Coupable innocente

Suis-je dans le noir ou ai-je les yeux fermés ? Peut-être les deux. La porte s'ouvrit, cette odeur que je connais si bien, odeur qui me suffoque et que je redoute, les pas se rapprochent de plus en plus. Il est là, dans cette obscurité je vois sa silhouette se tenir devant moi, avec ce sourire sur son visage, sourire narquois. Mon bourreau se tenait là. Tonton Koffi je l’appelais, le petit frère de maman qui habitait avec nous. Cette figure masculine pour laquelle j’éprouvais un dégoût sans pareil. Il se mit à dire : Fatima, ne résiste pas, ne crie pas et ça passera comme une lettre à la poste.

Je n’eus pas le temps d’ouvrir ma bouche qu’il écarta mes jambes, et me pénétra de manière brutale. J’étais en douleur, les larmes ruisselaient sur mon visage, et je pouvais l’entendre dire : « Fais plaisir à tonton ma belle, écarte-moi ces jambes pour qu’on en finisse pour aujourd’hui. Tu résistes ? Et pourtant tu sais bien que personne ne viendra te sauver, laisse-toi faire gentille petite fille. »

Après quelques minutes il se leva, pris un pagne et nettoya ce sang dans lequel je baignais. J’étais en sueur, je pleurais, mon sexe me faisait mal, et il me dit : sors rapidement d’ici. Au moment où je m’apprêtais à tourner la poignée de la porte, il me retint en disant : non on y va ensemble, et surtout pas un mot à quiconque. Il me donna une douche rapidement et me changea de vêtement. Il me prit par la main et nous sortîmes de la chambre. Dans la cour se trouvait maman, papa, des oncles et mes cousins venus en visite. Tout le monde semblait de bonne humeur et en pleine discussion. Tonton Koffi prit place sur une chaise et me fit assise sur ses genoux.

-Eh mais c’est la belle au bois dormant là avec son tonton. Dormait-elle encore quand tu es allé la voir ? Demanda maman à tonton Koffi

-Oh oui, mais j’ai dû la réveiller pour lui donner son bain ayant constaté qu’elle avait mouillé le lit d’urine.

-Bizarre, parce qu’elle se réveille toujours pour faire ses besoins. Et ça fait des années qu’elle a arrêté. Bon on mettra ça sur la fatigue.

Tout le monde ricana et la discussion reprit de plus belle.

Plus tard dans la soirée après le dîner ; j’étais dans la chambre avec maman et elle me mit au lit. Elle s’apprêtait à sortir de la chambre et je lui dis :

-Maman, ne me laisse pas seule. Je ne veux pas dormir seule, j’ai peur.

-Peur de quoi ? Je suis juste à côté et personne ne te fera du mal. Tu es en sécurité avec ta famille.

Sécurité ? Famille ? Deux mots pour moi qui ne vont pas du tout ensemble. Elle sortit de la chambre pour aller rejoindre papa et ferma la porte. Je restai en éveil, incapable de fermer l’oeil de toute la nuit. Quand j’essayais de fermer les yeux, je revois ce sourire narquois de tonton koffi. Je sentais ses mains se poser sur mon corps. Quel enfer me dis-je ! Je passai toute la nuit à regarder le plafond, à compter les moutons jusqu’à m’endormir.

Le lendemain matin à mon réveil, qui vis-je ? Tonton koffi se tenait là. Je me relevai en sursaut.

-Ta maman est déjà partie pour le boulot, elle m’a chargé de te préparer pour l’école. Allez, debout.

J’étais debout dans la douche et je balbutiais

-Tonton je je je peux me laver toute seule.

-Non, ta mère m’a dit de veiller à cela. Déshabille-toi

Sans plus tarder je m'exécute.

Et là encore je pouvais sentir ses doigts effleurer ma peau, il prenait son temps pour me faire des attouchements. Puis ensuite il me demanda de me baisser pour qu’il me fasse la toilette. La sensation douloureuse de ses doigts dans ma partie intime me fit pousser un cri aigüe. Ce n’était pas un ni deux doigts, mais trois à la fois qu’il enfonça à l’intérieur.

-Tonton tu me fais mal. J’ai mal. Criais-je.

-Si tu ne te tais pas tout de suite, je dirai à ta mère le soir que tu ne me respectes pas. Elle m’a demandé de te laver et toi tu refuses d’obtempérer.

J’aimais tellement ma mère que rien qu’à l’idée de penser qu’elle pouvait se fâcher contre moi je ne bronchai plus. Quand il eut fini , il m’habilla et me déposa à l’école avec sa voiture.

En classe je ne suivais pas, la maîtresse ayant remarqué que j’étais distraite me fit appel.

-Fatima, que se passe-t-il ? Tu m’as l’air bien perturbée, es-tu malade ?

-Non maitresse. Je suis juste fatiguée.

-Voudrais tu que j’appelle tes parents pour qu’ils viennent te chercher ?

Je ne savais quoi répondre, naturellement ce serait tonton koffi qui viendrait me chercher. Mes parents étant chacun respectivement au boulot. Que faire ? Il était hors de question que je rentre chez moi, dans cette prison sans barreaux.

-Non maitresse, ça va aller.

-Ok, mais n’hésite surtout pas à me dire si tu te sens mal.

A 17h tonton koffi m'attendais au portail.

-Maman n’est-elle pas de retour ?

-Elle à une réunion et finira tardivement. Ton père part en mission dans le nord pour le weekend, il sera de retour le dimanche soir.

Je me dis intérieurement : Seigneur tu sais que je ne tiendrai pas plus longtemps, fais que maman rentre vite.

Tout le long du chemin j’étais silencieuse. Je faisais semblant de ne pas l’entendre me demander comment ma journée s’est passé. Une fois à la maison je me précipitai dans ma chambre, en passant par la cuisine pour prendre un couteau que je mis sous mon oreiller.

Quelques minutes plus tard, la porte de la chambre s’ouvrit, il était là une fois de plus. Mais cette fois je ne le laisserai pas faire et peu importe si maman se fâche contre moi. Il se rapprocha du lit, me tira sur le bord, écarta mes pauvres jambes sans défense à nouveau et me pénétra sans plus attendre. Les deux bras en arrière, j’essayais de prendre le couteau sous l’oreiller.

C’est bon, je l’ai. Mais comment faire ? J’attendais le moment propice pour passer à l’action. Il se releva un instant, se dirigea vers la douche et là d’un bond je le poignardai dans le dos. Il tomba raide mort sur le sol, gisait dans une mare de sang. Je me tenais debout, couteau en main, ma main tremblait et brusquement maman entra dans la pièce.

-FATIMA qu’as-tu fait ? S’écria-t-elle

J’avais 9 ans, et je venais de commettre un meurtre. À qui la faute? Tonton Koffi pour avoir longtemps abusé et violé sa nièce que je suis? Mes parents pour avoir fait confiance à mon oncle pour veiller sur moi ? Ou peut-être Moi pour n’avoir pas su parler à ma mère plus tôt?

Un cauchemar ? Une réalité ? Je ne puis distinguer l’obscurité de la lumière.