Une recherche d'appartenance

Moi je suis différente. Je l'ai toujours été. Pour ma mère, c'est comme si j'étais une extra-terrestre. Dans le village de Winxberg, peu de liens amicaux, rien de spécial, mais on ne connait pas de teint foncé. C'était le cas jusqu'au jour de ma naissance. Ma mère était paralysée. Elle n'était pas raciste, dans notre monde le racisme n'existe pas non parce qu'on est éduqué et civilisé, non parce qu'on voit l'homme en tant qu'esprit, cœur et cerveau, en tant que frère par humanité, mais parce que l'autre différent n'existait pas.
Comment me sauver des questions intrusives des gens ? Mes parents cherchent à me cacher et m'admirent de tout coté. Je venais d'entrer à la prison du temps ne portant qu'un sourire et une peau brune. Peut-être que là où j'étais, j'ai décidé d'être distinguée et belle, je ne me rappelle que du fait que j'aime cette couleur. L'amour existe avant mon arrivée et avec le temps ma mère tombe amoureuse de moi. Ma mère avait ses défauts, elle était accablée par les exigences de la société. Personnellement, je réussis à dépasser les regards des habitants de Winxberg et leurs chuchotements. Je désire courir dans les prairies, prendre un bain dans la rivière, me noyer dans la boue. Ma mère me regarde parfois avec étonnement et horreur.
Quand j'essaye de me rapprocher des ados, ils s'éloignent. Alors je trouve les regards de ma mère plus tendres, au moins ils ne durent que quelques secondes et ensuite elle oublie et me caresse. Les gens jetaient beaucoup de commentaires qui me blessaient. Jour après jour, je devenais plus sérieuse et ordonnée, mais je conservais le courage de faire ce que je juge juste et bon. A l'Université de Winxberg, le même traitement persiste. Cependant, l'habitude apprend l'individu des leçons cassantes mais nécessaires, elle ajoute des épines à la rose pour être prête à confronter toute agression. J'étudiais la génie mécanique et ma mère n'était pas satisfaite, croiyant que cette profession est destinée aux garçons. En effet, c'est sa propre boîte de sécurité, elle n'ose pas la briser pour rencontrer la lumière du ciel et ses tempêtes soudaines.
Par contre, ma liberté est sacrée. C'est pourquoi ma mère me trouve extra-terrestre. La liberté est noble provenant d'un autre monde. Elle se traduit lorsque j'exprime mes opinions sans peur, dans mes révolutions contre l'intolérance et toute forme de mépris, lorsque je fais la course avec le vent et je chante avec le rossignol. Pourtant, parfois mon cœur hurle d'un désir fou de détruire les sources et formes d'injustice. Je reviens à moi-même pour déployer mes ailes, l'important est de prouver que la passion est invincible et que le rêve existe pour se réaliser. Chacun était un enfant; les enfants sont des anges, certains étouffent leur ange entre l'adolescence et l'âge adulte, d'autres l'interpellent au besoin, peu d'entre eux le protègent et le montrent.
Un jour, avant de quitter la fac, Kamal un jeune garçon me demande la possibilité de se rencontrer pour un projet concernant nos études. Une sensation inexplicable me pousse à accepter sans réfléchir. Le lendemain, il présente son idée de créer à la manière de l'éolienne, qui transforme la force du vent en électricité, une machine qui transforme l'eau de mer en vapeur spontanément. Je continue en proposant que la vapeur dégagée s'utilise comme fluide énergétique pour chauffer ou produire de l'électricité. Cette innovation offre de nombreux avantages. Sans repos, je m'attache à faire les travaux nécessaires. Il me compare à une étoile filante. A Winxberg on ne voit qu'à travers la superficie des yeux. Donc c'est ravissant d'entendre sa reconnaissance de mon lourd travail.
Un soir, il m'invite pour dîner chez eux, un dur silence règne comme si cette famille rencontre une momie fuyant l'Egypte. Pour eux, j'étais une fille étrangère brune exclue de la société. Seul le père de Kamal interrompt ce silence étouffant et ouvre une conversation. Alors que sa mère me demande d'un ton ironique la source de ma confiance me considérant inférieure aux autres. Je répond que seul le faible se cache derrière l'orgueil comme un lâche. Son sourire ironique s'efface, elle me perce d'un regard cruel.
La découverte d'un amour né récemment dans le cœur de Kamal demeure une aventure. Malgré les obstacles, l'amour étend ses racines comme le cèdre puissant qui s'attache au sol, majestueux il aspire au paradis. Le démon préparait les laves de son volcan visant l'avenir de notre amour, mais on possédait le présent. Chaque jour, on améliorait le projet. Ma mère remarque un changement. Elle pense que je suis tombée malade et elle a raison l'amour est une maladie incurable. Elle me demande si quelqu'un me dérange, elle a raison mais en retard, toute ma vie j'étais écrasée, blessée et elle n'a jamais mis fin aux balles verbales. Elle me demande si j'ai besoin d'un médecin, j'ai besoin d'un gros câlin pour me protéger de l'inconnu, pour oublier le passé immuable. Malgré tout, je ne réponds pas car je suis robuste capable de tout dans les limites du possible.
Le projet de la machine qui transforme l'eau de mer en vapeur d'eau pouvant être source d'électricité à son tour, s'achève. L'élément perturbant notre relation se déclenche lorsqu'il raconte à sa famille ce que nous avons préparé en ne parlant qu'à propos de lui-même. La lâcheté et le manque de confiance en soi dominent sa pensée. Il n'accepte pas qu'un tel travail se réfère à moi, il craint avouer mes capacités, il frissonne devant la vérité qui peut tout éclairer. Mes sentiments étaient partagés entre la surprise, la souffrance et le dégoût. La trahison de ma personne et le viol de mes droits résultent d'un niveau méprisable qui n'ordonne ni une attitude basée sur la conscience, ni un respect de soi, ni un courage qui reconnait l'existence, la liberté et les droits de l'autre. Kamal abandonne ce qui caractérise l'homme des autres créatures. Bref, il est dévoilé, j'étais dans le noir et maintenant je vois bien. Il me prenait d'un faible moineau, ne remarquant pas que j'avais l'aspect d'un aigle libre, qui se promène sur le sable mais ses ailes trainaient derrière lui l'emportant quand il décide vers les hauteurs.
Je ne pouvais supporter le silence, je raconte toute l'histoire à ma mère qui me demande étonnée si vraiment j'avais participé à cette innovation. Maman, aide-moi à enlever le couteau de mon dos, ne l'enfonce pas! Dès lors, je m'enfuis de la maison. Maman me cherche, répète qu'elle ignore la cause de ma fuite, que je suis loin d'elle psychiquement, que j'appartiens à un autre monde et qu'elle n'arrive pas à me comprendre. Je passais mes jours dans la prairie, où des animaux fidèles, ne portant aucun danger vivaient. Ils ne trahissent personne, seulement ils se défendent. L'homme peut être pire qu'un animal terrifiant. Je regarde un jour de loin Kamal, quelques professeurs, le maire de Winxberg et d'autres habitants qui font le premier essai sur ma machine, qui avec réussite transforme l'eau de mer en vapeur produisant une énergie. En effet, Winxberg se situait sur une île présentant un risque de disparition à cause du réchauffement climatique et de l'élévation du niveau d'eau et cette machine pourra sauver l'île une fois évoluée et utilisée dans une plus grande dimension. Mes efforts sauvaient les habitants de Winxberg qui m'ont jeté dans un monde isolé. Une planète lointaine a témoigné tout cela, au nom de la justice elle constate que je ne mérite pas Winxberg ni ses citoyens me méritent, elle m'a tiré à elle et je me sens maintenant chez moi. Ma mère pense que je ressemble au soleil parce qu'il est timide et discret lors du lever, puissant à midi, souriant et diffusant la tristesse lors du coucher, invisible lors des préoccupations du jour, mais très précieux lorsque la peur et le froid surgissent la nuit. Il ne reste plus rien m'appartenant sur cette terre à part de cette histoire de sentiments et d'appartenance résumée en quelques mots, je suis une extra-terrestre.