Vocation manquée

Moi je suis différent. Je l'ai toujours été. Pour ma mère, c'est comme si j'étais un extraterrestre. Depuis la mort de mon père , peu aprés ma naissance , on vivait seul ensemble . elle étais une femme brave , ferme dans ces décisions , mais aussi très sévère envers moi. On avait toujours des contrariétés. Jamais on était d'accord. C'est comme si elle n'était pas ma mère. Elle se demandait pourquoi j'étais indocile ? Pourquoi je ne suivais pas ces conseils ? Peut être qu'on avait pas la même vision des choses . j'étais indocile parce que j'étais un enfant différent , dévoré de passion . j'avais un goût irresistible pour le football . selon moi rien ne m'empêcherait d'avoir une carrière extraordinaire , de devenir un jour professionnel. J'avais le talent , le physique et tout le monde l'admettait à l'exception de ma mère pour qui je me nourrissais de chimère.

Je connaissais par cœur tous les techniques de mes idoles. Tous les jours devant la case de ma mère , quand je reproduisais leurs gestes , elle me tabassait. Elle s'y opposait en confisquant mes ballons et je ne savais pas pourquoi? Quand je parlais de foot , elle jetait sur moi un regard indifférent. Tout ce qu'elle avait à me dire c'était de rayonner sur mes pairs à l'instar de mon père. En tant qu' enfant je ne savais pas ce qu'elle disait par là. En guise de réponse, je lui disais qu'avec le football je pouvais le faire. Et je crois même que j'avais commencé à le faire, car mon nom était prononcé partout. J'étais devenu la star de ma génération. Mieux que personne je savais dribbler , marquer de magnifiques buts. Malgré tout , je perdais de plus en plus les chances de devenir professionnel à cause de ma mère qui faisait tout pour me barrer la route. Je me demandais pourquoi elle était si sévère , si injuste à mon égard.

Le même jour où je devais intégrer une école de formation de football , elle m'emmena dans une grande école coranique située au nord du sénégal en vue de m'initier aux enseignements religieux. L'école se trouvait au milieu de la forêt. La distance qui la reliait à la ville la plus proche était de douze kilométres. On la marchait chaque jour pour aller mendier de quoi manger. Ma mère a fait esprès de m'éloigner afin de chasser en moi l'idée de devenir footballeur. La vie était devenue dûre ,mais je n'y suis pas resté longtemps. Durant mon court séjour à l'école , j'incitais les autres élèves à fuir les cours pour aller jouer. Fatigué de me punir, le maître m'exclua de l'école. Maintenant je devais retouner chez ma mère, mais de crainte qu'elle me frappât ,j'étais resté deux jours dans la rue sans manger. À peine ces deux jours écoulés , la dureté m'obligea à y retourner. À mon arrivée , elle me regarda d'un mauvais œil tout en restant bouche bée. Elle ne l'aurait jamais cru si elle ne m'avait pas vu. C'est si j'étais un extraterrestre. Elle me traita d'enfant maudit et cela me poussa à lui poser la question de savoir pourquoi elle se comportait ainsi avec moi ? Pourquoi cette haine?

Cette question l'a tourmenté au point de la faire pleurer et j'étais surpris de la voir ainsi. Elle se tut et soupira . peut être les mots la manquaient. La silence fut interrompue par sa voix. Elle dit, en me regardant droit aux yeux.
- comment une mère puisse detester son propre fils? Je ne le sais pas , mais moi je t'aime . je ne t'ai jamais detesté. Écoute moi mon fils , je vais te donner les raisons de mon comportement. Ton père était un MOLLAH (titre donné aux prêtres musulmans et à toutes personne exerçant des fonctions juridiques et religieuses dans le monde musulman) et tu es son seul descendant. Il rêvait pour toi une situation semblable à la sienne . il y tenait beaucoup . il m'avait supplier avant sa mort de tout faire pour que tu deviennes Mollah comme lui et je l'avais promis ça. C'est pourquoi j'estimais poursuivre ton éducation selon son vœux. Je crois que j'ai tenu parole. J'ai en vain tout fait mais j'ai pas réussi . maintenant c'est à toi de choisir .
Touché par ce discours émouvant et inattendu de ma mère , j'étais resté sans voix.puis elle ajouta.
- mon fils, je vois que tu es passionné mais fait très attention car la passion est un poison qui trompe le mental et le cœur.
- Mais maman, repliquai je , j'ai entendu dire que nous devons laisser notre passion nous mener à notre profession.

Elle se sentit convaincue et me demanda de la pardonner si elle était injuste . c'était la première fois qu'elle était d'accord avec moi au sujet de mon avenir. Elle me prit dans ses bras et me dit d'un ton triste.
- Tu as raison mon fils je n'aurais pas dû te forcer forcer à prendre une chemin que tu ne voulais pas.
Elle regrettait tout et décida d'aimer à poursuivre mon carrière, mais c'était trop tard.

L'harmonie commençait à régner dans notre maison. On était devenu complices pour une prémière fois dans la vie et l'espoir de devenir professionnel resurgit en moi.
Quelques jours plus tard , ma mère tomba malade . c'est durant sa maladie que j'ai compris qu'elle m'aimait, car elle ne cessait de m'embrasser en priant Dieu de m'accorder une réussite totale,ce que je n'aurais jamais. Sa mort m'arracha tout ambition et je devenais de plus en plus orphelin. Mon enfance a été déterminé par le fait que j'ai eu une mère qui ne comprenait pas le véritable sens de la vocation. Aujourd'hui je suis devenu un homme sans valeur, méprisé . pourtant j'avais un rêve que je voulais réaliser , mais tout a été anéanti . Par ma mère ou mon père qui l'a donné l'ordre de m'élever ainsi.