L'autre bout du couloir

Toute histoire commence un jour, quelque part... Un grand cri, un vagissement au sortir du ventre d’une femme, voilà la commune manière de venir au monde de tous les hommes. Seulement,est-ce là le début de leurs histoires ? On peut naitre plusieurs fois dans une vie, certes, néanmoins, chacun à sa façon, mais on ne vit qu’une seule fois.Cependant, certains hommes, c’est bien à leur mort qu’ils naissent véritablement. Les grandes histoires, celles qui font les fameux hommes, commencent toujours par leur fin, ou faut-il plutôt dire, par leur tragique fin...
L’histoire de William Brown, est l’une d’entre elles, celle-ci débutapar un bref flash-back, ou doit-on alors plus exactement dire, que la célèbre histoire de ce citoyen noir Américain ordinaire, débuta par une question : « Avez-vous choisi votre repas ? ». C’était la question classique des grands restaurants luxueux, ceux aux baies vitrées qui longeaient les célèbres avenues de Chicago, où l’on se faisait servir son repas par un homme en costume sombre et l’on vous lisait d’abord le beau nom du prestigieux vin, avant, qu’avec un artdigne des palais de renom, l’on fasse alors couler le précieux nectar dans le plus éclatant de calice... William Brown, enviait autant qu’il portait en lui une farouche rage, contre ces quelques favorisés de la société de consommation, qui avaient fait de ces rares délices, une pratique quotidienne de la vie.
Et pourtant, lorsque l’homme posa la question à William Brown, tout c’était comme effacé devant lui, les quatremurs en briques de la pièce s’étaient écroulé... William Brown se vu alors comme sortir de la terre, comme si il renaissait de nouveau. Il se vu remarcher encore dans les rues de Chicago comme ce jour-là, ce même jour où toute sa vie avait basculée. C’était le même jour, le 7 Octobre 1978, William Brown marchait alors sur le trottoirparmi la masse des gens qui accourait dans les bureaux des grandes firmes occupant les grattes ciel aux abords du grand boulevard. William Brown avançait avec une seule idée en tête, puis, il y avait cet homme qui traversait la grande route et qui s’étaitretrouvé nez à nez avec une voiture roulant à vive allure, qui avait freinée brusquement devant lui. Une femme qui sortait de la pharmacie d’accoté, avait laissée tomber un flacon de médicament du petit sac en plastique bleudébordant qu’elle portait et renversa sur le trottoir, une dizaine des petits cachets de forme ovale.
William Brown, lui,avançait sans que rien de tout cela ne l’ai perturbé, il marchait,il se dirigeait droit vers la banque....
Lorsqu’il était enfin arrivé devant la banque, il se souvint alors de l’hésitation qu’il eut ce jour-là, et de la sueur froide qui avait baigné toutson corps. Puis, William Brown poussa la porte de la banque... Il revu la grande pendule qui ornait le mur en marbre noir en face dela porte d’entrée principale, elle était comme arrêtée à la même heure, 10 heure 20, la même heure que ce jour-là. Une femme le croisa et lui sourit, la même jeune femme à la chemise blanche et à lamini-jupe noire collante, avec une pile des papiers marqué du logo de la banque entre les mains.
Puis, soudain, trois coups de feu, trois balles d’abord dans le plafond de la banque, et puis les cris, la panique... William Brown se revu appuyer sur la gâchette de l’arme une fois, puis, deux fois, puis encore et encore... Avant que le vacarme assourdissant des gyrophares des voitures de la police ne retentit, et puis, le son terrible de la voix tonitruante du juge prononçant la sentence. C’était fini...
En effet, si la plus part des personnes peuvent lire la genèse de leur vie mentionnée sur un certificat de naissance, William Brown était l’une de rares personnes, qui avaient l’immense privilège de connaitre aussi, avec exactitude et dans les moindres détails ce qui allait être la fin, unvéritable apocalypse... Cependant, William Brown n’avait aucun pouvoir ni sur ce future fâcheux qui l’attendait, ni sur son lourd passé qui le hantait. Il subissait ces deux morceaux de sa vie sans influencer leur cour, sans résistance, c’était son destin...
La fin de l’histoire deWilliam Brown, était consignée dans un document administratif du tribunal de Chicago. Il s’agissait d’une décision de justice, un verdict. L’énonciation de cette décision judiciaire, avait enclenchée dans la vie de William Brown, le début d’une grande marche, une longue marche de dix-sept années dans un couloir sombre dont l’issue était pourtant, une question toute simple et bienveillante : « Avez-vous choisi votre repas ? ».
Il s’écoulaexactement six secondes et quarante-six tierces entre le moment où l’homme lui posa la question pour la première fois et lorsqu’il la lui répéta : - Monsieur Brown ! Avez-vous choisi votre repas ? William Brown, était alors sorti du bref flash-back qui l’avait emporté six secondes plus tôt, il fixa alors l’homme... L’homme devant lui, avait une casquette noire visée sur la tête, une uniforme verte foncé, celle des gardiens de la prison de haute sécurité, uninsigne d’officier de police en haut de lapoche gauche de sa chemise manches courtes.
William Brown savait que cette question, celle que l’homme lui posait instamment, signifiait quelque chose, elle signifiait que le moment était proche, que la fin était imminente, qu’après, tout sera fini...
William Brown pencha la tête et balaya le plafond de sa cellule d’un seul regard, puis dit alors à l’homme : - Sa sera un double cheeseburger avec vingt-deux cuisses de poulet.
L’homme acquiesça d’un geste de haut et bas de la tête, puis lui dit : - Vous savez, c’est votre dernier repas, il faudra bien vous régaler...
Un laps de temps s’écoula, puis, soudain, une idée vint à William Brown : - Voulez-vous ajouter aussi une glace à la menthe et au chocolat, s’il vous plait ? Il doit faire très chaud en enfer... Avait-il ironisé, comme pour tenter de conjurer ce mauvais sort qui lui collait à la peau.
William Brown, le célèbre prisonnier condamné à mort pour braquage et meurtre, a été exécuté cette nuit à minuit zéro cinq minute par électrocution... Avait-elle annoncée, la présentatrice du journal télévisé le matin...
Voilà comment un fameux homme de plus,naquit dans la grande éternité de l’histoire, par l’ouverture d’une tombe, par la porte de la mort...