Le Mont-Blanc

Au pied des Périades, le glacier, comme on peut le voir du Montanvert, se divise en deux branches, dont l'une remonte vers l'est et prend le nom de glacier de Léchaud, et l'autre se dirige derrière les aiguilles de Chamonix vers le mont Blanc du Tacul, et s'appelle le glacier du Géant. Une troisième branche, nommée le glacier du Talifre, s'étale sur les pentes de l'aiguille Verte.

C'est au milieu du Talilre que s'épanouit cette oasis des glaciers qu'on désigne sous le nom de Jardin, espèce de corbeille des fleurs alpestres, qui trouvent là une pincée de terre végétale, un rayon de soleil et une ceinture de pierres les isolant des glaces environnantes ; mais monter jusqu'au Jardin est une excursion assez longue, fatigante et même dangereuse, qui nécessite de coucher au chalet du Montanvert. Nous nous contentâmes de descendre au bord de la Mer de glace dont la moraine, composée de cailloux, de pierres et de blocs de toute forme et de toute grosseur rejetés comme les varechs et les galets sur la plage de l'Océan, rend les approches assez difficiles. Le glacier a baissé depuis quelques années de plusieurs mètres, comme le prouvent l'étiage dessiné sur le flanc des rochers et la moraine qui reste comme suspendue en l'air.

La troupe, chaussée de ses brodequins à clous, s'appuyant sur ses bâtons ferrés, précédée de ses guides, s'avança jusqu'au milieu à peu près du glacier, regardant avec curiosité au fond des crevasses, écoutant le murmure des eaux intérieures et cherchant à entendre cette musique du glacier dont parle l'ascensionniste anglais John Bail. Elle aurait pu traverser la Mer de glace entièrement, gagner sur l'autre rive le pâturage du Plan-de-l'Aiguille et revenir à Chamonix par le Chapeau ; mais elle ne franchit pas la veine blanche, la veine noire étant beaucoup plus tourmentée et revint au rivage où le dîner l'attendait.