Moi je suis différent. Je l'ai toujours été. Pour ma mère, c'est comme si j'étais un extra-terrestre : bras crochus, chevelure éparse, je n'avais pour but que d'atteindre les nuages. Un jour, autre fois, il y a longtemps, du moins, quelques cycles de lune... était-ce le soleil? Je ne me souviens plus. Enfin bref. J'ai connu le jour de cette grande trahison.
Depuis, l'homme est mort. Naturellement, je parle de la mort du développement cérébral. La carrosserie, elle, semble être restée intacte. Il est certain que parfois, nous devions changer quelques pièces. Qui ne le fait pas! De toute façon, l'insomnie nous assomme. Elle nous tue. Comme le sable qui s'échappe lentement d'un sablier. Enfin, je crois. Il reste toujours de l'incertitude dans l'inconfort de la cohérence.
Vous me semblez avoir soif! Voulez-vous vous abreuver? Je vous invite. Si au moins j'en étais sûr. N'ayez crainte! Il se peut que je bavasse. Vous savez, je n'ai pas l'habitude de recevoir des visiteurs. Était-ce une habitude? Il m'a fallu du temps pour comprendre le tempérament qui guide les réussites sociales actuelles. Celles qui tracent le contour du terrain de jeu.
Vous me comprenez?
De toute façon, je n'ai pas très faim. Je vous laisse de mon eau. Les sens peuvent parfois tout compromettre! J'ai souvenir, si c'est bel et bien le mien, que mon fils s'était assoupi. Était-ce le mien? Je ne suis plus certain. L'important c'est que quelqu'un ou quelque chose s'était endormi. C'était juste avant la grande pénurie des avantages sociaux. Vous savez, quand les nuages était créée par le mouvement du va-et-vient des pelles que faisaient vivre d'innombrables rêveurs. À l'époque, l'acharnement ne menait pas directement aux antidépresseurs. Les gens aimaient mieux se suicider. C'était plus salissant certes, mais ô combien moins douloureux! J'imagine que tout le monde trouvait son compte. C'est ce qu'on m'a dit. L'aurais-je juste constaté? Enfin bref. C'était l'époque où les gens pouvaient encore mourir.
Ah oui! C'est vrai! Votre infusion...
Vous voyez comment tout change! Ces oiseaux dans le ciel étaient, à mon époque, faits de métal. Ils étaient porteurs de maladies. Ils représentaient leurs besoins. Ils inventaient des attentes. Il fallait même parfois composer avec un nombre maximum de caractères. Vous savez, ceux qu'ils utilisaient pour comptabiliser et pour distancer les strates sociales. Quand les gens recevaient leurs envies, leur feu s'allumait. Ils brulaient ardemment. Ils avaient de la difficulté à ce que la flamme brûle constamment. C'étaient des pyromanes à l'époque. Croyez-moi! Ils étaient les charlatans de leur existence. Non, plutôt des magiciens! Ils avaient trouvé le remède miracle. Celui qui crée des feux synthétiques. Certains étaient même capables de les faire apparaître à tout moment. Cette magie était appelée la consommation. Ils en ont même fait médicament. Avec ce comprimé, il n'y avait plus aucun tracas. C'était tellement fiable, que même les médecins pouvaient le prescrire moyennant quelques heures de travail. Dans le temps, on se disait : Pas de sang, pas de blessures; pas de blessures, pas d'importance; pas d'importance, pas de dépenses et pas de dépenses pas de sang. C'est une formule simple! Comment être malheureux quand tout est réfléchi ? La confiance, tout part de la confiance! C'est ce que disait ma mère justement. Était-ce elle? Enfin, je crois. Sinon c'était quelqu'un d'autre.
N'ayez crainte, je ferai votre breuvage.
Ne regardez pas le ménage! Vous savez, à mon âge! Ma concoction est là, derrière le voile de l'ignorance. Celui qui guide nos pensées. Celle qui réalise nos rêves. J'ai hâte que vous la dégustiez. Elle est sucrée. Ma mère disait toujours : « si tu ne peux faire confiance, deviens insouciance ». Ce qu'elle souhaitait, c'était de m'éviter de composer avec les sentiments que les humains avaient à l'époque. C'était avant l'autocorrection verbale et les voitures intelligentes. Je ne sais pas si vous vous en souvenez. À ce moment-là, les gens avaient encore une mémoire. Était-ce une conscience? Les deux? Enfin, ils avaient encore le loisir d'être soumis. C'est à cette époque qu'ils commençaient à penser à contourner la mort. Vivre plus longtemps. Vivre pour toujours.
L'idée leur est venue de faire sortir les émotions. De faire disparaitre ces magiciens. Étaient-ce des charlatans? Je ne m'en souviens plus! Ils voulaient que les émotions n'appartiennent plus au genre humain. Ternir les couleurs et éclaircir les zones grises. En devenant neutre, l'homme éviterait toute forme de blessures et deviendrait invincible. Par de multiples mutations d'ADN, les erreurs de codage prodigués par la nature ont été modifiés, mettant fin aux peurs et aux peines qu'occasionne parfois l'existence. La vie avait perdu l'espoir de mourir. Le résultat était tellement concluant, que les vaudous des temps modernes ont changé leurs prescriptions. Imaginez, qui serait assez fou pour refuser! Il n'y avait qu'un seul problème. Le médicament rendait les gens stériles. Était-ce un problème? Je ne sais pas! Une chose est certaine, en se choisissant l'homme s'est proclamé ambassadeur de l'existence. Il considérait que l'évènement de la vie devait cesser d'être partagé par l'action de bannir la mort.
Les effets sont venus après quelques années. Le taux de mortalité a fondu comme neige au soleil et les gens ont perdu l'anxiété de survie. Vous savez, c'est ce même sentiment qui est occasionné par la date limite de la remise d'un travail. Celle qui causera l'évaluation des efforts que vous avez mis pour réaliser une tâche qui est laissée, comme souvenir, par le jugement des autres sur vos actions. Bref, grâce à cette technologie, l'importance économique n'existait plus et le remède a été fourni à l'entièreté de la population. Malgré toutes ces conclusions positives, personne n'aurait plus se douter que, finalement, écarter la mort signifierait détester la vie. Car si plus personne ne meurt, plus personne ne crée.
Quand j'étais dans la fleur de l'âge, j'ai constaté que plus rien n'était pareil. L'homme s'est retrouvé prisonnier de son enveloppe corporelle. Il s'est mis à ne plus consommer son existence. Quand le temps se perd, toutes les premières fois ne comptent plus. L'éveil et le sommeil ne font qu'un. L'âme devient complexe. Il n'y a plus aucune dualité qui anime l'existence. Il a bien tenté de se sacrifier, mais ses prouesses longtemps ventées sont devenues les bourreaux de ses désirs longtemps cachés. Par la disparition de la fin, il n'y avait plus de départ. L'homme n'avait plus l'intérêt d'entamer des choses. Parce qu'ils ont tué la mort.
Maintenant, les hommes sont là. Ils restent animés par une énergie économe. Ils restent en groupe à ne rien faire. Ils ne se cachent plus. Ça n'en vaut plus la peine. J'imagine! Ils y sont finalement parvenus. Il n'y a plus de maux qu'ils peuvent utiliser comme ils le faisaient d'antan. Ce sont ces repères qui distinguaient le parcours de l'existence.
L'eau arrive mon ami. Les nuages se créent. Votre philtre sera bientôt à point. Enfin, j'espère que vous l'aimerez. Je le ferai moi-même.
Il y a eu, quelqu'un comme vous, qui cherchait refuge durant les dernières chaleurs. Si vous aimez mon breuvage, je vous invite à rester plus longtemps. Vous savez, avec l'expérience que j'ai, je ne peux que vouloir consommer une compagnie comme la vôtre. La solitude m'accable et parfois me rend triste. Vous savez, mes membres sont plus fragiles et je m'en suis fracturé quelques-uns au cours de ma longue vie. Mais je crois être toujours fiable. Et si vous le voulez, j'imagine que, pour quelqu'un comme vous, l'abri de mes branches pourrait vous permettre de vous y nicher, de voir grandir votre famille tout en vous protégeant. Et quand je n'y serai plus, vous pourrez utiliser mon tronc meurtri pour vous nourrir d'insectes. Qui sait? Au moins, je sais que j'aurai vécu!
Enfin, je crois?
Car vous savez, nous, les arbres, continuons à vivre.
Depuis, l'homme est mort. Naturellement, je parle de la mort du développement cérébral. La carrosserie, elle, semble être restée intacte. Il est certain que parfois, nous devions changer quelques pièces. Qui ne le fait pas! De toute façon, l'insomnie nous assomme. Elle nous tue. Comme le sable qui s'échappe lentement d'un sablier. Enfin, je crois. Il reste toujours de l'incertitude dans l'inconfort de la cohérence.
Vous me semblez avoir soif! Voulez-vous vous abreuver? Je vous invite. Si au moins j'en étais sûr. N'ayez crainte! Il se peut que je bavasse. Vous savez, je n'ai pas l'habitude de recevoir des visiteurs. Était-ce une habitude? Il m'a fallu du temps pour comprendre le tempérament qui guide les réussites sociales actuelles. Celles qui tracent le contour du terrain de jeu.
Vous me comprenez?
De toute façon, je n'ai pas très faim. Je vous laisse de mon eau. Les sens peuvent parfois tout compromettre! J'ai souvenir, si c'est bel et bien le mien, que mon fils s'était assoupi. Était-ce le mien? Je ne suis plus certain. L'important c'est que quelqu'un ou quelque chose s'était endormi. C'était juste avant la grande pénurie des avantages sociaux. Vous savez, quand les nuages était créée par le mouvement du va-et-vient des pelles que faisaient vivre d'innombrables rêveurs. À l'époque, l'acharnement ne menait pas directement aux antidépresseurs. Les gens aimaient mieux se suicider. C'était plus salissant certes, mais ô combien moins douloureux! J'imagine que tout le monde trouvait son compte. C'est ce qu'on m'a dit. L'aurais-je juste constaté? Enfin bref. C'était l'époque où les gens pouvaient encore mourir.
Ah oui! C'est vrai! Votre infusion...
Vous voyez comment tout change! Ces oiseaux dans le ciel étaient, à mon époque, faits de métal. Ils étaient porteurs de maladies. Ils représentaient leurs besoins. Ils inventaient des attentes. Il fallait même parfois composer avec un nombre maximum de caractères. Vous savez, ceux qu'ils utilisaient pour comptabiliser et pour distancer les strates sociales. Quand les gens recevaient leurs envies, leur feu s'allumait. Ils brulaient ardemment. Ils avaient de la difficulté à ce que la flamme brûle constamment. C'étaient des pyromanes à l'époque. Croyez-moi! Ils étaient les charlatans de leur existence. Non, plutôt des magiciens! Ils avaient trouvé le remède miracle. Celui qui crée des feux synthétiques. Certains étaient même capables de les faire apparaître à tout moment. Cette magie était appelée la consommation. Ils en ont même fait médicament. Avec ce comprimé, il n'y avait plus aucun tracas. C'était tellement fiable, que même les médecins pouvaient le prescrire moyennant quelques heures de travail. Dans le temps, on se disait : Pas de sang, pas de blessures; pas de blessures, pas d'importance; pas d'importance, pas de dépenses et pas de dépenses pas de sang. C'est une formule simple! Comment être malheureux quand tout est réfléchi ? La confiance, tout part de la confiance! C'est ce que disait ma mère justement. Était-ce elle? Enfin, je crois. Sinon c'était quelqu'un d'autre.
N'ayez crainte, je ferai votre breuvage.
Ne regardez pas le ménage! Vous savez, à mon âge! Ma concoction est là, derrière le voile de l'ignorance. Celui qui guide nos pensées. Celle qui réalise nos rêves. J'ai hâte que vous la dégustiez. Elle est sucrée. Ma mère disait toujours : « si tu ne peux faire confiance, deviens insouciance ». Ce qu'elle souhaitait, c'était de m'éviter de composer avec les sentiments que les humains avaient à l'époque. C'était avant l'autocorrection verbale et les voitures intelligentes. Je ne sais pas si vous vous en souvenez. À ce moment-là, les gens avaient encore une mémoire. Était-ce une conscience? Les deux? Enfin, ils avaient encore le loisir d'être soumis. C'est à cette époque qu'ils commençaient à penser à contourner la mort. Vivre plus longtemps. Vivre pour toujours.
L'idée leur est venue de faire sortir les émotions. De faire disparaitre ces magiciens. Étaient-ce des charlatans? Je ne m'en souviens plus! Ils voulaient que les émotions n'appartiennent plus au genre humain. Ternir les couleurs et éclaircir les zones grises. En devenant neutre, l'homme éviterait toute forme de blessures et deviendrait invincible. Par de multiples mutations d'ADN, les erreurs de codage prodigués par la nature ont été modifiés, mettant fin aux peurs et aux peines qu'occasionne parfois l'existence. La vie avait perdu l'espoir de mourir. Le résultat était tellement concluant, que les vaudous des temps modernes ont changé leurs prescriptions. Imaginez, qui serait assez fou pour refuser! Il n'y avait qu'un seul problème. Le médicament rendait les gens stériles. Était-ce un problème? Je ne sais pas! Une chose est certaine, en se choisissant l'homme s'est proclamé ambassadeur de l'existence. Il considérait que l'évènement de la vie devait cesser d'être partagé par l'action de bannir la mort.
Les effets sont venus après quelques années. Le taux de mortalité a fondu comme neige au soleil et les gens ont perdu l'anxiété de survie. Vous savez, c'est ce même sentiment qui est occasionné par la date limite de la remise d'un travail. Celle qui causera l'évaluation des efforts que vous avez mis pour réaliser une tâche qui est laissée, comme souvenir, par le jugement des autres sur vos actions. Bref, grâce à cette technologie, l'importance économique n'existait plus et le remède a été fourni à l'entièreté de la population. Malgré toutes ces conclusions positives, personne n'aurait plus se douter que, finalement, écarter la mort signifierait détester la vie. Car si plus personne ne meurt, plus personne ne crée.
Quand j'étais dans la fleur de l'âge, j'ai constaté que plus rien n'était pareil. L'homme s'est retrouvé prisonnier de son enveloppe corporelle. Il s'est mis à ne plus consommer son existence. Quand le temps se perd, toutes les premières fois ne comptent plus. L'éveil et le sommeil ne font qu'un. L'âme devient complexe. Il n'y a plus aucune dualité qui anime l'existence. Il a bien tenté de se sacrifier, mais ses prouesses longtemps ventées sont devenues les bourreaux de ses désirs longtemps cachés. Par la disparition de la fin, il n'y avait plus de départ. L'homme n'avait plus l'intérêt d'entamer des choses. Parce qu'ils ont tué la mort.
Maintenant, les hommes sont là. Ils restent animés par une énergie économe. Ils restent en groupe à ne rien faire. Ils ne se cachent plus. Ça n'en vaut plus la peine. J'imagine! Ils y sont finalement parvenus. Il n'y a plus de maux qu'ils peuvent utiliser comme ils le faisaient d'antan. Ce sont ces repères qui distinguaient le parcours de l'existence.
L'eau arrive mon ami. Les nuages se créent. Votre philtre sera bientôt à point. Enfin, j'espère que vous l'aimerez. Je le ferai moi-même.
Il y a eu, quelqu'un comme vous, qui cherchait refuge durant les dernières chaleurs. Si vous aimez mon breuvage, je vous invite à rester plus longtemps. Vous savez, avec l'expérience que j'ai, je ne peux que vouloir consommer une compagnie comme la vôtre. La solitude m'accable et parfois me rend triste. Vous savez, mes membres sont plus fragiles et je m'en suis fracturé quelques-uns au cours de ma longue vie. Mais je crois être toujours fiable. Et si vous le voulez, j'imagine que, pour quelqu'un comme vous, l'abri de mes branches pourrait vous permettre de vous y nicher, de voir grandir votre famille tout en vous protégeant. Et quand je n'y serai plus, vous pourrez utiliser mon tronc meurtri pour vous nourrir d'insectes. Qui sait? Au moins, je sais que j'aurai vécu!
Enfin, je crois?
Car vous savez, nous, les arbres, continuons à vivre.