrée, incarnation fébrile de ma personnalité. Au fil des années, les guirlandes se multiplient et le papier de soie se froisse. Les oiseaux ploient. Le fond de la salle de classe est encombré par ces invitées festives ; nul ne peut plus y travailler. Il est temps de mener une opération d'envergure, un grand événement. Place au vernissage ! Les guirlandes sont réunies, réparées, accrochées. Le sol balayé, les chaises rangées. La promotion, menée tambour battant.
Le Jour J, petits et grands se pressent dans l'entrée. Une fois repus de canapés et de blinis, ils naviguent à vue dans la salle et commentent les œuvres. Gyrophares médiatiques. Pas de pitié : cette guirlande est « perchée », « spéciale », « particulière »... Les remarques fusent comme autant de coups de poing saccadés, blessant artistes et modèle. Je me retranche dans ma caverne, muse déchue de sa superbe. Fustigeant sa vulnérabilité, maudissant sa sensibilité. Ultime soubresaut de ma conscience : vite, rassembler les pans épars de ma robe, me draper dans un semblant de dignité. Fierté des condamnées.
Mes amis, entre deux verres, ont cherché à s'échapper. Ils me trouvent recroquevillée. Des ondes se propagent dans mon corps. Mes dents ne cessent de claquer. Je tousse, manquant de m'étouffer. Repoussant mes cheveux toujours plus nombreux, éternels démons capricieux. La pénombre masque habilement cernes, pâleur, vestiges de maquillage. Je distingue des sons. Des paroles bruissent dans l'air, feux-follets réconfortants. On se parle, on s'approche, on hésite. Puis, soudain, une main tendue, comme un pont entre le désert de mon imaginaire et le réel de mes pairs. Je me relève lentement, dépliant mes membres engourdis, vieille marionnette sortie de son sommeil. La machine se remet en marche ; les rouages de mon cœur et de mon esprit s'activent crescendo. Une grimace, un froncement, et... un rire ? Sauvée ! L'espoir est un invité impromptu et tenace.
Durant nos étreintes, le temps se dilate. Bien sûr, tout n'est pas fini – pas encore, mais déjà, ça va mieux. J'avance, pas à pas. Si possible, sur la bonne voie. Face au soleil. Je n'oublie pas de m'arrêter pour contempler la beauté des paysages et méditer. Il m'arrive aussi de tomber sur des êtres fascinants ; je les salue, échange et repars enchantée.
Vous me connaissez de nom ; je ne faillis jamais à ma réputation. Je vous ai sûrement croisé, mais vous êtes si souvent ailleurs, flottant dans le vague de l'incertitude, la tête penchée sur vos tracas, cloué par le désarroi. N'ayez crainte : ce n'est que partie remise. Soyez patients. Un jour, lorsque la brume de vos pensées se sera dissipée aux quatre coins du ciel, vous rouvrirez les yeux et vous me verrez. Rencontre ou retrouvailles ? A vous de décider de la teneur de ce moment. Sentez-vous libre de tout jugement. Hé ! Mais justement... Attendez !