Méfiez-vous du petit zombie

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Léon a pour ami un petit zombie qui s'appelle Zéon. Bien sûr, c'est bizarre, mais c'est comme ça. Une vraie amitié, au point que si le petit zombie reste des jours et des jours sans venir le voir, Léon a du mal à s'endormir. Il a même une boule au ventre. Son père lui dit :
— Tu as mal au ventre parce que tu t'inquiètes trop, Léon.
Et si Léon s'inquiète trop quand il ne voit pas Zéon, c'est bien la preuve que Zéon est son ami.
Justement, ce soir Léon a une boule au ventre. Voilà des jours et des jours qu'il n'a plus de nouvelles de Zéon. Hier encore, il est descendu à la cave, il a cru reconnaître son odeur, mais c'était une vieille patate pourrie. Pas de Zéon. Il attend un petit signe. Rien. Un grattement à la porte de sa chambre, c'est lui ! Mais non, c'est la chatte Molly qui fait ses griffes. Mais que se passe-t-il donc pour que Zéon ne lui rende plus visite ?
A-t-il déménagé ? Mais non, un zombie n'a pas d'adresse, il est partout chez lui !
Est-il malade ? Mais non, un zombie ne tombe pas malade, il est invincible !
Peut-être est-il fâché ?
Léon essaie de se rappeler leur dernière discussion. Vraiment, il ne voit pas ce qui aurait pu vexer Zéon.
À minuit, Léon ne dort toujours pas quand, soudain, il sent une odeur qui ne trompe pas. Il renifle aux quatre coins de sa chambre. Mais c'est sous son lit que c'est le plus horrible ! Et c'est bien là qu'il découvre son ami le petit zombie. Tout bizarre, tout ramollo, avec sur la tête un drôle de bonnet.
— Mais Zéon, qu'est-ce que tu fais là ?
— Chut, moins fort Léon ! Je suis chez toi incognito. Normalement, je n'ai pas le droit de venir te voir.
— C'est quoi encore cette histoire ?! Et puis franchement, qu'est-ce que tu sens mauvais !
— Tant mieux !
— N'importe quoi ! On dirait que tu es content de ta puanteur.
— Léon, tu ne peux pas comprendre, mais dis-moi, tu es bien sûr : je pue ?
— Mon pauvre Zéon, mais tu sens le moisi, le vomi, l'œuf pourri... c'est horrible !
— Ouf, je suis rassuré ! Merci, mon cher Léon, merci.
— Vas-tu me dire ce qu'il se passe ?
Zéon pousse un profond soupir avant de révéler son secret. Depuis des semaines, une étrange épizombie fait des ravages. Tout a commencé par un symptôme très bizarre, l'odeur de certains zombies s'est brutalement transformée. Ils se sont mis à sentir la rose. Oui, oui, la rose ! Vous imaginez un zombie qui sent la rose ?! C'est tout simplement ridicule. Impossible d'être effrayant avec une odeur pareille. Et le pire c'est que l'épizombie s'est rapidement propagée. Même le pauvre Zéon a été contaminé. Il paraît que cette nouvelle zaladie s'attrape au contact des humains.
— Attends Zéon, je n'y comprends rien du tout, tu as bien dit une zaladie ? Mais, c'est quoi ce truc ?
— Une zaladie, c'est quand un zombie perd son aspect effrayant. Et une épizombie, c'est quand plein de zombies attrapent une zaladie, c'est dramatique. Tu imagines ? Des zombies qui sentent la rose, qui deviennent tout mous, tout doux. Des zombies tout mignons, une catastrophe !
C'est vrai que Léon trouve son ami un peu drôle, presque flagada. Il préfère ne rien lui dire pour ne pas trop l'inquiéter.
Pauvre Zéon ! Il a tout essayé : les bains de purin, les shampoings à la crème chou-fleur, les sirops d'égout, rien n'y a fait. L'odeur de rose restait incrustée sous sa peau. Alors il est resté enfermé pendant trois semaines, avec interdiction formelle d'approcher son ami Léon. Heureusement, avec le temps, il a fini par retrouver son odeur d'avant.
— Mais, ce n'est pas tout. Lui confie le petit zombie tout gêné.
— Allons, Zéon, tu es mon ami, tu peux tout me dire.
Le petit zombie hésite un peu avant de retirer son bonnet. Et là, Léon éclate de rire. La tête de Zéon est recouverte de cheveux, tout bouclés et tout roses. Il est : ri-di-cu-le !
Léon regrette bien de s'être moqué de son ami, mais il faut dire que le spectacle est tellement comique !
— Excuse-moi Zéon, je suis vraiment désolé, je ne voulais pas te faire de peine, mais tu verrais ta tête, c'est vraiment trop drôle !
— Je sais bien, c'est une catastrophe. Chaque fois que je dois terroriser un enfant, il me prend pour une sorte de clown et éclate de rire...
— Bon, arrête de pleurnicher, il faut agir. Attends une seconde, je reviens.
Léon a une idée. Il va chercher la mousse à raser et le rasoir de son père. Et hop ! Il va faire la boule à zéro au petit zombie. Et puis, si jamais il est maladroit, pas d'importance, Zéon aura quelques cicatrices supplémentaires, et ça, c'est parfait pour une tronche de zombie. En deux temps, trois mouvements, Léon se transforme en barbier et rase les boucles roses de son ami. Comme il fallait s'en douter, il lui entaille le crâne un peu partout. Cette fois, Zéon a une tête épouvantable, une vraie terreur ! Même Léon n'est pas très rassuré en voyant le résultat. Enfin, comme il connaît Zéon, il n'a pas vraiment peur. Les deux amis sont si heureux de se retrouver qu'ils ne voient plus le temps passer. Soudain, Zéon réalise qu'il doit vite repartir, et Léon qu'il doit vite aller dormir. Alors, ils se quittent ravis d'avoir passé un si bon moment ensemble.
Le lendemain matin, Léon se lève d'excellente humeur. Il a une faim de loup.
— Plus mal au ventre Léon ?
— Plus du tout, Papa.
— Tant mieux, je préfère ça, tu as l'air en pleine forme et tu sens vraiment très bon ce matin.
Une journée d'école c'est une journée d'école, avec des hauts et des bas. Léon fait de son mieux. Et puis, il y a les récréations et ses copains, mais il y a surtout cette remarque d'Hector :
— Oh, Léon, tu sens vraiment trop bon aujourd'hui !
Étrange. Hector n'a pas l'habitude de lui parler de son odeur.
En rentrant chez lui, Léon sent que sa petite boule au ventre est revenue. Il se renifle toutes les cinq minutes, il a l'impression qu'il commence à sentir la rose. Dans les vitrines, il vérifie la couleur de ses cheveux. Ouf ! Ils sont toujours blonds et bien lisses.
Léon passe une mauvaise soirée. Il n'arrête plus de se renifler, de passer sa main sur ses cheveux.
Dans son lit, il essaie de se rassurer : il n'est pas un zombie, donc il ne peut pas attraper de zaladie. Malgré tout, sa petite boule au ventre grossit, grossit. La nuit, il fait plein de cauchemars qui sentent bon la rose.
Le lendemain matin, il se réveille tout flagada. Quand Molly le voit, elle court se réfugier sous le lit. Bizarre ! Il se dirige vers la salle de bain et là, dans le miroir, il découvre sa tête recouverte de cheveux tout bouclés et tout roses. Une vraie tête de clown. La honte ! Il est désespéré quand, dans son dos, éclate un rire énorme, un rire terrible, un rire diabolique : le rire de Zéon.
— Tu verrais ta tête, mon pauvre Léon, c'est trop drôle. Allez, ce n'est qu'une perruque, je l'ai mise sur ton crâne pendant que tu dormais. Un petit pschitt de parfum de rose sur ton tee-shirt, et hop, le tour était joué ! Moi aussi j'avais bien le droit de rigoler.
Léon a vraiment eu la peur de sa vie, mais Zéon est redevenu un vrai petit zombie et ça, c'est plutôt une bonne nouvelle.

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Image de Méfiez-vous du petit zombie
Illustration : Pablo Vasquez

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