Le football et moi

Je m’appelle julien, j'ai onze ans et je vais devenir footballeur !

Il faut que je devienne footballeur. Mon père n'a de cœur que pour ça. Faut le voir lorsqu'il y a un match à la télé : il s'agite, il saute, s’accroche sur le canapé, il lance des jurons, il donne des consignes... Avant je croyais que les joueurs pouvaient l’entendre tellement il leur parlait ; un jour, quand j’étais plus petit, je lui ai même demandé :
- Papa, les joueurs dans la télé, ils t’entendent vraiment ?
- Tu vas comprendre, julien. Avec le temps tu vas comprendre la magie du foot. M'avait-il répondu.

Et faut le voir quand on marque un but. Oh ! Qu'il est inarrêtable ! il crit tellement fort qu'on l’entend même chez les voisins. Et il court... il court partout dans la maison. Il lui arrive même de casser quelque chose. C’est extraordinairement. À l’heure du match, il porte toujours son maillot blanc, rouge et bleu. Le même maillot que portent les joueurs dans la télé. Quand le match commence et que les deux équipes font leur entrée sur le terrain, il se lève et... Et à la manière qu’on se tient debout pour chanter l'hymne national à l’école... lui aussi se tient debout, comme ça et il chante... Ah ! Qu'il est drôle mon père quand il suit son match... Surtout lorsque le match n'est pas maîtrisé. Il devient tout pâle et très silencieux. Parfois même il devient colérique. Il commente de temps en temps bien sûr... Il se met en rogne contre l’arbitre. Il me prend même à témoin :
- Regarde ! Regarde moi cet arbitre corrompu ! Ça c'est pas une faute ça ! Me dit-il à chaque fois que l'adversaire prend le ballon.

J’aime beaucoup le regarder quand il est à fond dans le match. Moi ça me passionne à la fin. Souvent je me mets aussi dans le bain. Je suis moi aussi à fond avec l’équipe. Mais à la différence de mon père, j'ne suis pas fort pour ça. L’autre jour quand l’équipe a pris une vraie raclée, j'ai beaucoup pleuré. Maman m'a pris dans ses bras et m'a consolé ; mon père me regardait de loin. Il était trop dégouté lui aussi. Je crois que c’est à cause de moi qu'il n'a pas éclaté en sanglot. Il devait se dire qu'il doit se montrer fort pour me servire d'exemple. La vérité est que lui aussi pleure quand on perd un grand match. Une fois, lorsqu’on avait perdu la finale, il avait les yeux tout rouges et tout gonflés. Il avait pleuré.

Moi ce que j’aime le plus dans le foot c'est lorsqu’il m'emmène au stade. Le stade est un endroit vraiment merveilleux... c'est surtout à cause du stade que je veux devenir footballeur. D’abord c'est très grand... vraiment très très grand. C'est l'un des plus grand du pays. Et qu’est-ce qu’il est beau ! J’aimerai y passé ma vie. Et les supporteurs... surtout dans les plus grand matchs. Avant le coup d’envoi, ils exhibent des tifos, des drapeaux, il y a des fumis... des chants. Qu’est-ce que j’aime ces chants-là. Je les adore ! On chante tous en chœur. Je tiens la main de mon père et d'un autre monsieur... nous nous tenons tous la main et on chante en chœur. J’aimerais vivre ça toute ma vie. C’est le plus beau moment. Et cette bonne chaleur que dégage le stade en ces moments-là... C’est magique ! Y a pas de plus grand mots pour exprimer ça.

Le foot c’est ma vie maintenant. Avec mon père, c'est derniers temps, on va très souvent au stade. Mon émerveillement reste le même. Le dimanche passé, on a gagné le match par trois buts à un ; je crois que j'ai crié plus fort que tout le monde. J’en avais les oreilles bouchées après. On était assis proche du terrain et à la fin du match, les joueurs se sont approchés de notre tribune et ont lancé quelques maillots. J'ai pu en attraper un et chose incroyable : c’était le maillot de mon joueur préféré ; en plus, il avait inscrit les trois buts. Y a nul doute ; c’était le plus beau jour de ma vie. J’oublierai jamais ce moment.

Le foot c'est beau... à la maison, quand je joue avec mon père dans le jardin ou quand on va au stade regarder un match ou bien encore quand on le suit à la télé. Mais à l’école c'est autre chose. J'ai tant détesté ça. C’était à l’origine de mes malheurs. Ça m'a apporté que des moqueries de la part des autres. Quand on constituait les équipes, j’étais toujours le dernier à être pris. Et ils me prenait qu’après une blâme sévère de la part du prof :
- Mais monsieur nous on ne veut pas de lui dans notre équipe. On préfèrerait plutôt une fille. Lui il est plus petit qu’une fille... et on a pas envie de nous frotter contre lui...
- Taisez-vous ! Vous êtes méchants ! Si je vous entends encore dire ça, je ferais convoquer vos parents. Vous êtes très méchants !

Ils étaient bien méchants. Au début de l’année, j'ai supplié papa qu'il m’enlève de l’école. Je lui ai dit que je préfère que lui-même me fasse les cours à la maison. Il est enseignant lui aussi. Mais il n'a pas voulu. À la place, il est allé expliquer ça au directeur. Ils ont été convoqué avec leurs parents. Mais ça n'a pas vraiment changé quelque chose. Ils m’ont encore plus écarté.

Heureusement, Patrick était toujours là pour moi. C'est mon ami. C’est à cause de lui que je continuais à aller en classe. S'il n’était pas là, j’aurais jamais pu. On passait tout le temps ensemble. Il est très fort à la console. Mais en classe, pendant les interros, il a bien besoin de moi et j’arrive toujours à lui glisser quelque chose.

La semaine passé était incroyable. On était allé assister au tournoi inter-écoles de handball. Luxia y participait. C’était la finale. On a assisté à un très grand match, mais notre école a fini par gagner. Elle était la meilleure joueuse sur le terrain. C'est elle qui marqué le plus. Au retour, dans le bus, elle s'est assise à côté de moi. Du coup on pu discuter pendant tout le trajet ; mon cœur n'a jamais battu aussi fort, j'ai cru que j’allais m'évanouir : elle m'a tenu la main et m’a dit que j’étais très sympa et intelligent. Elle m'a surtout dit qu'on pourrait se voir de temps en temps ; elle habite non loin de chez moi. C'est incroyable ! Elle veut être mon amie.

L’été passé, papa m'a inscrit dans un centre où j’allais passé les vacances à jouer au football. Je voulais pas y aller. Mais il m'a dit qu'il connaissait le coach. C’était un ami à lui. Il allait bien prendre soin de moi, il l’avait fait promettre. Mais moi ça ne me rassurait toujours pas. Il m'a donc demandé d’essayer au moins pendant quelques jours et si je ne m'y sens pas bien, je pourrais rentrer au bout d'une semaine. Dit comme ça, je ne pouvais pas refuser.

C’est à ce centre que j’ai découvert que j’étais un bon joueur. À l’école je ne jouais presque jamais. Et même quand je jouais je n’étais pas vraiment à l’aise. Par contre, avec le coach, j’arrivais à très bien jouer. J’étais même l’un des meilleurs de mon âge. Et là-bas les autres garçons, ça ne les dérangeait pas que je sois albinos. J’ai découvert que malgré ma taille un peu plus petite que celle des autres garçons, je pouvais être un bon joueur. En plus j’étais quant même assez rapide.

Le championnat inter-écoles de Handball fini, c’était maintenant le tour du football. La première journée j’étais sur le banc des remplaçants. À un moment Florian, un garçon de ma classe, s’est fait mal. Il fallait que je le remplace. Le prof m’a appelé et m’a demandé de m’échauffer pour entrer. Impossible j’ai pensé. J’étais figé sur place pendant un moment. J’ai entendu quelqu’un crier mon nom dans les tribunes. C’était Luxia. À ce moment, c’était comme-ci une force encore jusque là inconnue me poussait vers le terrain. Je suis entré sur le terrain et j’ai joué comme au centre l’été passé. Tout le monde était impressionné. À un moment la foule s’est mis à crier mon nom. Julien ! Julien ! C’était comme dans un rêve. Le moment le plus fou c’est lorsque j’ai marqué le but vers la fin du match. Tous les copains sont venu fêter le but avec moi. Même ceux qui étaient sur le banc des remplaçants. À la fin du match, ils ont tous soulevé.

Je crois qu’à partir d’aujourd’hui plus rien ne sera pareil.