Ma vie, mon calvaire...

Suis-je dans le noir ou ai-je les yeux fermés ? Peut-être les deux!
Ces deux questions me taraudent sans cesse l’esprit. Mais invariablement, j’y réponds : OUI! Je suis dans le noir et j’ai les yeux fermés!
Comment peut-il d’ailleurs en être autrement si mes nuits ne diffèrent guère de mes jours et vice versa ?
Suis-je malade ? Non!
Mais mon âme ? Assurément!, me répondra certainement un exorciste!
Quand vint le jour, je déambule dans "mon noir'', tel un fantôme en son palais. Et la nuit, prisonnière de ma chambre et de ma tête, mes yeux, comme indépendants de mon corps, n’arrêtent de visualiser le triste spectacle de ma vie...
‘’Tu m’énerves! Tu énerves tout le monde dans la maison !!!’’
Ces deux phrases sonnent aujourd’hui comme une caresse du vent à mes oreilles. Jour ou nuit ? Qu’importe ! Je les entends à tout moment. Ces deux phrases, prononcées par ma mère, ont résonné en moi comme l’être immonde que je suis. L’être détestable qui ne mérite même pas qu’on s’arrête sur lui pour essayer de le comprendre. L’être repoussant qui ne mérite ni l’amour, encore moins, l’affection de sa propre mère !!!
Qui suis-je ??? Je me pose toujours cette question. Car malgré mon prénom Ayaba et du haut de mes 20 ans, j'ignore qui suis-je. Ou du moins, je ne sais plus qui suis-je. Ma vie me parait bien assez fade aujourd’hui.
Qu’est-on censé faire quand l’on vous rabat les oreilles à chaque fois de : ‘’t’es bonne à rien’’, ‘’tu es une incapable’’, ‘’tu ne seras jamais rien’’, ‘’j’aimerais bien voir qui te prendra pour épouse’’... ou ‘’tu ressembles trop à ta mère’’, ‘’tu feras autant du mal à ta progéniture que ta mère vous en fait si tu ne changes pas’’... Autant de phrases négatives qui ont bercé mon enfance et mon adolescence. Mais aussi bizarre que cela puisse paraître, je n’en veux à personne et surtout pas à ma mère.
Se rend-elle seulement compte du mal qu’elle me fait ? Je ne pense pas! Je suis devenue son défouloir attitré quand père et elle se disputent.
Que dois-je faire ? Je subis en silence...et je prie fort pour enfin quitter cette maison-école où, qu’on le veuille ou pas, l’on apprend à perdre confiance en soi !!!
Ma famille est un théâtre où tous les membres sont des acteurs qui se méconnaissent !!!
Tapis dans l’obscurité de ma chambre, yeux ouverts ou fermés, mes larmes n’arrêtent de couler. Mon cœur n’arrête de se comprimer de douleur. Mes poumons n’arrêtent de suffoquer par anoxie. Et pourtant, ma chambre est bien aérée ! Et pourtant, je passe mes journées à amuser la galerie !
Si seulement, on pouvait voir avec mes yeux! On se rendrait compte que je ne vois que noirceur partout et que, puisque personne ne me comprendra jamais, je ne joue qu’un rôle : celui de l’hypocrite.
Que dois-je faire ? Quel comportement adopter lorsque je sens que l’on me rejette ?
Cela n’est en même temps pas si surprenant que ça, si l’on considère que je fus formée pour n’avoir pas confiance en moi. Si l’on considère que j’ai du mal à m’accepter moi-même. Si l’on considère que je fus rejetée par ma propre mère !!!
En Afrique, ‘’nul ne peut t’aimer plus fort que ta mère’’, paraît- il ! Alors, quand celle censée te couver, te délaisse et pis, te rabaisse à chaque fois, est-ce si étonnant ces pensées ?
Et pourtant, je ne lui en veux pas! Je n’y arrive tout juste pas!
Pourquoi ? Simplement parce que je crois que l’on devient le fruit de notre éducation, de notre parcours. Dois-je donc en vouloir à une personne qui probablement aussi n’a jamais été comprise et qui ne demande comme moi, qu’affection, attention et amour ??? Je ne pense pas!
« On ne souffre jamais que du mal que nous font ceux qu’on aime » : disait Victor HUGO.
Qui suis-je ? Quelle est ma mission sur terre ? M’aime-t-on effectivement ?
À 20 ans, âge où l’on peut prendre des décisions nous engageant, je me sens peu sûre de moi. Je me sens vide. D’aucuns me diront que j’aie perdu la tête, d’autres me diront que c’est une folie heureuse. Moi, je dirai que je me perds.
Dans un monde où seuls ont droit de cité le mensonge et l’hypocrisie, je ne peux que persister dans mon rôle.
Je me console en me disant que je ne suis peut-être pas la seule à vivre ça. Mais c’est malheureux d’avoir à vivre ce sentiment de rejet, d’abandon de sa propre famille. On devient demain, pour ceux ayant moins de chance, des cas sociaux toujours incompris.
Pour ma part, dire que je suis fatiguée est un doux euphémisme.
Fatiguée de quoi me demandera-t-on ?
Fatiguée de faire semblant, répondrais-je. Fatiguée de rire alors que le cœur ne m’en dit pas. Fatiguée de me battre. Fatiguée de vivre pour les autres. Fatiguée de tout. Fatiguée de la vie en elle-même !!! Mais ai-je seulement le droit de tout abandonner ? On a toujours le choix, dirais-je dans d’autres circonstances. Mais la force de faire ce choix me manque.
Alors, je survis. Jusqu’à quand ? Je ne le sais. Mais je survis en espérant que cette noirceur abyssale qui fait dorénavant partie intégrante de moi, ne m’enlise. En tout cas, pas avant d’avoir vu, ne serait-ce que le temps d’un battement de cil, le soleil.
OUI, JE SURVIS!!! Mais je continue de me battre car j’ai la foi que l’obscurité fera place un jour à la lumière.
Soudain! AYABA !!!! AYABA !!!! AYABA !!!!
Un concert tonitruant de pleurs me réveille.
Je vois enfin la lumière. Une lumière aveuglante....puis, je me vois les yeux fermés comme endormie, mais inerte. Car, désormais, je ne me réveillerai plus jamais. J’ai enfin trouvé la lumière...et la paix. Mais au prix de ma vie.
Mes tourments prennent fin. Je suis enfin libre !!!
Au final, j’aurais trouvé la force d’opérer le choix de tout quitter. Désespoir ou égoïsme ???
Au final, je ne me serais pas battue jusqu’au bout !
L’obscurité eut raison de moi...
Et mes yeux resteront éternellement fermés....
Triste vie !!!
Triste destin !!!
Triste fin !!!