Amadou le Bordaulais

Moi je suis différent. Je l'ai toujours été. Pour ma mère, c'est comme si j'étais un extra-terrestre. Je m'appelle Amadou. Oui, Amadou le Bordaulais.

Je suis un Bordaulais, et je viens dans un pays où on sous-estime les bagando ou tous ceux qui se battent pour sa survie. Je veux parler des jeunes battants survivants désignés. Désignés de par leur courage à joindre les deux bouts. Je suis utile au gens, je rends service au gens mais au retour ces mêmes gens me sous-estiment. Ils se méfient de moi, ils me traitent de tout-nom. Ils pensent que je suis un bandit, un voleur, un violeur, un salauds etc.
Moi Amadou je sors de ce monde. Bordeaux différent de celui de Paris. Un monde de no stress où je vends mes articles pour vivre.

Je suis cireur de chaussures, pousseur de wottoro( brouette ), laveur de voiture, porteur de bagages et nettoyeur de sol. Réparateur, encore revendeur d'accessoires d'appareils électroniques et téléphoniques.

Je suis le même Amadou qui vent à Bordeaux des flipperies pantalon jean bien slimé et des chaussures du goût de ma génération.

Je suis le même Amadou qui fait trop de bana-bana( se battre...) pour me prendre en charge et aussi mes parents, si je le veux !
Je m'adapte à toutes les situations.

Ce matin, je vais vous parler du bordeaux ou des bordaulais ou les bagando. Un monde fascinant et relaxant. Il se peut qu'il y est pareil chez vous, au Cameroun, en Côte d'Ivoire, au Burkina et au Bénin j'en doute point !

Mais avant de vous parler du Bordeaux et les bagando ou des bordaulais (...) laissez-moi vous dire encore une fois que je suis différent, je l'ai toujours été. Et pour ma mère, et pour mes amis et collaborateurs, c'est comme si j'étais un extra-terrestre. Dans ça, je me sens bien, je m'aime bien et je m'en fou !

Maintenant allons-y à Bordeau. Mesdames et Messieurs comme je l'avais dit à l'entame de mon kouma ( ma parole) , surtout autour du concept Bordeaux, Bordaulais ou Bagando. Ensemble descendons à Bordeaux.
Le bordeaux serait ou paraît un espace; une conception dystopique liée à la vie d'une catégorie de jeunes, élèves, étudiants, diplômés ou pas, mais qui, sont souvent défavorisés, déçus, désespérés de leurs situations qui se cra-cra pour leur survie. C'est de ça il s'agit. Le Bordeaux est un coin du marché où les jeunes se cherchent pour vivre. Le Bordaulais ou le Bagando, c'est un jeune qui se bat de tout-bord pour vivre. Y'en a partout en Afrique bien que les appellations diffèrent y'en a chez vous des bagando, les apprentis de gbaka, les vendeurs de pantalon en bas du pont, des cireurs de chaussures aux abords des routes, des laveurs de voiture, le petit cordonnier, les porteurs de bagages...c'est de ça il s'agit. Ils sont utiles mais aussi mal vus pour ces gens auxquels ils apportent aides. Un vrai dilemme cornélien !

Encore je me présente à vous de nouveau, je m'appelle Amadou. Diplômé d'université dans l'une des facultés. Hier je me suis dépêché pour aller à l'école, courageux, vif en espérant que demain serait meilleur et que je serai l'un des occupants. Hélas !

Que ferais-je après l'obtention de mon diplôme de licence? Déjà après avoir consommé beaucoup d'années en standby. Que faire continuer ou continuer d'attendre ? Qui me nourrit ? Qui m'habille ? Qui paye mon loyé? Et j'ai 30 ans. Vais-je toujours attendre ? Je ne sais pas !

Mais attends ! Que t'inspire d'un Amadou, l'espoir de toute une famille, les enfants, les parents qui, depuis la nuit des temps attendent que le même Amadou leurs tirent de là? Vais-je croiser les bras ?

Depuis ce jour, moi Amadou j'ai décidé de descendre à Bordeaux pour me soulager enfin de satisfaire ceux qui attendent de moi.

Chemin-faisant, d'autres me ridiculisent. Je suis sujet de moquerie. On me traite de trompeur, voleur, violeur, fumeur, drogué ou salaud.

Je demande la main de leur fille, on me traite de non-sérieux. Parce que je suis pousseur de wottoro, cireur de chaussures ou vendeur au pieds du pont. Est-ce ma faute, si je cherche à me nourrir ?

Je suis ce Amadou que tout le monde redoute, se méfie quand on monte dans le transport commun, ils se méfient parcequ'ils pensent que je vais voler tout le monde. Ils m'appellent " Mara Bolé " .( brigand, voleur, bandit...). C'est pour cette raison j'ai décidé d'adopter la posture des conceptions pour faire ma vie. Après tout, je suis et je demeure le révolté. Parce que, ils pensent que je suis. Alors que je ne le suis pas. C'est de ça il s'agit  !
Notre société fait de nous, de ce que nous ne sommes pas. Je vous invite de venir visiter notre Bordeaux.