La Pollution du banquier

« Toute histoire commence un jour, quelque part », disait-il, apparemment, ce cadavre qui a inséminé la femme que j’aime. Je ne peux pas lui en vouloir, moi aussi je la trouve jolie, mais bon, même alors qu’elle n’était qu’une simple idée dans la tête de sa mère, cela faisait environ trois mille ans qu’il était mort. Je me retourne vers elle, cette femme que j’aime, qui ne possède que miel pour mes abeilles, aussi j’aime ses gros seins, et je lui dis, à la déesse de tout mes sangs et tout mes cœurs, toutes les choses, ne me quitte jamais:
- Avons-nous terminé ici, élan sublime de mon cartilage et de mes poumons?
- C’est toi qui voulait absolument venir ici, me répond-t-elle, toujours souriante et radieuse, mais occasionnellement, dans certaines situations légèrement moins souriante et radieuse ce qui n’enlève absolument rien a son charme. Par exemple dans les cimetières.
Je me retourne vers l’endroit de dernier repos de la crapule, et la plus grosse holo-pierre tombale dans tout le holo-cimetière du district 9. Sur cette pierre tombale ce trouve un gros bouton rouge, sur lequel j’ai pesé environ le quart d’une seconde avant que cette fiction débute. Oui oui vous lisez « La Pollution du banquier », votre œuvre de fiction favorite. Et je vous explique tout, quand vous excitez le gros bouton rouge, la pierre tombale se met a hurler les citations préférées du défunt :
«  Partouze ! Pourquoi brasser ? Poro favorto ? Ping Pong Tong ! », s’exclame-t-elle, tour a tour. Et d’autres conneries. Je soupire, et je dis a ma vulnérable colombe, si délicate et sacrée:
- Très bien, si nous nous entendons pour sortir d’ici, je ne désire que vous comprendre en toute chose, éternelle énigme qui ne fait que battre mon cœur.
- Allons manger une pizza, répond-t-elle, un majestueux éclat de sagesse perlant dans l’humidité de ses yeux impossibles et mystifiants.
Je force sur elle un petit bec, puis nous marchons en dehors du cimetière, main dans la main, elle mettant sa main gauche sur son gros ventre de femme enceinte. Un ventre qui n’est que de beauté sans égal.

Voyez-vous, nous visitions la poussière de Sanchez Bobinette, le très fameux banquier qui a touché le pactole il y a une dizaine d’années. Il avait, de son vivant, investit dans tout et n’importe quoi, que ce soit les sous-vêtements pour femmes, les godemichets qui éjaculent, les élevages de rats domestiques, les technologies de mécanisation du raton laveur; mais ce qui l’a rendu réellement, absolument, impossiblement riche. c’est d’avoir investit un dollar canadien dans Apple. Comme vous le savez, en l’an 40'034 après que Jeep-Christler Inc. soit vendu aux Chinois, Apple a connu une explosion de revenus sans précédant en établissant en Amérique du Nord le tout premier Corporifat Islataxique sur Terre, remplaçant ainsi les États-Unis, le Canada et le Mexique par une corporation qui applique la charia, donc interdit de prêter de l’argent. Et ce simple dollar canadien, il c’est transformé en Montana littéralement figurativement. Et vous savez qui vivent au Montana figurativement littéralement ? Gaston Breton et Catanyshkamamapapaya Villeneuve. Moi et mon petit bout de femme. Nous sommes seuls a parler français au Montana, un coup de foudre convivial. Quoi qu’il en soit la pizzeria ce rapproche de nous, la conséquence nécessaire et évidente de la volonté d’une déesse. Nous entrons dans la pizzeria, qui s’appelle « Sanchezo Bobinetto Pizzato Italiano ». Je ferme la porte derrière nous, après avoir, sans aucun doute, ouvert cette porte pour ma douce, et brusquement le bruit agressant provenant du cimetière s'interrompt, reposant ainsi un peu nos oreilles. Les cris des morts sont remplacés par une musique douce qui sonne suffisamment italienne car elle est jouée sur un instrument a corde. Le gros bonhomme moustachu se pince les doigts, l'air fâché de prendre notre commande, c'est ça l'attrait touristique, plus que le cimetière ou même le méga-bordel. Je lance mes deux yeux dans l'un des coins du plafond, puis dans l'autre, jouant au jeu de lancer mes yeux dans des coins de plafonds. Pendant ce temps ma très douce passion sans pareil arrange le pépin des fiscalités avec le gros bonhomme, transférant le millième d'un crédit en échange de quatre pizzas : pepperoni fromage, anchois et ananas, fétus, et elle prend la dernière pizza pour emporter avec une garniture de nourriture pour chien. Il s'agit réellement de deux pizzas au fétus. Nous nous mettons confortable, à l'une des tables antigravité, je sabre avec mon bras pour enlever quelques chats, dégager un petit peu d'espace. Puis nous mangeons comme des rois, les chats mangent aussi. Pigeons, dromadaires, chats, les voraces démons des villes.

Après avoir mangé, nous irons prendre le futuro-métro vers notre appartement, un appartement totalement ordinaire, puis nous allons probablement avoir le jeu de se demander s'il y aura du sexe ou non, selon toute vraisemblance il y aura du sexe, peut-être traditionnel, peut-être zoroastro-pianoscopique, dodo pendant quatre heures, pour ensuite nous faire injecter dans les veines de l'énergie liquide par le réveil-matin, puis nous allons nous installer à nos stations de travail, et voter électroniquement dans la guerre entre les Rouges et les Bleus. Des fois nous votons pour les Rouges, les autres fois nous votons pour les Bleus, se serait beaucoup trop long a expliquer, simplement le gouvernement a été massivement automatisé, et l'appareil démocratique transposé dans une structure de marché économique. Chacun des référendums pour lesquels je vote à chaque deux à quatre seconde me valent un milliardième de crédit, dépendamment de facteurs comme la température de la guerre, etc. Mais ceci n'est pas une fiction politique. Ceci n’est pas la fiction de l’homme qui fera ces choses. Ceci est une fiction d'amour, et de contempler aujourd'hui, dans toute sa putréfaction, cet homme, qui... c'est-à-dire, dans mon univers, la science génétique a été poussée au point de pouvoir inséminer artificiellement une femme avec la matériel génétique d'un cadavre, n'importe quel cadavre, homme ou femme, frais ou poussière, acrobate ou despote, et les gouvernements à travers le monde ont décidé de créer un « Pacte global contre le nécrocisme », signé par tous sauf les très, très, très intelligents Suisses, et depuis ce temps les gens ne sont plus discriminés contre après leur mort ; ils conservent leurs propriétés, leurs capitaux, leurs investissements, leurs fonds de pension... Et la chose importante à retenir ici, c'est que la progression des facteurs économiques ont fait en sorte que la seule façon pour les hommes de devenir père, c'est après avoir économisé au minimum une ou deux unités de crédit. Notre société est donc largement composée d'hommes travaillant comme des fous pour pouvoir faire les investissements qui seront heureusement chanceux après leur mort, et des femmes enceintes avec les enfants d'hommes longtemps oubliés. Des hommes qui disaient « Ping Pong Tong »...

C'est à toutes ces idées que je travail, dans mon esprit, alors que je mange distraitement ma pizza, plus silencieux qu'à l'habitude, insensible aux invasions félines dans mes cheveux. Loin de moi la prétention d'affirmer que ma douce moitié pourrait dire autres mots que ceux les plus importants. Simplement, imaginons que je suis en train de tenir deux conversations simultanées, l'une avec vous et l'autre avec ma douce, et que toutes les deux possèdent ma plus complète attention. Pour terminer mes explications, la situation s'est beaucoup empirée après qu'il soit devenu illégal de prêter de l'argent ; maintenant les morts, qui contrôlent près de 99 % de la fortune d'Amérique, ne veulent plus prêter d’argent, et mon dilemme, je vous le présente maintenant, c'est que j'aimerais beaucoup avoir un enfant avec la femme que j'aime, pas avec une étrangère dans trois mille ans. Et réellement, pour l'homme moyen c'est plutôt infini plus un an. Alors je me suis passé par la tête, comment diable pourrais-je trouver un crédit ? Deux crédits ? Le plus facile serait de former une révolution, conquérir un pays, voler tout l'argent des morts. Mais le problème c'est que l'économie post-industrielle est tellement interconnectée que manquer de respect aux normes internationales peut causer des problèmes très sérieux d'instabilité féminine. Sinon, je pourrais décrocher un diplôme d'économie, devenir un investisseur, et voler l'argent de mes clients morts. Hélas ! de nos jours, étant donné la Crise des Investisseurs qui Volaient l'Argent des Clients Morts (11'978 après Jeep-Christler), ils ont tous été remplacés par des intelligences artificielles. Une autre solution serait simplement de construire un vaisseau de colonisation intergalactique, s'enfuir sur une nouvelle planète, loin, très loin de toutes les régulations, loin de tout ces cadavres riches et oppressants, loin de tout ces banquiers et leurs taux d'intérêt asphyxiants, loin de cette société malade. Mais réellement, cette gangrène n'origine-t-elle pas de la condition humaine ? Est-il moral pour les hommes d'exister ailleurs que leur propre poubelle ? Aussi, le constructeur de vaisseaux de colonisation intergalactique, c’était plutôt mon demi-oncle paternel. De la fesse germaine. Bon, quoi faire ? Je n'ai droit qu'à 15'000 caractères, incluant les espaces !

Après mûre réflexion, je vais courir dans la circulation automobile, l'argent des assurances devrait me faire environ un crédit. Je vais mourir « accidentellement » et mon amour pourra porter en son sein mes gènes de suicide par automobile. Les gènes d'un gagnant ! Les meilleurs plans sont souvent les plus complexes et inusités. Je me tourne vers la muse de mes pieds, le métronome de mes paroles, et je lui dis, uniquement plein d'amour :
- Dulcinée de tout les hippogriffes de ma destinée, j'ai oublié de faire quelque chose !
- Oh non ! Quoi donc ? répond-t-elle à la manière d'une betterave salée par les larmes de la tragédie de ne pas comprendre son divin époux.
- J'ai oublié que j'avais besoin de rencontrer un vieil ami d'enfance par rapport à son poisson disparu dans la tragédie du Poisson Disparu de 40'043 (après J-C). Ma très douce inéluctable merveille.
- Oh non !
- Ça ne devrait prendre que tout l'après-midi.
- Je comprends. Veux-tu que je retourne toute seule à la maison ? me demande-t-elle, aphrodite nymphe de toutes les beautés.
- Il s'agirait du développement optimal, immuable stupeur de toutes mes langueurs.
- Très bien, dit-elle.
- Très bien, ne m'attends pas ! dis-je, me débarrassant de ma montagne de chats et dromadaires logés dans mon plus grand muscle du corps humain.

Je cours presque, alors que je sort de la pizzeria. Malheureusement, il est rendu très difficile de trouver un accès piéton à proximité d'une voie de circulation pour automobile, étant donné le Grand Bond en avant (31'102 après Jeep-Christler). Il ne reste qu'une rue dans le monde entier, celle du Carrefour du Montana. J'y cours à toute vitesse, à cette vitesse je l'atteindrait dans un délais totalement approprié et raisonnable de trente minutes.

Trente minutes plus tard, trempé de sueur de la tête aux pieds, j'arrive à la seule route dans le monde entier, celle du Carrefour du Montana. Elle est superbe ! Deux lignes, clôturées, allant dans deux directions distinctes, avec des courbes aux extrémités, formant donc un anneau aplati. Sur cette route, qui mesure environ dix mètres de long, trente gros camions blindés roulent à toute vitesse, dans les directions opposées, et des centaines d'hommes et de femmes, perchés sur le passage piéton établi au-dessus de cette nageoire à requins polluants, sautent, ils sautent, et ils sautent, sur la rue, et ils explosent en mille morceaux quand ils se font écraser par les requins incomestibles. Je me place au bout de la file d'attente, anxieux de perdre ma vie à ses requins terrestres, mais plus anxieux de devoir attendre dans une file. Ils n’ont aucune signalisation pour le temps d’attente. C'est alors que je remarque un homme dans la foule, habillé en jaune, courir vers la clôture ceinturant la route, et tandis même qu'il se lance à grimper cette échelle primitivement barbaresque, il se fait électrocuter ! En plein jour ! Sous le regard de tout ces gens ! La honte ! Mais alors que je le regarde faire, je me souvient que mon pouvoir spécial c'est justement d'être insensible à l'électricité ! Elle peut passer à l'intérieur de moi comme si j’étais un conduit, sans la moindre douleur, pour autant que je me décharge télépathiquement sur une femme ! Réalisant cette chance innée de passer directement sur la route, je me lance, possédant toujours l'énergie de ma mission suicide. Je court jusqu’à la clôture ! Je saute !

Je me réveille, confus. L'homme habillé en jaune a reposé ma tête contre sa jambe, et m'offre une bouteille d'eau, alors qu'il me flatte délicatement les cheveux. Naturellement je suis très embarrassé, mais il dégage l'énergie très calme du taureau voluptueux, et me chuchote doucement :
- a...f.........sa...o.f. ?
- Parlez plus fort ! La route fait beaucoup de bruit ! dis-je, pensant plutôt au cris des sauteurs.
- Vous vous êtes fait électrocuté mon pauvre ! me dit-il, compatissant.
- Je sais ! Je croyait pourtant être né avec le pouvoir de résister à l'électrocution !
- Oui, moi aussi ! J'ai réfléchi, et se peut-il que vous pratiquez également l'ancien art perdu du sexe zoroastro-pianoscopique ?
- Ah zut alors ! J'avais oublié que la pratique de l'ancien art perdu du sexe zoroastro-pianoscopique retire de l'usager ses pouvoirs secrets de résistance à l'électrification.
- Je vois qu’il ne vous reste plus grand maux. Je vous laisse à vos desseins.

Il se lève, retourne dans la file d'attente. Il me jette un bref regard, il voit que je le regarde, puis il baisse les yeux. Le même manège se répète mille trente-et-une fois. Bon, le temps presse, je dois faire quelque chose, rapidement. Puis l’ampoule me frappe au visage.

[...]

- Parce que je te connais, mon amour. Je ne veux pas que tu meurt juste pour me mettre enceinte, descend donc du lampadaire.
- Tu ne comprends pas, ma très chère Catanyshkamamapapaya, déesse inéluctable de toutes les fondations aphrodisiaques ! Je ne désire nullement m'arrêter à posséder ton corps ! J'ai besoin du produit éternel de notre union, la descendance créée d'amour, sans intérêt ni hypothèque ! J'ai besoin que mon enfant soit capable de voir son père comme une goule plutôt qu'un squelette ! J'ai besoin de toi, j'ai besoin d'amour, j'ai besoin de toutes ces choses, toutes ces choses qui coûtent beaucoup trop cher ! J'ai besoin que tu soit enceinte avec ma semence dans les prochaines trente secondes ! Au diable la physique de faire tomber enceinte une femme enceinte ! Je suis autant capable de devenir dyslexique par amour que de faire tomber enceinte une femme enceinte par amour! Je peux soulever des montagnes ! Je peux tuer des chattes à la vitesse de la lumière ! Je peux -
- Chéri, pourquoi pas aller vivre en Suisse ?