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Je me suis souvent dit que la langue française manquait cruellement de vocabulaire.
Nous avons de jolis mots, c'est vrai : ivresse, funambule, mélancolie, éphémère, nuage, clapotis, libellule... Mais les plus jolis mots du monde demeurent intraduisibles.
Comment se fait-il qu'une si belle langue que la nôtre n'ait pas de mot pour désigner le reflet de la lune sur la surface de l'eau ou pour évoquer le plaisir de se réchauffer au coin du feu ? Plus inspirés probablement, les Turcs ont inventé le premier, yakamoz, et les Norvégiens le second, peiskos.
Dans mon dictionnaire de la langue idéale, j'emprunterais également au portugais cafuné, ce geste tendre de quelqu'un qui fait glisser ses doigts dans les cheveux de l'autre, et au japonais mono-no-aware, ce sentiment à la fois doux et amer, empreint d'une poésie vaporeuse, que l'on éprouve parfois au crépuscule, durant les longs voyages en train ou en contemplant une pluie torrentielle... Au néerlandais, j'emprunterais uitwaaien, marcher dans le vent pour le plaisir, et à l'inuit iktsuarpok, aller dehors pour voir si quelqu'un vient. J'irais chercher sur la Terre de Feu le mot mamihlapinatapai pour évoquer ce regard riche en signification échangé sans un mot par deux personnes dont aucune n'ose faire le premier pas, et sur l'Île de Pâques manabamàte, cette perte d'appétit éprouvée lorsqu'on est en train de tomber amoureux. Je prendrais à l'allemand heimat, cet attachement profond pour un endroit auquel on se sent appartenir et à l'indonésien jayus, qui évoque une blague si mal racontée qu'on ne peut s'empêcher de rire en l'écoutant.
Mais aujourd'hui, pour embellir ce dictionnaire, je cherche un mot que je n'ai encore trouvé dans aucune langue.
Un mot pour décrire cette immense reconnaissance à la vie quand je te regarde grandir, ce profond sentiment d'amour lorsque tes petits doigts s'accrochent aux miens, cette force que tu me donnes quand tu me souris, cet émerveillement face à chacune de tes prouesses, cet étonnement de te voir à la fois si petit et si grand... Dans ce mot, il y aurait aussi cette confiance que tu m'as offerte en faisant de moi une mère, cette belle responsabilité que tu m'accordes lorsque tes pleurs cessent dans mes bras, mais aussi cette fragilité devant tant de vulnérabilité ; enfin l'envie d'être toujours là pour te protéger.
Un mot pour décrire tout cela à la fois, un mot dont j'ai besoin chaque jour. Un mot dont les couleurs s'étofferaient au fil du temps, dont la puissance résonnerait à l'infini.
Si ce mot n'existe nulle part, alors je prendrais les lettres de ton prénom, je les mélangerais à la manière dont tu fais chavirer mon cœur, et j'inventerais pour toi ce nouveau mot : teetohmi.
Nous avons de jolis mots, c'est vrai : ivresse, funambule, mélancolie, éphémère, nuage, clapotis, libellule... Mais les plus jolis mots du monde demeurent intraduisibles.
Comment se fait-il qu'une si belle langue que la nôtre n'ait pas de mot pour désigner le reflet de la lune sur la surface de l'eau ou pour évoquer le plaisir de se réchauffer au coin du feu ? Plus inspirés probablement, les Turcs ont inventé le premier, yakamoz, et les Norvégiens le second, peiskos.
Dans mon dictionnaire de la langue idéale, j'emprunterais également au portugais cafuné, ce geste tendre de quelqu'un qui fait glisser ses doigts dans les cheveux de l'autre, et au japonais mono-no-aware, ce sentiment à la fois doux et amer, empreint d'une poésie vaporeuse, que l'on éprouve parfois au crépuscule, durant les longs voyages en train ou en contemplant une pluie torrentielle... Au néerlandais, j'emprunterais uitwaaien, marcher dans le vent pour le plaisir, et à l'inuit iktsuarpok, aller dehors pour voir si quelqu'un vient. J'irais chercher sur la Terre de Feu le mot mamihlapinatapai pour évoquer ce regard riche en signification échangé sans un mot par deux personnes dont aucune n'ose faire le premier pas, et sur l'Île de Pâques manabamàte, cette perte d'appétit éprouvée lorsqu'on est en train de tomber amoureux. Je prendrais à l'allemand heimat, cet attachement profond pour un endroit auquel on se sent appartenir et à l'indonésien jayus, qui évoque une blague si mal racontée qu'on ne peut s'empêcher de rire en l'écoutant.
Mais aujourd'hui, pour embellir ce dictionnaire, je cherche un mot que je n'ai encore trouvé dans aucune langue.
Un mot pour décrire cette immense reconnaissance à la vie quand je te regarde grandir, ce profond sentiment d'amour lorsque tes petits doigts s'accrochent aux miens, cette force que tu me donnes quand tu me souris, cet émerveillement face à chacune de tes prouesses, cet étonnement de te voir à la fois si petit et si grand... Dans ce mot, il y aurait aussi cette confiance que tu m'as offerte en faisant de moi une mère, cette belle responsabilité que tu m'accordes lorsque tes pleurs cessent dans mes bras, mais aussi cette fragilité devant tant de vulnérabilité ; enfin l'envie d'être toujours là pour te protéger.
Un mot pour décrire tout cela à la fois, un mot dont j'ai besoin chaque jour. Un mot dont les couleurs s'étofferaient au fil du temps, dont la puissance résonnerait à l'infini.
Si ce mot n'existe nulle part, alors je prendrais les lettres de ton prénom, je les mélangerais à la manière dont tu fais chavirer mon cœur, et j'inventerais pour toi ce nouveau mot : teetohmi.
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Pourquoi on a aimé ?
Nous avons beaucoup apprécié la poésie de ce texte, évocateur d'instants précieux et de doux sentiments. On ressent une émotion envahir la
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Pourquoi on a aimé ?
Nous avons beaucoup apprécié la poésie de ce texte, évocateur d'instants précieux et de doux sentiments. On ressent une émotion envahir la