Destin lié des enfants maudits

Bonjour, Merci d'être là!!! Depuis mon enfance, je suis parmi ces personnes qui font plus confiance à un journal intime qu'aux personnes physiques. Tout simplement parce qu'aucune des feuilles su ... [+]

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« Moi je suis différente. Je l'ai toujours été. Pour ma mère c'est comme si j'étais une extra-terrestre ». Différente, j'aurai compris, mais extraterrestre, j'étais étonnée du sens du terme. Tout a commencé en 1997, le 31 Août plus précisément, un jour sombre pour le monde auquel j'appartiens. Je m'appelle « Given », qui veut dire Donnée ou Offerte. Aujourd'hui, j'ai vingt ans et je vis avec des dons que j'ai reçus d'une femme partie à ma naissance. D'après mes parents, je suis une enfant maudite et la date exacte de ma naissance ne devrait jamais être révélée. Pourquoi ? Aucune explication précise de leurs parts jusqu'à mes neufs ans. Je me taisais donc bêtement, non j'avais peur surtout. Comment je perçois ma naissance ? Alors voilà, j'étais la nouvelle venue, consciente de rien, une toute petite chose pour le monde, mais malgré tout, une enfant tant attendue pour mes parents car pour la première fois, une petite fille, leur seule et unique. Mon secret était bien gardé que j'ai pu vivre comme un enfant normal. « Normal ? », je pense que j'exagère trop. Je suis tout, sauf normale, c'est évident, ça l'a toujours été. Alors, une petite chose qui m'a marquée durant l'enfance ? Oui, pour m'en dormir, mon père me racontait de vraies petites histoires. Chaque nuit avant le jour de mon anniversaire, c'était particulièrement celle de la reine Idéally, une femme tant admirée par ma famille mais que je n'ai pas eu la chance de rencontrer. Je me rappellerai toujours des yeux de mon père qui brillaient en me disant : « ce n'était pas une femme comme les autres Given, elle n'était pas seulement d'une grande beauté, elle avait un cœur en or, et bien plus. Elle était magique, dans le vrai sens du terme. Elle rayonnait de bonheur et de joie de vivre qu'elle ne gardait pas à elle seule, non, elle le partageait à tout le monde, sans exception  ». Je m'endormais toujours avant la fin de l'histoire et à chaque fois, un même rêve m'envahissait. Ce n'était pas si mystérieux que ça vu l'histoire que je venais d'entendre. Voir de loin une grande femme d'une beauté extraordinaire avec une couronne à la tête n'avait en effet, rien d'impressionnant.
Mais à mes neuf ans, le jour de mon anniversaire, quand je prenais enfin conscience du vrai sens de la commémoration, cet évènement que je constatais sans y prêter réelle attention chaque année, tout me ramenait à qui le moment était dédié : la reine Idéally, l'héroïne de l'histoire de mon père. J'étais alors plus attentive aux documentaires extraordinaires que diffusaient toutes les chaînes du Royaume sur l'histoire de la reine mais aussi la tragédie de sa mort. Je savais que la reine n'était plus de ce monde, mais quand ? Je l'ignorais, jusqu'à ce jour-là. Cela m'a fait bizarrement un choc, tellement que je venais à me culpabiliser, profondément. L'idée de célébrer même en cachette ma naissance, quand un mari, des enfants, toute une famille pleurent leur être cher, me hantait. Quelle idée douloureuse et affreuse je m'infligeais ! Et oui, je suis ce genre de personne qui subit souvent d' « overthinking » qui signifie « trop penser ». Mon secret s'éclaircissait alors de plus en plus. J'étais ce que l'on considère maudite aux yeux de tout le peuple du royaume, dont la plupart croyaient aux « malédictions des nouveaux nés, voleurs de vie connue ». Face à ces gens, je risquais l'exil à vie. Ne le mériterai-je pas ? Me disais-je.
Pour chaque anniversaire, on avait un gâteau de vœu comme tradition. Mais ce jour-là, je ne ressentais plus rien, je ne voulais rien, j'étais obligé de fermer les yeux, comme ça, et de faire semblant de faire un vœu. Au moment où j'ai ouvert les yeux, c'est là que tout a changé. Je n'étais plus à la maison, je me suis retrouvée au beau milieu d'une grande salle lumineuse, les murs en or, les lumières en diamant, les décorations avec des pierres précieuses à perte de vue, et le beau parfum de fleurs naturelles. Magnifique est un terme trop simple pour définir la beauté qui m'entourait. J'étais enfaite dans un château de nobles gens. Qui sont-ils ? Je l'ignorais. Et là, j'entendais des pas qui s'approchaient peu à peu de moi et la femme dans mes rêves apparut à ma droite, avec un visage familier. La reine Idéally, disais-je dans mes pensées avec mes mains tremblantes d'angoisses ou d'émerveillements ? Je l'ignore, encore et toujours. « N'aie pas peur, je suis ton amie, tu es dans un monde parallèle, un monde auquel appartiennent les personnes comme toi et moi » disait-elle, avec une voix si douce, et ses mains posés sur mes petites épaules, elle le faisait d'un tel charme que j'étais un peu rassurée malgré que je me sentais perdue. Elle se penchait doucement vers moi et dit : « Je t'observe depuis ta naissance, car la vie a choisi que ton destin soit lié au mien, aux nôtres. Tu seras la bonne version de moi, continue mes bonnes œuvres et apprends de mes erreurs. Vis avec ces dons que je te donne : Bonté, Amour, Dignité, Courage, et Loyauté. Fais en bon usage, démarque toi du monde, garde les bonnes valeurs que rejettent la grande majorité des humains. Given, tu es une enfant exceptionnelle ». Puis elle rajouta : « Porte mon bracelet de saphirs roses, preuve que tu ne rêvais pas. Tu seras la seule à le voir, il te rappellera que quelqu'un compte sur toi, et t'attend ici dans ce bel endroit ». Et dès la seconde d'après, j'étais de nouveau à la maison entourée de ma famille aimante. Et elle avait raison, tout était réel, les saphirs entourant mon poignet ne me quittait pas, non jamais, preuve de mon passage dans le monde d'à côté. Sacré anniversaire !
Depuis ce temps, j'ai grandi avec mes secrets. Si je cite comment j'ai fait toutes ces années, cela me prendrait toute une vie. En tout cas, j'ai essayé de prendre la route que prenait la reine Idéally. J'étais consciente d'une chose : mon destin était tracé depuis des lustres. De jour en jour, je la voyais à travers moi, j'avais l'impression de vivre pour deux. Mais j'aimais ça, bizarrement. J'apprenais peu à peu. Il m'arrivait de me heurter, de tomber, de sombrer mais j'avançais, encore et toujours. Comment je le sais ? A chaque bon acte que je réalise, à chaque sentiment positif que je ressens réellement, j'ai un nouveau saphir rose sur moi. Aujourd'hui, je me vois tellement briller que c'est juste extraordinaire et magique. De mon précédent anniversaire, une magnifique couronne du monde d'à côté s'est placée sur ma tête, avec des places vides pour encore et encore des saphirs roses. Alors ma route sera peut-être encore longue. Une chose que je ne cesse de me dire ? Elle a raison d'avoir été « elle ». Vouloir faire du bien ne nous fait que du bien. Désormais, je vis pour le bonheur de mon prochain. Et le mien dans l'histoire ? Je suis étonnement déjà heureuse. Que demander de plus que de pouvoir apporter le sourire aux malheureux, la joie à ceux qui souffrent, la confiance à ceux qui tremblent de peur, et surtout l'espoir à ceux qui perdent la joie de vivre ? J'essaie, encore et toujours, je précise. Toutefois, je suis fière de la femme que je suis aujourd'hui. Différente, oui, mais extra-terrestre, cela m'a toujours étonné, comme je le disais, mais ma mère a finalement avoué pourquoi ce terme. Il parait que tout simplement, d'après elle, la bonté est devenue tellement rare, et moi je représentais tout le contraire de ce qui était ordinaire dans notre monde, tellement qu'elle s'était toujours dit : « ma fille n'est sûrement pas de ce monde, une enfant maudite et pourtant d'une pure bonté. Antithétique ! ». Cela m'a fait sourire d'une part, d'autre part, j'étais encore plus étonnée que je ne l'étais avant. Mais le plus choquant, c'est qu'elle m'a avouée un grand secret sur la reine Idéally, et depuis je ne cesse de me demander : sur quelle enfant maudite mon destin sera-t-il lié à son tour, le jour où je volerai pour le monde d'à côté ? « Notre monde, un monde auquel appartiennent les personnes comme toi et moi » comme le disait-elle tendrement.