Confessions d'une vie

Toute histoire commence un jour, quelque part. J’ai 20 ans mais ne vous fiez pas à mon jeune âge car je porte sur mon dos le fardeau d’une longue vie et aujourd’hui, je suis prête à vous la raconter. Fille unique d’une mère passionnée par les fonds marins, j’ai héritée de mon prénom, Océane.

Le début de ma nouvelle vie a commencé le jour où je l’ai aperçu, au crépuscule, près de la plage. Je m’en suis rappelée comme si c’était hier. Elle n’avait pas changé d’un poil. Toujours pareille, le même visage que celui d’un enfant et derrière qui, se cachait la meilleure alliée de Satan. Je n’ai pas voulu me rapprocher, de peur qu’elle ne me voie. Je n’avais nullement envie de faire semblant (une fois de plus) ! Je me suis donc appuyée contre un palmier afin de me remettre les idées en place car rien qu’à la savoir ici, allongée, telle une baronne au bord de la plage me déconcertait, à croire qu’il n’y a vraiment pas de justice pour les innocents dans ce monde.

J’avais tant de reproches à lui faire, tant de choses à lui dire mais les mots ne sortaient pas de ma bouche. Je suis restée cachée durant une demi-heure, le temps de savoir quoi faire pour l’affronter. Alors je commençai à répéter à « haute voix » ce que je m’apprêtais à lui dire parce qu’il fallait que ce cauchemar se termine une bonne fois pour toute. J’avais les mains moites et l’impression que mon cœur se détachait de ma poitrine. Comment trouver les bons mots (d’ailleurs il n’y en a pas) pour dire à quelqu’un que vous êtes au courant de tout ce qu’il a manigancé contre vous ? [...]

A bien y réfléchir maintenant, je pense que si l’on était dans une cour de justice, là où l’on aurait le droit de dire tout haut ce que l’on pense tout bas, (dans un monde parallèle peut-être) on aurait sans doute eu une conversation comme celle-ci :
- Qu’est-ce que je t’ai fait ?
- Pourquoi me poses-tu la question ? rétorquerait Désirée.
- On ne répond pas à une question par une autre.
- Tu ne m’as rien fait. Puis-je savoir la raison de ma convocation ?
- Elle n’essaie même pas de se cacher derrière ses actes ! Penserais-je à haute voix.
- C’est ainsi quand on n’a rien à se reprocher !
- Tu ne te rends même pas compte du tort que tu fais autour de toi !
- Il n’y a pas de mal à chercher à obtenir ce que l’on n’a pas !
- En privant les autres de leur bonheur ?
- Faut bien survivre dans ce monde ! N’est-ce pas ? Et on a terminé j’espère ? Parce que moi je n’ai plus rien à ajouter ‘’ votre honneur’’.

Arrêtons-nous deux secondes pour imaginer ce monde parallèle où seule la justice ‘’des vérités cachées’’ seraient responsable de notre destin... Là où l’on pourrait apprendre les vraies pensées des gens vis-à-vis de nous... Là où l’honnêteté serait le seul moyen vers la vérité... C’est à se demander maintenant si l’on préfère vivre dans un monde rempli d’hypocrisie... c’est-à-dire là où la vérité fait moins mal...


Je me suis tenue à une certaine distance d’elle au cas où elle aurait eu envie de retenter quelque chose contre moi, et c’est là que je me suis mise à tout balancer comme une boite à parole, les yeux fermés et les larmes aux yeux :

- Je connais toute la vérité, je sais que c’est toi qui as orchestré mon enlèvement ! Tu as toujours été jalouse de moi, tu as toujours eu envie de me faire du mal et je n’ai jamais pu en parler, tu as toujours voulu avoir tout ce que je possède mais je tiens à te rappeler que les biens matériels n’ont jamais fait le bonheur d’un être humain. Je donnerais tout ce que j’ai aujourd’hui pour retrouver ma vie d’avant là où j’avais encore mes parents pour veiller sur moi. Très jeune, j’ai dû prendre les rênes de la famille et toi, tu étais au courant de mon histoire mais tu as quand même choisi de me trahir [...]
- Mais qu’est-ce que tu me racontes ma vieille ? Es-tu ivre en «  ce beau soir » ?
- Ne te méprends pas ! C’est bien toi l’alcoolique de nous deux et tôt ou tard, l’alcool aura raison de toi ! Ta vie est bien transparente, comme ce fameux rhum blanc dont je m’en rappelle plus le nom, le savais-tu ? au début on l’aime bien mais à force de le boire, on s’en lasse parce qu’il nous empoisonne le système. Ton corps était comme la forteresse des hommes dans les bordels de Tripoli, tu ne faisais que ça, à une époque, quoique... tu n’aies pas vraiment changée !
- Mais....
- Tu te tais à présent, c’est moi qui parle. Dans mon dos, tu te crois invincible mais devant moi tu ne peux rien. Tu es à mes pieds !
- Je... plaide...
- TU plaides ? Tu ne sais plus parler maintenant, regardes-toi donc ! Les lèvres et les mains tremblantes comme une feuille devant moi... ne pouvant plus prononcer un mot sans bégayer. Au sujet de mon enlèvement tu plaides ?
- Coupable...
- Les horreurs que l’on m’a fait subir dans cette cellule ?
- Coupable... Répondit-elle une seconde fois d’une voix défaillante.
- Ne vois-tu pas l’immensité de ton acte ? M’avoir fait enlevée et enfermée dans une cellule par des ravisseurs en demandant une somme si exorbitante ! croyant que cela me ferait perdre espoir mais tu n’as pas été très maline sur ce coup-là puisque je m’en suis sortie. Et même cachée derrière un masque, je te reconnaitrais toujours ! L’arme avec laquelle tu as failli m’abattre le soir de ma fuite, fais bien attention avec, car même si tu l’aurais voulu, elle ne m’aurait pas atteinte. Tu ne mérites pas que je te dénonce car te livrer aux autorités n’apaisera pas mes peines et mes douleurs... Je regrette tout simplement de ne pas m’être détournée le jour où je t’ai rencontrée [...]

A ce moment précis, en prenant conscience de tout ce que je venais de déballer, je pris mes jambes à mon cou, et je me suis mise à crier comme s’il s’agissait de mes dernières heures sur cette terre et soudainement tous mes souvenirs ont refaits surface : J’ai été battue à coup de fouet, enfermée avec les rats, maltraitée, dénigrée parce que je refusais de renoncer à mon identité...
Le soir de ma fuite, tandis que j’essayais de me faufiler entre les murs, j’entendis une conversation entre mes ravisseurs et Désirée pour me faire disparaitre, et tout ceci, par jalousie. En les écoutant, je vis ma vie défiler devant moi [...]


Le lendemain, des cris perçants me réveillèrent en sursaut, j’entendis des gens parler à des kilomètres, il s’était donc forcément produit quelque chose ! A mon arrivée, je vis les gens réunis comme autour d’une scène de crime. Je voulus donc me rapprocher pour y voir un peu plus clair. J’étais médusée ! C’était elle, c’était Désirée. On aurait cru que «  la baronne » y était depuis un certain temps... La voir, allongée, les yeux grands ouverts, ne pouvant réagir ou parler me donnait un petit sentiment de satisfaction, non pas que j’en étais la responsable mais c’était une petite victoire ! A mon avis, elle n’était plus une menace pour moi... Alors que les gens se dispersaient de plus en plus à l’arrivée des secours, je me rapprochai d’elle et lui fis une dernière confession :

- Si moi je n’avais pas eu l’occasion d’appuyer sur la détente, convaincue que quelque d’autre le ferait un jour où l’autre à ma place, je dois te dire que celui ou celle qui t’as fait cela n’a pas ratée son coup. Tu penses être la plus désirée de toutes mais tu es la plus délaissée. Tu pensais m’avoir gâchée la vie mais toi tu ne seras peut-être plus capable de remarcher un jour ! Tu ne mérites pas la mort, elle serait une belle échappatoire ! Tu mérites de vivre car l’enfer se trouve ici sur cette terre! Je suis tout à fait consciente de l’importance de mes mots mais tu mérites le meilleur du pire. Je n’ai nulle besoin de quelqu’un qui cherche à me ressembler, et qui utilise cette « ressemblance » pour me faire du mal. Si la vie en avait décidée ainsi, j’aurais eu une sœur jumelle. Je suis une solitaire, mon alter ego vit en moi. Mais je tiens à te rappeler que je suis et resterai la pièce maitresse quelles que soient ces vérités cachées... puisqu’au final je ne saurai jamais pourquoi tu me détestes autant mais selon les dires, tu n’as jamais eu besoin d’une raison valide, dès que la situation est tentante, tu ne veux que la saisir et parasiter les gens comme une sangsue... Moi je n’attends plus de réponses car la vie m’a apprise à ne pas trop chercher le fin mot de l’histoire pour éviter de rentrer là où il ne fallait pas... Cependant, qui aurait- cru qu’un 31 décembre de cette sombre année de 1985 nous réserverait une telle surprise ? Te voilà sortie de nos vies... en espérant qu’une nouvelle page s’ouvrira et qu’un jour nouveau commencera demain...