Nous hésitions à regagner le vestiaire de crainte que pendant la traversée du couloir, ne resurgissent toutes nos erreurs. J'imaginais déjà le coach nous dire « bon les gars, il va falloir vous sortir les doigts du... », il n'en fut rien. Il laissa planer un silence de quelques secondes qui parut une éternité comme pour laisser le temps à la prise de conscience collective.
Il commença : « bon les gars, cette première mi-temps a été catastrophique, nos actions ont été égoïstes voire destructrices pour nos chances de réussite, mais rien n'est encore joué... ».
Même si les esprits étaient en surchauffe, le coach savait trouver les mots pour faire baisser la température de quelques degrés. Il expliqua que nous avions dépensé toute notre énergie dès les premières minutes sans même tenter de la préserver et d'être en capacité de la renouveler. Je ne sais pas si tout le monde avait compris la métaphore qui suivait mais il souhaitait qu'on arrête de courir au diesel et qu'il était temps de passer à l'électrique. Il adorait jouer avec les mots. Il fallait arrêter de nourrir le jeu avec des passes longues mais jouer la proximité, produire et consommer du jeu au plus près les uns des autres.
« Non mais franchement, et vos tirs, trop de déchets ! Vous allez me réduire tout ça. Plantez, plantez ! » disait-il haut et fort. Il était temps pour nous de recycler nos vieilles techniques pour en élaborer de nouvelles. La stratégie première était d'éviter de gaspiller nos ressources et d'agir avec efficacité. J'étais stupéfait par l'ambiance du vestiaire, pas un mot ! Aucun d'entre nous ne s'était précipité sur son téléphone portable, comme d'accoutumée, pour envoyer un ou deux messages ou vérifier le nombre de pouces levés, une pause numérique qui prenait tout son sens.
Il n'avait pas tort non plus d'insister sur nos responsabilités. Au sortir du terrain, nous étions sceptiques sur la compétence de l'arbitre, comme si rejeter la faute sur un autre allait nous dispenser d'agir, comme par fatalité. « Si nos actions sont précises, calculées, aucun arbitre bon ou mauvais ne pourra les sanctionner » martelait-il.
On ne pouvait pas dire que l'équipe adverse était meilleure que nous, loin de là, mais elle avait construit, construit sans cesse, elle évoluait tout du long, innovant à chaque action, avec aussi bon nombre d'individualités laissant toutefois quelques joueurs sur le carreau ou plutôt sur le banc, s'imposant progressivement sur tout le terrain en ne nous laissant plus aucun espace de liberté comme privés d'air. Nous avions laissé faire, pensant que, de toutes façons, la partie était pliée.
20:30 c'était le score que le coach attendait pour la fin de la deuxième mi-temps pour les visiteurs que nous étions. Ces trente minutes de jeu restantes paraissaient courtes mais nous étions prêts à tout donner car comme le disait notre coach « la victoire est entre nos mains ».