« Toute histoire commence un jour, quelque part » quoi donc ? Qu’est-il encore venu me raconter des sept mots de sagesse de son agréable cauchemar ?
Ne va-t-il pas prendre au sérieux ce qui n’est que des propos insensés d’un affreux arbre qui hante son sommeil ? N’ose-t-il pas prendre pour vrai ce qui n’est qu’un rêve, cet enfant là ?
« La voix rauque de ce baobab m’est revenu cette nuit, plus ferme encore, et bien plus impérieuse. Plus exigeant aussi, malgré qu’il me réitère toujours la même langue, les mêmes mots, la même protestation. Le décor n’a pas du tout changé : macabre aux alentours, et macabre dans tout le reste. Seulement que pour cette fois, ses feuilles tombaient plus vite que les secondes, et les friables branches qui les portent, plus lâches que les jours de mon existence. Peut être est ce mon oreille dure qui fait dégénérer ce rêve, m’a-t-il dit. Ah ! Ce rêve qui me piétine. Ce loup qui dévore mes repos dus. Je ne peux plus sommeiller en l’attendant, et quand il arrive je ne peux guère refermer les yeux. Et le pire dans tout ça, est que l’imprécation n’a atteint que des bornes qui se gaussent de tout ce que je pensais savoir, tout ce j’ignore, et tout ce à quoi je croyais bon à ignorer. Tout me parle désormais d’histoire comme si j’en avais.»
Ô malheur ! Mais qui donc en veut à ce point à cet enfant ? Le matin dans la mendicité, et les nuits maintenant dans les enfers de son nouveau rêve. Quel cruel pinceau lui concocte de si maussades aventures ? Horrible montre qu’il est !
Quel malin offenseur voudrait donner de l’espoir à cette innocence, alors qu’il n’en a pas le droit ? Afin, il n’est qu’un enfant de la rue.
Cette folle révélation donna de l’âme à tout ce qui bouge. Les murmures du saumâtre vent des trottoirs, les symphonies embarrassantes des voitures, les claquements des pièces d’argent qu’il agite dans sa main, et même le silence pesant de son monde... tout ! Lui déclame maintenant cette prose maléfique : « Toute histoire commence un jour, quelque part ».
Que de fois m’a-t-il soutenu que depuis que ce rêve malhonnête lui fréquente, il sent son esprit tressaillir de son accalmie profonde. Il m’a dit que sa résilience invincible est, à chaque battement de la montre, corrodée par la montée des apéritifs inusités de la vie. Lui, qui n’eut connu de pareils frissons. Lui, qui n’eut navigué de tels horizons. Lui, qui n’eut jamais goutté à ces saveurs altières, prétends désormais à la vie, pour sucer, ne serait ce qu’un instant, le bonheur que d’avoir existé ; ce gamin a bien changé !
D’ailleurs, que ne m’a-t-il pas dit sur ses quintes nouvelles, ses espérances farfelues : « je crois que je veux vivre. J’ai comme l’impression que je le peux ; n’ai-je pas des narines pour cela ? Ou bien, ne suis-je qu’une fausse alerte de la géhenne ?
Non ! Je ne crois pas que je n’ai droits ni aux mélopées balsamiques d’une harpe, ni aux insidieux sortilèges d'un crépuscule, ruisselant quelque part dans la vallée .Moi aussi, je veux gouter à la légèreté du vent, aux enivrements du bonheur, aux extravagances de la beauté primaire, trempée dans les étoffes de la nature. Je veux sentir palpité en moi les effluves de l’amour, et puis j’ai le cœur tendre pour aimer. » ; Ô que si, ce gamin n’est plus le même !
D’irrésistibles conjurations peuplaient ses pensées et l’étourdissaient au plus haut degré. Décidé plus que jamais, à attiédir la pestilence de sa destinée, à escamoter la nauséabondise et alléger son langoureux itinéraire.
Pour une première, qu'un mendiant eut assez de ce vacarme. Une grande première dans sa vie que lui passer dans l’esprit, l’envie d’aller quelque part et de faire le premier jour de son histoire « Assez ! Que le temps me passe dessus. » Répétait-il souvent. Son esprit flaire, désormais, l’idée de perquisitionner la machine faiseuse de destin, afin de fossoyer d’autres adresses.
Il s’entêtait toujours, un temps soit peu, à me faire gober ses nouvelles absurdités. On dirait bien qu’il commence à prendre gout à frustrer ses collègues du métier : handicapés, les indigents, les sans domicile fixe... en continuant à soutenir fréquemment ceci : « que c’est malheureux, qu’une connivence de notre part, consent à la persévérance d’une telle abomination. Notre condition d’infirme, nous a rendu malheureux, et notre courage à le supporter ne fait qu’empirer notre misère, naïfs que nous sommes ! Notre stupide bravoure à glander sur le trottoir, pour quémander de la pitié à des passants qui passent, à demeurer dans ce faubourg de la désolation, c’est ça que nous voulons pour nous même. Car c’est ce à quoi nous nous tuons à faire, tout les jours : l’idiot, le désespéré, l’incapable. »
Cet ami là, par la magie de je ne sais quel secret, se croit capable de changer la fatalité dans laquelle nous sommes. Récemment convaincu que revenir, à chaque aube, dans ce boulevard, pour y reprendre les mêmes épitaphes, les mêmes affreuses litanies et y espérer les mêmes miettes pour survivre, n’est qu’une autre forme de refus de notre part à coopérer à la vie. «Ça ! C’est une ville en cravate, haut en couleur, dont qui se pâme des monuments d’Égypte ou d’ailleurs, admire. Mais au fond, ce n’est qu’un cimetière de luxe ; et pour eux, Je ne suis qu’un jeune cadavre, m’a-t-il soulignait, l’enfer du paradis des hommes. En fait, je suis la preuve de leur indifférence, la main invisible d’un mendiant qui ne se lasse jamais de mendier. Moi ! Qui suis l’âme obscure de sa grandeur, la pénombre de sa civilisation. Je suis l’enfant que l’on a jeté dans la rue.»
Ce jour là, je m’en rappelle, je lui avais pris la main, pour l’aider, comme de coutume, à traverser la route. Et à peine avions nous passer le seuil de la césure du chemin bitumé, que lui surprit un sot verdict.
Comme quand la foudre nous surprend en plein forêt, et que la rapide exécution ne permet pas à la conscience le temps de savoir ce qui se passe, je n’ai que senti ce pauvre mendiant, m’arracher brusquement le monitorat et chevaucher le retour.
Je l’ai vu galopé sous les klaxons cacophones des engins, défiant son sort, à travers une course très secouée. À peine parcourra t’il quelques petits mètres, qu’un ailée scooter lui pris en flagrance. Il n’a même pas voulu attendre les secours. La tête bien installée sur son lit coagulé de sang, qui salit et embouteille l’endroit. Il s’est afin décidé de s’en aller une bonne fois pour toute.
Ne va-t-il pas prendre au sérieux ce qui n’est que des propos insensés d’un affreux arbre qui hante son sommeil ? N’ose-t-il pas prendre pour vrai ce qui n’est qu’un rêve, cet enfant là ?
« La voix rauque de ce baobab m’est revenu cette nuit, plus ferme encore, et bien plus impérieuse. Plus exigeant aussi, malgré qu’il me réitère toujours la même langue, les mêmes mots, la même protestation. Le décor n’a pas du tout changé : macabre aux alentours, et macabre dans tout le reste. Seulement que pour cette fois, ses feuilles tombaient plus vite que les secondes, et les friables branches qui les portent, plus lâches que les jours de mon existence. Peut être est ce mon oreille dure qui fait dégénérer ce rêve, m’a-t-il dit. Ah ! Ce rêve qui me piétine. Ce loup qui dévore mes repos dus. Je ne peux plus sommeiller en l’attendant, et quand il arrive je ne peux guère refermer les yeux. Et le pire dans tout ça, est que l’imprécation n’a atteint que des bornes qui se gaussent de tout ce que je pensais savoir, tout ce j’ignore, et tout ce à quoi je croyais bon à ignorer. Tout me parle désormais d’histoire comme si j’en avais.»
Ô malheur ! Mais qui donc en veut à ce point à cet enfant ? Le matin dans la mendicité, et les nuits maintenant dans les enfers de son nouveau rêve. Quel cruel pinceau lui concocte de si maussades aventures ? Horrible montre qu’il est !
Quel malin offenseur voudrait donner de l’espoir à cette innocence, alors qu’il n’en a pas le droit ? Afin, il n’est qu’un enfant de la rue.
Cette folle révélation donna de l’âme à tout ce qui bouge. Les murmures du saumâtre vent des trottoirs, les symphonies embarrassantes des voitures, les claquements des pièces d’argent qu’il agite dans sa main, et même le silence pesant de son monde... tout ! Lui déclame maintenant cette prose maléfique : « Toute histoire commence un jour, quelque part ».
Que de fois m’a-t-il soutenu que depuis que ce rêve malhonnête lui fréquente, il sent son esprit tressaillir de son accalmie profonde. Il m’a dit que sa résilience invincible est, à chaque battement de la montre, corrodée par la montée des apéritifs inusités de la vie. Lui, qui n’eut connu de pareils frissons. Lui, qui n’eut navigué de tels horizons. Lui, qui n’eut jamais goutté à ces saveurs altières, prétends désormais à la vie, pour sucer, ne serait ce qu’un instant, le bonheur que d’avoir existé ; ce gamin a bien changé !
D’ailleurs, que ne m’a-t-il pas dit sur ses quintes nouvelles, ses espérances farfelues : « je crois que je veux vivre. J’ai comme l’impression que je le peux ; n’ai-je pas des narines pour cela ? Ou bien, ne suis-je qu’une fausse alerte de la géhenne ?
Non ! Je ne crois pas que je n’ai droits ni aux mélopées balsamiques d’une harpe, ni aux insidieux sortilèges d'un crépuscule, ruisselant quelque part dans la vallée .Moi aussi, je veux gouter à la légèreté du vent, aux enivrements du bonheur, aux extravagances de la beauté primaire, trempée dans les étoffes de la nature. Je veux sentir palpité en moi les effluves de l’amour, et puis j’ai le cœur tendre pour aimer. » ; Ô que si, ce gamin n’est plus le même !
D’irrésistibles conjurations peuplaient ses pensées et l’étourdissaient au plus haut degré. Décidé plus que jamais, à attiédir la pestilence de sa destinée, à escamoter la nauséabondise et alléger son langoureux itinéraire.
Pour une première, qu'un mendiant eut assez de ce vacarme. Une grande première dans sa vie que lui passer dans l’esprit, l’envie d’aller quelque part et de faire le premier jour de son histoire « Assez ! Que le temps me passe dessus. » Répétait-il souvent. Son esprit flaire, désormais, l’idée de perquisitionner la machine faiseuse de destin, afin de fossoyer d’autres adresses.
Il s’entêtait toujours, un temps soit peu, à me faire gober ses nouvelles absurdités. On dirait bien qu’il commence à prendre gout à frustrer ses collègues du métier : handicapés, les indigents, les sans domicile fixe... en continuant à soutenir fréquemment ceci : « que c’est malheureux, qu’une connivence de notre part, consent à la persévérance d’une telle abomination. Notre condition d’infirme, nous a rendu malheureux, et notre courage à le supporter ne fait qu’empirer notre misère, naïfs que nous sommes ! Notre stupide bravoure à glander sur le trottoir, pour quémander de la pitié à des passants qui passent, à demeurer dans ce faubourg de la désolation, c’est ça que nous voulons pour nous même. Car c’est ce à quoi nous nous tuons à faire, tout les jours : l’idiot, le désespéré, l’incapable. »
Cet ami là, par la magie de je ne sais quel secret, se croit capable de changer la fatalité dans laquelle nous sommes. Récemment convaincu que revenir, à chaque aube, dans ce boulevard, pour y reprendre les mêmes épitaphes, les mêmes affreuses litanies et y espérer les mêmes miettes pour survivre, n’est qu’une autre forme de refus de notre part à coopérer à la vie. «Ça ! C’est une ville en cravate, haut en couleur, dont qui se pâme des monuments d’Égypte ou d’ailleurs, admire. Mais au fond, ce n’est qu’un cimetière de luxe ; et pour eux, Je ne suis qu’un jeune cadavre, m’a-t-il soulignait, l’enfer du paradis des hommes. En fait, je suis la preuve de leur indifférence, la main invisible d’un mendiant qui ne se lasse jamais de mendier. Moi ! Qui suis l’âme obscure de sa grandeur, la pénombre de sa civilisation. Je suis l’enfant que l’on a jeté dans la rue.»
Ce jour là, je m’en rappelle, je lui avais pris la main, pour l’aider, comme de coutume, à traverser la route. Et à peine avions nous passer le seuil de la césure du chemin bitumé, que lui surprit un sot verdict.
Comme quand la foudre nous surprend en plein forêt, et que la rapide exécution ne permet pas à la conscience le temps de savoir ce qui se passe, je n’ai que senti ce pauvre mendiant, m’arracher brusquement le monitorat et chevaucher le retour.
Je l’ai vu galopé sous les klaxons cacophones des engins, défiant son sort, à travers une course très secouée. À peine parcourra t’il quelques petits mètres, qu’un ailée scooter lui pris en flagrance. Il n’a même pas voulu attendre les secours. La tête bien installée sur son lit coagulé de sang, qui salit et embouteille l’endroit. Il s’est afin décidé de s’en aller une bonne fois pour toute.