Du tréfond de ma mémoire,
Dans un épais brouillard,
Des images très anciennes
Petit à petit me reviennent
Les pieds dans les flaques d’eau, au milieu du marché de Shanghai, je découvre un autre monde. Sur des cagettes à même le sol, des poireaux, des pommes-de-terre, des choux, des carottes, des pommes, des fruits-du-dragon, etc.... Multitude de couleurs pour égayer cet endroit sombre, dissimulé, cloîtré à quelques mètres du Sheraton. Ça grouille autour de moi. Dans un seau des bestioles comme de gros vers de terre. Des serpents tricottent, s’enroulent, se déroulent entre eux. Deux-trois chiens noir-blancs, l’oreille dressée, l’œil apeuré, ficelés comme les cochonnets exposés à côté. Là, encore des tortues. Dans des bols toute une pharmacopée : serpent, pangolin, tortue, escargot, le tout finement broyé, des herbes également, séchées et écrasées. Les odeurs attaquent mes narines, les animaux tournicotent, brouillent ma vue. Je les vois s’envoler, devenir poussière, m’attaquer, certains s’accrochent, veulent se libérer, m’empêchent de bouger. Je suis dans une boule souvenir que l’on a secouée. La neige est rouge. L’un des flocons me colle à la peau. Il est gros comme une balle de tennis. J’ai beau battre des mains il me suit. Dans l’avion de retour il s’accroche à mon dos, se promène sur les passagers et toujours revient vers moi. Il grossit, grossit, devient ballon de baudruche mais ne s’envole pas. Il reste soudé à mon corps, l’enveloppe tout entier, le serre comme un étau. Je tousse, me démène en vain. C’est une masse gluante, comme cette pâte molle et informe que les enfants aiment triturer entre leurs mains. La boule, avec un regard féroce, se divise en particules, petites poussières de virus. Ils se posent sur mes amis, mes voisins, les marcheurs, les promeneurs. Ils se faufilent, les agrippent, leurs collent à la peau. Impossible de s’en défaire. Chaque particule a pris la physionomie de la boule mère, un regard haineux, un sourire narquois. Je l’entends me dire : « je suis plus forte que toi, plus forte que tous. Vous ne m’aurez pas. C’est moi la reine du monde. La reine des neiges, qu’elle rigolade. Les Rois du monde, une belle chanson qui me fait marrer. C’est moi le roi, c’est moi la reine, je suis plus forte que vos Tchernobyl et autres bombes atomiques. Je suis discret. Je ne fais aucun bruit, je suis invisible. Je m’infiltre là où je veux. Tu peux courir, tu ne m’auras pas. » La miette devient agressive. Tous les humains tombent à terre. Je ne sais plus si le monde existe. Je bats l’air dans l’espoir de faire fuir tous ces minuscules virus invisibles. Mes battements de bras ne servent à rien. Je souffle, je tousse. Ils me terrassent, j’étouffe.
Dring...Dring...Dring...
Le réveil !
Une douche froide pour me sortir cette nuit d’enfer de la tête. Filer à l’hôpital pour prendre la relève de mes collègues. Et, constater que, ce n’était qu’un demi-cauchemar...
Dans un épais brouillard,
Des images très anciennes
Petit à petit me reviennent
Les pieds dans les flaques d’eau, au milieu du marché de Shanghai, je découvre un autre monde. Sur des cagettes à même le sol, des poireaux, des pommes-de-terre, des choux, des carottes, des pommes, des fruits-du-dragon, etc.... Multitude de couleurs pour égayer cet endroit sombre, dissimulé, cloîtré à quelques mètres du Sheraton. Ça grouille autour de moi. Dans un seau des bestioles comme de gros vers de terre. Des serpents tricottent, s’enroulent, se déroulent entre eux. Deux-trois chiens noir-blancs, l’oreille dressée, l’œil apeuré, ficelés comme les cochonnets exposés à côté. Là, encore des tortues. Dans des bols toute une pharmacopée : serpent, pangolin, tortue, escargot, le tout finement broyé, des herbes également, séchées et écrasées. Les odeurs attaquent mes narines, les animaux tournicotent, brouillent ma vue. Je les vois s’envoler, devenir poussière, m’attaquer, certains s’accrochent, veulent se libérer, m’empêchent de bouger. Je suis dans une boule souvenir que l’on a secouée. La neige est rouge. L’un des flocons me colle à la peau. Il est gros comme une balle de tennis. J’ai beau battre des mains il me suit. Dans l’avion de retour il s’accroche à mon dos, se promène sur les passagers et toujours revient vers moi. Il grossit, grossit, devient ballon de baudruche mais ne s’envole pas. Il reste soudé à mon corps, l’enveloppe tout entier, le serre comme un étau. Je tousse, me démène en vain. C’est une masse gluante, comme cette pâte molle et informe que les enfants aiment triturer entre leurs mains. La boule, avec un regard féroce, se divise en particules, petites poussières de virus. Ils se posent sur mes amis, mes voisins, les marcheurs, les promeneurs. Ils se faufilent, les agrippent, leurs collent à la peau. Impossible de s’en défaire. Chaque particule a pris la physionomie de la boule mère, un regard haineux, un sourire narquois. Je l’entends me dire : « je suis plus forte que toi, plus forte que tous. Vous ne m’aurez pas. C’est moi la reine du monde. La reine des neiges, qu’elle rigolade. Les Rois du monde, une belle chanson qui me fait marrer. C’est moi le roi, c’est moi la reine, je suis plus forte que vos Tchernobyl et autres bombes atomiques. Je suis discret. Je ne fais aucun bruit, je suis invisible. Je m’infiltre là où je veux. Tu peux courir, tu ne m’auras pas. » La miette devient agressive. Tous les humains tombent à terre. Je ne sais plus si le monde existe. Je bats l’air dans l’espoir de faire fuir tous ces minuscules virus invisibles. Mes battements de bras ne servent à rien. Je souffle, je tousse. Ils me terrassent, j’étouffe.
Dring...Dring...Dring...
Le réveil !
Une douche froide pour me sortir cette nuit d’enfer de la tête. Filer à l’hôpital pour prendre la relève de mes collègues. Et, constater que, ce n’était qu’un demi-cauchemar...
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