YUME

Une nuit, j'ai fait un rêve et je vais vous le raconter.
J'étais dans une ville, la nuit tout était gris à part les halos de lumières ternes et jaunes des lampadaires, la rue était bordée d'immeubles gris.
Je marchais dans la rue, quand soudain un homme à la trentaine m'accosta. Il avait une veste noire comme ses yeux et l'air hagard. Il me demanda de le suivre. Il m'emmena dans un gymnase. Et, chose étrange, ce lieu était rempli d'enfants en bas-âge. Il me conduisit dans un vestiaire qui s'avéra être une salle de chirurgie. Dans celle-ci, il y avait deux autres filles de mon âge qui semblaient aussi apeurées que moi.
Pour vous dire je le sentais mal, très mal. Quand l'homme demanda à un enfant de nous surveiller, le gosse le fit sans broncher. Je sentais la situation déraper. Je saisis ma chance et me précipitai vers la porte qu'il avait laissée ouverte mais le gamin s'accrocha à ma jambe m'empêchant de bouger. J'avais beau me débattre de toutes mes forces, il en appela d'autres qui vinrent lui prêter main forte. Je me retrouvai plaquée au sol par une montagne d'enfants.
A cet instant l'homme revint, me vit, et un malin sourire défigura son visage. Il s'approcha me disant que ça n'allait rien me faire et qu'après je serais mieux. Je voyais sa main se rapprocher de ma tête. Désespérée je donnai un coup à un enfant qui me lâcha entraînant les autres avec lui et je pus me relever. Je reculai vers le fond de la salle où étaient les deux filles. L'homme de son air dominant s'approcha de nous. Il toucha la tête des deux filles qui étaient terrifiées. Celles-ci se relâchèrent et devinrent inertes. L'homme repartit et leur demanda de me surveiller : Elles s'exécutèrent.
Dans ma tête tout se chamboulait et je me demandais comment c'était possible, comment avait-il fait pour que les filles lui obéissent au doigt et à l'œil? Était-ce au moment où il leur a touché la tête? Voyant que la porte était ouverte, je me précipitai, encore une fois, les filles me plaquèrent au sol et l'homme revint pile à cet instant.
Je me demandais, paniquée, ce qu'il allait me faire et comment il faisait pour savoir quand j'essayais de m'enfuir. Il dit aux filles de me relâcher puis me demanda de le suivre. Je savais que si je désobéissais il me ferait quelque chose, alors je le suivis, méfiante et prudente. L'homme ricana devant ma méfiance et me dit de me détendre car il n'allait rien me faire. Ce qui eut l'effet inverse de ce qu'il attendait.
Il m'emmena dans le gymnase et me montra un écran sur le mur : un radar. Il m'expliqua à l'aide de l'écran qu'il voulait toucher une partie précise de mon cerveau qui ferait que j'obéirai au moindre de ses ordres. Quand je lui demandai pourquoi il faisait ça, il me dit que les enfants étaient trop désobéissants. Mais il me dit aussi que cela permettrait de corriger mes défauts, ma surdité entre autres. Je serais comme les autres enfants et que ce serait mieux. Ce à quoi je répondis haut et fort que les enfants n'étaient pas vivants, qu'ils faisaient juste semblant de vivre. Que si c'était pour être comme eux, je resterais avec mes défauts.
Après avoir dit ça je m'enfuis. Je déboulais dans la rue toujours en pleine nuit et m'enfuis à toutes jambes.
Mais soudain prise d'une vague de peur à la vue de cet homme de malheur, je me mis à courir à en perdre haleine. Je m'arrêtai dans un vieux parc abandonné couvert de mousse et de lierre. Dans ce parc je remarquais à la lueur des lampadaires, sur le sol pavé, un revolver rose. Entendant la voix de l'homme et comprenant qu'il était encore à ma poursuite je m'emparais de l'arme et recommençais à m'enfuir. Il me rattrapa et me prit au poignet. Il me dit que si je le suivais il ne m'arriverait rien. De peur je le suivis, docile, l'arme toujours cachée dans ma poche.
Il m'a conduite dans un appartement. Je me retrouvais dans une pièce avec un unique néon au plafond. L'homme était sur une chaise et moi j'étais à ses pieds.
Soudain, il ouvrit une porte et me jeta dans la pièce. Je ne voyais rien, l'obscurité était totale. Une bougie s'alluma et je vis un autre homme les jambes croisées assit sur une chaise. Il avait un chapeau blanc, un foulard rouge autour du cou et un revolver dans la main. C'était lui qui avait allumé la bougie. Il y avait deux autres hommes qui s'apparentaient à ses subordonnés. Eux aussi étaient armés. Ils ne semblaient pas avoir remarqué ma présence. Sans doute mue par un instinct intérieur, je me ruais vers eux et les pointais de mon arme. Mais le chef me désarma d'un coup de pied. Je tombai à genoux, et l'implorai de me laisser en vie. Il me répondit qu'il ne me tuerait pas si je restais à ses pieds. Je restais donc là le canon de son revolver pointé à deux centimètres de ma tête.
La porte grinça et s'ouvrit doucement, mon poursuiveur était toujours là, assis sur sa chaise. Ne pouvant y croire, je restais là sans rien faire, terrorisée. Qu'avait-il fait ? M'avait-il plongée dans une illusion ? Tellement de questions se bousculaient dans ma tête. Je bégayais, n'arrivant pas à prononcer une seule phrase entière et correcte. Il s'avança, c'est seulement à ce moment-là que je réalisai que j'étais dans un salon donnant sur une cuisine. L'homme approchait, il disait vouloir me toucher le cerveau. Au fur et à mesure qu'il avançait, je lui jetais tout ce qui me passait sous la main, même une chaise. Il évitait mes projectiles, ça me mettait en rogne. Il protesta que j'allais casser tous les couverts et que j'aurais pu le blesser. Ce à quoi je répondis que je m'en foutais, que tant mieux s'il avait été blessé et que je le détestais plus que tout au monde. En entendant ma réponse, il s'écroula sur le canapé comme s'il venait de se prendre une flèche en plein cœur. La main sur son torse, il paraissait abasourdi.
Il me dit qu'il avait fait tout ça pour moi, qu'il était désolé s'il m'avait offensé. Je partis de la pièce en lui disant que j'allais appeler la police, que j'étais obligée. Puis je m'éveillais, ce n'était qu'un rêve ou Yume.
 
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