Que devient le rêveur quand le rêve est fini ?

Moi je suis différent. Je l'ai toujours été. Pour ma mère, c'est comme si j'étais un extra-terrestre. Peut-être que jadis, j'étais un peu têtu. Mais à l'âge de 18 ans, j'étais encore très jeune et je nourrissais sans cesse le souhait de tout vivre de ma propre manière.

Parfois, je me fais passer plutôt pour un rêveur, et je voudrais décrocher la lune dans mon propre univers.

« Que devient le rêveur quand le rêve est fini ? ». C'est la première chose qui me revient à l'esprit quand je pense à elle.

Les yeux fermés, je me rappelle des jours d'été en France il y a tant d'années. Tout commença peut-être à ce moment-là : le jour où je la rencontrai par hasard à la plage dont je ne peux pas me souvenir du nom. Alina, mes beaux rêves, je ne cesse de penser à toi.

Chapeau de paille, lunettes de soleil, chemise blanche, je regardai Raphaël avoir hâte d'aller vers moi.
« Tiens, on va à la plage, tu viens ? Il fait beau aujourd'hui ! »
« Alina, elle vient ? »
Alina, elle s'asseyait toujours à côté de moi en classe. Je l'aimais, elle était si belle, mais j'avais été terriblement timide pour lui dire bonjour au début.
« Elle nous attend déjà dehors ! »
« Ça y est, un instant. »
Ça faisait 8 ans depuis ma dernière fois à la plage. Je brûlai de planter les pieds dans le sable, de me plonger sous les flots de la mer.
Il faisait beau ce jour-là où nous allâmes ensemble vers la mer pour la toute première fois. Nicolas, Louise et Pauline y vinrent aussi. Nous nous prélassions tous en maillot de bain, tuant le temps jusqu'au souper chez Pauline. Elle nous avait invités à dîner chez elle, elle dit qu'il y avait une grande arrière-cour derrière sa maison, que nous pourrions y passer une nuit blanche.

Alina me dit qu'elle venait, et me demanda si je viendrais là. Elle me posait toujours la même question chaque fois que nous avions la chance de sortir ensemble. D'une manière presque irréfléchie, je lui dis oui. Mais que puis-je dire plus que oui ?

Nicolas était doué en cuisine, il prépara un repas si copieux pour nous. Il y avait trop de plats pour m'en souvenir. Il arrive que nous restions tous éveillés toute la nuit, bavardant beaucoup, c'est comme si nous partagions toute notre vie.

Le soir, j'aime toujours ce qui se passe le soir. Il me semble que nous étions tous soûlards après le repas de cette nuit-là. C'était tellement amusant. Tout le monde s'endormait en empiétant l'un sur l'autre. Mais moi, je ne pus pas dormir.

Je décidai de me rendre tout seul vers la plage, changeant un peu d'air pour avoir bu un peu trop. Je croyais qu'Alina se coucha pour un moment, je ne pensais qu'à elle. En réalité, je ne le voulais pas. Et quand je me levai soudain, Alina était là. Elle voulait prendre l'air.

Elle me conduisit à la plage. Moi, qui étais heureux et timide en privé, n'aimais rien que de profiter des moments avec elle : au bord de la mer, sous la lune, en plein vent.

Je lui demandai ce qu'elle ferait cet été-là. Elle écoutait de la musique. Lisait. Sortait parfois le soir. Cuisinait au repos.
Je dis que je sortais aussi parfois le soir. Comme nous étions les deux étrangers là-bas, la sortie nocturne se déroula plus fréquemment. Le long de la promenade, elle s'arrêta en me murmurant : « Et si on allait à Paris ? ».

Paris, quoi de mieux que Paris la nuit ? J'allais y passer mes vacances d'été, avec Alina, je n'en revenais pas.
« Nous deux, t'en es sûre ? », ris-je un peu. Dans ma tête, je lui suppliais de laisser passer ma question stupide. J'aurais dû sauter de joie.
Rouge de honte, elle leva les yeux pour me voir en souriant. Elle me donna le signe ou je m'en trompais ? Mais le sourire, c'était la réponse de tout ça.

Paris, la nuit, la tour Eiffel, les sorties sont exactement ce à quoi je pense. J'en rêve depuis mon tout petit âge. À ce moment-là, j'étais comme gamin dont les yeux s'illuminaient au surgissement des bonbons !

Paris nous accueillit par la pluie. Devant nous surgit la tour Eiffel ressortant sur l'aube, l'image la plus romantique que je voie pendant mon séjour en France. Alina avait l'air épuisée après le vol. Elle s'endormait en s'appuyant sur mon épaule. Je n'osais pas bouger de peur de perturber sa somnolence.

Il pleuvait encore dehors. Nous arrivâmes à l'hôtel vers midi, un peu fatigués. J'avais réservé deux chambres car peut-être qu'Alina se sentirait inconfortable. Après la sustentation, nous décidâmes de nous reposer jusqu'au crépuscule.

J'adore me balader dans la ville, parfois nous nous assîmes au bord de la Seine en bavardant. Alina aime prendre des photos, elle emporta même une petite caméra. Et moi, je fus son excellent photographe.
Le soir, je ne me souviens pas exactement quel jour j'étais. Ce soir-là, nous nous amusâmes dans un public-house près de notre position. Je n'aime pas trop boire et Alina non plus. Écouter de la musique, profiter de l'ambiance et converser un peu en goûtant du vin, ça nous allait mieux.

Soudain, Alina me confia qu'elle avait beaucoup d'estime pour moi, d'une façon énergique. Elle me regarda dans les yeux en révélant ses secrets. Je ne savais pas quoi faire. Je lui dis qu'elle avait trop bu. Elle changea le ton en me criant : « Tu ne me comprends pas ! ».
Mais pourquoi étais-je si idiot devant elle ? Je n'osais pas lui dire la vérité, que je l'aimais au coup de foudre.

Elle me dit qu'elle voudrait faire quelque chose plus folle. Je ne la voyais jamais comme ça, la facon dont elle me regardait était... très différente. Elle ne m'expliquera rien mais me conduisit dans la rue en me serrant la main.

Il était 2 heures du matin. Personne n'était là sauf nous. Nous pédalâmes dans tous les coins de Paris. Elle se mit à chanter derrière moi, puis elle me demanda d'arrêter. Elle continua à boire la bouteille de vin que nous avions achetée tout à l'heure. Je pus la voir pleurer. J'aurais dû l'embrasser immédiatement en lui tout confiant mais je restais immobile. J'avais peur qu'elle tombe puisqu'elle était comme ivre-mort.

Je ne comprenais à rien. J'essayais de le faire mais brusquement, elle commença à se rendre vers moi, en état d'ivresse. Elle a dit en pleurant comme si elle était désespéré :

« Que devient le rêveur quand le rêve est fini ? ».