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Ecole nationale supérieure des travaux publics
Périples d’un amour interdit.
" Ça a duré une bonne minute. Une vraie minute. Une éternité. Le temps s'est dilaté, comme pour prolonger cet instant fatidique qui allait bouleverser à jamais la vie de Moanda. Une jeune dame, innocente et aimante, jetée en prison et privée de la présence de ses enfants. Tout cela pour le seul motif d'être tombée amoureuse de celui qu'elle n'aurait jamais dû aimer.
L'histoire de Moanda débuta dans les terres arides du Nord-Cameroun, au sein d'une famille pauvre en quête d'un avenir meilleur. Guidée par l'espoir, elle migra vers le centre-ville de Yaoundé, où sa mère avait trouvé du travail en tant que ménagère chez les Assiga, une puissante famille de l'aristocratie Ewondo.
C'est lorsqu'elle donna un coup de main à sa mère, que Moanda fit la rencontre d'Ayé, le benjamin des Assiga. Deux âmes en éveil, l'un de deux ans son aîné, l'autre de la condition la plus modeste. Une attention en entraînant une autre, un amour naquit à l'insu de leurs familles. Une passion ardente qui bravait les interdits, mais qui était vouée à un destin tumultueux.
L'amour se nourrissait de la fragilité de leurs rencontres furtives, et des regards complices. Mais le voile de la clandestinité ne pouvait dissimuler leur secret éternellement. La grossesse de Moanda, fit surface, emplissant Ayé de joie mais éveillant la fureur de Dame Bernadette, sa belle-mère.
Ayé avait retrouvé sa mère dans le salon, couchée sur le canapé, parcourant une revue italienne de mode. Il s'assis à ses côtés et dit :
Ayé : Mère, j'ai quelque chose d'important à vous dire, une très bonne nouvelle.
Mère : Les résultats du baccalauréat sont sortis ? Merci seigneur !
Ayé : Non mère, les résultats ne sont pas encore sortis, et c'est quelque chose de plus important encore.
Mère : Hum ! Je t'écoute.
Ayé : Je suis en couple avec Moanda, et elle est enceinte de notre enfant.
Mère : Hé Anti ! Comment oses-tu me parler ainsi, Ayé ? Une femme pauvre, tombée enceinte de notre sang ? Seigneur viens à mon secours !
Ayé : Mère, Moanda est une femme extraordinaire, et notre enfant portera en lui la force de notre amour.
Mère : Ne me parle pas d'amour, Ayé ! Cette fille n'est rien de plus qu'une pauvre Nkassa. Tu veux abaisser notre lignée en mêlant notre sang à de telles bassesses ?
Ayé : Mère, je vous en prie, comprenez que notre bonheur ne dépend pas de l'argent ou du statut social.
Mère : Tu parles de bonheur, mais tu ne réalises pas les conséquences de tes actes, Ayé. Penses-tu sérieusement que cette femme et son enfant seront acceptés par notre entourage ? Ekié !
Ayé : Mère, l'acceptation des autres ne doit pas dicter notre bonheur.
Mère : Bonheur ? Tu n'as aucune idée des regrets qui t'attendent, Ayé. Je ne serai jamais fière de toi si tu persistes dans cette folie. Ce n'est pas l'amour, c'est une illusion éphémère qui te conduira à ta perte.
Ayé : Mère, je te respecte en tant que mère de notre famille, mais je refuse de me plier à tes attentes étroites. Je suivrai mon cœur et je resterai fidèle à Moanda, peu importe les conséquences.
Mère : Puisse-tu rapidement ouvrir les yeux, Ayé. Mais sache que si tu persistes dans cette voie, tu seras seul, abandonné par ceux qui te soutiennent. Réfléchis bien à ce que tu sacrifies pour cet amour illusoire. Okalga ! (Elle quitta brusquement la pièce en claquant violemment la porte).
C'est sur ces mots que se termina notre dispute. Je restais très surpris de la réaction de maman. Que faire face à sa colère et à son rejet ? C'est vrai que je ne manque de rien, de plus je suis son seul fils, ne devrais-je pas l'écouter vu qu'elle a plus d'expérience que moi ? Moanda m'aime éperdument, je sais que notre amour est sincère, ne devrais-je pas me battre pour ma progéniture ?
Ayé cogite, cogite, cogite comme si sa vie en dépendait, sachant que son futur en dépendra. Il était tellement plongé dans les pensées qu'il finit par s'endormir dans le canapé du salon.
De son côté, Dame Bernadette, la belle-mère de Moanda, autrefois bienveillante et généreuse envers elle, ne pouvait accepter que son précieux fils se mêle à une femme de condition modeste et de culture étrangère. Elle exigea de Moanda de mettre fin à sa grossesse, craignant que son sang ne soit dilué par celui d'une pauvre Nkassa.
Moanda, mêlée de joie et de désillusion, prit la fuite et trouva refuge dans son village natal de Figuil au Nord Cameroun. C'est là qu'elle donna naissance à deux magnifiques garçons, Nasser et Abdoul. Mais Dame Bernadette avait un plan machiavélique pour les récupérer. Elle fit miroiter à Moanda la possibilité d'un retour à Yaoundé, en prétendant vouloir rétablir la relation entre elle et Ayé.
Le cœur rempli d'espoir, et contre la volonté de sa famille, Moanda accepta de revenir à la capitale, se laissant aveugler par la perspective de voir ses enfants grandir avec leur père. Mais à son arrivée, le piège se referma sur elle. Les autorités l'arrêtèrent et l'emmenèrent en prison, tandis que Dame Bernadette s'appropriait ses enfants.
Dans les murs froids et inhospitaliers de la prison, Moanda ressentait le poids de sa naïveté et de son amour aveugle. Elle repensait à la conversation où elle annonça sa grossesse à Ayé, confrontant la désapprobation de Dame Bernadette et la peur de perdre son amoureux. Et elle se souvenait de leur dernière rencontre avec leurs parents, où Dame Bernadette annonça sa décision implacable de mettre fin à cette relation.
Dans sa cellule solitaire, Moanda ressentait de la désillusion face à l'abus de pouvoir de Dame Bernadette, qui avait pris le contrôle total de sa vie. Ayé, impuissant face à l'autorité de sa mère malgré sa majorité, partageait ces mêmes sentiments d'impuissance, sans pouvoir agir pour sauver sa bien-aimée et leur descendance.
La nuit sombre s'installe et les barreaux de la prison se dressent devant moi, me rappelant ma condition d'opprimée. Les larmes dévalent mes joues. Je me recroqueville dans un coin de ma cellule solitaire, cherchant un peu de réconfort dans mes pensées.
Je me remémore mon père, parti bien trop tôt de ce monde, me laissant seule dans ce chemin tortueux. Sa voix résonne dans ma mémoire, me rappelant de me méfier de la malveillance de Dame Bernadette. Oh père, si tu étais encore ici, tu aurais séché mes larmes.
Et mes enfants, les précieux trésors qui ont été arrachés de mes bras. Leurs rires et leurs regards innocents me manquent cruellement. Je les imagine grandir sans ma tendresse, sans mon amour maternel protecteur. La pensée me consume, me motivant à lutter encore plus fort pour les retrouver.
Mais au milieu de toutes ces pensées douloureuses, je sens une force émerger en moi. L'amour, cette force puissante et inébranlable, m'envahit et tisse une lueur d'espoir dans l'obscurité. Je refuse de me laisser briser par les murs froids de cette prison, par l'oppression implacable de Dame Bernadette.
Avec une détermination féroce, je décide de me battre pour surmonter cette épreuve au nom de l'amour. Je sèche mes larmes, redressant fièrement ma tête. Je suis Moanda, une femme forte et résiliente. Et je sais que, quelle que soit l'adversité qui se dresse devant moi, mon amour pour Ayé et le désir de retrouver mes enfants me guideront vers la liberté.
La nuit continue à s'étendre, enveloppant ma douleur dans son manteau sombre. Mais je sais qu'au-delà des barreaux de cette prison, l'aube de la liberté attend son heure. Et je serai là, prête à embrasser la lumière du jour, prête à braver tous les obstacles au nom de l'amour.
Le récit de Moanda s'achève avec une note de suspens. À sa sortie de prison, elle découvrit avec effroi que ses enfants avaient été envoyés très loin de Yaoundé, dans un lieu inconnu d'Ayé. La lutte pour retrouver ses enfants venait de commencer, plongeant Moanda et Ayé dans l'incertitude et l'angoisse.
La route vers la rédemption est semée d'embûches, mais l'amour de Moanda pour ses enfants et ne faiblira pas. Le lecteur reste en suspens, captivé par le destin incertain de Moanda et de sa quête pour retrouver ses enfants.