Ma bonne étoile

E. R

Assise sur le rebord de ma fenêtre, je contemple les étoiles qui scintillent dans le ciel si sombre. Un frisson me parcourt pendant que le vent doux et frais me frôle, me caresse le visage. J'aime m'asseoir ici et regarder le ciel. Il est beau à chaque moment de la journée. Mais le soir, il est magnifique. J'aime tant profiter de la vue, elle me réconforte. J'aime le calme apaisant de la nuit. Ça a toujours été le cas. 
Je regarde la lune, ce soir, elle est pleine et quelques étoiles l'accompagnent. Je descends du rebord de ma fenêtre et referme celle-ci une fois dans ma chambre. Je remarque que mon gilet préféré est sur mon bureau alors que j'étais persuadée que je l'avais laissé dans la cuisine. Cela m'intrigue et je souris en pensant au fait que ma mère me dirait sûrement que je regarde trop de séries policières. Par la suite, je termine mes devoirs et je prends ma douche puis me brosse les dents. Ma mère me souhaite une bonne nuit et c'est dans ces conditions que je pars me coucher. 
Cette nuit là, je fais un cauchemar. Je me réveille en sueur. Je suis perdue puis je me rappelle où je suis. J'essaie de me rendormir, mais en vain. Au bout de quelques minutes, je décide de descendre et de me servir un verre d'eau fraîche. Il doit être environ trois heures du matin. 
Un gros bruit me saisit dans un écho sonore. Je sursaute. Je crois d'abord que c'est un objet en verre qui a éclaté mais je suis dans la cuisine et mon verre est toujours dans ma main. Je me retourne rapidement, désormais sur mes gardes. Mon rythme cardiaque s'accélère en apercevant qu'aucun bout de verre, ni de quoi que ce soit d'ailleurs, ne gît au sol. 
Intriguée, je vérifie les alentours puis je poursuis ma quête jusqu'au salon. L'inquiétude me sert les tripes. Je ne constate aucun débris. 
Mon stress est justifié puisque je sens deux grandes et larges mains soulever mon corps tout frêle. Je hurle, je hurle si fort jusqu'à m'en époumoner. Je demande à ce qu'on me lâche. Une des deux mains vient s'abattre sur ma bouche atténuant ainsi les sons que je produis. Mon sang se glace lorsque qu'on me murmure un : 
« Ferme-la ou tu verras ». 
Des larmes de terreur coulent sans même que je ne leur ai donné l'autorisation. Sa menace me glace le sang. Je repense soudainement à ma mère. Dort-elle encore ? A-t-elle entendu mes cris tranchants ? Mais une question tourne sans arrêt dans mon esprit : Où est-elle ? C'est alors que j'entends des légers bruits de pas au niveau des escaliers.
Ma vue brouillée de larmes arrive quand même à discerner la silhouette de ma chère maman. Elle hurle mon prénom tandis qu'elle se rue sur mon agresseur. Celui-ci, surpris, ne réagit pas immédiatement ce qui me laisse le temps de m'échapper de sa prise. Ma mère se relève aussi vite que l'éclair et me tend sa main que je saisis. J'ai eu le temps de voir la frayeur dans ses yeux juste avant de partir dans une course folle. 
Prises toutes deux d'un élan de courage, nous nous précipitons sur la porte d'entrée que nous ouvrons. Nous nous élançons à l'extérieur. 
Brusquement, la fraîcheur de la nuit me frappe. Il vente. Je me remémore quand j'étais perchée sur le rebord de ma fenêtre. Je repense à la beauté de la nuit étoilée. Au bruit quasi inexistant qui flottait dans l'air. 
Mes jambes avancent toutes seules. Je me retourne et je vois que la personne nous suit. Il nous suit. C'est un homme, plutôt grand, et il court. Il est vêtu de noir et il porte une cagoule qui masque son visage presque dans son entièreté. Une capuche est rabattue sur sa tête, il est méconnaissable. 
« Qu'est-ce que tu fais ? s'exclame ma mère. On n'a pas le temps là ! »
Je me retourne, désormais dans le bon sens de la course. 
« Désolée ». 
Soudain, j'accélère. Nous allions entrer dans une forêt que je connais par cœur. J'y ai passé un nombre d'heures incalculables.
J'accélère encore plus ma course et je prends un chemin étroit à ma droite. Ma mère me suit, toujours ma main dans la sienne. Je sais qu'elle a confiance en moi, je le sens, mais surtout, je l'espère. Nous zigzaguons à travers les arbres, à bout de souffle. Je n'entends plus les pas précipités de l'homme derrière nous. Je me retourne donc et vois sa silhouette s'éloigner de plus en plus jusqu'à ne plus la voir. Un cri de rage résonne à travers les bois, je frissonne tout en sachant qui l'a poussé. 
Ma mère et moi ralentissons. Nous nous arrêtons pour la première fois depuis le début de cette course. Inconsciemment nos mains se délient et nos regards se croisent. Des larmes sont nichées au bord de ses yeux. Je peux y lire une grande inquiétude.
« Je t'aime si fort ma chérie. Je ferais tout pour te protéger, je te le promets sur ma vie, » me susurre ma mère dont la voix s'effondre à la fin de ses mots. 
Mon cœur se réchauffe et je ressers mon étreinte autour d'elle. Je sens que mes joues sont humides et je comprends que je suis en train de pleurer. Je me détache lentement d'elle et essuie mon visage du revers de la main tout en affichant un mince sourire pour tenter de rassurer ma mère lorsque qu'elle me voit dans cet état. 
Nous avons encore marché longtemps. Je tentais tant bien que mal de nous sortir de cette forêt. L'angoisse ne nous a absolument pas quittée. Des brindilles craquellent sous nos pieds malgré tous les efforts que nous fournissons pour faire le moins de bruit possible. Nous décidons de nous cacher en attendant le lever du soleil. Je suis adossée contre un tronc d'arbre et je laisse un soupir m'échapper. Mes pieds me font souffrir et sont recouverts de terre. Mon regard dévie vers le ciel noir. Je contemple les étoiles et la lune. Pendant que je me perds dans la profondeur de l'univers, une étoile filante passe. 
Je ferme les yeux avec force et souhaite « faites qu'on s'en sorte saines et sauves ». 
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