Suis-je dans le noir ou ai-je les yeux fermés ? Peut-être les deux. Bien que réveillé, je dors. Je dors mais je pense. Plus le temps passe, plus je m’y habitue. De toute façon, je n’ai pas le choix. C’est quand même inquiétant de se réveiller de cette manière. Mais voilà, je vis avec tous les mois, toutes les semaines et quasiment tous les jours. Je cohabite avec ce phénomène bizarre depuis environ quatre ans. Comment est-ce qu’on l’appelle encore ? L’immobilité...hum, non ! Ah !...J’y suis ! C’est la paralysie du sommeil. À l’époque, je me disais que des esprits maléfiques se jouent du bien-être des hommes. Mais j’avais tout faux. En fait, c’est mon propre corps qui me protège. De quoi ? De qui ? Eh bien de moi ! Il me préserve non seulement du danger que constitue ma propre personne, mais également par des gestes brusques qui surviendraient tout au long de la nuit, pendant mon sommeil. Presque tout le monde expérimente cette manifestation étrange... enfin, je le crois. Il y a tout de même des privilégiés comme moi qui arrive à rester éveillé sans toutefois se réveiller. Je me demande pourquoi on l’appelle paralysie du sommeil et non paralysie du réveil. Pourquoi, si ce phénomène invraisemblable n’importune point les gens qui dorment ? En général, cela ne dure que quelques instants, mais l’on dirait à ce moment précis que le temps semble comme suspendu. Il n’y a que deux moyens pour moi de m’en sortir. Soit cette paralysie cesse toute seule, soit une tierce personne me réveille. Comme c’est étrange !
Au début, j’avais peur, oui, très peur. Mais en lisant des psychologues, j’ai compris que c’était normal et qu’il n’y avait donc aucune raison d’en être effrayé. Depuis ce temps, je gère cette situation insolite de main de maître. Toutefois, je ne serais pas fâché d’en être débarrassé. Une fois, j’ai eu l’audace d’obliger mon corps à me relâcher. Eh bien, cette idée n’était certainement guère des plus brillantes, car j’ai éprouvé une atroce douleur et j’ai senti une odeur capiteuse me monter aux narines, puis un sifflement fort désagréable a résonné dans mes oreilles. Il retentissait dans ma tête et produisait comme un effet larsen. Je me suis promis de ne plus jamais essayer une telle folie.
Parfois, il m’arrive de me demander si les animaux expérimentent ce genre de manifestation. Après tout, ils rêvent aussi. Je m’interroge inlassablement. Quelqu’un peut-il être prisonnier de son propre corps, et ce, durant une très longue période ? Peut-être était-ce le cas de la belle au bois dormant ? Peut-être est-ce également ce qui arrive à certaines personnes comateuses ? Peut-être même que c’est ce qui se passe avec les morts !!! Hum !...Non, pas vraiment puisque leurs corps se corrompent. Je pense néanmoins que la ligne qui sépare le sommeil et la mort est très fine. D’ailleurs, quand on se réveille, le remugle plein la bouche, l’on se dit : « ouf ! J’aurais pu y rester ».
À quoi pensais-je tout à l’heure ?... Ah ! Cette fameuse paralysie du sommeil ! Elle affecte surtout ma langue, elle la colle à mon palais, elle me rend littéralement muet. Au début elle ne se limitait qu’à m’empêcher de parler et de bouger, mais par la suite elle s’est muée en quelque chose de cauchemardesque. Ces derniers temps, c’est à peine si je réussis à bouger mes mains. Mais le pire dans tout cela c’est que, lorsque mes yeux s’ouvrent, j’ai des visions terrifiantes. Je me retrouve comme dans un état semi-conscient. Croyez-moi, c’est encore plus palpable que la réalité. Parfois, je sens que je ne suis pas seul. Je ressens des mains qui me frôlent, je sens des objets sur moi et en moi et je vois des silhouettes d’hommes, de femmes... des créatures dantesques. Le simple fait d’imaginer que ça pourrait m’arriver à tout moment quand je dors me fait flipper.
Un jour, j’étais couché, la conscience pourtant claire dans cette espèce d’engourdissement. Je pense que quelqu’un est couché près de moi. Au cœur de la nuit, je me réveille, mais je ne bouge pas. Je n’y arrive pas. J’entends siffler ce serpent et je sais qu’il vient vers moi. À cet instant, j’aperçois mon petit frère, couché à mes côtés. Je désire tellement qu’il vienne à mon aide. Alors, je lutte avec moi-même et parviens à lui pincer l’oreille du bout des doigts. Mais il s’écrie, mécontent : « Arrête, tu me fais mal ! » Il me tourne littéralement le dos et se rendors. Je réalise que je suis perdu. Soudain une force me secoue et je vois le serpent glisser sinueusement sur ma poitrine. Il me mord le cou. Il va à gauche et puis à droite. Je sens comme une force qui me contraint à lui présenter mon cou.
J’ai rencontré des gens qui prétendent pouvoir sortir de leurs corps. Comment ? Ça, je l’ignore ! J’avoue que parfois, j’ai aussi envie de m’évader comme eux, m’échapper de ce carcan invisible. Mais comment m’y prendre ? Et même si je le pouvais, à quoi bon ? Le simple fait de rencontrer de telles personnes me prouve que leur monde à eux est encore pire que le mien, sinon ils y resteraient. J’essaye de rester zen, de ne pas paniquer.
Je me dis: « rien de tout ceci n’est réel, rien de tout ce que je vis n’est réel. Tout ceci n’est qu’illusion. Non, je ne suis pas couché, je ne suis pas prisonnier de mon corps. Je n’existe pas et je n’ai jamais existé ». J’aurais tellement souhaité que ce fut le cas. Descartes avait raison. Même si je veux douter de tout, il faut quand même qu’il y ait quelqu’un pour douter. Je pense, donc je suis. Je suis une intelligence emprisonnée dans un corps condamné. Comment cela peut-il m’arriver ? On dit que ce qui ne te tue pas te rend fort. Mais moi je ne suis ni mort ni fort. Bonté divine ! Où trouver le grain de sable qui viendra enrayer ce dispositif bien huilé ? Libère-moi ! Relâche-moi, je te l’ordonne, corps-prison, si frêle, mais si fort. Je t’en prie, cher corps, rend-moi tout simplement ma liberté.
Au début, j’avais peur, oui, très peur. Mais en lisant des psychologues, j’ai compris que c’était normal et qu’il n’y avait donc aucune raison d’en être effrayé. Depuis ce temps, je gère cette situation insolite de main de maître. Toutefois, je ne serais pas fâché d’en être débarrassé. Une fois, j’ai eu l’audace d’obliger mon corps à me relâcher. Eh bien, cette idée n’était certainement guère des plus brillantes, car j’ai éprouvé une atroce douleur et j’ai senti une odeur capiteuse me monter aux narines, puis un sifflement fort désagréable a résonné dans mes oreilles. Il retentissait dans ma tête et produisait comme un effet larsen. Je me suis promis de ne plus jamais essayer une telle folie.
Parfois, il m’arrive de me demander si les animaux expérimentent ce genre de manifestation. Après tout, ils rêvent aussi. Je m’interroge inlassablement. Quelqu’un peut-il être prisonnier de son propre corps, et ce, durant une très longue période ? Peut-être était-ce le cas de la belle au bois dormant ? Peut-être est-ce également ce qui arrive à certaines personnes comateuses ? Peut-être même que c’est ce qui se passe avec les morts !!! Hum !...Non, pas vraiment puisque leurs corps se corrompent. Je pense néanmoins que la ligne qui sépare le sommeil et la mort est très fine. D’ailleurs, quand on se réveille, le remugle plein la bouche, l’on se dit : « ouf ! J’aurais pu y rester ».
À quoi pensais-je tout à l’heure ?... Ah ! Cette fameuse paralysie du sommeil ! Elle affecte surtout ma langue, elle la colle à mon palais, elle me rend littéralement muet. Au début elle ne se limitait qu’à m’empêcher de parler et de bouger, mais par la suite elle s’est muée en quelque chose de cauchemardesque. Ces derniers temps, c’est à peine si je réussis à bouger mes mains. Mais le pire dans tout cela c’est que, lorsque mes yeux s’ouvrent, j’ai des visions terrifiantes. Je me retrouve comme dans un état semi-conscient. Croyez-moi, c’est encore plus palpable que la réalité. Parfois, je sens que je ne suis pas seul. Je ressens des mains qui me frôlent, je sens des objets sur moi et en moi et je vois des silhouettes d’hommes, de femmes... des créatures dantesques. Le simple fait d’imaginer que ça pourrait m’arriver à tout moment quand je dors me fait flipper.
Un jour, j’étais couché, la conscience pourtant claire dans cette espèce d’engourdissement. Je pense que quelqu’un est couché près de moi. Au cœur de la nuit, je me réveille, mais je ne bouge pas. Je n’y arrive pas. J’entends siffler ce serpent et je sais qu’il vient vers moi. À cet instant, j’aperçois mon petit frère, couché à mes côtés. Je désire tellement qu’il vienne à mon aide. Alors, je lutte avec moi-même et parviens à lui pincer l’oreille du bout des doigts. Mais il s’écrie, mécontent : « Arrête, tu me fais mal ! » Il me tourne littéralement le dos et se rendors. Je réalise que je suis perdu. Soudain une force me secoue et je vois le serpent glisser sinueusement sur ma poitrine. Il me mord le cou. Il va à gauche et puis à droite. Je sens comme une force qui me contraint à lui présenter mon cou.
J’ai rencontré des gens qui prétendent pouvoir sortir de leurs corps. Comment ? Ça, je l’ignore ! J’avoue que parfois, j’ai aussi envie de m’évader comme eux, m’échapper de ce carcan invisible. Mais comment m’y prendre ? Et même si je le pouvais, à quoi bon ? Le simple fait de rencontrer de telles personnes me prouve que leur monde à eux est encore pire que le mien, sinon ils y resteraient. J’essaye de rester zen, de ne pas paniquer.
Je me dis: « rien de tout ceci n’est réel, rien de tout ce que je vis n’est réel. Tout ceci n’est qu’illusion. Non, je ne suis pas couché, je ne suis pas prisonnier de mon corps. Je n’existe pas et je n’ai jamais existé ». J’aurais tellement souhaité que ce fut le cas. Descartes avait raison. Même si je veux douter de tout, il faut quand même qu’il y ait quelqu’un pour douter. Je pense, donc je suis. Je suis une intelligence emprisonnée dans un corps condamné. Comment cela peut-il m’arriver ? On dit que ce qui ne te tue pas te rend fort. Mais moi je ne suis ni mort ni fort. Bonté divine ! Où trouver le grain de sable qui viendra enrayer ce dispositif bien huilé ? Libère-moi ! Relâche-moi, je te l’ordonne, corps-prison, si frêle, mais si fort. Je t’en prie, cher corps, rend-moi tout simplement ma liberté.