La vie, comme un miroir

Prologue
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Toute histoire commence un jour, quelque part. Et celle qui commence dès notre naissance, est commune à tous et est originale. L’enfance, elle a disparu pour certains, en tout cas pour moi. Elle n’est pas permanente et donc nous ne restons pas enfant d’une façon éternelle. Même le chiot qui, dans la journée, vacille sur ses pattes pour rejoindre sa mère se trouvant aux alentours du terminus, deviendra un chien qui pourra chasser un voleur après avoir déterminé et senti son rythme cardiaque.
Petit, je l’étais autrefois. Et maintenant j’ai grandi. Ces temps passés où le plaisir était pour moi, pour tout enfant d’ailleurs, jouer et sucer notre fameux bonbon de l’époque. Hélas ! Ce plaisir, il n’est plus ; maintenant, le plaisir, pour moi, est de me pencher à servir les gens, à aider les gens de ma communauté plus encore ma société ou du moins cela doit rester la vocation ferme pour toute personne consciente, lui confiant amplement le plaisir. C’est la vie qui évolue, ainsi que les comportements pour ainsi dire. Chaque fois, lorsqu’on se lève, c’est le même quotidien qui se répète. Là à la maison, assis sur une chaise, en train de regarder le père qui tient le chapelet pour faire des invocations. C’est assez pour une importance de voir son quotidien s’étaler ; commençant par la perception de l’enfant qui a obligé à sa mère de lui donner une pièce de monnaie lorsqu’elle a voulu lui infliger une volonté sans faille de l’apprentissage, de l’amour de la connaissance, jusqu’à la tombée de la nuit où la tante, dans le risque de le faire, me demande de lui rappeler de fermer la porte de sa chambre et où le père éteint toutes les lumières, et d’essayer de le traduire en écrits. La vie, quant à elle, déteste l’oubli de certains moments de notre quotidien. Une cause concrète pour elle d’imposer une certaine condition : des souvenirs, qui viennent en tête, le soir, en s’apprêtant à dormir. Et par là, nous apercevons sa gaieté ; la gaieté de la vie.
En effet, je me suis dit, relativement à ma faculté d’intellectuel mineure, qu’il n’y a d’histoire plus vraie et plus sensible que celle qui consiste à décrire sa vie, à refléter sa vie à travers des textes, des phrases puis des mots. Et plus encore si celle-là est partagée. Lorsque les hommes de l’histoire se mettent à rédiger leurs mémoires dans leur solitude, certains d’entre eux, au fin fond de leur cellule de prison ; leurs écrits, quand ils sont publiés, atteignent une apogée retentissante au détriment de certaines histoires inventées et où leurs auteurs piochent de leur temps au moment de l’aurore, ou peut-être une fois la nuit tombée, en silence. Cela montre à quel point, sous tous les cieux du monde, les écrits personnels sont dotés d’une importance accrue tout en constituant un reflet pour certains.
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La vie n’a pas été tout à fait rose pour certains sujets humains, pour la plupart des enfants. Courir, pleurer et feindre ont tous été des moyens pour éviter la cravache. Cravache ? Oh ! Quelle condamnation ! Souvenir d’un soir, après un repas succulent suivi du thé, nous prenions la décision d’aller aux champs maraichers d’à coté, situé à quelques kilomètres de notre demeure, pour voler des piments cultivés dans ces champs là et les apporter à la mère dans le but de la rendre satisfaite. Quant à moi, furieuse était ma mère en découvrant tout le processus d’obtention de ces piments. Il s’ensuivit une cicatrice permanente, à ma main droite, engendrée par la cravache utilisée par le père pour la correction de cet acte de vol. Nous l’avions tous connu, très bien, jadis : Cravache, la condamnation des enfants têtus et désireux de se trouver dans des aventures héroïques. Maintenant, nous ne pleurons point à cause d’elle ; nous ne feindrons point à cause de la cravache. Pleurer n’est pas une affaire de grands ; et nous sommes des grands, nous ne sommes pas des petits. Parfois, nous nous sentons tristes et malheureux mais nous laissons la vie s’étaler, en dissimulant ces sentiments inappréciables, jusqu’à ce que tout soit réglé. Une comparaison de ce temps et celui de notre enfance révèle, par voie de conséquence, que nous avons grandi. En ce temps d’enfance, le matin, lorsque la mère nous réveilla, nous avions l’habitude de rester un long moment dans la porte de notre chambre, bailler de façon interminable, gratter toutes les parties de notre corps ; la tête, les cuisses, le dos,... ; regarder à gauche et à droite comme si on s’apprêtait à aller quelque part, alors que l’école nous attendait. Oui l’école. Il s’ensuivit d’une simulation de maladie, la plupart maux de ventre, rien que pour ne pas aller à l’école. Et la mère ayant compris cela, nous obligeait à nous rendre à l’école. Celle-ci, nous la détestions autrefois. Et aujourd’hui, nous ne trouvons que de la sympathie chez elle. Désormais, nous nous réveillons nous-mêmes ; et si nous simulons, c’est pour échapper au travail proposé par le père mais ce n’est pas parce que nous refusons d’aller à l’école.
J’ai parlé de la mère, en fait elle n’est pas la mère biologique, mais je la considère comme telle. Je n’ai pas très connu la mère biologique. Elle est loin de mois. La mère qui m’a éduqué, est décédée alors que j’étais en terminale, je devrais faire le baccalauréat. Assez ironique ? Je ne pense pas. Et si je m’étais penché à rédiger une histoire qui consiste, sans nul doute, à illustrer les circonstances de sa mort ? Serait-elle assimilable à celle des hommes de l’histoire ? Je n’en sais pas grand-chose.
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«  Le jour noir »
En fait c’était un jour. Oui ce jour où l’esprit sera perturbé suite à une annonce de la perte d’un être cher. Nous étions là, dans cette maison se trouvant aux alentours du terminus, entrain de dormir. Et moi j’étais là aussi, dans ce lit peut-être que j’étais dans un sommeil profond mais qui sera interrompu par une sensation étrangère et particulière. La petite vint et tapota la porte en disant d’une voix basse et même triste : « venez regarder ce qui est arrivé à la mère ». Elle ne comprenait pas ce qui s’était passé. C’était comme dans un rêve, oui un rêve qui sera bientôt réalité. Je fus réveillé par ce bruit silencieux, mais je savais déjà à mon réveil, que ce n’était pas une chose ordinaire qui allait déranger la famille à cette heure là.
C’est ainsi que je pris la destination du lieu où reposait l’être qui sera perdu. Là je le vois, en train de faire ses derniers mouvements dans cette vie. Et moi, et la petite avions assisté à ces mouvements. Elle pleura car même en étant petite, elle a su que la mère allait rendre l’âme. Tout à coup, le tonus musculaire disparut : c’est la perte d’une mère. Une mère qui a consacré la majeure partie de son temps pour rendre heureux un être éternellement insatisfait. Tout en étant petit, je ne pouvais pas me rendre compte de tout ce qu’elle faisait pour moi. Et pendant sa vie, je la voyais en train de me demander si à l’école tout va bien, si j’ai faim. Et là ma vision devint floue et ma conscience perturbée. En effet c’était une nuit, une nuit comparable à un jour noir. Les gens furent venus et l’ambiance triste commença. Des cris ici dans la chambre et là bas dans la rue même si c’était une nuit. Cet évènement passé, je me pose la question : c’est quoi la vie ?
Il n’existe pas de réponses simples pour cette interrogation. Mais elle peut être analysée en fonction de ma propre conception d’elle. Je peux dire, à mon avis, elle est éphémère même si elle nous permet de réussir dans l’au-delà, le Grand Jour. Et en regardant ce jour où le Créateur détruisit le mur silencieux, je me suis réfugié dans « l’autre monde » : c’était pour me sentir seul. J’ai pensé que la vie sur terre me sera impossible après son départ dans l’autre monde. Mais comme toute situation de la vie, cela n’était que pure ignorance, cette sensation était temporaire. Et je suppose que, désormais, je peux faire face à cette pression intérieure plus ou moins intense.
La vie, elle évolue. Tout change, tout évolue, seuls les imbéciles ne changent pas. Dit-on. Je me souviens de Monsieur FALL, notre professeur de Français, en sixième, lorsqu’il nous prêchait sans arrêt de changer de mentalité d’une façon positive et d’essayer de grandir. Souvent il nous disait «  seuls les imbéciles ne changent pas ». Maintenant j’ai changé ou du moins je le pense.
La vie de tout un chacun est égale au nombre de jours qu’il a vécus. Le soleil se lève, la journée débute et la vie reprend. En se réveillant, chaque matin, nous avons tendance à manifester de la torpeur, eh bien cela est une chose normale, parce qu’à ce moment l’organisme est plus ou moins équilibré. Et peu de temps après, nous verrons clairement notre horizon, et nous apercevons dans celui-ci des choses qui égayent notre vie comme lorsque l’on voit le ciel clair et que l’on ressent l’air pur dégagé par les arbres. Le repas succulent, à la suite d’une inanition douloureuse, préparé, pour une durée allant de onze heures à quatorze heures, ainsi que le moment passé avec le frère, dans la journée, au milieu de la famille, en buvant ce fameux thé, fait partie de la journée. Et lorsque la journée termine, au moment de coucher, dans ce lit, j’aperçois la gaieté de la vie : la remémoration d’une simulation de fatigue, dans la journée, pour ne pas être au rendez-vous du travail proposé par le père. Le père ! Tout tourne autour de lui. Le matin, lorsqu’il me voit, très tôt réveillé avant lui, il me taquine en me disant qu’aujourd’hui j’ai fait preuve de bravoure en me levant si tôt car pour lui, je me suis levé exceptionnellement à cette heure, à ce jour. Et Le travail, pour lui, est un exercice sympa ; heureux, il l’est quand il le pratique.
Et ainsi, la nuit, lorsque nous décidons de dormir, des souvenirs quotidiens viennent en images, nous sourions pensant que demain tout ira bien si cela consente à la seule volonté divine.
C’est ainsi que j’ai rempli des pages pour raconter ma propre histoire, qui n’est point une invention ou encore moins anodin.