La fin

Suis-je dans le noir ou ai-je les yeux fermés? Peut-être les deux.
Je me suis réveillée ce jour-là et je n'ai rien compris. La police était partout. Je ne connaissais personne. Les corps étaient enveloppés partout.
- Mes condoléances, ma fille, et merci à Dieu pour votre sécurité.
- Pardon?
- Miraculeusement, c'est seulement toi qui a survécu parmi tous ces gens.
- Monsieur l'officier de la police, je ne comprends pas ce que vous m'avez dit tout à l'heure. Pourriez-vous, s'il vous plaît m'expliquer? Où suis-je? Quelle est cette ridicule plaisanterie? Où est ma mère? Où est mon père? Où est mon frère? Où sont mes soeurs? Où est tout le monde? Que se passe-t-il ici?
Et je me suis souvenue dans un instant. Aujourd'hui, c'est le samedi, notre grande famille se réunit ensemble. Mais nous n'étions pas encore partis. J'étais endormie tranquillement dans mon lit : c'est la dernière chose dont je me souvenais.
- Des bombes sont tombées sur de nombreux endroits au Liban, ici et dans d'autres endroits. Peu de survivants. Et vous avez survécu, Dieu merci. Pas de blessures, vous allez bien.
- Je vais bien? Pas de blessures! Que dites-vous? Où est le reste de ma famille? Dites quelque chose! Je vous en supplie!
- Je suis désolé, personne n'a été sauvé ici. Mes condoléances à nouveau.
- Je veux appeler l'un de mes proches, s'il vous plaît.
- Utilise mon téléphone.
- Merci.
Allo...
Non, non, non...
Je veux appeler une autre personne.
Salut...
Quoi? Vous plaisantez? Sans blague? Vous vous moquez de moi? Comment ai-je survécu alors? Que dois-je faire ici?
Tout le monde est parti.Tout le monde sans exception. Et moi, je reste. Moi!!! Qui suis je? Comment cela peut-il arriver? Qu'est-ce que c'est? Que dois-je faire? Mais pourquoi? Pourquoi moi? Pourquoi ne suis-je pas morte avec eux?
J'ai vu au loin le corps de mon père enveloppé dans une écharpe blanche. Non non non... Ne pars pas, mon père! Lève-toi s'il te plaît. Dis que tu es là. Demande moi si je veux t'embrasser comme d'habitude. S'il te plaît, pour la dernière fois..
Papa!
Ma mère est là aussi enveloppée. Et j'ai couru... Maman! Maman! Réveille toi! Tu te réveillais toujours à la moindre voix. Je crie, pourquoi tu ne m'entends pas? Pourquoi ne réponds-tu pas? Maman, ne me quitte pas maman!
Que vais-je faire? Je deviendrais certainement folle! Tous ceux que j'aime, sont partis!
Quelle perte est la plus difficile, la plus impuissante? Peut-être que ça ne pourrait pas être aussi mal que celle-ci.
Je m'éclate de rire. O monde incompréhensible! Les gens rient-ils même lorsqu'ils se sentent tristes?
Peut-être que ces rires ne sont qu'une dernière tentative de cacher ses douleurs, ou d'assassiner l'apparence de la tristesse loin de la pitié des gens et de leurs regards. Il n'y a pas d'autres explications: on ne rit que pour lutter contre l'absurdité du monde. Et la vérité la plus bizarre mais aussi la plus réelle, c'est que nous vivons seuls parmi des milliers de personnes qui nous entourent de tous les coins. Tout est relatif à ce que nous ressentons et pensons, et à la façon dont nous voyons toutes les choses. Étrangers dans la vie des autres, inconnus, mais conscients chacun de sa vie à part. Chacun danse selon ses propres rythmes et colore son univers à sa façon, et remarque, lui seul, ce qui se passe en lui et ce qu'il fait tout seul. Chacun de nous est un secret en soi. Il y a aussi toujours un moment où nous revenons au point du départ où personne d'autre que nous n'est là, dans un monde que personne ne connaît autre que nous, au fond d'un puit profond de notre personne, une profondeur effrayante mais réelle. Derrière chaque geste presque même inaperçu une certaine profondeur, un homme perdu dans l'ombre de ses fantasmes, à la recherche de sa vérité et de ce qu'il est réellement, attendant le moment où il se réveillera brusquement pour construire son chemin et son propre destin. Une vie suffit-elle pour nous découvrir et vivre pleinement, ou vivons-nous à moitié pour toujours?
Nous nous fatiguons en essayant de commencer à chaque fois avec plus de passion, nous ressentons le besoin d'aimer et d'être aimé, mais nous finissons continuellement avant même que notre histoire ne commence, nous partons avant de nous retrouver.
Les oiseaux continuent à voler. Le temps ne s'arrête pas. Le monde respire. Je m'étouffe. O oiseaux! Emmenez-moi avec vous. Laissez-moi migrer, vers le plus loin possible, vers une autre galaxie!
Que penserait une personne si elle savait qu'elle mourrait après un jour ou une semaine?
Va-t-elle cesser de vivre à fond et à goûter les petites secondes et à apprécier les moindres détails ou vivra-t-elle cette semaine comme elle ne l'a jamais faite auparavant?
Celui qui connaît bien la réalité de cette vie se rend compte après un certain moment que la mort est chaque jour de plus en plus proche.
Nous ne devons pas combattre les jours seulement comme un passe-temps, nous devons chercher nos talents, ce qui nous permet de laisser quelques traces avant de s'en aller. Et si nous sommes amoureux, nous ne devons jamais cesser d'aimer.
Même s'ils nous trahissent mille et une fois, même si nous ne trouvons en aucun moment quelqu'un pour partager cet amour avec nous.
Nous avons un cœur qui peut être un abri, sans inquiétude ni regret, un refuge d'une éternelle miséricorde. Alors ne laissons pas nos cœurs se transformer en une pièce vide et froide, ouvrons nos cœurs et soyons libres comme le cœur d'un oiseau accroché à la joie née de la plénitude de son vol.
La mort est très proche, tout ce que nous avons donner de toute notre âme n'est pas apprécié dans ce monde, et s'effondre rapidement comme la neige.
La mort nous attaquera, mais gardons espoir, et lançons nous à accomplir le plus grand nombre de rêves avant le moment de la fin inévitable.