Suis-je dans le noir ou ai je les yeux fermés ? Peut-être les deux. Qui sait si la vie est prédéfinie, que nous la subissons juste ou si cest bien nous qui la bâtissons. Je croyais être celui que les anciens appellent « un homme lucide ». Mais quest-ce que la lucidité ? Est ce se rendre compte dêtre dans un état lorsquon en est conscient et que nos sens nous le font savoir ? Et si l'on fait fi de leurs voix serait on toujours lucide ? Peut on être dans une chambre éclairée, fermer les yeux et se dire être dans l'obscurité ? Bien sûr que non. Ce n'est que lorsque les yeux sont ouverts et qu'aucune lumière n'est présente que l'on est dans le noir. Alors je devais juste avoir les yeux fermés.
Je les ouvris timidement. Des yeux rougis et endoloris par d'innombrables nuits sans sommeil dont je peinais à garder ouverts et/ou était ce dû, me souvenant que mon dernier repas remontait à très loin, à une famine que je savais encourir mais dont je ne ressentais nullement les symptômes aussi bien que mon estomac ne semblait rien me réclamer. Affaiblis, mes yeux ne me permettaient que de discerner des ombrelles telles des tâches, petites et noires, se déplaçant çà et là sur un fonds de lumières jaunes virant quelques fois à l'oranger, lumières qui s'élevaient et s'abaissaient à la manière d'une flamme de bougie caressée par les vents et que, je savais chaudes et à quelques mètres de moi.
Malgré mes efforts de vision, rien ne prenait forme et je voyais trouble comme embrumé, et aussi, je n'entendais rien. Je me sentais être en léthargie, assommé, engourdie quoique je sentais le reste de mon corps, vidé, comme lorsque l'on a tout donné après un long triathlon. Seulement, je crois avoir fait bien plus que courir, nager ou même pédaler tellement bien plus que le simple fait d'y repenser, à tous ces efforts, m'épuisait encore bien davantage.
Le brouillard se dissipant, un fourmillement me parcourut le corps, de la tête jusqu'aux pieds comme si une nuée de fourmis venait d'établir une colonie sur moi. Ensuite, lointaines, des sons comme des pas lents et légers résonnèrent puis devinrent de plus en plus proches et intenses ressemblant cette fois ci à des tam-tams joués à l'occasion d'une immense parade et, soudain des grondements me parvinrent, me foudroyèrent en même temps que je sentis une force me compresser à intervalles réguliers le thorax. C'était mon cœur que je sentais vibrer, relancé, battre comme s'il s'était à un moment donné arrêté de le faire, pulsant à une vitesse folle telle un torrent ma liqueur de vie, mon sang, à travers mes veines, artères et capillaires que je sentis frémir, gémir d'une douleur un peu saillante sur son passage. Ceci me fit comme une décharge électrique et finit par m'éveiller entièrement en irriguant chaque parcelle de mon corps et redonnant ainsi un peu de vie et de crédit à mon esprit écorché vif.
Je reprenais conscience et mon ouïe me gratifiait de sa capacité. J'entendis alors des sifflements stridents qui me percutèrent les tympans à m'en donner une vive douleur à la tête, signe que mes oreilles étaient encore ensommeillées par ce réveil abrupt car après quelques instants, se brochant comme sur radio, sur la bonne fréquence, ces sifflements se changèrent en un son, asynchrone de plusieurs sirènes, policières et ambulancières qui résonnaient autour de moi accompagné par un vacarme de voix d'hommes et de femmes qui s'y mêlaient. À cela s'ajoutait le crépissement d'une chose. Chose que j'avais sur le bout de la longue sans pour autant que je ne puisse y mettre un nom surtout que son odeur, âcre et poussiéreux, que je reniflais d'ailleurs, me le remémorait vaguement avec une pointe de douleur assénée à l'aide d'une enclume d'affliction à mon cœur qui subissait une tourmente des plus infernales : la solitude d'une âme sœur privée de sa moitié, un corps sans âme.
C'est à ce moment, en proie à une réflexion sur le nom de cette chose crépissante, malodorante et suffoquante, que ma vue, décida t'elle de s'éclaircir afin de m'en donner la réponse. Hélas mieux aurait il fallut que je restasse terrer dans mon ignorance, que je demeurasse sourd afin qu'elle ne puissa susciter mon odorat et que lui à son tour ne fit de même pour ma vue, afin que je restai aveugle dans ma brume salvatrice car devant la scène qui se présenta à moi, je tressaillis d'horreur. Ce qui se déroulait devant mes yeux en lambeaux, était un spectacle des plus affreux. J'essayais aussitôt de détourner le regard mais mon corps, estomaqué, ne daignait répondre à mes supplications. Je fis même des doléances à ces gouttes d'eau salées, guerrières redoutables, lesquelles débordent à la moindre crue, à la moindre montée de tristesse et de malheur pour rendre supportable cette transgression mais aucune d'elles, aussi fortes et vaillantes fussent elles, ne répondit à ma détresse. Sans doute parce qu'elles savaient déjà qu'elles ne feraient que l'effet d'une goutte d'eau débordant d'un océan. En effet, comment ces pauvresses pouvaient elles apaiser mon malheur ? Comment ne pas comprendre leur impuissance ainsi que leur abdication face à ce monstre, ce tsunami, qu'elles savaient me dépouillait de tant et ravageait tout, et, que ce vide et ce malheur, ne seront à jamais être combler ni même attendri que ce soit par elles ou par le temps car n'est ce pas que je perdais tout ?
Les ombrelles et les lumières bien qu'au ralentie, se dessinèrent et me parurent telles qu'elles étaient : des flammes gigantesques si éblouissantes et éclatantes qu'elles déchiraient littéralement la nuit de leurs couleurs flamboyantes et, hurlant au ciel et aux étoiles telle une meute de loups affamés et ayant trouvé une proie bien faible et bien tendre, en l'occurrence une veille bâtie en bois, ma maison, mon seul refuge, se lancent en festin. C'était tout ce qui me restait de ma défunte épouse. Elle était ma connexion aux autres. Mes yeux pour voir le monde. La femme de mes réalités.
Ce bois brûlant, chargeait l'air déjà suffoquante de tous mes souvenirs et de toute ma vie, qui se réduisaient à vue d'œil en un tas de cendres et se reflétaient dans cette fumée grisâtre, s'envolant vers des contrées lointaines où je savais, ne plus les revoir. Dans ce brouillard, j'en aperçu un qui se développa sous mes yeux, comme projetée par vidéo projecteur et qui plus est, me fit souvenir le nom de ce bois : de l'ébène. Je souris intérieurement à la chaleur de ce souvenir, au réconfort qu'il apportait à ma tourmente car ce fut le premier de notre vie de couple que nous ayons, elle et moi, conçus dans cette maison. Nous étions en hiver et la construction de la maison venait d'être achevée. Nous décidâmes ma femme et moi, de s'y rendre. Seulement une neige impossible se mit à pleuvoir nous obligeant à y passer nuit. Sans couverts ni bois de chauffe nous avions utilisé le bois d'ébène restant de la construction. L'air empestait, nous enfumait mais nous, allongés l'un à côté de l'autre, dans notre bulle, nous endormions paisiblement. Celui là aussi s'en allait. Voilà que mon cœur se mit à tambouriner fort, tellement fort, à cogner dur et douloureusement dans ma poitrine, à tel point que si la nature lui avait doté de membres inférieurs il s'en aurait volontiers aller, loin, très loin hurler sa peine. Sur cette crémation car, il ne restait plus grand chose à sauver, sur laquelle des hommes et des femmes, des pompiers revêtus de leurs casques, armures et de leurs lances à eau tentaient tant bien que mal à tour de manette d'en freiner l'appétit dévorant, japercevais au travers une étrange silhouette sombre, lente et sereine, madressant comme un tendre au revoir.
À cette épreuve, mes forces m'abandonnèrent et mon subconscient, bien que je ne m'y disposais pas, me proposa au repos avec une lourdeur, une peine qui me conduisait au plus profond des abîmes. Je m'évanouissais lentement avec une amertume, une larme roulante sur ma joue car au bûcher était une innocente, pleine de ma vie.
Je les ouvris timidement. Des yeux rougis et endoloris par d'innombrables nuits sans sommeil dont je peinais à garder ouverts et/ou était ce dû, me souvenant que mon dernier repas remontait à très loin, à une famine que je savais encourir mais dont je ne ressentais nullement les symptômes aussi bien que mon estomac ne semblait rien me réclamer. Affaiblis, mes yeux ne me permettaient que de discerner des ombrelles telles des tâches, petites et noires, se déplaçant çà et là sur un fonds de lumières jaunes virant quelques fois à l'oranger, lumières qui s'élevaient et s'abaissaient à la manière d'une flamme de bougie caressée par les vents et que, je savais chaudes et à quelques mètres de moi.
Malgré mes efforts de vision, rien ne prenait forme et je voyais trouble comme embrumé, et aussi, je n'entendais rien. Je me sentais être en léthargie, assommé, engourdie quoique je sentais le reste de mon corps, vidé, comme lorsque l'on a tout donné après un long triathlon. Seulement, je crois avoir fait bien plus que courir, nager ou même pédaler tellement bien plus que le simple fait d'y repenser, à tous ces efforts, m'épuisait encore bien davantage.
Le brouillard se dissipant, un fourmillement me parcourut le corps, de la tête jusqu'aux pieds comme si une nuée de fourmis venait d'établir une colonie sur moi. Ensuite, lointaines, des sons comme des pas lents et légers résonnèrent puis devinrent de plus en plus proches et intenses ressemblant cette fois ci à des tam-tams joués à l'occasion d'une immense parade et, soudain des grondements me parvinrent, me foudroyèrent en même temps que je sentis une force me compresser à intervalles réguliers le thorax. C'était mon cœur que je sentais vibrer, relancé, battre comme s'il s'était à un moment donné arrêté de le faire, pulsant à une vitesse folle telle un torrent ma liqueur de vie, mon sang, à travers mes veines, artères et capillaires que je sentis frémir, gémir d'une douleur un peu saillante sur son passage. Ceci me fit comme une décharge électrique et finit par m'éveiller entièrement en irriguant chaque parcelle de mon corps et redonnant ainsi un peu de vie et de crédit à mon esprit écorché vif.
Je reprenais conscience et mon ouïe me gratifiait de sa capacité. J'entendis alors des sifflements stridents qui me percutèrent les tympans à m'en donner une vive douleur à la tête, signe que mes oreilles étaient encore ensommeillées par ce réveil abrupt car après quelques instants, se brochant comme sur radio, sur la bonne fréquence, ces sifflements se changèrent en un son, asynchrone de plusieurs sirènes, policières et ambulancières qui résonnaient autour de moi accompagné par un vacarme de voix d'hommes et de femmes qui s'y mêlaient. À cela s'ajoutait le crépissement d'une chose. Chose que j'avais sur le bout de la longue sans pour autant que je ne puisse y mettre un nom surtout que son odeur, âcre et poussiéreux, que je reniflais d'ailleurs, me le remémorait vaguement avec une pointe de douleur assénée à l'aide d'une enclume d'affliction à mon cœur qui subissait une tourmente des plus infernales : la solitude d'une âme sœur privée de sa moitié, un corps sans âme.
C'est à ce moment, en proie à une réflexion sur le nom de cette chose crépissante, malodorante et suffoquante, que ma vue, décida t'elle de s'éclaircir afin de m'en donner la réponse. Hélas mieux aurait il fallut que je restasse terrer dans mon ignorance, que je demeurasse sourd afin qu'elle ne puissa susciter mon odorat et que lui à son tour ne fit de même pour ma vue, afin que je restai aveugle dans ma brume salvatrice car devant la scène qui se présenta à moi, je tressaillis d'horreur. Ce qui se déroulait devant mes yeux en lambeaux, était un spectacle des plus affreux. J'essayais aussitôt de détourner le regard mais mon corps, estomaqué, ne daignait répondre à mes supplications. Je fis même des doléances à ces gouttes d'eau salées, guerrières redoutables, lesquelles débordent à la moindre crue, à la moindre montée de tristesse et de malheur pour rendre supportable cette transgression mais aucune d'elles, aussi fortes et vaillantes fussent elles, ne répondit à ma détresse. Sans doute parce qu'elles savaient déjà qu'elles ne feraient que l'effet d'une goutte d'eau débordant d'un océan. En effet, comment ces pauvresses pouvaient elles apaiser mon malheur ? Comment ne pas comprendre leur impuissance ainsi que leur abdication face à ce monstre, ce tsunami, qu'elles savaient me dépouillait de tant et ravageait tout, et, que ce vide et ce malheur, ne seront à jamais être combler ni même attendri que ce soit par elles ou par le temps car n'est ce pas que je perdais tout ?
Les ombrelles et les lumières bien qu'au ralentie, se dessinèrent et me parurent telles qu'elles étaient : des flammes gigantesques si éblouissantes et éclatantes qu'elles déchiraient littéralement la nuit de leurs couleurs flamboyantes et, hurlant au ciel et aux étoiles telle une meute de loups affamés et ayant trouvé une proie bien faible et bien tendre, en l'occurrence une veille bâtie en bois, ma maison, mon seul refuge, se lancent en festin. C'était tout ce qui me restait de ma défunte épouse. Elle était ma connexion aux autres. Mes yeux pour voir le monde. La femme de mes réalités.
Ce bois brûlant, chargeait l'air déjà suffoquante de tous mes souvenirs et de toute ma vie, qui se réduisaient à vue d'œil en un tas de cendres et se reflétaient dans cette fumée grisâtre, s'envolant vers des contrées lointaines où je savais, ne plus les revoir. Dans ce brouillard, j'en aperçu un qui se développa sous mes yeux, comme projetée par vidéo projecteur et qui plus est, me fit souvenir le nom de ce bois : de l'ébène. Je souris intérieurement à la chaleur de ce souvenir, au réconfort qu'il apportait à ma tourmente car ce fut le premier de notre vie de couple que nous ayons, elle et moi, conçus dans cette maison. Nous étions en hiver et la construction de la maison venait d'être achevée. Nous décidâmes ma femme et moi, de s'y rendre. Seulement une neige impossible se mit à pleuvoir nous obligeant à y passer nuit. Sans couverts ni bois de chauffe nous avions utilisé le bois d'ébène restant de la construction. L'air empestait, nous enfumait mais nous, allongés l'un à côté de l'autre, dans notre bulle, nous endormions paisiblement. Celui là aussi s'en allait. Voilà que mon cœur se mit à tambouriner fort, tellement fort, à cogner dur et douloureusement dans ma poitrine, à tel point que si la nature lui avait doté de membres inférieurs il s'en aurait volontiers aller, loin, très loin hurler sa peine. Sur cette crémation car, il ne restait plus grand chose à sauver, sur laquelle des hommes et des femmes, des pompiers revêtus de leurs casques, armures et de leurs lances à eau tentaient tant bien que mal à tour de manette d'en freiner l'appétit dévorant, japercevais au travers une étrange silhouette sombre, lente et sereine, madressant comme un tendre au revoir.
À cette épreuve, mes forces m'abandonnèrent et mon subconscient, bien que je ne m'y disposais pas, me proposa au repos avec une lourdeur, une peine qui me conduisait au plus profond des abîmes. Je m'évanouissais lentement avec une amertume, une larme roulante sur ma joue car au bûcher était une innocente, pleine de ma vie.