Le but de Léa

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Histoires Jeunesse :
  • 11-14 ans (cycle 4)
  • 8-11 ans (cycle 3)
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  • Sport - Jeunesse
  • Vivre ensemble (cycle 3 & 4)
Léa n'aimait pas l'école car on y faisait trop de lecture en silence, trop de mathématiques et il y avait trop de devoirs à la maison. Mais surtout, Léa n'aimait pas l'école car elle détestait la récréation !  Il y en avait deux petites, le matin et l'après-midi, et une grande, le midi. Elle avait essayé d'en parler à ses parents :
— Non. Je ne veux pas aller à l'école ! J'aime pas les récréations !
 
Mais ses parents n'avaient pas compris. Ce jour-là, comme tous les matins, ils la déposèrent à l'école. Léa fit la grimace et fronça ses sourcils durant tout le trajet. Elle croisa les bras sur son torse. Elle refusa de répondre à sa mère qui lui demandait si elle avait bien pris toutes ses affaires pour l'école. 
 
Elle continuait de bouder au moment où sa mère ouvrit en grand les portes du coffre, qui s'ouvraient comme une fenêtre. Sa mère fit descendre la rampe en métal et attrapa les poignées du fauteuil roulant de Léa. Elle mit le fauteuil sur la rampe et appuya sur un bouton. La rampe descendit lentement en faisant des bips-bips-bips, pour poser doucement Léa sur le sol. Sa mère fit rouler le fauteuil jusqu'au trottoir en face de l'école. Tout le monde pouvait la voir et cela mit Léa en colère.
 
Devant elle, des garçons passaient sans la regarder.
— Hé ! On joue au foot à la récré ? demanda Pierre.
— Oui ! répondirent les autres. 
 
Un des garçons se retourna. Timidement, il s'éloigna de ses amis et s'approcha de Léa. Elle fit semblant de ne pas le voir.
— Salut Léa ! lança Thomas. 
— Salut, murmura Léa, en fixant le ballon de football que tenait Thomas.
 Le père de Thomas s'approcha d'eux.
— Alors, Léa, tu joues au foot pendant la récré, toi aussi ?
—  Je déteste la récré ! Je ne fais jamais rien pendant la récré ! s'écria Léa tout d'un coup, et elle s'éloigna le plus vite possible. 
 
Énervée, elle arriva à la rampe d'accès handicapé devant l'école. Il n'y avait que deux petites marches à monter pour les autres, mais elle, elle devait faire un long chemin en zigzag. La pente était dure à monter, ça lui faisait mal.
 — T'as besoin d'aide ? proposa Thomas.
Léa l'ignora et s'engagea dans la pente. Arrivée à mi-chemin, essoufflée, elle réalisa que ce matin, elle avait peut-être besoin d'aide. Découragée, elle tourna la tête vers Thomas et répondit à contrecœur :
— Oui, OK. 
 
Thomas lui confia son ballon de foot, qu'elle mit sur ses genoux, puis attrapa les poignées du fauteuil. 
Arrivés devant la porte de la salle de classe, elle tendit le ballon à Thomas. Il refusa gentiment.
— Non, garde-le. Tu me le rendras à la récré. Tu veux jouer au foot avec nous aujourd'hui ?
— OK, on verra, répondit Léa après un moment d'hésitation.
 
Alors que le maître expliquait comment faire des divisions, Léa regardait par la fenêtre. Elle pouvait voir les cages du terrain de foot, dessinées à la craie sur le béton de la cour. Elle se surprit à attendre la récréation avec impatience.  La cloche finit par retentir. Son cœur battait très fort. Et si les autres ne voulaient pas jouer avec elle ? Elle ne pouvait pas marcher, elle ne pouvait pas courir comme eux ! Comment allait-elle faire ?
— Tu viens ? 
C'était Thomas, qui avait l'air réjoui d'aller en récré. Devant sa bonne humeur, Léa se sentit rassurée et le suivit dehors. 
 
— Elle peut faire arbitre, dit Pierre, les bras croisés. Ou goal. Mais elle ne peut pas courir et taper dans le ballon.
— Elle pourrait pousser avec les roues peut-être !
— Ou alors, on lui donne un bâton !
— Ou alors, on joue avec les mains !
— Mais c'est plus du foot, alors, c'est du handball !
— J'ai vu une vidéo sur internet, dit Léa tout bas. Je peux jouer en utilisant les roues de mon fauteuil.
 Tous les garçons se tournèrent vers elle. Certains avaient l'air intéressés, d'autres avaient l'air de ne pas trop y croire.
— Je peux taper le ballon avec les côtés du fauteuil, les roues et les plaques pour les pieds.
 
Elle avança pour se rapprocher du ballon, et d'un coup brusque, fit tourner son fauteuil roulant sur lui-même. La roue avant tapa le ballon, qui fusa trop fort et atterrit près de la grille d'entrée de l'école. Certains des garçons avaient toujours l'air dubitatifs, d'autres, surpris, avaient envie de refaire un essai. 
Le ballon fut remis en jeu. Léa et Pierre s'en approchèrent au même moment. Pierre se prépara à tirer mais Léa fut plus rapide et frappa le ballon avec les plaques pour les pieds de son fauteuil. Cette fois-ci, le ballon finit droit dans les buts. Les garçons ouvrirent des yeux ronds. Léa savait qu'il s'agissait d'un coup de chance mais commençait à comprendre comment jouer. 
 
— Bien joué Léa ! Allez, on commence !
— C'est moi qui choisis les équipes !
— Non c'est moi !
 
Léa sentit son cœur battre plus fort dans sa poitrine. Thomas lui fit un clin d'œil amical. Mais alors que la partie battait son plein, la cloche sonna et le maître les rappela à l'intérieur. 
 
— C'est nul... grogna Pierre.
— Léa, tu gardes mon ballon jusqu'à la récré de midi ? demanda Thomas.
 
Léa récupéra le ballon en souriant. 
 
***
 
À la fin de la journée, ses parents furent étonnés de voir Léa si contente, alors qu'elle était si énervée le matin même ! Ils furent également surpris qu'elle veuille un ballon de football pour jouer à la récré, elle qui d'habitude détestait les récrés, et qu'elle pose toutes ces questions sur le handisport. 
 
Léa n'aimait toujours pas l'école, il y avait toujours trop de lecture, trop de mathématiques et trop de devoirs. Mais heureusement, il y avait les récréations.

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Image de Le but de Léa
Illustration : Mathilde Ernst