Je ne suis qu'une simple cannette de Coca, naissant dans l'obscurité d'une usine de production. Mon existence commence avec le rugissement assourdissant des machines, le tintement du métal se pliant et se façonnant pour me donner forme. À ce stade, je suis encore une coquille vide, attendant d'être remplie d'un doux nectar pétillant. Le bruit des lignes de production est constant, une symphonie chaotique de mécanique industrielle. Les machines me façonnent avec précision, me donnant ma forme emblématique, et je sens le froid métal contre ma surface. C'est à la fois un peu effrayant et excitant, sachant que je suis en train de devenir un récipient pour une boisson rafraîchissante.
Puis, c'est le moment tant attendu. Là-haut, une cascade de liquide sucré se déverse en moi. Je peux sentir l'effervescence se propager à travers mes parois, la sensation piquante de milliers de bulles dansant à l'intérieur. C'est une expérience délicieuse, un peu comme si je buvais ma propre essence. Emplie de ce précieux liquide, je suis scellée hermétiquement. Je ressens une sorte de sécurité dans cette coque, sachant que je suis prête à être transportée vers de nouvelles aventures. C'est à ce moment-là que je sens l'excitation de la découverte, de l'inconnu qui m'attend.
Je suis entassée avec mes compagnes dans de grandes caisses en carton, attendant le voyage vers les supermarchés, les distributeurs automatiques et d'autres points de vente. Pendant ce temps, il fait noir et tout est silencieux. Toutefois, je sais que le monde extérieur est vaste et varié, n'attendant que d'être découvert.
Le moment de la consommation est enfin arrivé. Placée dans un petit réfrigérateur près des caisses enregistreuses, je suis retirée de l'espace réfrigéré par une main curieuse, et me retrouve bientôt entre les doigts d'une personne assoiffée. L'homme m'ayant sélectionné est un peu grassouillet, a les cheveux bruns court et a de petits doigts boudinés. Il me place dans son panier d'épicerie à côté d'un sac de chips et d'une pizza congelée. Je peux sentir l'anticipation, l'excitation, et la soif de sa part. J'aperçois par la fenêtre du supermarché un soleil ardent. L'on peut voir l'humidité dans l'air. L'homme sue à grosse gouttes. Je comprend tout à fait son achat impulsif improvisé en fin d'emplette pour me prendre. Directement après avoir payé, une fois dehors et derrière sa voiture, le coffre ouvert pour placer ses sacs de courses, l'homme ouvre ma goupille. Chaque gorgée est un mélange de satisfaction et de rafraîchissement, et je me déverse dans une gorge avide. C'est un moment éphémère, mais intense. Les émotions de joie, de soulagement et de plaisir m'inondent alors que je satisfais la soif de mon consommateur. C'est comme si j'étais la vedette d'un court métrage, créé pour apporter un sourire et une pause bienvenue dans la journée de quelqu'un.
Puis, comme rapidement que tout a commencé, tout se termine. Je suis jetée dans un bac de recyclage devant le supermarché. Mon contenu ayant disparu, laissant une coquille vide, je ne peux plus satisfaire à ma première fonction déterminée. C'est un peu triste, mais je sais que c'est ma destinée. Je me retrouve parmi d'autres cannettes vides. Le bruit d'une benne à recyclage est le dernier son que j'entends avant de quitter le monde de la consommation. C'est un son qui me remplit d'espoir, car je sais que ma vie n'est pas encore terminée. Je vais subir une transformation, un nouveau départ.
Je suis emmenée dans une usine de recyclage, où je suis nettoyée et préparée pour une nouvelle existence. Les machines me découpent et me fondent, me transformant en une feuille de métal prête à renaître sous une nouvelle forme. C'est un processus fascinant, une sorte de renaissance après la fin de ma première vie.
Je peux sentir l'anticipation de ma prochaine incarnation, et c'est à la fois exaltant et un peu effrayant. Je ne sais pas encore ce que je deviendrai, mais je suis prête pour cette nouvelle aventure. Alors que je deviens une nouvelle cannette, je réalise que ma vie est un cycle éternel. Je suis créée, consommée, recyclée, et créée à nouveau. C'est un voyage perpétuel, une histoire continue d'existence et de réinvention. Et je suis fière de jouer mon rôle dans la préservation de notre belle planète, prête à vivre ma prochaine vie avec curiosité et détermination.
Alors que je me trouve, fraîchement transformée et remplie d'eau gazéifiée au citron, sur une étagère étincelante, j'attire rapidement l'attention d'une femme élégante dans une épicerie fine de quartier. Elle cherche des boissons légères et saines pour accompagner son après-midi de lecture au parc. Lorsqu'elle m'aperçue, je vis ses yeux pétiller d'intérêt. Ses longs doigts fins me saisissent et elle m'ajoute soigneusement à son panier déjà rempli de produits biologiques et d'en-cas santé.
De retour chez elle, elle dépose son butin sur le comptoir de la cuisine, puis range le tout dans les armoires et dans le réfrigérateur. Elle me met dans son sac à dos, se préparant à une escapade tranquille. Lorsqu'elle arrive au parc, elle s'installe sur un banc en bois devant un petit étang artificiel. Le soleil baigne le parc d'une lumière douce, les oiseaux gazouillent, et la brise légère souffle dans les arbres. Elle me sort de son sac, ainsi que son livre favori du moment. Elle retire ma goupille et se délecte de mes saveurs. J'e sens l'eau citronnée jaillir en moi, créant un frémissement de bulles. La femme prend une gorgée, un sourire de satisfaction se dessine sur son visage élégant. La première gorgée fut rafraîchissante, la deuxième apaisante, et la troisième tout aussi satisfaisante que la première. Elle savoure ma compagnie pendant qu'elle se plonge dans les pages de son roman d'aventures, se perdant dans un monde imaginaire.
Cependant, lorsque la dernière goutte fut bue, elle me pose au sol à côté du banc sans même me jeter un regard. Sa lecture captivante semblant la transporter loin de la réalité, et elle en oublia ma présence. Sa lecture terminée, elle quitta le parc, me laissant là, seule. J'ai patienté pendant des heures, des jours, des semaines, des mois, à attendre que quelqu'un me remarque. Les saisons passèrent. Je connu le froid de l'hiver et la fonte de la neige au printemps, qui me firent rouiller et me désagréger.
Finalement, au début de l'été, un employé d'entretien du parc venu avec un sac poubelle et me ramassa. J'étais couverte de l'oxyde ferrique rougeâtre, ma jolie apparence avait été ternie, des trous traversaient ma carcasse et mes couleurs vives avaient été souillées par le temps. Le sac poubelle de l'employé fut transporté jusqu'au dépotoir où l'ambiance était lugubre. La compagnie de déchets similaires à moi ne faisait qu'ajouter à mon chagrin. La solitude m'envahie, et je me sentie abandonnée. J'aurais pu avoir une autre vie, être encore transformée. J'aurais même pu avoir maintes autres vies, mais non.
Les années ont passées, et j'ai lentement commencé à me désintégrer. Mon destin était scellé, et je n'avais plus qu'à attendre ma disparition complète. Dans cette fin mélancolique, je me suis rendu compte de l'importance de notre cycle de vie environnementale. Mon existence avait commencé avec enthousiasme et avait été marquée par la consommation et le recyclage, mais, inévitablement, j'avais atteint ma fin dans l'indifférence et l'oubli.
Je suis devenue un rappel silencieux de la nécessité de la responsabilité environnementale, de l'importance de jeter correctement nos déchets, et du fait que notre planète mérite mieux. Ma vie s'est terminée, mais j'espère que mon histoire, bien que triste, saura servir de leçon à ceux qui l'entendent, les encourageant à prendre soin de notre monde et à reconnaître la valeur de chaque petit geste pour préserver la planète que nous partageons.
Je ne fut qu'une simple cannette. Un amas d'atomes d'aluminium, mais j'aurais tant aimé partager plus longtemps mon existence avec vous, chers singes savants.