La nuit

   Je m'en souviens comme si c'était hier; nous étions le 13 juillet 2023. Après avoir dîné des aliments légers avec mon père et mon petit frère nous nous préparions à aller à Chambéry le Haut. Les deux garçons partis devant, je me dépêchai d'enfiler mon fin pull sur mes larges épaules. Je courus ensuite dans les escaliers, avec ma précipitation je faillis m'étendre de tout mon long sur les marches restantes. 
 

   Je sortis dehors, prenant le temps de fermer la porte à clé. Le vent faisait bouger mes cheveux au rythme de mes pas; rapides. J'ai dû courir pour rattraper ma demi famille. Nous descendîmes la rue depuis la gare jusqu'à un arrêt de bus. Tous trois rentrâmes dans la navette déjà bondée de monde et de sacs. Je me faufilai entre bras, pieds et voix. Ma peur immorale revint me hanter comme un fantôme de mauvais film d'horreur...la peur des gens. En me retrouvant entourée par des géants et par des nains. Je me retrouvais également enfermée dans un conte, une légende. 
Le trajet ne dura que quelques minutes seulement. Nous sortîmes du bus et je me retrouvai grelottante dans la rue goudronnée. 
- Suis-je sotte de ne pas avoir pris de veste?
Nous continuions de marcher dans la nuit presque entièrement tombée. Je distinguais déjà des étoiles courageuses, brillantes, plus que les lampadaires autour de moi. Puis nous nous assîmes dans la douce herbe déjà trempée de rosée. Je regardai autour de moi, dans cette immensité noire. Nous étions nombreux à être venus; ça me flanque encore la frousse rien que d'y penser. Je regardai derrière moi et vis, dans les bois sur les Monts, des lumières, celles de téléphones sûrement. Le maire parla sur une petite estrade, puis se tut . Le spectacle commença alors!
 
   Depuis des enceintes posées de part et d'autre j'entends de la musique se disperser dans la nuit finissant de s'installer peu à peu. Ces musiques je les connaissais, je les entends souvent passées à la radio...mais je ne les apprécie pas pour autant.
J'entendis une détonation puis, vis dans le ciel comme une fleur qui s'ouvre et, en un instant; se fane. Un joli bouton rouge... Ensuite je vis apparaître dans l'espace diverses couleurs, toutes plus magnifiques les unes que les autres : du jaune, du rouge, du bleu, du vert et de différentes colorations encore. Des boules de feu jaillirent dans le ciel, ensuite explosèrent en millions d'étoiles filantes, pétillantes. 
J'étais là; dans l'herbe, muette devant le beauté du spectacle que je contemplais d'un regard admiratif oubliant le froid qui me martyrisait comme des violentes pointes de couteau. Je me suis enfin calée contre mon père. 
A ce moment précis je me sentais comme minuscule, un simple jouet oublié sur une plage alors que le propriétaire est déjà parti. Je me sentais prise au piège dans une boule de neige. Des flocons brillants tombaient tout autour de la sphère qui m'entourait, frôlant le verre qui me tenait prisonnière de cette immensité noire. 

   Je me sentais bien à cette endroit, c‘est bien la première fois que je me sentais aussi libre de mes mouvement, de faire « ce que je voulais » . 
Je crois bien que j'étais absorbée par cet espace. Les minutes sont passées...trop vite à mon goût. J'aurais voulu rester indéfiniment sans me soucier du reste. Profitant de ma vie. 
Mon père me dit un peu tôt qu'il fallait commencer à rentrer. Il s'arrêta d'abord à un stand de boissons où il se prit une bière. 
Tous les trois on commença alors à rentrer car il ne fallait pas rater la navette de retour. Des scooters partirent les premiers puis des voitures, ensuite des familles avec des poussettes et finalement ceux à pieds. Le froid me mordait comme un molosse à qui j'aurais donné un coup de pied.
 

   Mon cauchemar revint...monter dans le bus avec des trentaines de personnes ! Je tâchais de respirer calmement, essayais de revenir à moi-même; mais dans mon esprit il y a un parc d'attractions dans lequel mon cerveau est tombé.
Heureusement le trajet se passa rapidement, je jetais de temps à autre des regards circulaires puis lançais des regards à la fenêtre pour regarder le dehors, des ombres, défiler vivement. 
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