100g de farine
80g de sucre
4 œufs
Séparer les blancs des jaunes dans un récipient. Mélanger les jaunes et le sucre.
Monter les blancs en neige et les rajouter à la première préparation. Terminer par la farine.
Tellement obligée de me cacher dans cette baraque pour ne pas que mes gardes du corps débiles touchent au récit de ma triste vie ! C’est sûr la cuisine et eux, ça fait 2...
2/08/2012
Encore un appel des flics, un de mes deux grands frères a encore fait une connerie.
Y’en a marre, on trime avec ma mère pour rapporter de l’argent et eux se permettent encore de déconner. Je suis à bout, besoin de respirer, de sortir de cette cité qui m’enferme entre quatre murs.
Mais il y a mes petits frères, mes bébés, mes amours ! Je ne les laisserai pas, je me le suis promis, je les sortirai d’ici. Allez, il est l’heure d’aller préparer le repas. Pas le temps d’écrire plus aujourd’hui, j’ai tout le ménage à faire.
8/08/2012
Aujourd’hui, c’était trop bien ! J’ai pu sortir 1h au city et regarder les garçons jouer au foot. Bien-sûr je n’ai jamais le droit de jouer... Et puis de toute façon, mon sport c’est le handball ! Les Jeux Olympiques me font rêver, les matchs sont ma bouffée d’oxygène. Je suis sûre et certaine que les garçons seront champions !
12/08/2012
La France EST CHAMPIONNE ! Quelle après-midi devant le match ! Même mes petits frères ont crié pour le dernier but des Français. Pas le temps d’écrire plus, ma mère m’appelle !
13/08/2012
Malheureusement ma joie est de courte durée. Ménage avec ma mère, j’ai commencé mon travail depuis début août. Le lundi on est dans un immeuble miteux ! J’attends tellement les jours suivants, où on est dans le gymnase où s’entraînent les pros ! Je les admire tellement. Les cours ne vont pas me manquer, je ne reprends pas le lycée, c’est terminé pour moi, il faut absolument qu’on ramène de la thune. J’ai donc accepté ce boulot et je ne m’en plains pas, si cela peut soulager ma mère et sauver mes petits frères.
23/08/2012
Aujourd’hui comme chaque mercredi je suis allée aider ma mère à faire le ménage au gymnase du Vercors. Quand je nettoyais les tribunes j’ai reçu un ballon d’une joueuse en pleine tête. Je l’ai renvoyé immédiatement à un des deux entraîneurs.
Vendredi 24/08/2012
Aujourd’hui je suis retournée aider ma mère au gymnase en espérant retoucher le ballon. Les trois coups de sifflet retentissent, fin de l’entraînement, il nous reste encore les toilettes à faire. En me dirigeant vers les vestiaires, le coach s’avance vers moi. Au départ, je pense qu’il cherche un ballon, je m’efface et change ma direction. Là, il me suit et m’interpelle. C’est à MOI, MOI Nour fille de cité qui fait juste le ménage, mes jambes tremblent, ma gorge se serre. Les mots ne me viennent pas, je l’ai juste écouté :
« Bonjour Nora, je sais que tu aides ta mère à travailler au gymnase, des filles de l’équipe te connaissent. Hier en me renvoyant le ballon je me suis aperçu de ta précision, de ta force et du fait que tu sois gauchère. Veux-tu venir essayer mercredi prochain de t’entraîner avec notre équipe de -18 CF ? »
C’est la plus belle de mes rencontres, même si je ne m’appelle pas Nora, moi c’est Nour.
28/08/2012
Trop contente ! Aujourd’hui, 1er entraînement avec l’équipe des -18 CF et ça ne sera pas mon dernier. Pourquoi je dis ça ? Car le coach veut me revoir !
Forcément j’ai eu un peu de mal à m’adapter. Mais heureusement les entraineurs m’ont aidé à comprendre comment placer mes appuis, sauter en extension, tirer, etc. Ce soir je suis épuisée mais ravie d’avoir commencé ce sport que je regardais en cachette à la télé ou en passant la serpillière au gymnase.
3/09/2014
Je viens de retomber sur ce carnet pendant mon déménagent. Waaaouh ça a beaucoup changé pour moi. J’ai signé au Centre de Formation à Bourg-de-Péage, ce qui veut dire que je m’entraîne tous les jours sans relâche et sans répit. Le niveau est vraiment au-dessus, je fais beaucoup d’efforts ! Je m’arrache pour être à la hauteur de leur confiance. J’ai enfin pu sortir de la cité, je suis indépendante et j’arrive même à payer quelques courses à ma maman. Je continue à l’aider car elle est très fatiguée par les coups de la vie.
13/03/2017
Ce matin je me suis réveillée, je me suis préparée pour aller à l’entraînement. Une fois que celui-ci terminé, l’entraîneur de la D1 m’a pris à part en me disant qu’il voudrait me parler après l’entraînement. Je te laisse imaginer ma joie. À 18h15 je le rejoins dans son bureau et il me dit qu’il veut aborder mon avenir. Il dit que j’ai un potentiel énorme et un talent inné. Aussi que je pourrais devenir une joueuse pro dans son équipe, être une pièce maîtresse de l’équipe, qu’ils avaient besoin de moi. Cette nouvelle m’a vraiment surprise ; je n’aurais jamais imaginé en arriver là un jour. Sans hésitation j’accepte la proposition ! Je n’ai pas besoin des dix jours de réflexion qu’il me laissait. Mon rêve se réalise et je n’arrive pas à y croire même en l’écrivant.
Ma mère un jour m’a dit « tous tes sacrifices seront récompensés » : elle avait vu juste. En ce moment mes frères sont encore dehors sûrement en train de faire leurs activités qui me gonflent. Ma mère, comme d’habitude, doit faire la vaisselle. Puis il y a moi, tellement heureuse ! Je n’arrive toujours pas à y croire : je suis pro !
01/10/2017
Ma saison se passe tellement bien ! Au final, j’ai eu quatre clubs de D1 qui m’ont appelée ! J’ai évidemment écouté le choix du cœur, BDP c’est ancré ! Ils ont tellement fait pour moi.
Je vais enfin pouvoir sortir mes petits frères et subvenir à leurs besoins avec mon contrat de deux saisons. Si je continue comme ça, dans quelques années, je rêve d’une maison à la campagne au pied des montagnes.
14/05/2018
ALEERTEEEEE !!! Obligée encore de l’écrire pour pouvoir y croire ! Je vis un rêve éveillé, ils sont loin les ménages avec maman. Un mail d’Olivier Krumbholz est arrivé ce matin : je suis sélectionnée pour le prochain stage de l’équipe de France.
18/06/2018
Première journée du stage, visite médicale. Il détecte quelque chose d’anormal et me demande d’aller passer des examens complémentaires. Arrivée à l’hôpital, un médecin me prend en urgence pour me faire passer une échographie. Il revient me voir et m’annonce que je fais un déni de grossesse, je peux accoucher très prochainement ! Je n’ai même pas eu le temps de prévenir mes proches et mon rêve d’équipe de France se transforme en cauchemar. Mon ventre a gonflé de plus en plus et je prends conscience que je vais être mère d’ici peu. Je suis sous le choc et je ne sais pas comment l’annoncer à ma famille.
3h46
Je m’en souviendrai. Naissance de ma fille, Leïla. Ma mère débarque à l’hôpital dans tous ses états. Elle prend Leïla dans ces bras pour la première fois, toute émue.
8/07/2019
Ma fille se porte bien elle grandit si vite ! J’ai repris le handball et tout se passe à merveille. Le seul problème est que mes frères ne savent pas pour ma fille, c’est un parcours de combattante pour leur cacher.
Le club a très bien réagi et m’épaule pour que je revienne au plus haut niveau. Je compte bien assurer sur les terrains, avoir un enfant n’est pas un handicap, bien au contraire, c’est ma force.
27/09/2019
Leïla doit passer des examens, son état de santé est inquiétant.
15/10/2019
J’ai reçu un appel du médecin de Leïla qui vient de m’annoncer qu’elle est atteinte d’une maladie génétique. Je dois partir faire des tests médicaux pour savoir si je suis porteuse saine. La plus grosse épreuve va être de recontacter le père. Je ne sais plus quoi faire, je suis complètement perdue. Je n’ai jamais révélé son identité à qui que ce soit. J’ai trop honte ! Encore un combat de plus à surmonter... Mais je ne me laisserai pas abattre !
Après tout, comme ma mère m’a toujours dit : les plus durs combats sont menés par les plus grandes guerrières.
80g de sucre
4 œufs
Séparer les blancs des jaunes dans un récipient. Mélanger les jaunes et le sucre.
Monter les blancs en neige et les rajouter à la première préparation. Terminer par la farine.
Tellement obligée de me cacher dans cette baraque pour ne pas que mes gardes du corps débiles touchent au récit de ma triste vie ! C’est sûr la cuisine et eux, ça fait 2...
2/08/2012
Encore un appel des flics, un de mes deux grands frères a encore fait une connerie.
Y’en a marre, on trime avec ma mère pour rapporter de l’argent et eux se permettent encore de déconner. Je suis à bout, besoin de respirer, de sortir de cette cité qui m’enferme entre quatre murs.
Mais il y a mes petits frères, mes bébés, mes amours ! Je ne les laisserai pas, je me le suis promis, je les sortirai d’ici. Allez, il est l’heure d’aller préparer le repas. Pas le temps d’écrire plus aujourd’hui, j’ai tout le ménage à faire.
8/08/2012
Aujourd’hui, c’était trop bien ! J’ai pu sortir 1h au city et regarder les garçons jouer au foot. Bien-sûr je n’ai jamais le droit de jouer... Et puis de toute façon, mon sport c’est le handball ! Les Jeux Olympiques me font rêver, les matchs sont ma bouffée d’oxygène. Je suis sûre et certaine que les garçons seront champions !
12/08/2012
La France EST CHAMPIONNE ! Quelle après-midi devant le match ! Même mes petits frères ont crié pour le dernier but des Français. Pas le temps d’écrire plus, ma mère m’appelle !
13/08/2012
Malheureusement ma joie est de courte durée. Ménage avec ma mère, j’ai commencé mon travail depuis début août. Le lundi on est dans un immeuble miteux ! J’attends tellement les jours suivants, où on est dans le gymnase où s’entraînent les pros ! Je les admire tellement. Les cours ne vont pas me manquer, je ne reprends pas le lycée, c’est terminé pour moi, il faut absolument qu’on ramène de la thune. J’ai donc accepté ce boulot et je ne m’en plains pas, si cela peut soulager ma mère et sauver mes petits frères.
23/08/2012
Aujourd’hui comme chaque mercredi je suis allée aider ma mère à faire le ménage au gymnase du Vercors. Quand je nettoyais les tribunes j’ai reçu un ballon d’une joueuse en pleine tête. Je l’ai renvoyé immédiatement à un des deux entraîneurs.
Vendredi 24/08/2012
Aujourd’hui je suis retournée aider ma mère au gymnase en espérant retoucher le ballon. Les trois coups de sifflet retentissent, fin de l’entraînement, il nous reste encore les toilettes à faire. En me dirigeant vers les vestiaires, le coach s’avance vers moi. Au départ, je pense qu’il cherche un ballon, je m’efface et change ma direction. Là, il me suit et m’interpelle. C’est à MOI, MOI Nour fille de cité qui fait juste le ménage, mes jambes tremblent, ma gorge se serre. Les mots ne me viennent pas, je l’ai juste écouté :
« Bonjour Nora, je sais que tu aides ta mère à travailler au gymnase, des filles de l’équipe te connaissent. Hier en me renvoyant le ballon je me suis aperçu de ta précision, de ta force et du fait que tu sois gauchère. Veux-tu venir essayer mercredi prochain de t’entraîner avec notre équipe de -18 CF ? »
C’est la plus belle de mes rencontres, même si je ne m’appelle pas Nora, moi c’est Nour.
28/08/2012
Trop contente ! Aujourd’hui, 1er entraînement avec l’équipe des -18 CF et ça ne sera pas mon dernier. Pourquoi je dis ça ? Car le coach veut me revoir !
Forcément j’ai eu un peu de mal à m’adapter. Mais heureusement les entraineurs m’ont aidé à comprendre comment placer mes appuis, sauter en extension, tirer, etc. Ce soir je suis épuisée mais ravie d’avoir commencé ce sport que je regardais en cachette à la télé ou en passant la serpillière au gymnase.
3/09/2014
Je viens de retomber sur ce carnet pendant mon déménagent. Waaaouh ça a beaucoup changé pour moi. J’ai signé au Centre de Formation à Bourg-de-Péage, ce qui veut dire que je m’entraîne tous les jours sans relâche et sans répit. Le niveau est vraiment au-dessus, je fais beaucoup d’efforts ! Je m’arrache pour être à la hauteur de leur confiance. J’ai enfin pu sortir de la cité, je suis indépendante et j’arrive même à payer quelques courses à ma maman. Je continue à l’aider car elle est très fatiguée par les coups de la vie.
13/03/2017
Ce matin je me suis réveillée, je me suis préparée pour aller à l’entraînement. Une fois que celui-ci terminé, l’entraîneur de la D1 m’a pris à part en me disant qu’il voudrait me parler après l’entraînement. Je te laisse imaginer ma joie. À 18h15 je le rejoins dans son bureau et il me dit qu’il veut aborder mon avenir. Il dit que j’ai un potentiel énorme et un talent inné. Aussi que je pourrais devenir une joueuse pro dans son équipe, être une pièce maîtresse de l’équipe, qu’ils avaient besoin de moi. Cette nouvelle m’a vraiment surprise ; je n’aurais jamais imaginé en arriver là un jour. Sans hésitation j’accepte la proposition ! Je n’ai pas besoin des dix jours de réflexion qu’il me laissait. Mon rêve se réalise et je n’arrive pas à y croire même en l’écrivant.
Ma mère un jour m’a dit « tous tes sacrifices seront récompensés » : elle avait vu juste. En ce moment mes frères sont encore dehors sûrement en train de faire leurs activités qui me gonflent. Ma mère, comme d’habitude, doit faire la vaisselle. Puis il y a moi, tellement heureuse ! Je n’arrive toujours pas à y croire : je suis pro !
01/10/2017
Ma saison se passe tellement bien ! Au final, j’ai eu quatre clubs de D1 qui m’ont appelée ! J’ai évidemment écouté le choix du cœur, BDP c’est ancré ! Ils ont tellement fait pour moi.
Je vais enfin pouvoir sortir mes petits frères et subvenir à leurs besoins avec mon contrat de deux saisons. Si je continue comme ça, dans quelques années, je rêve d’une maison à la campagne au pied des montagnes.
14/05/2018
ALEERTEEEEE !!! Obligée encore de l’écrire pour pouvoir y croire ! Je vis un rêve éveillé, ils sont loin les ménages avec maman. Un mail d’Olivier Krumbholz est arrivé ce matin : je suis sélectionnée pour le prochain stage de l’équipe de France.
18/06/2018
Première journée du stage, visite médicale. Il détecte quelque chose d’anormal et me demande d’aller passer des examens complémentaires. Arrivée à l’hôpital, un médecin me prend en urgence pour me faire passer une échographie. Il revient me voir et m’annonce que je fais un déni de grossesse, je peux accoucher très prochainement ! Je n’ai même pas eu le temps de prévenir mes proches et mon rêve d’équipe de France se transforme en cauchemar. Mon ventre a gonflé de plus en plus et je prends conscience que je vais être mère d’ici peu. Je suis sous le choc et je ne sais pas comment l’annoncer à ma famille.
3h46
Je m’en souviendrai. Naissance de ma fille, Leïla. Ma mère débarque à l’hôpital dans tous ses états. Elle prend Leïla dans ces bras pour la première fois, toute émue.
8/07/2019
Ma fille se porte bien elle grandit si vite ! J’ai repris le handball et tout se passe à merveille. Le seul problème est que mes frères ne savent pas pour ma fille, c’est un parcours de combattante pour leur cacher.
Le club a très bien réagi et m’épaule pour que je revienne au plus haut niveau. Je compte bien assurer sur les terrains, avoir un enfant n’est pas un handicap, bien au contraire, c’est ma force.
27/09/2019
Leïla doit passer des examens, son état de santé est inquiétant.
15/10/2019
J’ai reçu un appel du médecin de Leïla qui vient de m’annoncer qu’elle est atteinte d’une maladie génétique. Je dois partir faire des tests médicaux pour savoir si je suis porteuse saine. La plus grosse épreuve va être de recontacter le père. Je ne sais plus quoi faire, je suis complètement perdue. Je n’ai jamais révélé son identité à qui que ce soit. J’ai trop honte ! Encore un combat de plus à surmonter... Mais je ne me laisserai pas abattre !
Après tout, comme ma mère m’a toujours dit : les plus durs combats sont menés par les plus grandes guerrières.