Toute histoire commence un jour, quelque part. Et voilà celle de K, elle nous emporte dans le quotidien d’un garçon philosophe, fin observateur et qui avec parcimonie analyse les faits de sa société... :
Assis sur le claustra de la terrasse, le dos affaissé au mur, K avait la tête levée au le ciel. On eut dit qu’il contemplait une de ces scènes mystiques qui le plongeait dans un instant méditatif intense. Ces forts moments de résilience rien ne pouvait l’y extirper. Par moments, sorti de sa caserne psychique, il contemplait les mouches qui lui paraissaient danser au rythme d’un chant entomologique qu’il ne pouvait ouïr. Cette pensée lui arracha un petit sourire moqueur. Pourquoi cette imagination lui est-elle parvenue ? L’effort de trouver une réponse à son interrogation rendait son sourire de plus en plus large. Et bientôt il lâcha involontaire un rire, balança la tête de gauche à droite comme pour signifier de sa désolation présente. Indo, sa mère, assise à même la terrasse et qui depuis un moment observait la scène se tint le menton en signe d’étonnement. On pouvait lire dans ses yeux un air de pitié et d’inquiétude. Elle ne tarda pas à l’apostropher :
- Qu’as-tu donc à rire tout seul ?
- Oh !!! rien de vraiment intéressant
- J’espère pour toi que tu vas bien.
- Je vais bien !!! renchérit-il, je vais bien.
Aussitôt il se replongea dans ses songeries. Ce garçon, je l’ai enfanté seulement se disait-elle. De ses agissements, elle ne contrôlait rien. Enfant précoce, elle avait décelé en lui une étrange curiosité et un calme incommensurable. A peine âgé d’un an se rappelle-t-elle, il regardait la télévision avec grande attention, agissant aux scènes s’y produisant par des mimiques qui animaient son visage innocent de nourrisson. Indo pouvait ainsi le laisser la journée durant sans qu’elle s’inquiéta à aucun moment qu’il se déroba de son centre d’attention.
A beaucoup d’égards K était un enfant différent des autres. Sa singularité dans les gestes, son désir de perfection, ses exigences vestimentaires et gustatives étaient de ces particularités intransigeantes. Tout ce qui lui tombait sur la main faisait l’objet d’une longue auscultation, et il ne s’en débarrassa que lorsqu’il eut jugé sa curiosité satisfaite. Il lui arrivait parfois qu’il commit quelques bavures. Il suffisait de le toiser pour le recadrer. Prenant alors conscience de ses turpitudes, il tachait de ne plus en commettre. Ces occasions étaient plutôt rares où ses déraillements firent sanctionnés d’un châtiment corporel. Encore K ne se souvenait-il que d’une seule fois. Certainement la plus marquante. Il avait alors sept ans, un samedi, à la sortie des cours de rattrapage, il s’était aventuré à suivre ses camarades dans une randonnée sans but. Ce n’est que tard dans la journée, lorsque le soleil achevait sa course qu’il décida de rentrer. Marchant difficilement à travers le terrain sablonneux de cette ville qui évoquait l’après déluge, il rencontra sa mère qui était désespérément à sa recherche. Elle était dans tous ses états. L’inquiétude et la colère caractérisaient sa mine. Elle le toisa un bon moment puis lui demanda de monter dans la voiture. Jamais il ne l’avait vu aussi colérique. Son cœur entama alors des battements frénétiques. Lorsque arrivés à la maison conscient du sort qui lui était réservé, K enleva machinalement la ceinture qui lui tenait le pantalon, l’enroula puis la camoufla derrière le dos, afin qu’elle ne puisse être l’instrument de son bourreau. Indo qui avait remarqué sa manie, se saisi de la ceinture et commença par lui assener des coups. C’est alors que le bouclier de la ceinture lui heurtant le front fit jaillir un filet de sang. On le transportât aussitôt à l’hôpital. De cet évènement, K en garda un souvenir, une cicatrice lui surplombant le front et qui se perd dans les rides se formant lorsqu’il lui arriva de froncer les sourcils.
***************************************************************************
K plongé à fond dans ses questionnements philosophiques acquiesçait ses propres déductions :
- Tous ces grand bouleversements socio-économiques qui ont caractérisé l’occident, ces grand édifices, ces grands chef d’œuvre qui constituent aujourd’hui le socle de l’hégémonie occidentale. Ne sont-ce pas des esprits pensant l’émanation d’idées ou de pensées fertiles qui ont été préalablement éclosent et matérialisées par la force de la volonté ? demandait-il à son ego.
- Certainement !!! Approuva-t-il
- Mais si le changement escompté dans le monde matériel doit avoir à priori été ébauché dans l’univers intelligible. Ce qui d’ailleurs est nécessairement le cas. Que pour modeler à sa guise la matière, lui donner diverse forme, la manier à sa volonté doit précéder tout un processus métaphysique qui constitue l’aboutissement d’une longue gestation idéologique. Aussi ne sait-on pas que la nature humaine concède ipso-facto à l’individu la faculté inconditionnelle de penser, de faire germer les idées et de les rendre féconde par l’action. Que cette concession de la nature n’est ni stigmatisante ni sélective. Elle est donc l’apanage des hommes au-delà de leur situation géographique, leurs différences morphologiques, culturelles, ethniques ou raciales. Qu’elle constitue même par essence la définition de l’individu, de l’être humain. Si toutes ces assertions sont irréfutables et indéniablement vrai. La légitimité et la nécessité de s’interroger sur les causes et la nature de ce qui s’avère l’obstacle pour une envolé du Gondwana doit être une évidence. Dans la mesure où la condition primaire est à fortiori satisfaite. Si logique il y a les prémisses d’une métamorphose doivent s’ébaucher au jour.IL urge dès lors d’écarter ces obstacles qui clairsement le bitume qui mène au développement. Qu’en dis-tu. ? K avait trouvé une façon superflue de répondre aux interrogations qui taraudent son esprit. Il s’était forgé un personnage imaginaire avec qui il interagissait, peaufinait les grandes lignes de ses idées, les étudiait de façon méthodique et les approfondissait au fur et à mesure que s’enchainent les raisonnements dans lesquels patauge son intellect. Solitaire dans ses idées, solitaire dans sa vision du monde, il avait découvert là un substitut, un moyen de combler son asociabilité. Son ego était le personnage idéal à même de décoder et comprendre ses postulats. Interagir sans subversives contradictions tout en apportant des réponses critiques constructives aussi bien à ses inférences qu’à ses inquiétudes. En ses monologues enthousiasmés il trouvait un refuge psychologique où dématérialisé son être paraissait transporté dans un univers harmonieux où nul obstacle ne pouvait entraver sa sérénité. Cette échappatoire symbolise le point de rencontre de K avec lui-même, avec cette entité pensante enfoui en lui. Il y a découvert son potentiel et sa forte capacité à solutionner les dilemmes qui lui chatouillaient les méninges. Ainsi vers une connaissance de soi d’avantage grandissante se dirigeait-il.
- Nul concrétisation ne serai atteinte, quand bien même les idées novatrices existent, quelles pullulent et germent dans quantité d’esprits ambitieux, soucieux d’entreprendre si le climat idéologique comportemental n’est pas favorable à leur incubation. Je présage que par le passage d’une tempête épuratrice qui emportera avec elles toutes les viles maladies telles l’égoïsme, l’ethnocentrisme, l’égocentrisme... viendra une averse de prospérité qui fera germer le développement au sein de notre champ commun qu’est le Gondwana. La volonté doit d’avantage être forte et le civisme beaucoup plus tranchant car c’est par leur biais que l’on défrichera les mauvaise herbes qui freinent la croissance de notre semence.
***************************************************************************
La matinée était plutôt calme, les arbres jonchant la nouvelle route bitumée vêtus de leurs feuillages pourpres caractéristique de cet instant de la journée semblaient inertes. On eut dit que le vent chargé de rosée peinait à se mouvoir. L’environnement était triste sobre dépourvu d’ambiance. Quelques chiens errants pour se remettre de cette rude nuit qui vient de s’achever creusaient pour s’y nicher des trous aux pieds des arbres. Seuls quelques oiseaux espiègles frappés par la douce lumière matinale entonnaient leur chant strident rompant ainsi par moment la mélancolie qui sévissait. K, apparu impromptu d’une ruelle étroite qui débouche sur la bitume, venait de découvrir le ciel dans sa jovial splendeur. En effet la ruelle qu’il venait d’emprunter se dessine entre d’imposantes rangées de concessions dont les murs s’érigeant au plus haut camouflaient l’astre. Il s’arrêta net un moment, déploya son nez vers le ciel pour se gaver d’avantage de cet air frais qui avait une senteur toute particulière. Soudain quelque chose le tiqua de jeter un coup d’œil sur sa montre. Il était huit heures moins le quart. Approximant la longue route qui l’attendait, il hâta le pas trainant difficilement son sac chargé. Au portail du lycée à peine avait-il salué le gardien, Ambouka, un quadragénaire qui paraissait plus vieux que son âge, signe d’une alimentation moins soignée, K s’englouti dans l’établissement. Arrivé sur l’estrade devant la porte qui donnait accès à la salle de cours il fit une pose, guettant le regard du prof qui visiblement se donnait à cœur joie de griffonner ses formules mathématiques au tableau. Prêt à taper pour attirer l’attention de l’enseignant, ses mains furent comme retenu par une entité invisible. Mr Idrissa était de ces profs sévères qui ne tolèrent pas les irrégularités. Mine toujours serrée, émacié, et habituellement habillé d’un pantalon en tissu et d’une manche courte carrelée, il était craint de ses élèves. Jamais il ne tenait pour dispenser son cours un quelconque papier. Son seul fétiche, sa craie qu’il employait majestueusement et exprimant à travers elle l’étendue de son incroyable intellect. Aussitôt qu’il écrivit une dernière formule, il considéra le pauvre jeune homme essoufflé et visiblement paniqué qui se tenait au-devant de sa classe.
-Entre donc dit-il fronçant légèrement les sourcils face à l’hésitation de l’élève.
Devant ces mots qui sonnaient paradoxalement tendre car venant du prof le plus craint du lycée, les élèves furent ébahis.
K entra maladroitement dans la salle sous les regards incongrus de ses camarades. Il lança un « bonjour monsieur » timide et regagna péniblement sa place. Malgré sa rigueur Mr Idrissa se montrait docile à l’égard de ses meilleurs élèves. K était l’un d’eux le meilleurs qu’il n’ait jamais eu confia-t-il un jour à un de ses collègues. C’est ce qui d’ailleurs lui a valu de ne s’être pas fait sanctionné pour son retard. Ayant maintenant retrouvé ses esprits, il porta son attention sur les formules qui embellissaient le tableau.
-Mr dit-il excusez-moi mais il me semble que vous aviez dans la seconde équation omis une variable. Ce qui rend la suite du raisonnement plutôt caduque.
-Merci bien K, quelle indulgence !!!-s’adressant aux autres élèves :
-Bande de figurines, n’êtes-vous pas fichu de déceler l’erreur alors même que vous aviez suivit le raisonnement dès son début ?
K eu envie de s’enterrer à l’instant, de disparaitre. Mr Idrissa venait de le plonger dans un malaise insoutenable. Une grosse goute de sueur se forma sur le coin de son oreille. Pour échapper de la cave dont son anxiété l’avait fait prisonnier, de ses yeux il commença à inspecter la salle. Un bout de plafond pendait à un coin de celle-ci laissant entrevoir un faisceau de lumière pénétrant au travers de la tôle qui au fil des années a cédée aux caprices des intempéries. On ne sait quelle infortune avait arraché les battants d’une des quatre fenêtres que comptait la salle. K fut dépité, dégouté, indigné par ce piteux décor qui traduit non moins l’irresponsabilité que l’indifférence de l’administration.
Le soleil désormais terne et qui tel un calicot était accroché au ciel conférait à ce dernier une couleur jaunâtre qui rappelait l’or. Et les quelques rares nuages qu’on pouvait observer paraissaient tels des immense plaques de plomb qui se fendaient puis se racolaient les unes aux autres. Le hennissement des ânes, les braiments des moutons, formaient avec le vrombissement des moteurs, un cocktail cacophonique qui montant au ciel semble pleurer la déchéance de ce jour qui s’en va à jamais. Plus tard le nuit était tombée et seul se faisait ouïr les aboiements des chiens qui rompaient par moment le calme régnant alors sur la ville. Lamso la peau desséchée, le visage ridé, le regard vague, assis à même le sol et adossé au mur du vestibule, distinguant à peine les contours de ses mains, mastiquait avec nonchalance sa cola. Un instant bougeait-il ses bras pour chasser les moustiques qui inopportunément chantaient à ses oreilles. On pouvait alors entendre hurler ses os dont la vieillesse avait rendus bavards. A quoi pouvait-il bien songer ? Se remémorait-il ce temps déchu à l’époque où les chants des coqs et la symphonie des pilons rythmaient le début de ses journées ? On ne pouvait ne pas déceler sur l’expression de son visage une certaine mélancolie qu’engendre la nostalgie de cette époque. Difficilement, il se détacha du sol et muni de sa canne rejoignit son lit de bambou et s’y allongea. Quelques instants plus tard on pouvait entendre les ronflements de ce vieillard qui se perdait dans le silence d’une nuit envoutante.
Depuis un moment K contemplait fixement la silhouette de son grand père Lamso. Ce vieillard suscite en lui une certaine fascination. A travers son corps flasque se raconte une histoire, l’épopée d’une jeunesse remplie de combat, de sacrifice, de dévouement, de préservation de l’intérêt générale et d’une volonté inouïe dans la quête d’un idéal commun. Il incarne l’émanation d’un mental fort d’une énergie infaillible. Et voilà que l’infortune de l’âge le réduit à un être frêle et squelettique. Ironie de la nature, les quelques muscles qui lui restent à peine accrochés à leur pendoir se meuvent à volonté et semblent être attirés par la pesanteur terrestre. Vers quoi pouvaient-ils bien être attirés si ce n’est leur ultime réceptacle qui à tout point de vue semble impatient de leur offrir refuge. Le personnage pittoresque qu’ incarne Lamso inspire K dans quantité de ses idéaux. Ainsi ne se lassait-il jamais de longues conversations qu’ils leur arrivaient d’animer. Lamso est sans doute en dehors de son ego la seule personne à qui K livrait ses pensées.
Peu à peu, le silence matinal laissait place aux gémissements de vieux moulins mêlés aux chants de coqs qui se relayaient et donnaient l’impression d’assister à ces conversations des plus ésotériques. K peinait à s’y résoudre, la nuit a été plutôt courte quelques instant plutôt pensa-t-il, n’était-il pas en train de s’imaginer les yeux fermés, de merveilleux scénarios certainement des plus improbables ? Et voilà donc qu'une autre journée de routine s’annonce au Gondwana !!!
Assis sur le claustra de la terrasse, le dos affaissé au mur, K avait la tête levée au le ciel. On eut dit qu’il contemplait une de ces scènes mystiques qui le plongeait dans un instant méditatif intense. Ces forts moments de résilience rien ne pouvait l’y extirper. Par moments, sorti de sa caserne psychique, il contemplait les mouches qui lui paraissaient danser au rythme d’un chant entomologique qu’il ne pouvait ouïr. Cette pensée lui arracha un petit sourire moqueur. Pourquoi cette imagination lui est-elle parvenue ? L’effort de trouver une réponse à son interrogation rendait son sourire de plus en plus large. Et bientôt il lâcha involontaire un rire, balança la tête de gauche à droite comme pour signifier de sa désolation présente. Indo, sa mère, assise à même la terrasse et qui depuis un moment observait la scène se tint le menton en signe d’étonnement. On pouvait lire dans ses yeux un air de pitié et d’inquiétude. Elle ne tarda pas à l’apostropher :
- Qu’as-tu donc à rire tout seul ?
- Oh !!! rien de vraiment intéressant
- J’espère pour toi que tu vas bien.
- Je vais bien !!! renchérit-il, je vais bien.
Aussitôt il se replongea dans ses songeries. Ce garçon, je l’ai enfanté seulement se disait-elle. De ses agissements, elle ne contrôlait rien. Enfant précoce, elle avait décelé en lui une étrange curiosité et un calme incommensurable. A peine âgé d’un an se rappelle-t-elle, il regardait la télévision avec grande attention, agissant aux scènes s’y produisant par des mimiques qui animaient son visage innocent de nourrisson. Indo pouvait ainsi le laisser la journée durant sans qu’elle s’inquiéta à aucun moment qu’il se déroba de son centre d’attention.
A beaucoup d’égards K était un enfant différent des autres. Sa singularité dans les gestes, son désir de perfection, ses exigences vestimentaires et gustatives étaient de ces particularités intransigeantes. Tout ce qui lui tombait sur la main faisait l’objet d’une longue auscultation, et il ne s’en débarrassa que lorsqu’il eut jugé sa curiosité satisfaite. Il lui arrivait parfois qu’il commit quelques bavures. Il suffisait de le toiser pour le recadrer. Prenant alors conscience de ses turpitudes, il tachait de ne plus en commettre. Ces occasions étaient plutôt rares où ses déraillements firent sanctionnés d’un châtiment corporel. Encore K ne se souvenait-il que d’une seule fois. Certainement la plus marquante. Il avait alors sept ans, un samedi, à la sortie des cours de rattrapage, il s’était aventuré à suivre ses camarades dans une randonnée sans but. Ce n’est que tard dans la journée, lorsque le soleil achevait sa course qu’il décida de rentrer. Marchant difficilement à travers le terrain sablonneux de cette ville qui évoquait l’après déluge, il rencontra sa mère qui était désespérément à sa recherche. Elle était dans tous ses états. L’inquiétude et la colère caractérisaient sa mine. Elle le toisa un bon moment puis lui demanda de monter dans la voiture. Jamais il ne l’avait vu aussi colérique. Son cœur entama alors des battements frénétiques. Lorsque arrivés à la maison conscient du sort qui lui était réservé, K enleva machinalement la ceinture qui lui tenait le pantalon, l’enroula puis la camoufla derrière le dos, afin qu’elle ne puisse être l’instrument de son bourreau. Indo qui avait remarqué sa manie, se saisi de la ceinture et commença par lui assener des coups. C’est alors que le bouclier de la ceinture lui heurtant le front fit jaillir un filet de sang. On le transportât aussitôt à l’hôpital. De cet évènement, K en garda un souvenir, une cicatrice lui surplombant le front et qui se perd dans les rides se formant lorsqu’il lui arriva de froncer les sourcils.
***************************************************************************
K plongé à fond dans ses questionnements philosophiques acquiesçait ses propres déductions :
- Tous ces grand bouleversements socio-économiques qui ont caractérisé l’occident, ces grand édifices, ces grands chef d’œuvre qui constituent aujourd’hui le socle de l’hégémonie occidentale. Ne sont-ce pas des esprits pensant l’émanation d’idées ou de pensées fertiles qui ont été préalablement éclosent et matérialisées par la force de la volonté ? demandait-il à son ego.
- Certainement !!! Approuva-t-il
- Mais si le changement escompté dans le monde matériel doit avoir à priori été ébauché dans l’univers intelligible. Ce qui d’ailleurs est nécessairement le cas. Que pour modeler à sa guise la matière, lui donner diverse forme, la manier à sa volonté doit précéder tout un processus métaphysique qui constitue l’aboutissement d’une longue gestation idéologique. Aussi ne sait-on pas que la nature humaine concède ipso-facto à l’individu la faculté inconditionnelle de penser, de faire germer les idées et de les rendre féconde par l’action. Que cette concession de la nature n’est ni stigmatisante ni sélective. Elle est donc l’apanage des hommes au-delà de leur situation géographique, leurs différences morphologiques, culturelles, ethniques ou raciales. Qu’elle constitue même par essence la définition de l’individu, de l’être humain. Si toutes ces assertions sont irréfutables et indéniablement vrai. La légitimité et la nécessité de s’interroger sur les causes et la nature de ce qui s’avère l’obstacle pour une envolé du Gondwana doit être une évidence. Dans la mesure où la condition primaire est à fortiori satisfaite. Si logique il y a les prémisses d’une métamorphose doivent s’ébaucher au jour.IL urge dès lors d’écarter ces obstacles qui clairsement le bitume qui mène au développement. Qu’en dis-tu. ? K avait trouvé une façon superflue de répondre aux interrogations qui taraudent son esprit. Il s’était forgé un personnage imaginaire avec qui il interagissait, peaufinait les grandes lignes de ses idées, les étudiait de façon méthodique et les approfondissait au fur et à mesure que s’enchainent les raisonnements dans lesquels patauge son intellect. Solitaire dans ses idées, solitaire dans sa vision du monde, il avait découvert là un substitut, un moyen de combler son asociabilité. Son ego était le personnage idéal à même de décoder et comprendre ses postulats. Interagir sans subversives contradictions tout en apportant des réponses critiques constructives aussi bien à ses inférences qu’à ses inquiétudes. En ses monologues enthousiasmés il trouvait un refuge psychologique où dématérialisé son être paraissait transporté dans un univers harmonieux où nul obstacle ne pouvait entraver sa sérénité. Cette échappatoire symbolise le point de rencontre de K avec lui-même, avec cette entité pensante enfoui en lui. Il y a découvert son potentiel et sa forte capacité à solutionner les dilemmes qui lui chatouillaient les méninges. Ainsi vers une connaissance de soi d’avantage grandissante se dirigeait-il.
- Nul concrétisation ne serai atteinte, quand bien même les idées novatrices existent, quelles pullulent et germent dans quantité d’esprits ambitieux, soucieux d’entreprendre si le climat idéologique comportemental n’est pas favorable à leur incubation. Je présage que par le passage d’une tempête épuratrice qui emportera avec elles toutes les viles maladies telles l’égoïsme, l’ethnocentrisme, l’égocentrisme... viendra une averse de prospérité qui fera germer le développement au sein de notre champ commun qu’est le Gondwana. La volonté doit d’avantage être forte et le civisme beaucoup plus tranchant car c’est par leur biais que l’on défrichera les mauvaise herbes qui freinent la croissance de notre semence.
***************************************************************************
La matinée était plutôt calme, les arbres jonchant la nouvelle route bitumée vêtus de leurs feuillages pourpres caractéristique de cet instant de la journée semblaient inertes. On eut dit que le vent chargé de rosée peinait à se mouvoir. L’environnement était triste sobre dépourvu d’ambiance. Quelques chiens errants pour se remettre de cette rude nuit qui vient de s’achever creusaient pour s’y nicher des trous aux pieds des arbres. Seuls quelques oiseaux espiègles frappés par la douce lumière matinale entonnaient leur chant strident rompant ainsi par moment la mélancolie qui sévissait. K, apparu impromptu d’une ruelle étroite qui débouche sur la bitume, venait de découvrir le ciel dans sa jovial splendeur. En effet la ruelle qu’il venait d’emprunter se dessine entre d’imposantes rangées de concessions dont les murs s’érigeant au plus haut camouflaient l’astre. Il s’arrêta net un moment, déploya son nez vers le ciel pour se gaver d’avantage de cet air frais qui avait une senteur toute particulière. Soudain quelque chose le tiqua de jeter un coup d’œil sur sa montre. Il était huit heures moins le quart. Approximant la longue route qui l’attendait, il hâta le pas trainant difficilement son sac chargé. Au portail du lycée à peine avait-il salué le gardien, Ambouka, un quadragénaire qui paraissait plus vieux que son âge, signe d’une alimentation moins soignée, K s’englouti dans l’établissement. Arrivé sur l’estrade devant la porte qui donnait accès à la salle de cours il fit une pose, guettant le regard du prof qui visiblement se donnait à cœur joie de griffonner ses formules mathématiques au tableau. Prêt à taper pour attirer l’attention de l’enseignant, ses mains furent comme retenu par une entité invisible. Mr Idrissa était de ces profs sévères qui ne tolèrent pas les irrégularités. Mine toujours serrée, émacié, et habituellement habillé d’un pantalon en tissu et d’une manche courte carrelée, il était craint de ses élèves. Jamais il ne tenait pour dispenser son cours un quelconque papier. Son seul fétiche, sa craie qu’il employait majestueusement et exprimant à travers elle l’étendue de son incroyable intellect. Aussitôt qu’il écrivit une dernière formule, il considéra le pauvre jeune homme essoufflé et visiblement paniqué qui se tenait au-devant de sa classe.
-Entre donc dit-il fronçant légèrement les sourcils face à l’hésitation de l’élève.
Devant ces mots qui sonnaient paradoxalement tendre car venant du prof le plus craint du lycée, les élèves furent ébahis.
K entra maladroitement dans la salle sous les regards incongrus de ses camarades. Il lança un « bonjour monsieur » timide et regagna péniblement sa place. Malgré sa rigueur Mr Idrissa se montrait docile à l’égard de ses meilleurs élèves. K était l’un d’eux le meilleurs qu’il n’ait jamais eu confia-t-il un jour à un de ses collègues. C’est ce qui d’ailleurs lui a valu de ne s’être pas fait sanctionné pour son retard. Ayant maintenant retrouvé ses esprits, il porta son attention sur les formules qui embellissaient le tableau.
-Mr dit-il excusez-moi mais il me semble que vous aviez dans la seconde équation omis une variable. Ce qui rend la suite du raisonnement plutôt caduque.
-Merci bien K, quelle indulgence !!!-s’adressant aux autres élèves :
-Bande de figurines, n’êtes-vous pas fichu de déceler l’erreur alors même que vous aviez suivit le raisonnement dès son début ?
K eu envie de s’enterrer à l’instant, de disparaitre. Mr Idrissa venait de le plonger dans un malaise insoutenable. Une grosse goute de sueur se forma sur le coin de son oreille. Pour échapper de la cave dont son anxiété l’avait fait prisonnier, de ses yeux il commença à inspecter la salle. Un bout de plafond pendait à un coin de celle-ci laissant entrevoir un faisceau de lumière pénétrant au travers de la tôle qui au fil des années a cédée aux caprices des intempéries. On ne sait quelle infortune avait arraché les battants d’une des quatre fenêtres que comptait la salle. K fut dépité, dégouté, indigné par ce piteux décor qui traduit non moins l’irresponsabilité que l’indifférence de l’administration.
Le soleil désormais terne et qui tel un calicot était accroché au ciel conférait à ce dernier une couleur jaunâtre qui rappelait l’or. Et les quelques rares nuages qu’on pouvait observer paraissaient tels des immense plaques de plomb qui se fendaient puis se racolaient les unes aux autres. Le hennissement des ânes, les braiments des moutons, formaient avec le vrombissement des moteurs, un cocktail cacophonique qui montant au ciel semble pleurer la déchéance de ce jour qui s’en va à jamais. Plus tard le nuit était tombée et seul se faisait ouïr les aboiements des chiens qui rompaient par moment le calme régnant alors sur la ville. Lamso la peau desséchée, le visage ridé, le regard vague, assis à même le sol et adossé au mur du vestibule, distinguant à peine les contours de ses mains, mastiquait avec nonchalance sa cola. Un instant bougeait-il ses bras pour chasser les moustiques qui inopportunément chantaient à ses oreilles. On pouvait alors entendre hurler ses os dont la vieillesse avait rendus bavards. A quoi pouvait-il bien songer ? Se remémorait-il ce temps déchu à l’époque où les chants des coqs et la symphonie des pilons rythmaient le début de ses journées ? On ne pouvait ne pas déceler sur l’expression de son visage une certaine mélancolie qu’engendre la nostalgie de cette époque. Difficilement, il se détacha du sol et muni de sa canne rejoignit son lit de bambou et s’y allongea. Quelques instants plus tard on pouvait entendre les ronflements de ce vieillard qui se perdait dans le silence d’une nuit envoutante.
Depuis un moment K contemplait fixement la silhouette de son grand père Lamso. Ce vieillard suscite en lui une certaine fascination. A travers son corps flasque se raconte une histoire, l’épopée d’une jeunesse remplie de combat, de sacrifice, de dévouement, de préservation de l’intérêt générale et d’une volonté inouïe dans la quête d’un idéal commun. Il incarne l’émanation d’un mental fort d’une énergie infaillible. Et voilà que l’infortune de l’âge le réduit à un être frêle et squelettique. Ironie de la nature, les quelques muscles qui lui restent à peine accrochés à leur pendoir se meuvent à volonté et semblent être attirés par la pesanteur terrestre. Vers quoi pouvaient-ils bien être attirés si ce n’est leur ultime réceptacle qui à tout point de vue semble impatient de leur offrir refuge. Le personnage pittoresque qu’ incarne Lamso inspire K dans quantité de ses idéaux. Ainsi ne se lassait-il jamais de longues conversations qu’ils leur arrivaient d’animer. Lamso est sans doute en dehors de son ego la seule personne à qui K livrait ses pensées.
Peu à peu, le silence matinal laissait place aux gémissements de vieux moulins mêlés aux chants de coqs qui se relayaient et donnaient l’impression d’assister à ces conversations des plus ésotériques. K peinait à s’y résoudre, la nuit a été plutôt courte quelques instant plutôt pensa-t-il, n’était-il pas en train de s’imaginer les yeux fermés, de merveilleux scénarios certainement des plus improbables ? Et voilà donc qu'une autre journée de routine s’annonce au Gondwana !!!