Tout ce qui brille n'est pas de l'or

Toute histoire commence un jour, quelque part. Dans un village lointain, vivait Selemani, un joli garçon, qui se trouvait alors en âge de se marier. Selon la coutume du village, ses parents lui dirent : « Nous allons te choisir une fille qui nous convient et porter la dot à sa famille ».

Mais, lui, formé à 600km de son village, dans la culture des jeunes « connectés », refusa de suivre le conseil de son père au point qu’un jour, lassé de ce refus persistant, son père lui dit : « si tu ne veux pas que nous te procurions une épouse, va la chercher toi-même et choisis-la selon tes goûts. La vie est courte : nous voulons, avant de mourir, voir nos petits-enfants. » Le garçon répondit : « voilà bien ce que j’attendais » et il partit, arpentant pour la première fois les savanes, au-delà de son village à la recherche de son âme-sœur.

Il traversa la forêt des chauves-souris et arriva dans un petit village dont il ignorait tout des coutumes, dans ce village, les femmes étaient douces et majestueuses, elles semblaient provenir d’une autre planète, le jeune homme confus par ces belles créatures décida de prendre congé dans ce « paradis sur terre », se disait-il.

Une chose cependant étonnait le jeune Selemani, dans le village, il n’y avait aucune trace masculine, il n’y avait donc que des femmes dotées d’une beauté extraordinaire. Selemani pensa que les hommes s’occupaient de la chasse car le village était situé derrière la forêt des chauves-souris, une forêt dont l’histoire étonnait car on racontait que les chauves-souris pouvaient, grâce aux forces obscures des ancêtres malveillants, prendre la forme humaine et tromper ainsi les membres des familles et semer ainsi la division et même la mort. Malheureusement, le jeune homme ne croyait plus à ce qu’il considérait comme mythe raconté pour endormir les enfants autour du feu.

Son deuxième jour, alors qu’il se baladait dans son nouveau « coin de bonheur», un lieu où il était exempté des critiques répétitives, des conseils interminables de son père, un lieu où la moindre de ses demandes était satisfaite avant même qu’il ne l’ait formulée ; tout à coup, épris de fatigue il trouva une rivière aux eaux si calmes qu’une présence des crocodiles dans ses profondeurs pouvait étonner, il décida de s’y abreuver.

C’est là qu’il entendit un chant qui ne pouvait que venir d’un ange. Il se dit, tête baissée : « je dois sûrement être en train de rêver », à quelques mètres de lui, un corps fait de miel, puisait de l’eau dans une calebasse.

Il  venait de faire la rencontre de la plus belle femme qu’il n’avait vu jusque-là. Il s’empressa de lui demander son nom, la jeune fille aux yeux à la couleur d’émeraudes répondit : « Vanina, je réponds au nom de Vanina ».

Le jeune homme se présenta à son tour et pria la jeune demoiselle de porter la calebasse à sa place, elle accepta.

Ils partirent donc vers la demeure de la jeune demoiselle et cette dernière invita Selemani à entrer dans sa maison où elle vivait seule car, disait-elle, sa mère vivait à l’autre rive pour prendre soin de ses champs.

Ce dernier s’empressa d’entrer, et fit inviter à partager le repas avec sa nouvelle amie, ils prirent le temps de se côtoyer et de s’aimer ; et un jour, le jeune homme souhaita présenter sa nouvelle compagne à sa famille, telle était sa mission, mais la jeune fille se disait n’est pas être prête pour cette traditionnelle rencontre, qu’aucun homme, peu importe ses nouvelles mœurs, ne pouvait ignorer, ni ne pouvait appliquer.

Le jeune homme accepta ce que lui demandait sa bien-aimée ; cependant, deux semaines plus tard, le jeune Selemani, fier de ce qu’il venait d’accomplir, se disait « mon père sera plus que fier de moi, car j’ai trouvé de l’or ».

Il insista auprès de sa bien-aimée et la jeune demoiselle ne pouvait qu’accepter contre son gré. Ils décidèrent donc de partir vers le village du jeune Selemani en prenant le chemin le plus court qui impliquait la forêt des chauves-souris.

La jeune Vanina dont la beauté avait éblouit sans même lui laisser le temps de s’étonner, notre jeune homme qui en était aussi tombé éperdument amoureux, sans savoir, le pauvre, que c’était là une chauve-souris qui avait pris pour lui plaire, l’apparence d’une femme. Il la demanda en mariage et lui proposa en cours de route de profiter de cette visite chez ses parents, pour qu’ensemble, ils puissent aussi ramener la dot.

La jeune fille acquiesça ; puis, d’un bond et sans crier gare, lui sauta sur le dos. Le garçon, surpris, lui dit : « Que fais-tu là ? Qu’est-ce que cela signifie ? » La fille répondit : « Quand tu m’as aimée, qu’imaginais-tu ? Maintenant, allons chez toi » et elle lui tint fermement les épaules par des mains qui, soudain, perdant leur finesse, se mirent à ressembler à des griffes. Que faire ?...Le jeune homme se mit en route ainsi harnaché.

Quand ils furent près de son village, il dit : « Mon amour, ce serait mieux que tu descendes maintenant de mes épaules et que tu marches à pieds. Sinon, on va se moquer de nous ! » La fille chauve-souris refusa énergiquement et le tint plus ferme que jamais.

Le garçon se cacha dans les bois pour attendre la nuit ; alors, quand l’obscurité fut bien établie, les portes closes et chiens apaisés, il se glissa dans sa case sans être aperçu. Là, il insista : « Mon aimée, descends et assieds-toi sur ce tabouret ! » Comme elle refusait, une discussion s’ensuivit, qui fut entendue par la jeune sœur de ce garçon.

Alertée, elle avertit ses parents.

Son père lui dit : « Ma fille, je ne puis entrer la nuit dans cette case : qui sait ce qui se passe ?...Attendons demain matin ! »...

Le jour venu, il entra donc dans la case et fut stupéfait d’y découvrir son propre fils portant une femme sur le dos. Le garçon lui raconta ce qui s’était passé. Ses parents sortirent et se concertèrent, car ils avaient compris dans quelles griffes leur fils était tombé. Le père rentra donc dans la case et y creusa, au milieu, un trou profond d’au moins trois machettes. La mère fit bouillir une grande casserole d’eau et, dans un large plat, mit en sauce tous les insectes qu’elle put trouver, avec du milieu, un buisson de crabes et d’écrevisses. Quand la fille aperçut ce plat qu’on lui offrait, elle sauta sur lui, tomba dans le trou et l’on y versa aussitôt l’eau bouillante, ce qui la fit passer proprement de vie à trépas. Le père, alors, se tourna vers son fils et lui dit : « Tout ce qui brille n’est pas de l’or. Dorénavant sois prudent ! »