La forêt est grande. Immense. Gigantesque. Elle s'étend à perte de vue, comme si le monde n'était recouvert que de chênes et de sapin. Quelques collines apportent du relief au paysage. Elles se dressent, surplombent la forêt. Sur l'une d'elle, une crête qui porte sur son échine des arbres dénudés par la brise hivernale, il y a, à son sommet un rocher. Dessus, un loup mâle au pelage argenté contemple son habitat. Sa maison. Son royaume. Il bombe la poitrine, inspire une bouffée d'air frais qui lui pique la truffe. Là haut, il se sent puissant, maitre du monde. De son monde. Il se retourne. Derrière lui, il y a quatre autres loups qui attendent de le suivre pour aller chasser. Il ouvre la gueule pour mieux humer l'air. Hier, un troupeau de rennes à été aperçu. S'ils arrivent à en chasser un, la meute retrouvera des forces. L'hiver est cruel. Ça y est, il pense sentir des rennes. Il bondit de la pierre et partit en courant, suivit de ses quatre compagnons. Ils avancèrent longtemps, suivant la trace du troupeau de rennes. Peu à peu, des empreintes apparaissent. Ils les suivent. Puis, après avoir parcouru une longue distance, ils débouchèrent dans une clairière. Dedans broutaient plusieurs dizaines de rennes. Les trois loups les plus sveltes se tapirent dans l'herbe, dans le but de rabattre un animal vers les deux plus costauds. Le mâle argenté continue sa route, sans se faire remarquer, accompagné d'une femelle au poil brun. Un peu plus loin, ils se placent derrière un arbre tombé et attendent.

D'un coup, le sol se met à trembler. Un nuage de poussière se lève, malgré le temps humide. Et, un masse sombre approche d'eux à toute vitesse. La chasse est lancée. Les trois loups ont isolé un des rennes. Bientôt, ce sera à eux d'agir, et ils tueront l'animal. Le mâle gris tend ses muscles. Pas maintenant. Pas encore. Presque. Maintenant ! Il s'élance. Il n'entend plus rien

d'autre que son souffle et ses pattes martelant le sol. Le temps semble avancer au ralenti. Il court vers le renne qui vient de passer. Il est tout près. Il allonge ses foulées et lui mord le jarret. Le gout du sang emplit sa gueule. L'animal se débat. Chasser les rennes est une tache ardue, car avec leurs sabots et leurs longs bois, ils peuvent blesser un loup pas assez compétent, voir causer la mort. Mourir. A cette pensée, il frémit d'excitation. L'idée qu'il puisse mourir rend cette partie de chasse intéressante. Quelle ironie que de se dire que la mort donne tant de valeur à la vie ! Il ne lâche pas prise. Le renne lui donne un cou de pied à l'oreille. Un filet de sang, chaud, lui parcourt la tempe. La louve bondit sur le dos de l'animal, et lui mord la nuque. Un autre loup arrive, et lui saisit l'autre patte. Alors, le mâle argenté lâche prise et vient enfoncer ses crocs dans la gorge du renne. Sa proie se raidit, et, après avoir lâché son dernier souffle, tombe à terre, inerte, les yeux grands ouverts mais ne pouvant plus jamais voir. Les cinq loups forment un cercle. Chacun hoche la tête, c'est un rituel, un manière de rendre hommage à l'animal qui a donné sa vie pour celles des loups.

Puis, la proie est ramenée auprès de la meute.