Suis-je dans le noir ou ai-je les yeux fermés ? Peut-être les deux. Je me pince plusieurs fois mais rien n’y fait, je suis belle et bien en éveil et tout à fait lucide. Alors, je remarque que tout vient de s’écrouler comme un château de carte. Que toute ma vie est un tissu de mensonges. Mon père, ma mère,... mon mariage. Tout. Mais qu’est-ce que je pensais au juste ? Que la vie était un conte de fée ? Que tout finissait toujours bien ? Ou pire encore que je vivrai une de ces charmantes histoires dont on me bassinait les oreilles avec de ces phrases toutes faites ‘’Et ils vécurent heureux jusqu’à la fin des temps ?’’ Vraisemblablement Non.
Je viens de comprendre la triste réalité qu’est ma vie. Un ensemble de baratins emballé dans du papier cadeau. J’aurais dû m’en douter que derrière ces sourires se cachaient une vérité. Une vérité que j’aurais dû apercevoir. Tout était toujours parfait. Trop parfait pour être vrai. De la vaisselle à mon mariage en passant par mes charmants parents et mon époux si aimant, Charles alias C.
Et pourtant tout allait si bien. Rien ne présageait un tel retournement de situation...
Tout a commencé le 15 mars. J’ai rencontré C un jeudi soir en allant prendre un verre après le service. Il m’a gentiment abordé, on a discuté de tout et de rien. Pour tout dire, il ne m’a pas fait une grande impression. C’est le genre d’homme que vous ne regarderez quand vous avez du temps. Pas le genre qu’on s’arrête un instant en chemin, afin de mater et d’apprécier son charme. Loin de là. Il était pas mal mais sans plus. A la fin, Charles a voulu me raccompagner mais j’ai décliné son offre. Au retour, mes parents m’attendaient sur le perron de notre maison. Heureusement que je suis rentrée seule sinon ma mère aurait une occasion de plus de me caser. Chose que je ne voulais absolument pas.
Trois jours plus tard, j’ai croisé Monsieur C non loin de mon lieu de service et il m’a invité à déjeuner. Invitation que j’ai acceptée. Et ce fut le début d’une longue série de rendez-vous. On allait soit au cinéma, soit à un concert de jazz ou encore à la plage. A vrai dire, il savait s’y prendre avec les filles, un vrai gentleman. Et je n’ai rien vu venir, par la moindre faille dans son comportement... Et c’est cela qui m’a fait peur car un homme droit, ça n’existe pas tout simplement. La perfection n’est pas de ce monde....
Après quatre mois, Monsieur C m’a demandé en mariage. J’étais d’accord, mes parents aussi, un peu plus que moi je l’avoue. Tout est allé si vite, depuis ce fameux jeudi soir jusqu’au jour du mariage. Il faut dire que C avait de l’argent et d’importantes usines de transformation de cacao car il était un homme d’affaires. Et c’est tout ce que je sais de lui. Vous vous dites sûrement que cela est insuffisant pour épouser un homme mais moi ça me convenait. Quoi de plus ? Et puis ma mère ne m’a pas vraiment laissé le choix. « Mélanie, écoute moi très bien. C’est la dernière fois que je te le dis. Soit tu épouses Charles, soit tu prends le premier vol pour le camp de la Géorgie et tu ne reviens pas avant 10 ans. ». Et le choix fut vite fait. J’aimais C mais pas à la folie.
Aujourd’hui, nous fêtons notre 8ème anniversaire de mariage. Tout le monde disait que nous formions la paire. Dans l'entreprise de C, je m'occupais de tout ce qui était lié à la communication vue que c'était ma formation de base. Je recherchais les investisseurs et clients potentiels et lui se chargeait de signer les documents et de me donner des ordres. Je ne savais pas de quoi il discutait avec eux. Je faisais mon job et tout le monde en était ravi surtout mes parents... Si j'avais su.
Pour cette soirée, toutes les personnes qui connaissaient de près ou de loin ma famille y étaient conviés. On devait faire un discours, parler de l'importance de la famille et du travail bien fait et dîner dans une ambiance plus ou moins festive... Mais rien ne s’est passé comme prévu et je suis devenue la risée à mon propre anniversaire de mariage...
Il était 19h. Le moment pour nous de faire notre apparition et de montrer nos sourires colgate devant des centaines d’invités aussi hypocrites les uns que les autres. Je venais de m’en rendre compte à mon plus grand damn. Les compliments, les bisous sur la joue, les câlins, les serrages de mains, rien n’était vrai.
Ce soir-là, j’avais eu un mauvais pressentiment dont j’ai eu a parlé avec Charles. Il m’avait juste dit : « Mélanie ne t’en fais pas. Tout se passera bien ». Puis, il avait conclu la discussion par un baiser chaste sur le front.
J’ai toujours pensé que je me réveillerai de ce cauchemar mais seul un bruit de verre cassé me ramena à la triste vérité : Mon mari et mes parents étaient des trafiquants de drogue recherché par Interpol depuis plus de 20ans.
Cette vérité me frappa de plein fouet. Toutes ses réunions entre eux, ces voyages improvisés, le luxe notoire dans lequel je vivais tant chez mes parents que chez Charles et enfin la rapidité dans laquelle s’est déroulé mon mariage... Tous me revinrent. Peut-être que ce sont mes parents qui l'ont envoyé vers moi pour que je l'épouse et....Mon Dieu!
«Madame, vous allez bien? Voulez vous un peu d'eau?». Voilà les quelques mots que m'ont adressé les policiers au poste après m'avoir interrogé. Pour eux, j'étais la petite femme "soit belle et tais-toi". Celle qui aimait le luxe et qui se battait dans les boutiques pour avoir le tout dernier Louboutin. Et même si, j'avais été éduquée de cette manière, je n'étais pas ce genre de personne. Tout le monde vous juge sans vous connaître...
Après plusieurs interrogatoires au poste, on devait juste attendre notre procès. Selon les informations on risquait au moins une peine d'emprisonnement de 20 ans chacun. Si tout allait bien, moi je rentrerai chez moi libre et...ruiné. Une perspective à laquelle je flippais un peu. Mais comparablement au sort de Charles et de mes parents, cela n'était absolument rien....
Deux semaines après notre arrestation, on a été jugé. Mes parents ont avoué que je n'y étais pour rien. Quand aux propos de "mon très cher époux" le lâche à préférer mentir. Quel honte pour notre famille !
Je suis restée en prison 2 mois afin de faire une rétrospection sur ma vie, comme l'a ordonné le juge... Au départ, j'étais au bord du gouffre et en voulais à toute ma famille, à Dieu, au juge, et à la vie d'être si injuste. Les premières semaines était un calvaire entre les travaux à faire, l'environnement dont je n'étais pas habitué et la mauvaise bouffe qu'on nous servait... Je dormais à peine trop occupée à penser à l'aspect chaotique de ma vie et à incriminer mes parents pour les mauvais choix qu'ils ont fait pour moi... Surtout ma mère. Je ne sais pas si je pourrai lui pardonner....
Il y a certains jours comme ceux ci où je crie, je pleure et ne mange absolument rien... Et ensuite je remercie le ciel de ne pas avoir eu d'enfant avec ce traître qu'est mon mari. Car je ne sais pas comment je lui aurait expliqué que son géniteur était en tôle pour trafic de stupéfiants. Enfin, il y a ces jours où je me dis que l'avenir sera meilleur...
Aujourd'hui, je sors après deux longs mois de réflexion et de préparation de soi. Je préfère le voir ainsi plutôt que de penser au mot prison. Je rentre chez moi et presque tout a disparu... Au moins, il reste la maison. Je pourrai y habiter le temps de reprendre ma vie en mains.
A partir de ce jour, je n'aurai plus de regrets, je vivrai ma vie en faisant mes propres choix et je ne penserai désormais qu'à moi. Je ferme les yeux un moment et les rouvre. Je ne suis plus dans le noir. Tout mon être irradie de bonheur...et d'espoir.