— Au diable la besace ! s'écria le vieillard.
— Le diable a bien souci de votre besace qui ne renferme que du plomb, de la poudre et du tabac, murmura le jeune homme.
— Le diable est bon enfant, répliqua maître Schwartz.
— Il n'accepterait la besace qu'en attendant le besacier. Vous êtes sans doute un homme de poids, maître Schwartz ; mais le diable préférerait, je pense, le maire de Saint-Loup et le juge Pfeiffer.
— Que Dieu leur donne paix en l'autre monde, après la guerre qu'ils nous font en celui-ci, soupira le vieux chasseur. Quatre francs d'amende pour le meurtre d'un chamois, l'adresse est noblement récompensée !
— Ne pleurez pas, maître, il n'y aura pas d'amende aujourd'hui ; je ne vois pas même un oiseau à qui envoyer un grain de plomb. Que ne suis-je encore cousant mes souliers près de mon feu de tourbe, au lieu de flairer sur ces montagnes les trente-deux vents !
— Modère-toi, mon garçon, et d'apprenti cordonnier tu deviendras maître bottier à Lausanne ou à Genève. J'ai été, moi, pendant sept ans, rempailleur de chaises ; et que de tribulations pendant sept ans ! Mais, à l'exemple de Job, j'ai offert ma patience au Seigneur, et me voilà sacristain de l'église de Saint-Loup.
— Eh bien ! je vous le demande, monsieur le sacristain, si vous ne savez manier que la hallebarde, comment voulez-vous abattre un chamois ?
Maître Schwartz tousse pour ne point répondre, et, le corps penché en avant, il gravit le sentier qui se dessine à peine devant ses pas ; le jeune homme, moitié murmurant, moitié riant, le suit, son fusil sous le bras, et les mains dans des gants de peau d'ours.
Cependant la neige tombe épaisse et glacée ; les eaux du lac bourdonnent ; et Genève apparaît au loin, avec ses clochers, comme une nuée de corbeaux pesants qui volent à travers les brouillards.
Tout à coup maître Schwartz s'arrête et arme sa carabine. II a aperçu un troupeau de daims qui sommeillent sans méfiance, accroupis, le ventre dans la neige.
— Un moment, lui crie son compagnon ; l'avalanche a bougé.
Il est trop tard. La détonation frappe d'épouvante le troupeau de daims ; tous s'élancent et fuient. Le plus grand, dont le cou est percé d'une balle, hésite, trébuche ; et l'avalanche, qui se précipite en roulant, l'emporte avec elle dans le lac.
— Quel malheur ! dit le vieillard.
— Au contraire ; nous avons bien du bonheur, dit le jeune homme, en descendant dans le sentier.
— Le diable a bien souci de votre besace qui ne renferme que du plomb, de la poudre et du tabac, murmura le jeune homme.
— Le diable est bon enfant, répliqua maître Schwartz.
— Il n'accepterait la besace qu'en attendant le besacier. Vous êtes sans doute un homme de poids, maître Schwartz ; mais le diable préférerait, je pense, le maire de Saint-Loup et le juge Pfeiffer.
— Que Dieu leur donne paix en l'autre monde, après la guerre qu'ils nous font en celui-ci, soupira le vieux chasseur. Quatre francs d'amende pour le meurtre d'un chamois, l'adresse est noblement récompensée !
— Ne pleurez pas, maître, il n'y aura pas d'amende aujourd'hui ; je ne vois pas même un oiseau à qui envoyer un grain de plomb. Que ne suis-je encore cousant mes souliers près de mon feu de tourbe, au lieu de flairer sur ces montagnes les trente-deux vents !
— Modère-toi, mon garçon, et d'apprenti cordonnier tu deviendras maître bottier à Lausanne ou à Genève. J'ai été, moi, pendant sept ans, rempailleur de chaises ; et que de tribulations pendant sept ans ! Mais, à l'exemple de Job, j'ai offert ma patience au Seigneur, et me voilà sacristain de l'église de Saint-Loup.
— Eh bien ! je vous le demande, monsieur le sacristain, si vous ne savez manier que la hallebarde, comment voulez-vous abattre un chamois ?
Maître Schwartz tousse pour ne point répondre, et, le corps penché en avant, il gravit le sentier qui se dessine à peine devant ses pas ; le jeune homme, moitié murmurant, moitié riant, le suit, son fusil sous le bras, et les mains dans des gants de peau d'ours.
Cependant la neige tombe épaisse et glacée ; les eaux du lac bourdonnent ; et Genève apparaît au loin, avec ses clochers, comme une nuée de corbeaux pesants qui volent à travers les brouillards.
Tout à coup maître Schwartz s'arrête et arme sa carabine. II a aperçu un troupeau de daims qui sommeillent sans méfiance, accroupis, le ventre dans la neige.
— Un moment, lui crie son compagnon ; l'avalanche a bougé.
Il est trop tard. La détonation frappe d'épouvante le troupeau de daims ; tous s'élancent et fuient. Le plus grand, dont le cou est percé d'une balle, hésite, trébuche ; et l'avalanche, qui se précipite en roulant, l'emporte avec elle dans le lac.
— Quel malheur ! dit le vieillard.
— Au contraire ; nous avons bien du bonheur, dit le jeune homme, en descendant dans le sentier.