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Ils déjeunaient ensemble comme chaque mardi.
Le mardi toujours. C'était ça. Leur jour, leur moment, un instant entre eux mais qui ne prêtait à aucune conséquence. Du moins c'est ce qu'ils se racontaient. Qu'un déjeuner ce n'était rien sinon pas grand-chose, que chacun de son côté de la table au milieu et à la vue des autres, ça restait innocent, convenable, qu'aucune limite n'était ainsi franchie.
Leurs regards qui s'attisaient, leurs mains qui se frôlaient, et la façon dont il se penchait parfois vers son oreille, juste dans le creux, pour lui souffler quelques mots moins anodins, ce n'était rien non plus. Si l'appétit de l'autre s'aiguisait, rien n'était consommé, chacun repartait de son côté, retrouver son autre, la moitié de la paire officielle.
Ce n'était vraiment rien, qu'un petit jeu. Un jeu malgré eux.
Un jour elle était entrée là. Il déjeunait seul. Elle s'était installée à la table d'à côté, seule également.
Le serveur avait échangé leur commande, ils n'avaient rien dit, amusés, goûtant le plat de l'autre, finissant à la même table à partager la même bouteille. En commandant une autre. Fixant un autre déjeuner déjà.
Ils n'étaient pas responsables, c'était le hasard, la destinée des croisements auxquels on n'échappe pas.
Ils avaient fixé les règles. Les règles les protégeaient de tout dérapage.
Un jour, un seul, un déjeuner, l'addition et un café.
Il arrivait avant elle, elle repartait avant lui. Aucune confidence trop intime ni trop personnelle. Ce qu'ils faisaient dans la vie, la façon dont ils occupaient les autres déjeuners de la semaine, ceux des week-ends, rien ne filtrait, pas même leur prénom : ils en changeaient chaque mardi.
Inconnus et intimes à la fois. La seule certitude était de trouver l'autre à la même table, le même jour, à la même heure.
Elle avait mordu sa lèvre, il lui avait resservi du vin.
Leurs jambes s'étaient frôlées l'espace d'une demi-seconde. Une sensation de chaleur lui remontait pourtant le long de la cuisse.
Elle avait dit alors, l'on pourrait se retrouver sans se voir, se toucher sans se voir, ce ne serait pas réel tout à fait, une seule et unique fois. Ce ne serait rien, à peine une caresse, une parenthèse blanche.
Il n'avait rien répondu. Ils avaient vidé leurs verres sans un mot, sans se quitter des yeux, mais sans un mot. Elle était partie avant lui. Il était resté longtemps après, songeur, triant et alignant les miettes de pain écrasées sur la nappe blanche. Il s'était rendu aux toilettes, avait passé de l'eau sur son visage, s'était regardé longuement dans le miroir fendillé au-dessus du lavabo. Il cherchait quelque chose dans ses traits, se fixant durement, mais il avait beau chercher, il n'arrivait pas à trouver la moindre trace de culpabilité.
Ils n'en n'avaient plus reparlé. Ni le mardi suivant, ni celui d'après.
L'idée restait là pourtant, elle flottait en suspens. Accentuait la pression de leurs mains quand elles se frôlaient. Caressait sa bouche quand elle la trempait dans son verre de vin.
Ce mardi-là, elle portait une robe rouge, aux manches courtes relevées d'un fin liseré blanc. Il avait son costume noir élégant et sa chemise blanche des autres mardis. La salle s'était vidée à petit, elle avait dépassé l'heure. Il n'avait rien dit. Il fixait leurs serviettes froissées chacune de leur côté. Il s'était approché de son oreille, y avait soufflé quelque chose. Elle s'était levée, il l'avait rejointe dans le vestibule. Seul le voile d'un rideau tendu par le vent les séparait encore. Ils s'étaient rapprochés un peu plus. Rien qu'un jeu innocent, un souffle chaud, celui de sa bouche contre la sienne au-travers du voile, la pression de son corps, et ses mains qui couraient le long de ses cuisses. Presque rien. Une légère brûlure sous le coton immaculé. Il y avait eu un bruit de vaisselle, et soudain elle s'était arrachée à son contact. Disparue.
C'est un autre mardi. Il se tient à la même table. Il attend. Cinq, dix minutes. Elle est en retard. Il se répète que ce n'est rien. Il pense à son souffle, à ses lèvres, à sa façon de le mordiller au travers du tissu. Les règles sont fixées. Les règles les protègent. Elle va venir, c'est certain. Les voiles, c'était son idée à elle.
Le mardi toujours. C'était ça. Leur jour, leur moment, un instant entre eux mais qui ne prêtait à aucune conséquence. Du moins c'est ce qu'ils se racontaient. Qu'un déjeuner ce n'était rien sinon pas grand-chose, que chacun de son côté de la table au milieu et à la vue des autres, ça restait innocent, convenable, qu'aucune limite n'était ainsi franchie.
Leurs regards qui s'attisaient, leurs mains qui se frôlaient, et la façon dont il se penchait parfois vers son oreille, juste dans le creux, pour lui souffler quelques mots moins anodins, ce n'était rien non plus. Si l'appétit de l'autre s'aiguisait, rien n'était consommé, chacun repartait de son côté, retrouver son autre, la moitié de la paire officielle.
Ce n'était vraiment rien, qu'un petit jeu. Un jeu malgré eux.
Un jour elle était entrée là. Il déjeunait seul. Elle s'était installée à la table d'à côté, seule également.
Le serveur avait échangé leur commande, ils n'avaient rien dit, amusés, goûtant le plat de l'autre, finissant à la même table à partager la même bouteille. En commandant une autre. Fixant un autre déjeuner déjà.
Ils n'étaient pas responsables, c'était le hasard, la destinée des croisements auxquels on n'échappe pas.
Ils avaient fixé les règles. Les règles les protégeaient de tout dérapage.
Un jour, un seul, un déjeuner, l'addition et un café.
Il arrivait avant elle, elle repartait avant lui. Aucune confidence trop intime ni trop personnelle. Ce qu'ils faisaient dans la vie, la façon dont ils occupaient les autres déjeuners de la semaine, ceux des week-ends, rien ne filtrait, pas même leur prénom : ils en changeaient chaque mardi.
Inconnus et intimes à la fois. La seule certitude était de trouver l'autre à la même table, le même jour, à la même heure.
Elle avait mordu sa lèvre, il lui avait resservi du vin.
Leurs jambes s'étaient frôlées l'espace d'une demi-seconde. Une sensation de chaleur lui remontait pourtant le long de la cuisse.
Elle avait dit alors, l'on pourrait se retrouver sans se voir, se toucher sans se voir, ce ne serait pas réel tout à fait, une seule et unique fois. Ce ne serait rien, à peine une caresse, une parenthèse blanche.
Il n'avait rien répondu. Ils avaient vidé leurs verres sans un mot, sans se quitter des yeux, mais sans un mot. Elle était partie avant lui. Il était resté longtemps après, songeur, triant et alignant les miettes de pain écrasées sur la nappe blanche. Il s'était rendu aux toilettes, avait passé de l'eau sur son visage, s'était regardé longuement dans le miroir fendillé au-dessus du lavabo. Il cherchait quelque chose dans ses traits, se fixant durement, mais il avait beau chercher, il n'arrivait pas à trouver la moindre trace de culpabilité.
Ils n'en n'avaient plus reparlé. Ni le mardi suivant, ni celui d'après.
L'idée restait là pourtant, elle flottait en suspens. Accentuait la pression de leurs mains quand elles se frôlaient. Caressait sa bouche quand elle la trempait dans son verre de vin.
Ce mardi-là, elle portait une robe rouge, aux manches courtes relevées d'un fin liseré blanc. Il avait son costume noir élégant et sa chemise blanche des autres mardis. La salle s'était vidée à petit, elle avait dépassé l'heure. Il n'avait rien dit. Il fixait leurs serviettes froissées chacune de leur côté. Il s'était approché de son oreille, y avait soufflé quelque chose. Elle s'était levée, il l'avait rejointe dans le vestibule. Seul le voile d'un rideau tendu par le vent les séparait encore. Ils s'étaient rapprochés un peu plus. Rien qu'un jeu innocent, un souffle chaud, celui de sa bouche contre la sienne au-travers du voile, la pression de son corps, et ses mains qui couraient le long de ses cuisses. Presque rien. Une légère brûlure sous le coton immaculé. Il y avait eu un bruit de vaisselle, et soudain elle s'était arrachée à son contact. Disparue.
C'est un autre mardi. Il se tient à la même table. Il attend. Cinq, dix minutes. Elle est en retard. Il se répète que ce n'est rien. Il pense à son souffle, à ses lèvres, à sa façon de le mordiller au travers du tissu. Les règles sont fixées. Les règles les protègent. Elle va venir, c'est certain. Les voiles, c'était son idée à elle.
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Pourquoi on a aimé ?
Voilà une romance légère, toute en douceur et volupté... qui se cache derrière les voiles d’une écriture vaporeuse pour nous prendre par la
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