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Assise dans ce café du Onzième arrondissement de Paris, je n'en mène pas large. Et pour cause, l'heure de la rupture a sonné. Sauf que je ne sais pas rompre. J'ai une certaine expérience en la matière : j'ai déjà très mal rompu deux fois.
La première fois, j'en ai encore des frissons rien que d'en parler, c'était avec mon premier amour, Hervé. Hervé, l'amoureux des premières fois.
Premier baiser, pas mal, mais...
Premier câlin, plutôt bien, mais...
Premier week-end dans une tente de camping à l'ancienne, sympa, mais...
Voilà, à chaque fois il y avait ce « mais... » Rien à reprocher vraiment, mais rien non plus qui donne envie d'aller beaucoup plus loin.
Alors, lorsque je me suis lassée, commençant à guetter d'autres hommes, d'autres baisers, d'autres câlins et lieux de vacances, mes arguments de rupture ne tenaient qu'à une petite phrase pas très assurée. « Hervé, comment te dire, j'ai un truc à te dire, mais... »
Il m'a regardé avec un air tout tendre et gentil « à la Hervé » et il a répondu :
— Mais... quoi ?
— Mais... Je ne sais pas... Tu en penses quoi, de nous deux, toi ? (Grosse, grosse erreur)
— Ben... Comme toi, je crois, on s'entend bien sur tous les plans, on aime les mêmes choses, on vit des moments géniaux, ça vaudrait le coup de passer à la vitesse supérieure, tu ne crois pas ?
Et il s'est mis à me parler emménagement ensemble, études en duo, peut-être même bébé.
Je venais d'échouer lamentablement à la toute première tentative de rupture de ma vie. Hervé, décidément l'homme de toutes les premières fois.
J'ai donc emménagé avec lui, espérant inconsciemment trouver quelques reproches rédhibitoires à lui opposer un jour ou l'autre. Mais non, au quotidien, il était ordonné et facile à vivre, joyeux, agréable. C'est finalement son départ en Colombie pour un stage de fin d'études qui m'a libérée d'Hervé au bout de quatre ans. À vrai dire, je l'aime toujours bien, mais...
Premier baiser, pas mal, mais...
Premier câlin, plutôt bien, mais...
Premier week-end dans une tente de camping à l'ancienne, sympa, mais...
Voilà, à chaque fois il y avait ce « mais... » Rien à reprocher vraiment, mais rien non plus qui donne envie d'aller beaucoup plus loin.
Alors, lorsque je me suis lassée, commençant à guetter d'autres hommes, d'autres baisers, d'autres câlins et lieux de vacances, mes arguments de rupture ne tenaient qu'à une petite phrase pas très assurée. « Hervé, comment te dire, j'ai un truc à te dire, mais... »
Il m'a regardé avec un air tout tendre et gentil « à la Hervé » et il a répondu :
— Mais... quoi ?
— Mais... Je ne sais pas... Tu en penses quoi, de nous deux, toi ? (Grosse, grosse erreur)
— Ben... Comme toi, je crois, on s'entend bien sur tous les plans, on aime les mêmes choses, on vit des moments géniaux, ça vaudrait le coup de passer à la vitesse supérieure, tu ne crois pas ?
Et il s'est mis à me parler emménagement ensemble, études en duo, peut-être même bébé.
Je venais d'échouer lamentablement à la toute première tentative de rupture de ma vie. Hervé, décidément l'homme de toutes les premières fois.
J'ai donc emménagé avec lui, espérant inconsciemment trouver quelques reproches rédhibitoires à lui opposer un jour ou l'autre. Mais non, au quotidien, il était ordonné et facile à vivre, joyeux, agréable. C'est finalement son départ en Colombie pour un stage de fin d'études qui m'a libérée d'Hervé au bout de quatre ans. À vrai dire, je l'aime toujours bien, mais...
* * *
Ma deuxième rupture ratée, je la dois à Alex. À la base pourtant, elle semblait plus facile, j'avais toutes les cartes en main, et je ne comptais pas renouveler le fiasco de la première fois. Car Alex, lui, possédait de vrais gros défauts. Je l'avais rencontré lors d'une fête bien arrosée entre amis, et j'avais décidé de rompre un an plus tard, le lendemain d'une autre fête bien arrosée entre amis.
J'ai pris mon courage à deux mains et me suis lancée sur le ton le plus déterminé et ferme possible :
J'ai pris mon courage à deux mains et me suis lancée sur le ton le plus déterminé et ferme possible :
— Alex, t'as encore trop bu hier soir, franchement, c'est plus possible. J'assume plus, c'était la fois de trop, j'en ai marre, j'arrête, je te quitte. Stop. Finito. J'y pense depuis un moment, pas la peine d'essayer de me retenir.
Il m'a regardée d'un air terrifié et il a fondu en larmes. Mais pas des larmes que l'on peut accueillir, préparé, avec un peu de distance. Pas de ces larmes appelant à lui tendre un paquet de mouchoirs, en espérant qu'elles seront rapidement oubliées au bout de quelques semaines. Non, de vraies larmes profondes et déchirantes qui briseraient les cœurs les plus solides.
Alex était au bout du rouleau, il avait appris la veille son licenciement et la maladie d'un ami, il n'avait pas voulu me le dire pour ne pas gâcher ma fête d'anniversaire. Ces derniers temps, c'est vrai, il faisait n'importe quoi, il n'était plus lui-même, mais avec son passé douloureux et ses cicatrices à vif, j'étais tout ce qui lui restait, son roc, son pic, sa péninsule. J'étais tout pour lui, il n'était rien sans moi, il ne savait pas ce qu'il serait capable de faire si je le quittais, pourrais-je vivre avec ça ?
Alex était au bout du rouleau, il avait appris la veille son licenciement et la maladie d'un ami, il n'avait pas voulu me le dire pour ne pas gâcher ma fête d'anniversaire. Ces derniers temps, c'est vrai, il faisait n'importe quoi, il n'était plus lui-même, mais avec son passé douloureux et ses cicatrices à vif, j'étais tout ce qui lui restait, son roc, son pic, sa péninsule. J'étais tout pour lui, il n'était rien sans moi, il ne savait pas ce qu'il serait capable de faire si je le quittais, pourrais-je vivre avec ça ?
Et je n'ai pas pu. Je suis restée. Son état semi-dépressif a perduré et je n'ai jamais trouvé le moment ni le courage de tenter de re-rompre. Il a fallu attendre une année et trois mois pour qu'il tombe amoureux d'une autre, une fille plus jeune, rencontrée en boîte de nuit, ma sauveuse, merci Jessica. Aujourd'hui c'est elle, son roc, et j'ai retrouvé ma place originelle et plus tranquille de grain de sable parmi les grains de sable.
* * *
Non, les ruptures, décidément, ce n'est pas mon truc. Je ne sais pas si c'est une compétence qui peut s'acquérir, mais chez moi c'est devenu presque une phobie. Promis, après celle-là, je retourne au célibat et j'y reste, je m'y prélasse et je le savoure jusqu'à la fin de mes jours.
Cette fois, la rupture s'annonce un peu moins compliquée. Logiquement, je devrais y arriver. Gérald est un bel homme rencontré sur internet, bon amant, bon père de famille, mais c'est justement là que le bât blesse. Il a une ex-femme et deux enfants.
Ce n'est pas grave en soi, mais ça fait trop pour moi qui vis seule, ça le rend moins disponible, ça complique notre histoire.
Au bout de six mois, je commence à m'attacher et je vois bien que trop de choses nous séparent, qu'à terme, ça risque de ne pas marcher. Surtout, surtout, il faut impérativement que je rompe avant qu'il ne m'intègre vraiment à sa vie, avant qu'il n'ait l'idée de me présenter à ses...
Cette fois, la rupture s'annonce un peu moins compliquée. Logiquement, je devrais y arriver. Gérald est un bel homme rencontré sur internet, bon amant, bon père de famille, mais c'est justement là que le bât blesse. Il a une ex-femme et deux enfants.
Ce n'est pas grave en soi, mais ça fait trop pour moi qui vis seule, ça le rend moins disponible, ça complique notre histoire.
Au bout de six mois, je commence à m'attacher et je vois bien que trop de choses nous séparent, qu'à terme, ça risque de ne pas marcher. Surtout, surtout, il faut impérativement que je rompe avant qu'il ne m'intègre vraiment à sa vie, avant qu'il n'ait l'idée de me présenter à ses...
— Coucou ! Désolé d'être en retard. Bon ben voilà, je te présente Elliot et Zoé, les amours de ma vie. Depuis le temps que je leur parle de toi, je me suis dit que c'était l'occasion... Il y a eu un petit imprévu, leur école est à côté et j'ai bien essayé de te prévenir, mais tu ne répondais pas, alors... alors voilà, on est là, surpriiise !
Oui, ils sont bien là devant moi, à me fixer avec curiosité. Elliot, six ans, un genou écorché et un peu de morve séchée au coin du nez. Zoé, neuf ans et demi, un appareil dentaire, de grosses lunettes et d'immenses yeux écarquillés au milieu. Leur grand dadais de père avec son sourire d'excuse, ses cheveux ébouriffés, son air à la fois embêté et... comme soulagé, serein. Confiant.
Je les regarde tous les trois et soudain, jamais une non-rupture ne m'a paru autant aller de soi.
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Pourquoi on a aimé ?
Histoire tour à tour amusante et touchante, « Ruptures » brosse le portrait haut en couleur d’un personnage qui rencontre quelques difficultés
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