« Moi je suis différent. Je l'ai toujours été. Pour ma mère, c'est comme si j'étais un extra-terrestre ». Pendant que, les enfants de mon âge étaient affairés aux jeux à longueur de journée, j'étais assis là, sous le grand arbre du village. Les pieds croisés, le regard tourné vers le coucher du soleil. J'étais triste, car comme lui, il me sembla que cette boule de feu s'en était allée trop tôt. Mais, elle reviendra, le jour d'après, après l'aurore. Je serai là espérant que lui aussi reviendra.
L'heure était venue pour moi de m'en aller de ce , car les vieux du village commencèrent à se grouper pour leur traditionnelle causerie. C'était sous cet arbre que se prenaient toutes les décisions importantes du village. Cet arbre mythique pour notre tribu. Nul n'avait le droit de couper une branche de cet arbre. Les anciens du village y veillaient, scrupuleusement.
Mes enfants, cet arbre est le symbole de notre tribu. Vous devez vos vis à cet arbre. Vous ne serez pas vivants si cet arbre avait été abattu. Le regard fixé sur Père Ndefo, les enfants suivaient attentivement l'histoire de cet arbre à qui ils doivent leur existence.
Un soir, alors que nos parents étaient réunis sous cet arbre, nous entendîmes des bruits d'arbres s'abattant. Épris de peur, nous nous enfuîmes dans les cases de nos parents. Les bruits ne cessaient de se faire entendre. Les parents, inquiets de ce qui se passait restèrent groupés autour de l'arbre afin d'unir leur force face à ce gigantesque monstre qui ne cassait d'avancer. La pénombre dans laquelle se trouvait notre village s'éclaircissait peu à peu. Bientôt, on apercevait les cases des villages voisins.
Tout autour de notre village tombaient des arbres grâce auxquels la tribu vivait et se soignait. Une grande ferraille se fit apercevoir. Il était écrit, Grande Société du Bois. Le « gigantesque monstre » se dirigea vers l'arbre sous lequel étaient regroupés nos parents puis, à une dizaine de mètres, il s'arrêta.
Un monsieur, barbu, vêtu d'une salopette bleue descendit. Monsieur, mettez-vous à l'abri, car je dois abattre cet arbre s'écria-t-il.
Mais, à l'abri de quoi dont-on se mettre ? Ces arbres nous protègent de la pluie, du vent et du soleil. Où allons-nous aller ? Que deviendrons-nous après que vous aurez abattu cet arbre ? Nous avons été épouvantés par les bruits de vos engins. Si nous avions été alertés, croyez-moi, vous ne détruiriez aucun de ces arbres. Nous ne vous laisserons pas détruire cet arbre. S'il s'en faut, nous laisserons nos vies. De toutes les façons, nos vies sont en agonie. La sauvegarde de cet arbre est l'espoir de la survie de notre village. Cet arbre est l'héritage que nous lèguerons à nos enfants. Il ne pourra pas être détruit par l'attitude d'un membre de la tribu. Cet arbre est le symbole de notre vie. Observer sa destruction, c'est participer à notre mort. Quelle vie aurions-nous donc après notre mort ? Si nous laissons le repère de notre vie être détruit alors notre vie n'aura plus de sens. Elle ne vaudra plus la peine d'être vécue. Elle n'existera même pas parce que rien ne la soutiendra. Nous serons comme un morceau de papier amené çà et là par le vent. Nous avons une décision à prendre avant que le pire ne se produise. Risquer nos vies afin de continuer de vivre en nos enfants ou accepter de mourir en nos enfants. En prononçant ces paroles, Mouté, un jeu brave du village qui siégeait avec les vieux donnait un regain de courage aux hommes du village qui, d'un mouvement de la tête, acquiescèrent ces paroles de Mouté.
L'engin rebroussa chemin. Cet arbre fut sauvé, le village allait donc vivre sous son ombre et grâce à ses fruits. Pendant de longues années, notre alimentation provenait de cet arbre. Pour notre tribu, cet arbre était sacré. Les anciens décidèrent d'être des protecteurs des arbres, car notre tribu a survécu grâce à la présence de cet arbre.
Un jour, Kaho, un homme alcoolique du village surnommé le fou avait comme d'habitude ingurgité plusieurs calebasses de matango. Il saisit une machette et décida d'abattre le grand arbre du village. Tout le monde sortit pour voir le sacrilège qu'allait commettre Kaho. Dongmo, la femme la plus âgée du village resta assise sur son lit, refusant de sortir, car, disait-elle, ses yeux ne verront pas la fin de cet arbre qui pour elle est le symbole de la vie de notre tribu. En allant au grand arbre, Éliane, la petite fille de Dongmo entendit sa grand-mère prononcer les paroles de clémence afin que le dieu de nos ancêtres estompe ce sacrilège du fou du village.
Oh !! Ne permettez pas que mes yeux voient la destruction de l'arbre sacré.
Ne permettez pas que le jour de la destruction de cet arbre soit compté parmi les jours de ma vie.
Telles étaient les paroles que marmonnait Dongmo.
Autour de l'arbre sacré était attroupée une grande foule. Les anciens et les hommes robustes du village tentaient vainement de dissuader Kaho. Sa fureur ne permettait pas que l'on s'approche de lui. Progressivement, il assommait le grand arbre à coup de machette. Il fallait agir, au plus vite, le temps pressait.
Les jeunes du village observaient la démystification de l'arbre sacré. Les vieux craignaient alors que les épopées de la tribu racontées aux jeunes pour perpétuer la tradition de notre tribu soient désormais considérées comme mensonge par ces derniers, car l'histoire de l'arbre sacré les avait jusqu'ici empêchés de s'éloigner de la tradition et de détruire des arbres.
Mouté, devenu âgé était l'un des anciens du village. Il craignait de voir la tradition s'ébranler. Cela ne se passera pas sous mes yeux, dit-il. Kaho ne se laissait pas perturber par les paroles et les cris des villageois qui essayaient désespérément de le stopper.
Kaho évoluait lentement mais surement vers la destruction de cet arbre. Sa robustesse tenait à distance toute tentative de s'approcher de lui. Lorsque Nouhou, l'un des hommes pour qui il avait une grande considération essaya de s'approcher de lui afin de le convaincre d'arrêter ce sacrilège, Kaho se retourna et leva la main comme un joueur de tennis attendant la prochaine balle à frapper. Nouhou s'arrêta et ne fit plus de geste. Face au regard menaçant de Kaho, il rebroussa chemin.
Tout le village fut étonné. Nul autre n'avait jamais pu calmer Kaho. Toutes les fois où il menaçait la sécurité du village, Nouhou avait su le calmer, mais ce soir-là, ce ne fut pas le cas.
Mouté, terrifié par ce qui se passait sous son regard entrepris de stopper Kaho. Il profita d'un moment d'inattention, courut et se jeta sur lui. Levant son bras, le fou l'assena à la tête. La foule saisit cette occasion et ramassa la machette qui était tombée à quelques mètres de Kaho. Ce dernier fut arrêté et ligoté par les hommes du village. Les prières de Dongmo avaient été exaucées.
De ce coup, Mouté ne se relèvera pas. L'arbre sacré du village avait été préservé, mais le village avait perdu un de ses fils. C'était mon père. Cette nuit-là, ma mère enfanta un fils. Serait-ce pour remplacer mon défunt père que je ne verrai pas ? Je n'en sais rien. Mais, chaque jour j'étais là près de cet arbre qu'il a défendu jusqu'à la mort.
L'heure était venue pour moi de m'en aller de ce , car les vieux du village commencèrent à se grouper pour leur traditionnelle causerie. C'était sous cet arbre que se prenaient toutes les décisions importantes du village. Cet arbre mythique pour notre tribu. Nul n'avait le droit de couper une branche de cet arbre. Les anciens du village y veillaient, scrupuleusement.
Mes enfants, cet arbre est le symbole de notre tribu. Vous devez vos vis à cet arbre. Vous ne serez pas vivants si cet arbre avait été abattu. Le regard fixé sur Père Ndefo, les enfants suivaient attentivement l'histoire de cet arbre à qui ils doivent leur existence.
Un soir, alors que nos parents étaient réunis sous cet arbre, nous entendîmes des bruits d'arbres s'abattant. Épris de peur, nous nous enfuîmes dans les cases de nos parents. Les bruits ne cessaient de se faire entendre. Les parents, inquiets de ce qui se passait restèrent groupés autour de l'arbre afin d'unir leur force face à ce gigantesque monstre qui ne cassait d'avancer. La pénombre dans laquelle se trouvait notre village s'éclaircissait peu à peu. Bientôt, on apercevait les cases des villages voisins.
Tout autour de notre village tombaient des arbres grâce auxquels la tribu vivait et se soignait. Une grande ferraille se fit apercevoir. Il était écrit, Grande Société du Bois. Le « gigantesque monstre » se dirigea vers l'arbre sous lequel étaient regroupés nos parents puis, à une dizaine de mètres, il s'arrêta.
Un monsieur, barbu, vêtu d'une salopette bleue descendit. Monsieur, mettez-vous à l'abri, car je dois abattre cet arbre s'écria-t-il.
Mais, à l'abri de quoi dont-on se mettre ? Ces arbres nous protègent de la pluie, du vent et du soleil. Où allons-nous aller ? Que deviendrons-nous après que vous aurez abattu cet arbre ? Nous avons été épouvantés par les bruits de vos engins. Si nous avions été alertés, croyez-moi, vous ne détruiriez aucun de ces arbres. Nous ne vous laisserons pas détruire cet arbre. S'il s'en faut, nous laisserons nos vies. De toutes les façons, nos vies sont en agonie. La sauvegarde de cet arbre est l'espoir de la survie de notre village. Cet arbre est l'héritage que nous lèguerons à nos enfants. Il ne pourra pas être détruit par l'attitude d'un membre de la tribu. Cet arbre est le symbole de notre vie. Observer sa destruction, c'est participer à notre mort. Quelle vie aurions-nous donc après notre mort ? Si nous laissons le repère de notre vie être détruit alors notre vie n'aura plus de sens. Elle ne vaudra plus la peine d'être vécue. Elle n'existera même pas parce que rien ne la soutiendra. Nous serons comme un morceau de papier amené çà et là par le vent. Nous avons une décision à prendre avant que le pire ne se produise. Risquer nos vies afin de continuer de vivre en nos enfants ou accepter de mourir en nos enfants. En prononçant ces paroles, Mouté, un jeu brave du village qui siégeait avec les vieux donnait un regain de courage aux hommes du village qui, d'un mouvement de la tête, acquiescèrent ces paroles de Mouté.
L'engin rebroussa chemin. Cet arbre fut sauvé, le village allait donc vivre sous son ombre et grâce à ses fruits. Pendant de longues années, notre alimentation provenait de cet arbre. Pour notre tribu, cet arbre était sacré. Les anciens décidèrent d'être des protecteurs des arbres, car notre tribu a survécu grâce à la présence de cet arbre.
Un jour, Kaho, un homme alcoolique du village surnommé le fou avait comme d'habitude ingurgité plusieurs calebasses de matango. Il saisit une machette et décida d'abattre le grand arbre du village. Tout le monde sortit pour voir le sacrilège qu'allait commettre Kaho. Dongmo, la femme la plus âgée du village resta assise sur son lit, refusant de sortir, car, disait-elle, ses yeux ne verront pas la fin de cet arbre qui pour elle est le symbole de la vie de notre tribu. En allant au grand arbre, Éliane, la petite fille de Dongmo entendit sa grand-mère prononcer les paroles de clémence afin que le dieu de nos ancêtres estompe ce sacrilège du fou du village.
Oh !! Ne permettez pas que mes yeux voient la destruction de l'arbre sacré.
Ne permettez pas que le jour de la destruction de cet arbre soit compté parmi les jours de ma vie.
Telles étaient les paroles que marmonnait Dongmo.
Autour de l'arbre sacré était attroupée une grande foule. Les anciens et les hommes robustes du village tentaient vainement de dissuader Kaho. Sa fureur ne permettait pas que l'on s'approche de lui. Progressivement, il assommait le grand arbre à coup de machette. Il fallait agir, au plus vite, le temps pressait.
Les jeunes du village observaient la démystification de l'arbre sacré. Les vieux craignaient alors que les épopées de la tribu racontées aux jeunes pour perpétuer la tradition de notre tribu soient désormais considérées comme mensonge par ces derniers, car l'histoire de l'arbre sacré les avait jusqu'ici empêchés de s'éloigner de la tradition et de détruire des arbres.
Mouté, devenu âgé était l'un des anciens du village. Il craignait de voir la tradition s'ébranler. Cela ne se passera pas sous mes yeux, dit-il. Kaho ne se laissait pas perturber par les paroles et les cris des villageois qui essayaient désespérément de le stopper.
Kaho évoluait lentement mais surement vers la destruction de cet arbre. Sa robustesse tenait à distance toute tentative de s'approcher de lui. Lorsque Nouhou, l'un des hommes pour qui il avait une grande considération essaya de s'approcher de lui afin de le convaincre d'arrêter ce sacrilège, Kaho se retourna et leva la main comme un joueur de tennis attendant la prochaine balle à frapper. Nouhou s'arrêta et ne fit plus de geste. Face au regard menaçant de Kaho, il rebroussa chemin.
Tout le village fut étonné. Nul autre n'avait jamais pu calmer Kaho. Toutes les fois où il menaçait la sécurité du village, Nouhou avait su le calmer, mais ce soir-là, ce ne fut pas le cas.
Mouté, terrifié par ce qui se passait sous son regard entrepris de stopper Kaho. Il profita d'un moment d'inattention, courut et se jeta sur lui. Levant son bras, le fou l'assena à la tête. La foule saisit cette occasion et ramassa la machette qui était tombée à quelques mètres de Kaho. Ce dernier fut arrêté et ligoté par les hommes du village. Les prières de Dongmo avaient été exaucées.
De ce coup, Mouté ne se relèvera pas. L'arbre sacré du village avait été préservé, mais le village avait perdu un de ses fils. C'était mon père. Cette nuit-là, ma mère enfanta un fils. Serait-ce pour remplacer mon défunt père que je ne verrai pas ? Je n'en sais rien. Mais, chaque jour j'étais là près de cet arbre qu'il a défendu jusqu'à la mort.