Cri de coeur

-Maître ? Vous plaisantez ? Vous pouvez me cogner comme l'ont fait tous les autres mais je ne vous appellerai pas, maître ! Votre gent dite masculine a longtemps exercé sans vergogne son autorité sur les pauvres femmes de notre société ! Et nous avons été pendant longtemps les élèves sages et obéissantes de cette société phallocratique. Aujourd'hui nous sommes à bout de force, et nous ne comptons pas périr en silence comme toutes les autres femmes qui ont perdu l'usage de la parole à force d'enfouir leur voix.
Et laissez-moi vous dire que s'il y'a bien une appellation qui vous conviendrait, c'est bien celle-là : « Le dictateur » Dès cet instant la foule de femmes qui se tenait derrière moi se mit à hurler « Dictateur, Dictateur ! » Pendant ces hurlements, un des hommes présent dans cette bande qui accompagnait ce foutu dictateur venait d'administrer une gifle de plus sur mon pauvre visage souriant. Alors que je réfléchissais donc à comment tenir tête à ces hommes de loi venus spécialement pour empêcher notre marche, une interrogation du dictateur apparemment contrarié me fit sourire davantage.
-Dictateur : « Puis je savoir pourquoi tu souris ? »
-Pourquoi je souris ? Vous osez me demander pourquoi je souris ? La réponse devrait pourtant être évidente pour vous, car vous êtes l'autorité suprême de cette société au bord de la dérive et Vous êtes censés être ouvert d'esprit. Mais hélas ! Ici, l'autorité est donnée à n'importe qui. Le seul critère recommandé, est la présence de TESTICULES entre les jambes ! Et pour revenir à votre question, sachez tout simplement que je souris parce que j'ai atteint mon but !
Eh oui, la douleur de vos gifles ne peut pas et ne pourra jamais d'ailleurs égaler la joie qui m'anime lorsque je regarde cette grande foule de femmes décidées à se faire entendre. Ceci est la résultante de cinq années de sensibilisation. Au départ j'avais ma voix et le courage de me faire entendre dans cette satanée société mal gouvernée ; Mais seule je me suis très vite rendu compte qu'il était difficile d'impacter comme il se doit ! Aujourd'hui donc, j'ai toutes les raisons du monde de sourire et de me sentir fière.
Et même si mon cœur baigne toujours dans un sang d'amertume lorsque ma raison me fait admettre que même à l'instant T où je vous parle il y'a des millions de fillettes qui se font mutiler dans des conditions précaires et abominables ; Et des millions de jeunes filles qui sont mariée de force a l'adolescence pour finir violentées, méprisées et muselées une fois mariées. Je reste quand même toujours fière parce que ma voix et celle de toutes ces femmes présentent ici contribueront à changer la donne dans un futur qui ne saurait tarder. Alors que la foule de femme qui m'accompagnait hurlait en signe d'approbation, mon gifleur cria d'une voix masculine ceci : 
« Même cette marche féministe que vous vous entêtez à mener ne changera pas votre destin de femme. »
-Comment ? Vous estimez que c'est pour fuir mon destin de femmes que j'ai enfreint la loi en organisant cette marche FEMINISTE ? Vous voyez au fur et à mesure que nous avançons dans cette conversation, vous me prouver clairement qu'en plus d'être des dictateurs, vous êtes également très limité dans votre façon d'appréhender les choses. Qu'à cela ne tiennent faites vous honneur pour une fois et retenez de manière indélébile que ni les mutilations génitales féminines, ni les mariages précoces et le viol ne représentent mon destin et encore moins celui des autres femmes. Ces abominables conditions nous ont été imposées par vous !
Oui vous et tous vos pairs qui ont érigé l'humiliation de la gent féminine au rang le plus suprême des normes de cette société où l'impunité est reine. Et parlant d'impunité je m'en voudrai de ne pas évoquer ici et maintenant l'état pitoyable de ce pays extrêmement riche mais gouverné par des hommes qui en plus d'avoir un esprit phallocratique recèlent en eux les pires maux de la mal gouvernance étatique. Alors que mes pairs féministes, inlassables, continuaient de me jeter des fleurs, Le dictateur poussa un soupir las avant d'affirmer vigoureusement que :
-« La mal gouvernance politique ne me concerne guère. Si votre théâtre féministe tire à sa fin, Veuillez me suivre au tribunal. »
-Je partirai avec vous au tribunal. Répliquai-je sur un ton ironique. Mais avant cela je tiens à vous faire savoir puisque vous semblez avoir une mémoire de poule ; que vous avez toujours œuvrez en faveur des gouvernants politiques de ce pays. Et ceci est une raison largement suffisante pour moi de vous rappelez que vous ainsi que vos supérieurs politiques sont entrain de plonger ma nation dans un chao imminent. Et je ne serai pas complice de votre lâcheté politique.
Je disais donc plus haut que notre vie sociale dans ce pays est actuellement pitoyable. A l'instant où je vous parle des familles crèvent de faim au Nord du pays, Et à côté de cela nous dénombrons plus d'un million de déplacés internes, des milliers d'écoles fermées et plus de quatre-cent-milles enfants dans la rue. A cela s'ajoute des milliers de pertes en vies humaines ayant pour cause l'hydre terroriste. Et face cette abominable situation, vous aviez trouvé un moyen efficace pour sauver notre nation en pleure : « Le jeu des coups d'Etat ! » Eh oui ici au Pays des hommes intègres la cupidité habite les gouvernants et la psychose la population. Ici, la corruption, la gabegie et la démagogie sont au centre de la gouvernance politique, et l'égalité des sexes n'est qu'un leurre.
Avant même de retrouver le souffle après cette longue phrase, je sentis mes mains se faire saisir et mon corps poussé de force vers une destination que j'ignorais bien. Alors que mes assaillants m'éloignaient donc doucement de cette foule agitée, j'affirma haut et fort ceci : « Braves femmes, mon allocution représente ici un cri de cœur pour cette nation en gangrène, merci donc de ne pas vous résigner car c'est maintenant qu'il faut se lever »