La princesse de la terre promise

-Maître ? Vous plaisantez ? Vous pouvez me cogner, comme l'ont fait tous les autres mais je ne vous appellerai pas maître. Le dégoût que vous m'inspirez s'intensifie à chaque fois que vous putréfiez mes murs de votre présence. Donc si vous avez fini avec vos menaces, je vous prie de quitter ma demeure j'aimerais respirer de l'air pur.
-Vous pouvez vous agiter et cracher votre venin autant que vous voulez mais, une chose est certaine j'arriverai à vous plier à ma volonté.
Je préférerai mille fois une mort lente et douloureuse que de me soumettre à de telle bassesse.
-[Sourire malicieux] Vous savez pourquoi nous, hommes d'honneur, malgré tout notre pouvoir et les nombreux employés à nos ordres, allons nous-même chasser nos proies ? Peu importe votre réponse je vais quand même vous le dire. On le fait tout simplement à cause de l'adrénaline, l'excitation, le plaisir inouï suscité par la traque du gibier apeuré. L'extase de le voir se débattre de toutes ses forces, courir le plus vite possible pour sauver sa vie et d'un coup sec [reproduction avec gestuelle du bruit de fusil] tout est fini. La jouissance arrive à son paroxysme quand, tout en se dépossédant de son âme, il vous fixe d'un regard haineux mais résigné.
-Vous êtes un monstre.
-Monstrueusement beau je le sais vous n'êtes pas la seule à succomber à mon charme. [Lui tenant le visage] Mais en ce qui concerne le caractère, vous êtes très loin du compte je peux vous rassurer.
-Sortez de chez moi. Le jeune homme sortit de chez elle sans mot dire d'un pas élégant.
Kaefra Ekhumbunta était une jeune femme la vingtaine à peine qui rêvait d'une société autre que la sienne où ceux de sa classe sociale auraient plus de valeur que les animaux que domestiquaient ces Bourgeois snobinards et arrogants. Dans sa société à elle, à son grand regret, seuls ceux issus d'une longue lignée de nobles pouvaient se permettre de rêver et prétendre même avoir le droit de posséder le corps et les désirs de ces malheureux, que le sort avait condamné à naitre dans des familles paysannes et que le travail avait détérioré leur coloration au fil des temps, qui étaient à leur service. La vie était encore plus difficile pour ceux qui comme elle, osaient naitre d'une aventure adultérine entre les deux groupes sociaux. Car, ils n'étaient acceptés nulle part : ils inspiraient du dégoût auprès des Bourgeois surtout des femmes cocufiées et de la méfiance chez les paysans à cause de leur peau qui était la mixture parfaite témoin de leur différence. Le comte Lord Mac Storman était de loin le plus dégoutant de tous. Ce qui était pour elle le plus écœurant était les sentiments que son cœur ne cesse de lui hurler à chaque fois qu'il s'approchait d'elle. C'était pour elle la seule guerre dans laquelle, quel que soit l'issu, elle savait qu'elle finirait perdante. Lors de ses multiples batailles internes, elle ne cessait de se demander ce qui pouvait bien perturber autant l'arythmie de son cœur l'obligeant chaque fois à garder sous son contrôle sa respiration pour ne pas se trahir. Est-ce son orgueil démesuré ou son obsession pour sa personne qui osaient autant l'attirer ? Ou encore la tendresse à laquelle il faisait parfois preuve les rares fois qu'elle arrivait à le croiser à son insu avec les enfants handicapés qu'il allait voir en cachette chaque dimanche ? Une chose est sûre cet homme était l'incarnation même du mystère. Et c'était peut-être ce suspens qui planait sur cet être à deux visages qui suscitait sans doute sa curiosité conclut-elle à chaque fois.
De son côté, ce cher Lord arpentait les rues sifflotant et remuant en circulaire sa canne satisfait comme d'habitude de ses échanges avec la belle sauvageonne surtout si on prend en compte que cette dernière était le fantasme de tous hommes de la ville même mariés. Il ne savait pas pourquoi, malgré le mépris qu'elle ne cessait de lui vouer, il n'arrivait pas à se défaire d'elle. Il semblait être attiré par quelque chose qu'elle avait en plus. Ce qui l'intriguait le plus était cette petite lueur de douceur qu'il croyait entrevoir dans les yeux de la jeune femme à chaque moment d'échange haineux qu'il s'arrangeait à provoquer chaque fois. Hormis ces moments divertissants à se disputer avec la jeune femme, Mac Storman passait ses journées entre les cours de magistratures, les séances de boxe en compagnie du seul mâle de sa classe qu'il pouvait considérer comme ami, enchainer des tribunaux pour selon son cher père « apprendre des meilleurs les rouages du métier » et le reste du temps à trainer avec ceux de son rang à faire ce à quoi la société vouait les futurs maitres. Le dimanche, qu'il attendait l'arrivée avec impatience, restait sa journée préférée car, son père le laissait faire ce qu'il voulait du moment où, si ça n'honorait pas sa lignée, il faisait preuve de discrétion. Chose qui n'était pas un problème pour le jeune homme qui s'était fait maître du camouflage depuis le temps. En ce jour, il pouvait être un jeune homme normal qui jouit de ses passions à l'abris de tout regard. Ce fameux jour était en quelque sorte l'équilibre dont il avait besoin pour survivre dans cette société et continuer à faire semblant d'être l'un de ces fils à papa pourri gâté qui se croyaient tout permis.
Des jours avaient passé sans nouvelles de ce cher Lord. Cette absence semblait l'inquiéter à sa grande surprise. Car, ses pensées obscènes l'illustraient dans les bras infâmes de toutes ces filles à la moralité douteuse, qui se permettaient de balader leurs mains vers des zones dont l'accès se voulait privé chez ceux sur qui elles pouvaient jeter leur dévolu, entraient de faire ce à quoi elle se refusait à chaque fois d'y penser pour ne pas se rendre plus malade qu'elle ne l'était déjà. C'était la première fois qu'il faisait autant de temps sans venir ne serait-ce que la regarder pensa-t-elle en ferma le restaurant dans lequel elle travaille en journée. Quand tout d'un coup elle entendit dernière elle à son oreille
-Suis-moi en silence il en va de ta vie.
Elle suivit le mystérieux inconnu en silence avant de s'apercevoir que c'était celui à qui son cœur s'émouvait depuis le début de la semaine. Il lui fallut quelques mètres avant de reprendre ses esprits et l'interroger.
-Que se passe-t-il ? Où allons-nous ? Tu saignes ?
-Je vais bien je vais tout t'expliquer une fois en sécurité. Maintenant avancez le plus vite possible on est suivie.
-Pourquoi serions-nous suivies et par qui ? Je n'irais plus nulle part avec vous sans plus d'éclairci.
Sans raison à parente il la prit par la taille et l'embrassa passionnément. Ce fut l'un des plus beaux moments, plus qu'un rêve pour la jeune Kaefra qui n'avait pas vu venir la scène mais, une chose était sûre c'était mieux que dans ses projections. Dans ses rêves, elle le voyait débarquer dans son resto rempli à craquer par ces infâmes de la haute avait des roses parfumées d'un rouge intense et, contre toute attente, l'embrasserait après la plus belle déclaration d'amour qu'elle ait jamais entendu jusqu'à là. Elle était encore dans les nuages quand il l'a fit entrer dans une maison en la faisait tourner sur eux-mêmes comme dansant une valse et s'écarta d'elle une fois à l'intérieur.
-Je suis désolé pour.... le baiser [dit-il d'un ton gêné] je voulais juste détourner l'attention le temps que j'ouvre la porte à leur insu.
-Alors s'est-elle ? [Dit une voix effrayante comme sortie du souffre] La fameuse princesse détentrice de la clé ?
-Oui c'est elle [répondit le jeune d'un ton agité] Kaefra je te présente Yumbina l'enchanteresse, elle sera notre guide tout au long du voyage.
-Voyage ? Et qui est cette princesse ? Enchanteresse ! Ne me dis pas qu'à ton âge tu crois encore aux contes de la bonne fée ? Se moqua-t-elle de lui.
Furieuse, l'enchanteresse s'approcha d'elle en murmurant des sorts dans une langue que la jeune femme avait l'air de comprendre vu qu'elle répondait à la grande surprise de tous.