À la maison, Sandrine se sentait seule. Il ne fallait pas faire de bruit car Maman se reposait. Elle devait faire ses devoirs, manger en silence, ranger et dormir. Au club de football par contre, elle pouvait parler, bouger et rire. Elle pouvait même y fêter Noël et son anniversaire. C'était comme une famille. D'ailleurs, elle n'avait choisi ni ce club ni le football, c'était juste parce que c'était au bout de la rue. Elle pouvait y aller quand elle voulait sans déranger ni inquiéter Maman.
Le jour de ses onze ans, on lui dit qu'elle ne pouvait plus rester. Il n'y avait pas assez de filles de son âge et elle était trop grande pour jouer avec les garçons. Sandrine tristement baissa la tête : elle ne pourrait jamais changer de club. C'était trop loin. Il n'y avait personne ni pour la conduire ni pour payer l'abonnement de bus. Alors elle continua à s'entrainer mais sans participer aux matchs. Elle trouvait toujours à se rendre utile : elle rangeait les maillots, préparait les sandwichs ou balayait le vestiaire. Elle aurait fait n'importe quoi pour faire partie du club. A seize ans, les joueurs la réclamait car elle était jolie. Elle sortait avec le gardien de l'équipe pro. On lui confiait la caisse le dimanche, car elle n'était pas bête en plus.
A vingt-trois ans, elle se maria avec le professeur d'EPS du collège qui entraînait aussi les poussins. Elle quitta le club. Elle avait un travail, une famille, plusieurs fêtes de Noël et beaucoup d'anniversaires à souhaiter. Pourtant elle réalisa au bout de quinze ans qu'elle se sentait seule, encore plus seule que lorsqu'elle était enfant. Elle trouvait son fils indolent et sa fille insolente. Il préférait les jeux en ligne aux tournois de foot, elle ne voulait pas qu'on la voit dans la voiture pourrie de sa mère. Sa belle-mère semblait avoir emménagé dans sa cuisine : elle était là pour nourrir son fils et éduquer ses petits-enfants. Sandrine n'était plus chez elle dans sa maison.
Elle commença à penser au divorce et au charmant sourire de l'assistant du service comptabilité. Elle accompagna sa collègue Carole au Pilates et sa cheffe au yoga. Elle se demandait pourquoi les hommes de l'entreprise avait une équipe de foot et les femmes des cours de stretching et de méditation.
- Au foot, ils font des tournois, c'est compétitif, avait dit Carole.
- Et c'est le dimanche avait renchéri Betty. Moi je peux seulement caser une activité sur la pause de midi.
- Les RH ont fait un sondage sur les préférences des employés, avait expliqué sa cheffe.
Sandrine n'avait rien dit mais pour la première fois s'était demandée combien sa vie aurait été différente si elle avait pu rejoindre une section féminine.
Un soir, elle entendit son mari et sa belle-mère parler des filles qui ne savaient pas jouer au foot. Sandrine soupira en enlevant son bonnet et décida de se cacher dans la salle de bains toute la soirée. La voix de son fils la retint dans le couloir :
- Maman, elle sait.
Le rire embarrassé de sa grand-mère encouragea l'adolescent à poursuivre :
- Elle court bien plus vite que Papa.
Sandrine finalement se cacha dans la salle de bains mais au lieu de se faire couler un bain, elle appela le coach des U17, son ancien petit ami qui avait fait une carrière pro. N'aurait-on pas besoin d'une entraîneure pour enfin ouvrir une section féminine ?
Il était un peu surpris : n'aurait-elle pas des vues sur lui ? Il avait lu dans un des magazines du coiffeur que les femmes revenaient souvent vers leur premier amour.
Sandrine laissa l'ancien gardien de but flirter avec elle car c'était plus simple pour se faire écouter. Le club avait fait beaucoup pour elle, mais aurait pu faire plus en ouvrant une section féminine. Elle voudrait donner cette chance à d'autres... Elle avait un diplôme d'animatrice sportive. Il croyait qu'elle était secrétaire. Oui, elle avait aussi un BTS d'assistante de direction. La plupart des coachs avaient aussi un autre travail.
Il avoua qu'il y avait de plus en plus de demandes. Oui, le club serait intéressé si elle voulait entraîner les filles. Elle devrait passer un soir après l'entraînement.
Elle préféra passer un après-midi avec son CV, ses diplômes et un projet pour les cinq prochaines années de la nouvelle section féminine.
Le jour de ses onze ans, on lui dit qu'elle ne pouvait plus rester. Il n'y avait pas assez de filles de son âge et elle était trop grande pour jouer avec les garçons. Sandrine tristement baissa la tête : elle ne pourrait jamais changer de club. C'était trop loin. Il n'y avait personne ni pour la conduire ni pour payer l'abonnement de bus. Alors elle continua à s'entrainer mais sans participer aux matchs. Elle trouvait toujours à se rendre utile : elle rangeait les maillots, préparait les sandwichs ou balayait le vestiaire. Elle aurait fait n'importe quoi pour faire partie du club. A seize ans, les joueurs la réclamait car elle était jolie. Elle sortait avec le gardien de l'équipe pro. On lui confiait la caisse le dimanche, car elle n'était pas bête en plus.
A vingt-trois ans, elle se maria avec le professeur d'EPS du collège qui entraînait aussi les poussins. Elle quitta le club. Elle avait un travail, une famille, plusieurs fêtes de Noël et beaucoup d'anniversaires à souhaiter. Pourtant elle réalisa au bout de quinze ans qu'elle se sentait seule, encore plus seule que lorsqu'elle était enfant. Elle trouvait son fils indolent et sa fille insolente. Il préférait les jeux en ligne aux tournois de foot, elle ne voulait pas qu'on la voit dans la voiture pourrie de sa mère. Sa belle-mère semblait avoir emménagé dans sa cuisine : elle était là pour nourrir son fils et éduquer ses petits-enfants. Sandrine n'était plus chez elle dans sa maison.
Elle commença à penser au divorce et au charmant sourire de l'assistant du service comptabilité. Elle accompagna sa collègue Carole au Pilates et sa cheffe au yoga. Elle se demandait pourquoi les hommes de l'entreprise avait une équipe de foot et les femmes des cours de stretching et de méditation.
- Au foot, ils font des tournois, c'est compétitif, avait dit Carole.
- Et c'est le dimanche avait renchéri Betty. Moi je peux seulement caser une activité sur la pause de midi.
- Les RH ont fait un sondage sur les préférences des employés, avait expliqué sa cheffe.
Sandrine n'avait rien dit mais pour la première fois s'était demandée combien sa vie aurait été différente si elle avait pu rejoindre une section féminine.
Un soir, elle entendit son mari et sa belle-mère parler des filles qui ne savaient pas jouer au foot. Sandrine soupira en enlevant son bonnet et décida de se cacher dans la salle de bains toute la soirée. La voix de son fils la retint dans le couloir :
- Maman, elle sait.
Le rire embarrassé de sa grand-mère encouragea l'adolescent à poursuivre :
- Elle court bien plus vite que Papa.
Sandrine finalement se cacha dans la salle de bains mais au lieu de se faire couler un bain, elle appela le coach des U17, son ancien petit ami qui avait fait une carrière pro. N'aurait-on pas besoin d'une entraîneure pour enfin ouvrir une section féminine ?
Il était un peu surpris : n'aurait-elle pas des vues sur lui ? Il avait lu dans un des magazines du coiffeur que les femmes revenaient souvent vers leur premier amour.
Sandrine laissa l'ancien gardien de but flirter avec elle car c'était plus simple pour se faire écouter. Le club avait fait beaucoup pour elle, mais aurait pu faire plus en ouvrant une section féminine. Elle voudrait donner cette chance à d'autres... Elle avait un diplôme d'animatrice sportive. Il croyait qu'elle était secrétaire. Oui, elle avait aussi un BTS d'assistante de direction. La plupart des coachs avaient aussi un autre travail.
Il avoua qu'il y avait de plus en plus de demandes. Oui, le club serait intéressé si elle voulait entraîner les filles. Elle devrait passer un soir après l'entraînement.
Elle préféra passer un après-midi avec son CV, ses diplômes et un projet pour les cinq prochaines années de la nouvelle section féminine.