Post mortem

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Nouvelles - Policier & Thriller
Dans le silence et la solitude d'un fin rayon de lumière, les cadavres aux sourires idiots marinent au sous-sol. L'odeur y est insoutenable, mais les insatiables affamés dévorent...

Les diptères, ces sales bestioles ; mouches vertes et bleues, auront trouvé terreau fertile pour la ponte. Dans les bouillons et les gargouillis répugnants, bientôt les larves naissent, puis se nourrissent. Elles sont tels les croque-morts ; oiseaux de mauvais augure. Elles entonnent un air putride. Chantent en chœur la décomposition. Dansent dans un tourbillon malsain. Peuplades visqueuses et révulsives. Troupes d'acteurs sur une scène rongée où les bides morts deviennent les instruments inertes d'une cadence infernale...

Léthargie animée. Descente vers les profondeurs. Bal des pourritures.

Vermines rampantes au resto. À table. Là, s'anime la décrépitude dans la pénombre des lendemains. Les asticots grignotent dans les orbites. Engeance malsaine qui charrie, consomme et digère ces plats savoureux. Un dîner de viande froide ? Encore un peu de foie ? De cervelle ? Le Tartare se tarit. Matière immobile et flasque qui tombe en lambeaux. Sang coagulé. Corps bleuis, enflés. Nauséabonds. Villes et cités lugubres d'un temps d'effervescence éphémère propice au développement excessif ; à la vie trépidante dans les miasmes urbains. On passe, on dépasse. On trépasse. Moments frétillants voués à l'intemporalité finie des abîmes. Cortège des avaleurs aux appétits gargantuesques qui mastiquent dans la solitude des espaces... Oasis périssables des immondices.

Blattes, scarabées, charançons, rats et vers repoussants. Citadins étranges de quartiers incertains, zones hautement peuplées où on y circule et s'y affaire sur des autoroutes osseuses. Les excavateurs se déplacent dans les fosses et les rampants progressent dans les trachées. À l'intérieur de tunnels œsophagiques, fragiles d'une architecture en décrépitude constante, l'affaissement et le glissement des tronçons sont choses communes. Dans ces ruelles incertaines, univers des organes gisants à ciel ouvert, il y a des kilomètres de voies de contournement à franchir. Les légions rouges et noires vagabondent à travers la porosité des cavernes aux parois inertes... Que de chair à excaver. De résidus à transporter. Les équipes de dépeceurs sont au travail. Fouisseurs et exciseurs sont à l'œuvre sur des chantiers en déclin. Ils se vautrent dans la mort exquise.

Dents allongées, mandibules tranchantes, bouches broyeuses et trompes poilues. Tous sont là pour prendre part au festin. Les convives s'en donnent à cœur joie. Pour que rien ne se perde.

Quand viendra enfin le dernier jour, voraces, les videurs n'auront laissé que peu de choses derrière eux. Que contrées désertes de carcasses en arêtes, squelettes jaunis par le temps et la poussière. Que paysages d'immobiles dépouilles où les incessants courants d'air des jours et des nuits traverseront encore agglomérations d'agrégats et charpentes d'ossatures lisses à faire frémir. Ruines et débris sans subsistance. Instantané des victimes du temps qui passe. Dureté de l'éphémérité des éléments. Qu'absence des regards. Quelques boucles de cheveux blonds et noir. Sur les tempes des crânes vides, deux trous béants. Qu'un bras allongé. Sa main ouverte sur le plancher. Un index recourbé, doigt nu qui traverse la gâchette d'un révolver Smith & Wesson .38 spécial. L'arme rouillée recouverte d'une toile d'araignée tendue parmi quelques détritus.

Plus qu'un vent glacial qui se lève et qui traverse la pièce, un coup de fouet au dos de la quiétude des éternités de ce que furent autrefois ces deux corps habités de vie.

Pour le meilleur ou pour le pire...

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