Le Nord.
Le fameux grand et puissant Nord industriel. Le Nord et ses gigantesques usines implantées entre les ports et les gares. Entre les centre-villes et les plages. Ce grand Nord m’inspirait immédiatement d’énormes cheminées, des locomotives. Un paysage en noir et blanc. Des hommes transpirants, uniquement des hommes, pas de femmes. Leurs vêtements tachés et leur dos courbé composaient le tableau que je pouvais retrouver à travers les documentaires télévisés.
Cette région symbolisait quelque chose de mystérieux, quelque chose d’inatteignable. L’image d’un quotidien insurmontable surplombé par la rugosité du climat. Ces « gens du Nord » suscitaient en moi une curiosité particulière, comme l’admiration « d’avoir survécu » !
Des années plus tard, un matin très froid et humide de novembre, je prenais le train pour Dunkerque. Paris-Gare du Nord - Lille-Flandres. TER : terminus gare de Dunkerque.
Plus j’approchais de ma destination, plus je sentais mon cœur battre. Il battait de plus en plus vite à chaque arrêt du train, et davantage quand il repartait. Il m’avait semblé qu’une éternité s’était écoulée.
À la sortie de la gare de Dunkerque, il était là. Il m’attendait, lumineux. Je retrouvais un peu de chaleur.
Nous avons alors pris la route en direction de chez lui. On pouvait pratiquement tout le temps apercevoir les grandes cheminées. L’usine, c’était là que travaillaient toute leur vie de nombreux hommes de la région. Il me faisait découvrir où il avait grandi : le collège, le terrain de foot, l’appartement de son meilleur ami, le chemin secret derrière le lycée, chez sa sœur, les différents appartements dans lesquels ils ont vécu depuis leur arrivée en France...
On arrivait près de la maison, j’étais stressée « et si sa mère ne m’aimait pas, et ses sœurs... et si jamais je ne suis pas comme il faut ... ». Comme dans le train, mon cœur s’était remis à battre la chamade et il ne s’était calmé un petit peu que quand sa mère m’avait accueillie les bras grands ouverts. J’avais si peur de ne pas être acceptée ou de ne pas plaire mais je savais pourquoi j’avais fait ce chemin et il ne s’agissait pas de faire demi-tour maintenant.
Je me suis si rapidement sentie comme chez moi. Le canapé était le même, l’organisation de la cuisine m’était familière, l’odeur du déjeuner en préparation mêlée à la chaleur des présentations. Je me sentais bien. J’étais soulagée, rassurée, apaisée.
On avait mangé, bu le thé et longuement discuté. La tante était là aussi. C’était la grande sœur.
Elles me posaient des questions et me racontaient plein d’histoires vécues et d’anecdotes. J’écoutais, j’apprenais. Je découvrais le combat quotidien de ce binôme increvable qui avait survécu au Grand Nord. Elles avaient quitté l’Algérie au début des années 2000 pour pouvoir offrir à leurs enfants des possibilités. Elles racontaient leur divorce immédiat, le combat pour avoir la machine à laver et passer le permis. Ici, elles avaient décidé de s’habiller comme elles voulaient. Les enfants racontaient avec humour l’éducation qu’elles orientaient vers la poursuite d’études et la discipline, mais aussi vers le partage, l’amour et la tolérance. Face à moi, un couple de Super Nana qui s’étaient battu, à la force de leurs mains et de leurs âmes, pendant des années, jour et nuit pour offrir à leurs enfants la possibilité de pouvoir choisir. Elles me faisaient penser à ma maman, qui avait quitté son Maroc natal à 20 ans pour le Paris des années 80 et découvrir une autre vie, un nouveau pays et tout ce qu’il s’en suit.
Ces femmes sont mes héroïnes car elles bravent le quotidien avec la vision du lendemain. Les battantes ce sont elles. Ce sont celles qui se battent, mais pas vraiment pour elles. Elles portent les armes et protègent ce qu’elles aiment. Et c’est pour elles qu’aujourd’hui je me bats. Et c’est pour elles que demain, ils et elles se battront.
À toutes les mamans, à toutes les femmes.
Le fameux grand et puissant Nord industriel. Le Nord et ses gigantesques usines implantées entre les ports et les gares. Entre les centre-villes et les plages. Ce grand Nord m’inspirait immédiatement d’énormes cheminées, des locomotives. Un paysage en noir et blanc. Des hommes transpirants, uniquement des hommes, pas de femmes. Leurs vêtements tachés et leur dos courbé composaient le tableau que je pouvais retrouver à travers les documentaires télévisés.
Cette région symbolisait quelque chose de mystérieux, quelque chose d’inatteignable. L’image d’un quotidien insurmontable surplombé par la rugosité du climat. Ces « gens du Nord » suscitaient en moi une curiosité particulière, comme l’admiration « d’avoir survécu » !
Des années plus tard, un matin très froid et humide de novembre, je prenais le train pour Dunkerque. Paris-Gare du Nord - Lille-Flandres. TER : terminus gare de Dunkerque.
Plus j’approchais de ma destination, plus je sentais mon cœur battre. Il battait de plus en plus vite à chaque arrêt du train, et davantage quand il repartait. Il m’avait semblé qu’une éternité s’était écoulée.
À la sortie de la gare de Dunkerque, il était là. Il m’attendait, lumineux. Je retrouvais un peu de chaleur.
Nous avons alors pris la route en direction de chez lui. On pouvait pratiquement tout le temps apercevoir les grandes cheminées. L’usine, c’était là que travaillaient toute leur vie de nombreux hommes de la région. Il me faisait découvrir où il avait grandi : le collège, le terrain de foot, l’appartement de son meilleur ami, le chemin secret derrière le lycée, chez sa sœur, les différents appartements dans lesquels ils ont vécu depuis leur arrivée en France...
On arrivait près de la maison, j’étais stressée « et si sa mère ne m’aimait pas, et ses sœurs... et si jamais je ne suis pas comme il faut ... ». Comme dans le train, mon cœur s’était remis à battre la chamade et il ne s’était calmé un petit peu que quand sa mère m’avait accueillie les bras grands ouverts. J’avais si peur de ne pas être acceptée ou de ne pas plaire mais je savais pourquoi j’avais fait ce chemin et il ne s’agissait pas de faire demi-tour maintenant.
Je me suis si rapidement sentie comme chez moi. Le canapé était le même, l’organisation de la cuisine m’était familière, l’odeur du déjeuner en préparation mêlée à la chaleur des présentations. Je me sentais bien. J’étais soulagée, rassurée, apaisée.
On avait mangé, bu le thé et longuement discuté. La tante était là aussi. C’était la grande sœur.
Elles me posaient des questions et me racontaient plein d’histoires vécues et d’anecdotes. J’écoutais, j’apprenais. Je découvrais le combat quotidien de ce binôme increvable qui avait survécu au Grand Nord. Elles avaient quitté l’Algérie au début des années 2000 pour pouvoir offrir à leurs enfants des possibilités. Elles racontaient leur divorce immédiat, le combat pour avoir la machine à laver et passer le permis. Ici, elles avaient décidé de s’habiller comme elles voulaient. Les enfants racontaient avec humour l’éducation qu’elles orientaient vers la poursuite d’études et la discipline, mais aussi vers le partage, l’amour et la tolérance. Face à moi, un couple de Super Nana qui s’étaient battu, à la force de leurs mains et de leurs âmes, pendant des années, jour et nuit pour offrir à leurs enfants la possibilité de pouvoir choisir. Elles me faisaient penser à ma maman, qui avait quitté son Maroc natal à 20 ans pour le Paris des années 80 et découvrir une autre vie, un nouveau pays et tout ce qu’il s’en suit.
Ces femmes sont mes héroïnes car elles bravent le quotidien avec la vision du lendemain. Les battantes ce sont elles. Ce sont celles qui se battent, mais pas vraiment pour elles. Elles portent les armes et protègent ce qu’elles aiment. Et c’est pour elles qu’aujourd’hui je me bats. Et c’est pour elles que demain, ils et elles se battront.
À toutes les mamans, à toutes les femmes.